Les financements directs : un effet déclencheur positif, un effet d’aubaine à corriger

Les financements directs : un effet déclencheur positif, un effet d’aubaine à corriger

Les financements directs sont de deux natures : les prêts aidés (Section I) et les subventions (Section II). Ils sont réglementés aux articles D. 331-1 à D. 331-114 du Code de la construction et de l’habitation : subventions et prêts pour la construction, l’acquisition et l’amélioration d’habitations donnant lieu à l’aide personnalisée au logement. Ce chapitre se limitera à l’étude des dispositifs en faveur de l’accession au logement pour des ménages sous conditions de ressources.

Les prêts aidés

Le ministère du Logement identifie les prêts aidés suivants : le prêt à taux zéro (PTZ) (Sous-section I), le prêt conventionné (PC – PAS) (Sous-section II), le prêt social de location-accession (PSLA) (Sous-section III). Les conditions d’octroi de ces prêts ayant déjà été décrites à de nombreuses reprises, nous n’en détaillerons pas toutes les modalités, mais insisterons sur les points susceptibles, selon nous, de pouvoir être améliorés.

Le prêt à taux zéro (PTZ)

– Historique. – Créé à partir de 1995, puis réformé en 2011 sous l’appellation « PTZ+ », régulièrement modifié puis renommé à nouveau « PTZ » en 2015, le prêt « ne portant pas intérêt consenti pour financer la primo-accession à la propriété » dit « prêt à taux zéro » ou « PTZ » est codifié aux articles L. 31-10-1 et suivants du Code de la construction et de l’habitation.
– Statistiques. – De 349 800 PTZ+ émis en 2011, alors sans condition de ressources, ce nombre a chuté dès le retour des conditions de ressources à 77 800 en 2012. Puis le dispositif, limité à 58 500 PTZ en 2015, a été relancé en 2016 pour se stabiliser aux alentours de 120 000 PTZ émis par an. Il a baissé à 92 890 PTZ en 2019 et à 66 732 PTZ en 2020.
La dépense correspondante est plafonnée à 2,1 Md€ par l’article 244 quater V du Code général des impôts.
Le cumul des prêts concernés est passé de 7,942 Md€ en 2017 à 3,5 Md€ en 2020. Chaque année, le ministère du Logement publie, en annexe du décret mettant à jour les conditions d’attribution et les modalités des PTZ, l’étude d’impact prévue au second alinéa du I de l’article 244 quater V du Code général des impôts. Le coût pour les finances publiques est estimé dans la dernière étude d’impact annuelle à près de 400 M€ pour 2022.
Dans le rapport du compte logement 2019, le montant compté au titre du PTZ dans les avantages de taux consentis ressort à 993 M€, en forte baisse par rapport à 2018 (1 474 M€) du fait de la baisse des taux de marché, de la diminution du nombre de prêts accordés (-6,4 %), de leurs montants moyens. 2020 est une année trop atypique pour être prise en compte. L’aide apportée par un PTZ est de l’ordre de 10 000 euros par prêt.

Bénéficiaires du PTZ

– Être primo-accédant. – Sous seuils de revenus fiscaux de l’année N-2, les bénéficiaires doivent être primo-accédants, c’est-à-dire ne pas avoir été propriétaires de leur résidence principale ou n’ayant pas acquis les droits réels immobiliers de leur résidence principale dans le cadre d’un bail réel solidaire au cours des deux dernières années précédant l’émission de l’offre de prêt, le tout sauf les exceptions au profit de certains bénéficiaires.
– Condition de ressources. – Le montant total des ressources, divisé par le coefficient familial, doit être inférieur à un plafond fixé par décret, en fonction de la localisation du logement, plafond qui ne peut être supérieur à 37 000 € ni inférieur à 16 500 €. Les seuils actuels sont consultables sur internet :
https://www.anil.org/pret-taux-zero/">Lien
– Tableau comparatif des seuils de revenus pour un ménage avec deux enfants. – Pour comparer des ordres de grandeur, le lecteur pourra consulter sur l’extension numérique du présent rapport un tableau des seuils de revenus pour les logements locatifs, le BRS (PSLA) et le PTZ, pour un ménage avec deux enfants (donc quatre personnes).

Tableau comparatif des seuils de revenus (Logements locatifs, PSLA des BRS, PTZ)

ACCESSION Zone Paris (Abis) Zone A Zone B Zone C
Communes limitrophes Reste IDF – Côte Azur – Genevois B1 B2
PTZ 74 000 € 60 000 € 54 000 € 48 000 €
PSLA et BRS (prêt Accession d’Action Logement)60 788 €43 273 €
Paris et communes limitrophes (en euros)Île-de-France hors Paris et communes limitrophes (en euros)Autres régions (en euros)
Taux réduit TVA Anru82 075 €75 507 €59 142 €
LOCATIFParis et communes limitrophes (en euros)Île-de-France hors Paris et communes limitrophes (en euros)Autres régions (en euros)
PLI92 986 €64 739 €56 647 €
PLS73 941 €68 024 €53 281 €
PLUS56 878 €52 326 €40 985 €
PLAI31 287 €28 779 €22 665 €
Il est intéressant de remarquer l’art de compliquer les choses avec des zones territoriales qui diffèrent selon le régime, sans présenter les tableaux de plafonds de ressources des dispositifs Duflot, Pinel, ou autres qui sont encore différents.
Par comparaison, en retenant le critère du revenu disponible des ménages de l’Insee en 2019 (publié le 9 novembre 2021), supérieur par définition au revenu fiscal pris en compte pour le PTZ, on peut constater que pour les couples avec deux enfants, le PTZ peut potentiellement concerner des ménages jusqu’au huitième décile.
Déciles de revenu disponible 1er décile 2e décile 3edécile 4edécile 5edécile (médiane) 6edécile 7e décile 8e décile 9e décile
Couples avec deux enfants 30 000 37 910 43 090 47 460 52 290 57 660 63 790 72 650 91 390
Ensemble des Français14 26018 76022 53026 72031 47037 16043 97052 71067 170

Opérations éligibles. Condition de résidence principale

Le prêt à taux zéro permet de financer une opération neuve ou l’acquisition d’un logement ancien à la condition d’y réaliser des travaux d’amélioration et que la performance énergétique du logement après travaux soit supérieure ou égale à l’étiquette E. Il peut également financer l’acquisition d’un logement du parc social sous conditions, et l’acquisition en première propriété des droits réels immobiliers de leur résidence principale dans le cadre d’un bail réel solidaire.
En cas de vente du logement précédemment acquis avec un prêt à taux zéro (PTZ), le bénéficiaire du prêt peut acheter une nouvelle résidence principale ouvrant droit au PTZ et demander un transfert de son PTZ initial, à hauteur du capital restant dû. L’établissement prêteur peut refuser le transfert s’il a pour effet de dégrader significativement le niveau de garantie dont il dispose.
Le logement doit être la résidence principale de l’emprunteur pendant une durée de six ans à compter du versement du prêt. Toutefois, un acquéreur peut obtenir un PTZ pour financer un logement destiné à devenir sa résidence principale au moment de sa retraite, sous réserve que celle-ci intervienne dans un délai maximum de six ans.
Dans ce cas, le logement doit être loué à un locataire dont les ressources sont inférieures au plafond ouvrant droit à un prêt locatif social (PLS).
Le logement ne peut être affecté ni à la location saisonnière ou meublée, ni utilisé comme résidence secondaire ou à titre d’accessoire du contrat de travail. Toutefois, lorsque l’emprunteur ne peut occuper le logement huit mois par an pour certaines raisons professionnelles, de santé ou en cas de force majeure, il peut continuer à bénéficier du PTZ.
Dernière minute
À la suite de la publication des conclusions du Conseil national de la refondation relatives au logement, il a été annoncé la prorogation du dispositif jusqu’en 2027 et son recentrage sur la sobriété foncière, ce qui tendrait à en exclure les maisons individuelles.

Montant

Le montant du PTZ ne peut pas dépasser les pourcentages suivants du prix d’achat :
Pour les opérations de vente du parc social à ses occupants, le montant du prix d’achat est fixé à 10 % du coût total de l’opération.
Pour aider les bénéficiaires potentiels à se diriger dans une règlementation aux allures de labyrinthe, les agences départementales pour l’information sur le logement (Adil) apportent leur concours si nécessaire. Nous renverrons donc le lecteur au site internet de l’Anil.
https://www.anil.org/aj-offres-pret-ptz-2022">Lien
www.anil.org/outils/outils-de-calcul/votre-pret-a-taux-zero/">Lien

Durée – différé d’amortissement

Le délai de remboursement du PTZ dépend des revenus, de la composition du foyer fiscal et de la zone géographique où se trouve le logement. En moyenne, le délai du prêt s’étend de vingt à vingt-cinq ans. Selon les ressources du bénéficiaire, une période de différé de cinq, dix ou quinze ans est octroyée.

Modalités d’attribution

– Une convention à conclure par les banques avec l’État. – Les PTZ sont distribués par les banques ayant conclu une convention avec l’État, conforme à une convention-type.
La convention-type oblige notamment l’établissement émetteur du prêt à transmettre à la Société de gestion des financements et de la garantie de l’accession sociale à la propriété (SGFGAS), chargée de regrouper et publier les statistiques relatives à l’octroi des PTZ, les éléments relatifs au PTZ consenti. Ledit organisme vérifie que l’instruction des demandes de prêt ne portant pas intérêt a été faite dans le respect de la réglementation.

Le prêt conventionné (PC) accession sociale (PAS) ou hors accession sociale

– Définition du prêt conventionné. – Il est destiné au propriétaire qui souhaite faire des travaux dans sa résidence principale ou à toute personne qui veut devenir propriétaire de sa résidence principale (en l’achetant ou en la faisant construire). Contrairement aux PTZ et PAS, il est accordé sans conditions de ressources.
On distingue parmi les prêts conventionnés ceux qui bénéficient de la garantie de l’État prévue à l’article L. 312-1 du Code de la construction et de l’habitation, dénommés « prêts d’accession sociale » (PAS) et accordés sous les mêmes conditions de ressources que les PTZ, de ceux qui n’en bénéficient pas, dénommés « PC hors PAS ».
Les prêts conventionnés sont exclusifs de tout autre prêt, à l’exception d’une liste de prêts définie réglementairement :
  • prêt à taux zéro ;
  • éco-PTZ ;
  • prêt d’épargne logement ;
  • prêt Action Logement ;
  • prêt relais ;
  • prêt fonctionnaire ;
  • prêt bancaire à taux fixe dont le taux d’intérêt est inférieur ou égal aux conditions d’un prêt issu d’un compte épargne logement en vigueur.
Le prêt conventionné est compatible avec les travaux bénéficiant d’une subvention de l’Agence nationale de l’habitat (Anah).
Les conditions d’occupation du logement financé à l’aide d’un prêt conventionné sont identiques à celles du PTZ.
De nombreux sites internet décrivent les modalités d’octroi.
https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F10793">Lien
– Opérations finançables. – Le prêt peut servir à financer les opérations suivantes :
  • achat d’un terrain et construction d’un logement sur ce terrain ;
  • achat d’un logement neuf ;
  • achat d’un logement ancien et travaux d’amélioration si nécessaire ;
  • travaux dans un logement existant pour faire des économies d’énergie, pour l’agrandir (par extension ou par surélévation) ou pour transformer en logement un local qui n’était pas destiné à l’habitation. Le montant des travaux doit au moins être égal à 4 000 €.
– Logement devenant la résidence principale de l’emprunteur. – Le logement doit devenir la résidence principale de l’emprunteur au plus tard un an après la fin des travaux ou l’achat. La résidence principale est celle où l’emprunteur doit résider au moins huit mois par an, étant rappelé que depuis le 1er janvier 2016 il est possible d’affecter le logement à un autre usage au bout de six ans (location, résidence secondaire ou usage professionnel/commercial).
Il est possible de n’affecter le logement acquis à la résidence principale qu’au bout de six ans maximum, à condition que ce logement soit occupé par l’emprunteur à partir de la date de son départ à la retraite, et qu’il soit mis en location jusqu’à cette date en respectant des règles spécifiques.
– Taux d’intérêt applicables. – Comme pour le PTZ, le prêt conventionné est distribué par les banques qui ont signé une convention avec l’État, mais la différence fondamentale est que le prêt conventionné donne lieu à un taux d’intérêt qui peut s’avérer plus élevé que le taux des prêts classiques. Les plafonds de taux sont les suivants au 1er mars 2022 :
La durée de remboursement est comprise entre cinq et trente ans, le contrat de prêt pouvant prévoir un allongement jusqu’à une durée maximale de trente-cinq ans.
– Faible impact de ces prêts sur le marché. – Nous ne détaillerons pas davantage les prêts conventionnés compte tenu de leur faible impact sur le marché du fait de la baisse des taux. Le compte logement de l’État fait ressortir un montant d’avantage de taux de 94 M€ au titre des autres prêts conventionnés, 3,5 % du total des aides résultant des avantages de taux pour 2018, montant en baisse en 2019 à 75 M€, puis encore en 2020 à 58 M€. Ce constat a pu amener certains à s’interroger sur leur utilité en période de taux bas ; la récente remontée des taux des prêts immobiliers inciterait plutôt à maintenir le statu quo.

Le prêt social de location-accession (PSLA)

– Définition. – Le prêt social de location-accession (PSLA) est un prêt conventionné consenti non pas à des particuliers primo-accédants mais à des opérateurs (organismes HLM ou promoteurs privés) pour financer la construction ou l’acquisition de logements neufs ou anciens avec des travaux en vue de consentir des contrats de location-accession. Il est réglementé par les articles D. 331-76-5-1 à D. 331-76-5-4 du Code de la construction et de l’habitation.
– Prêt PSLA soumis à des conditions particulières. – Les contrats de location-accession dans des opérations donnant lieu à un prêt PLSA sont soumis à des conditions particulières concernant principalement :
  • les plafonds de ressources des ménages pouvant souscrire le contrat de location-accession ;
  • les plafonds de loyers (pendant la phase locative) et de prix, étant précisé que ce prix initial est minoré de 1 % à chaque date anniversaire du contrat de location ;
  • une phase locative d’au moins six mois. En cas de levée d’option, le PSLA peut être transféré au ménage.
– Des durées et des taux dépendant des ressources. – La durée du prêt est de trente ans et le taux dépend des ressources sur lesquelles le PSLA est consenti : s’il est consenti sur ressources libres, le taux est celui du marché (dans la limite des taux plafond des prêts conventionnés – V. ci-dessus). S’il est consenti sur ressources adossées au livret A, le taux est révisable, indexé sur celui du livret (0,5 % en 2021 ; 1 % puis 2 % en 2022 ; 3 % en 2023), et les prêts sont accordés par les banques distributrices, qui ont signé une convention avec la Caisse des dépôts et consignations sous l’égide de l’État.
Les avantages procurés par l’octroi d’un PSLA sont :
  • le bénéfice du taux réduit de TVA de 5,5 % pour les logements neufs ;
  • une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties pendant quinze ans.
– Transfert possible du prêt PSLA à l’accédant. – En cas de transfert du prêt PSLA, l’accédant qui demande le transfert du prêt bénéficie de celui-ci pour le montant du capital restant dû, au prorata de la fraction correspondant au logement qu’il acquiert. Le transfert du prêt n’est pas automatique mais dépend de l’accord de l’établissement de crédit qui peut s’y opposer en fonction des critères de solvabilité au moment de la levée d’option.
En cas de transfert, le ménage bénéficie de la garantie de relogement mentionnée au II de l’article R. 331-76-5-1 du Code de la construction et de l’habitation. Lorsque le PSLA est à taux révisable et est transféré, un ajustement de la durée de prêt est opéré afin d’absorber les variations de taux.
Les logements faisant l’objet d’un PSLA doivent être occupés à titre de résidence principale (au moins huit mois par an).
– Statistiques des prêts PSLA. – Depuis 2011, 6 900 logements en moyenne sont financés par an, dont 78,5 % par des organismes HLM ou des SEM et 21,5 % par des opérateurs privés, la très grande majorité d’entre eux se situant en zones B1 et B2 (70,2 %).
Les logements concernés ont une surface habitable moyenne de 65 mètres carrés.
Le compte du logement ne nous renseigne pas sur le cumul de prêts PSLA accordés, ni le ratio par logement, ni le montant conventionné par l’État.

Les subventions

Le financement direct de l’accession à la propriété peut aussi résulter des subventions que constituent les allocations sociales (Sous-section I) et les aides d’Action Logement (Sous-section II).

Allocations sociales

– Les aides existant avant 2020 : APL, ALF et ALS. – Avant 2020, les accédants à la propriété aux revenus modestes pouvaient bénéficier de l’aide personnelle au logement (APL), de l’allocation de logement familial (ALF) ou encore de l’allocation de logement social (ALS). Le tableau de ces aides tel que figurant dans le compte logement 2020 permet d’en mesurer l’ampleur et de montrer que ces aides étaient très minoritairement attribuées pour accéder à la propriété :
Ces aides personnelles étaient versées sous conditions de ressources. Elles n’étaient pas cumulables. Distribuées par les caisses d’allocations familiales (CAF) et la Mutuelle sociale agricole (MSA), les sites internet de ces organismes donnent toutes les informations en détail.
En ce qui concerne l’accession, l’APL était versée aux occupants du parc conventionné qui ont signé un prêt conventionné pour l’acquisition de leur résidence principale.
Fin progressive des APL accession. La loi de finances pour 2018 a prévu la mise en extinction des APL accession. Ainsi, les prêts signés après le 1er janvier 2018 ne sont plus éligibles excepté, jusqu’au 1er janvier 2020, pour l’achat d’un logement dans l’ancien en zone 3 ou pour un projet d’accession en outre-mer ayant par ailleurs bénéficié d’un soutien de l’État.
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Bénéficiaires et montant des aides au logement avant 2020
Depuis le 1er janvier 2020, les APL accession sont donc supprimées. Cette suppression est critiquée par certains au motif qu’elle n’aurait pas eu l’impact budgétaire souhaité dans la mesure où elle empêcherait certains locataires d’accéder à la propriété… engendrant ainsi un coût plus élevé pour l’État, les APL location étant plus élevées que les APL acquisition. « Supprimer l’APL accession contraint certains ménages à rester locataires et donc à bénéficier encore de l’APL location, trois fois plus coûteuse pour l’État, annulant de fait les économies potentiellement réalisées, sans compter le manque à gagner fiscal en terme de TVA sur les logements neufs non acquis et de droits de mutation dans l’ancien… », explique Damien Hereng, président de la Fédération française des constructeurs de maisons individuelles.

Aides d’Action Logement

– Qui est le groupe Action Logement ? – Le groupe Action Logement regroupe l’ensemble des organismes collecteurs (comités interprofessionnels du logement [ CIL ]) de l’ancienne Participation des employeurs à l’effort de construction (PEEC [ ex-1 % patronal, devenu 0,45 % de la masse salariale en 1992 ]). Action Logement a été créé en 2015 pour devenir le collecteur unique.
En 2017, le groupe Action Logement est organisé en trois nouvelles entités : Action Logement Groupe, structure de tête qui fixe la stratégie et mène les discussions avec les pouvoirs publics, Action Logement Immobilier, structure holding qui détient les participations des filiales immobilières implantées sur le territoire, et Action Logement Services qui collecte la PEEC et peut ainsi délivrer des aides aux particuliers.
Ces aides, destinées à aider l’accession à la propriété du logement, sont le prêt Accession et la prime Accession.
– Prime Accession. – C’était une aide de 10 000 € destinée aux salariés d’une entreprise du secteur privé non agricole, justifiant de ressources respectant les plafonds PSLA (V. ci-dessus) et qui sont primo-accédants, c’est-à-dire n’ayant pas été propriétaires de leur résidence principale au cours des vingt-quatre derniers mois.
Les projets concernés étaient : la construction, l’acquisition d’un logement neuf (Vefa), l’accession sociale à la propriété dans le neuf dont le PSLA, l’accession en bail réel solidaire (BRS) dans le neuf. Un dispositif similaire est destiné aux agriculteurs qui souhaitent acquérir dans le neuf.
Le prix d’acquisition du logement concerné ne devait pas être supérieur aux prix plafonds PSLA et les conditions de performance énergétique devaient être respectées (ce qui n’est pas une réelle contrainte dans le neuf). Cette aide était cumulable avec le prêt Accession.
Victime de son succès, avec plus de 20 000 ménages qui en ont bénéficié, Action Logement indique que la distribution de cette prime est terminée depuis le 30 décembre 2022.
– Prêt Accession. – Les conditions d’attribution du prêt Accession d’Action Logement sont légèrement différentes de celles de la prime Accession.
Il s’adresse également aux salariés des entreprises du secteur privé non agricole, justifiant de ressources respectant des plafonds qui ne sont pas ceux du PSLA, mais ceux des dispositifs Duflot/Pinel, légèrement supérieurs, donc plus favorables.
Les opérations concernées sont des opérations de construction et d’acquisition dans le neuf, mais également des ventes par des organismes HLM dans le cadre de la vente HLM. L’accession en BRS est également éligible.
Le montant du prêt est de 40 000 €, le taux, qui s’élevait à 0,5 % (hors assurance obligatoire), et passé à 1,5 % depuis le 1er mars 2023, et la durée est libre dans la limite de vingt-cinq ans.

Le bilan des financements publics : corriger les effets d’aubaine

– Quel bilan tirer des aides à l’accession à la propriété ? – En premier lieu, nous exclurons de ce bilan les prêts et aides d’Action Logement, car ils sont distribués sur contributions dédiées, gérées de manière paritaire. Ces aides sont la contrepartie des cotisations et du principe de solidarité sous-jacent.
L’enjeu est plutôt de faire un bilan des aides d’État et des collectivités.
Une étude historique et comportementale réalisée avant la mise en place du nouveau PTZ en 2011, mais qui nous semble rester totalement pertinente pour le régime actuel du PTZ, rappelle que les objectifs initiaux du PTZ étaient de poursuivre la politique d’encouragement de l’accès à la propriété de son logement. Les dispositifs anciens que le PTZ a remplacés avaient montré leurs effets positifs : l’étude indique qu’entre 1977 et 1984, presque 60 % des nouveaux accédants ont eu recours à un prêt aidé alors dénommé « PAP » ou à un prêt conventionné, ce qui a eu pour effet que le taux de propriété a nettement augmenté, de 45 % en 1970 à 54 % en 1988.
Il est intéressant de noter les conclusions de cette étude de 2005 :
  • le prêt à taux zéro a bien un effet déclencheur sur l’accession à la propriété ;
  • cet effet touche principalement les ménages les plus modestes parmi les accédants, dont la plupart seraient restés, en l’absence de PTZ et de son effet déclencheur, dans le logement qu’ils occupent ;
  • mais le PTZ semble produire d’importants effets d’aubaine : 85 % des bénéficiaires de la période étudiée auraient tout de même choisi de déménager pour devenir propriétaires en l’absence du prêt à taux zéro…
Par ailleurs, l’objectif fixé au PTZ de permettre notamment une sortie « par le haut » pour les locataires du parc social semble bien avoir été rempli.

Les aides à l’acquisition de la résidence principale : entre nécessité et effets d’aubaine

1. Dans un rapport publié en 2016, la Cour des comptes conclut après avoir analysé les quatre aides d’État à l’acquisition de la résidence principale qui coexistaient alors pour les primo-accédants (l’aide personnelle au logement pour l’accession [ APL accession ], le prêt d’accession sociale [ PAS ], le prêt à taux zéro renforcé [ PTZ+ ] et le prêt social de location-accession [ PSLA ]), et en dépit d’un montant cumulé de près de deux milliards d’euros par an, que ces dispositifs se révélaient de moins en moins efficaces et suggérait à l’État plusieurs mesures afin de rationaliser les aides, de mieux les articuler avec les politiques locales de logement et d’urbanisme, et de diminuer leur coût pour les finances publiques.
2. Il ressort en effet de ce rapport que la proportion de ménages propriétaires de leur logement, après avoir doublé en cinquante ans pour atteindre 57 %, n’évolue plus désormais que lentement.
3. La Cour des comptes note également que le PTZ+ se caractérise par des effets d’aubaine élevés et des risques d’effet inflationniste. Il doit être mieux ciblé, afin de parvenir à un meilleur effet déclencheur. Les recommandations de la Cour, relatives au PTZ, sont les suivantes :
  • mettre en place les liaisons nécessaires entre les bases de données (SGFGAS, CNAF, etc.) pour permettre un suivi précis de l’efficacité et de l’efficience des différentes aides à l’accession (PTZ+, PAS, APL accession et PSLA) ;
  • réorganiser le dispositif du PTZ+ en le ciblant sur les ménages plus modestes, en fixant un seuil de quotité de l’aide et en appliquant la garantie du FGAS ;
  • supprimer le dispositif du PAS ;
  • aménager les règles de gestion de l’APL accession en fusionnant les barèmes et en relevant les plafonds afin d’accroître la complémentarité de cette aide avec le PTZ+ ;
  • accroître les possibilités d’accès au PTZ+ dans les zones tendues, les quartiers de la politique de la ville et les centres anciens dégradés ;
  • développer la coordination de l’action des services déconcentrés de l’État avec celle des collectivités territoriales en mettant en place une gestion déconcentrée d’enveloppes d’aides à l’accession à la propriété permettant de compléter les interventions locales.
4. Ménages métropolitains possédant leur résidence principale. Après avoir nettement augmenté de 1998 (53,3 %) à 2010 (58 %), le taux de ménages métropolitains qui possédait début 2018 leur résidence principale était revenu à 57,8 %. Mais les disparités selon les caractéristiques des ménages sont fortes : les jeunes (moins de trente-neuf ans) sont plus souvent propriétaires que la tranche d’âge plus élevée, les couples sans enfants ou avec enfants sont en forte progression, contrairement aux personnes seules ou aux familles monoparentales, ce qui montre probablement que la Cour des comptes a raison de conclure dans son étude de 2016 qu’il faudrait « réorganiser le dispositif du PTZ+ en le ciblant sur les ménages plus modestes, en fixant un seuil de quotité de l’aide et en appliquant la garantie du FGAS ».
5. Montant et évolution des aides au logement. Le rapport du compte du logement détaille le montant des aides au logement d’un montant en 2020 de 37,6 milliards d’euros. Il met aussi le poids de ces aides, qui représentent 1,6 % du PIB, en corrélation avec les prélèvements relatifs au logement estimés à 78,8 milliards d’euros.
Les aides poursuivent leur repli bien que moins fortement qu’en 2019 et 2018 (-2,4 %, après -3,7 % et -4,1 %), principalement du fait de la poursuite de la forte baisse des avantages de taux. L’essentiel des aides (90,7 %) est composé des prestations sociales (53,8 %) et des avantages fiscaux (36,9 %). Elles bénéficient pour 70,6 % au secteur locatif, dont 36,6 % pour le secteur social et 33,9 % pour le secteur libre. Elles sont, en outre, versées pour 16,8 % aux propriétaires occupants et pour 12,3 % aux locaux d’hébergement collectif. En dix ans, la part des propriétaires occupants parmi l’ensemble des bénéficiaires a reculé de 10,7 points alors que celle des locataires du secteur libre a progressé de 8,4 points. Ce qui montre que les recommandations de la Cour des comptes semblent avoir été entendues.
6. Propositions faites par les organisations. La dernière campagne présidentielle a été l’occasion pour de nombreuses organisations de faire des propositions. Notamment, le 27e Rapport sur l’état du mal-logement en France publié en janvier 2022 par la Fondation Abbé Pierre souligne que si la première priorité doit être de régler la question du mal-logement et de permettre une accession à un logement pour tous, il ne faut pas pour autant négliger de permettre l’accession à la propriété.
7. S’il reste important de maintenir des aides à l’accession à la propriété, pour que le parcours résidentiel ne se bloque pas et qu’il puisse toujours permettre à des locataires de sortir du parc locatif, la question doit être posée de la pertinence d’une aide à l’accession à la propriété par rapport à l’effet d’aubaine qu’elle entraîne.
8. L’effet d’aubaine pourrait se définir par le fait qu’une personne, même sans l’aide obtenue, aurait eu la possibilité d’acquérir son logement. Elle a donc bénéficié d’une aubaine, d’un « cadeau ». Mais l’effet d’aubaine est une réalité très difficile à quantifier. Ainsi, Bernard Coloos écrit dans un article récent, que « les études et analyses réalisées sur le sujet ont focalisé les polémiques depuis plus de dix ans maintenant. Ainsi par exemple pour le défunt PAP, les évaluations s’étalent entre 10 % à 90 % d’effets d’aubaine selon les auteurs. L’Insee, en son temps, avait avancé un chiffre de l’ordre de 50 % ».
Le succès du bail réel solidaire, dont nous avons déjà parlé dans ce rapport (V. supra, nos et s.), est d’ailleurs en partie lié à la suppression de cet effet d’aubaine : ceux qui ont les moyens d’acheter en secteur libre auront toujours intérêt à le faire compte tenu de la règle de plafonnement du prix imposée par le système du BRS, qui supprime toute aubaine financière au profit des accédants désireux de revendre.

Corriger l’effet d’aubaine : mission impossible ?

1. Pour supprimer l’effet d’aubaine lié aux aides, directes ou indirectes à l’acquisition d’un logement, la loi impose dans certains cas des clauses dites « anti-spéculatives ».
C’est notamment le cas de l’article L. 443-12-1 du Code de la construction et de l’habitation pour la vente HLM et de la loi no 2013-61 du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social.
2. Au-delà de ces dispositifs légaux, la liberté conventionnelle peut également permettre l’insertion de clauses anti-spéculatives, mais la jurisprudence très ancienne de la Cour de cassation impose, face au caractère absolu du droit de propriété, deux obligations : une limitation dans le temps et un intérêt sérieux et légitime.
3. Généralement, des cas d’exemption du dispositif anti-spéculatif sont prévus et liés :
  • soit à des motifs sérieux et légitimes pouvant revêtir les caractéristiques de la force majeure rendant nécessaire la revente du bien : il s’agit de faits qui s’imposent à l’acquéreur et vont l’obliger à solliciter l’autorisation de céder le bien pour lequel il a bénéficié d’une aide à l’accession. Le plus souvent, on prévoit le décès de l’acquéreur ou de son conjoint, le divorce ou la rupture du Pacs, la mutation ou mobilité professionnelle, une période de chômage prolongée, l’invalidité ou l’incapacité reconnue, parfois le surendettement de l’accédant, cette liste étant tantôt limitative ou tantôt indicative selon les clauses rencontrées ;
  • soit à la possibilité de revendre à un sous-acquéreur remplissant les critères exigés pour l’acquisition initiale, à condition que le prix de revente n’excède pas le prix d’acquisition initial réévalué selon un indice national. Ce que prévoit le mécanisme du BRS.
4. À notre avis, la correction de ces effets d’aubaine conditionne la survie des aides à l’accession au logement, du moins à leur niveau actuel. Cette correction nous semble pouvoir être opérée au moment de la revente, considérant alors qu’une part significative de la plus-value réalisée trouve son origine dans l’aide apportée. Il n’y a, en pareil cas, aucune raison économique, morale ou citoyenne, de conserver le montant de cette aide.