Les trois statuts déjà acquis du Vivre ensemble

Les trois statuts déjà acquis du Vivre ensemble

– Préambule. Le statut juridique de la colocation. – Plusieurs des modes d'habitat que nous allons envisager découlent du statut de la colocation. Celui-ci est bien connu et couramment pratiqué. Afin de ne pas alourdir les développements qui vont suivre, nous renvoyons ici au détail des règles spécifiques à la colocation :
– Vivre ensemble, c'est vivre solidaires. – Le point d'ancrage des différents modes de vie collective est sans conteste la solidarité, plus ou moins marquée en fonction des régimes existants. Elle est un élément clé dans le contrat de cohabitation intergénérationnelle, essentielle pour l'habitat inclusif et primordiale dans le fonctionnement de l'habitat participatif.

Le contrat de cohabitation intergénérationnelle solidaire

Origines et premiers développements de l'habitat intergénérationnel

À l'aube des 70's. Apparu dans les années soixante-dix aux États-Unis, sous l'égide de Maggie Kuhn, fondatrice du mouvement « Gray Panthers », militant pour le droit des personnes âgées, le développement de l'habitat intergénérationnel a poursuivi son essor en Europe dans les années quatre-vingt. Tout d'abord en Grande-Bretagne, puis en Espagne dans les années quatre-vingt-dix. En France, il faut attendre le dramatique épisode de la canicule de 2003 pour que l'isolement des personnes âgées soit mis en exergue. Dès 2004, une association, le Pari Solidaire, met en relation deux générations dont les besoins peuvent s'autoalimenter.
Le rôle primordial des associations. Différentes associations se créent afin de mettre en relation ces deux générations, chacune avec son fonctionnement ou règlement intérieur, souvent basé sur le premier modèle de charte éditée par le Pari Solidaire, appelée « Charte du senior et de l'étudiant ». Celle-ci pose déjà les mots-clés de ce nouveau mode de logement atypique : créer ou retisser le lien social intergénérationnel, prévenir l'isolement des seniors, rendre de menus services, une aide bénévole et une présence du côté des jeunes ; accepter la modestie de la contribution, l'aide reçue, et s'assurer un complément de revenus du côté des plus âgés.
Les prémices en France. D'abord actif à Paris et en Île-de-France, le Réseau CoSI (Cohabitation Solidaire Intergénérationnelle) regroupe en 2010 les associations qui se sont créées dans les grandes villes de 2005 à 2009, pour couvrir progressivement tout le territoire. Actuellement vingt et une associations font partie de ce réseau qui encourage la mise en relation des jeunes à la recherche d'un logement avec des seniors disposant d'un espace d'habitation et souhaitant accueillir un colocataire. Aujourd'hui le Pari Solidaire est à l'origine de 2 300 cohabitations. L'institutionnalisation progressive de la cohabitation intergénérationnelle décrite par Joachim Pasquet (directeur du Réseau CoSI), basée essentiellement sur la charte citée supra, continue son essor jusqu'en 2018 grâce aux observations des fédérations, de l'Urssaf et des collectivités.
– Présentation. – La cohabitation intergénérationnelle naît d'une conjonction de besoins. Les jeunes, particulièrement exposés à la pénurie de logements ou aux loyers trop élevés ont des ressources limitées. De leur côté, les aînés ont besoin de se sentir moins seuls dans leur logement devenu trop grand, et de recevoir une aide légère sans soin ou assistance. Pourquoi, dès lors, ne pas organiser par un contrat le logement d'un jeune chez une personne plus âgée à laquelle il tiendra compagnie et rendra de menus services ? Pour être séduisante, l'idée n'est pas, en Droit, dépourvue de tout risque. Tout d'abord, en droit du travail. Les services rendus par le jeune peuvent-ils être assimilés à un emploi ? Ensuite, en droit civil. N'y a-t-il pas là un bail ?
– Aspects juridiques. – La formule se développant néanmoins, avec le concours d'associations dont le travail mérite d'être salué, il devenait nécessaire de clarifier, en France, le régime juridique de ce nouveau type d'habitat. C'est ainsi que le « contrat de cohabitation intergénérationnelle solidaire » voit le jour dans l'article 117 de la loi Elan. Il est annoncé qu'une charte précisera « le cadre général et les modalités pratiques » de la cohabitation. C'est chose faite le 13 janvier 2020 avec la parution de l'arrêté relatif à la charte de la cohabitation intergénérationnelle. L'objet de ce nouveau contrat est de permettre à une personne âgée de moins de trente ans de se loger à moindre coût chez une personne de plus de soixante ans, améliorant ainsi les conditions de vie de cette dernière grâce à la présence d'un jeune, à son domicile, qui lui rendra de petits services et aides quotidiennes. C'est un rapport donnant-donnant dans lequel chacun doit trouver un avantage. Se loger pour l'un, être aidé tout en restant chez soi pour l'autre. L'équation solidaire est trouvée. Nous en présenterons le régime juridique (§ I), avant de porter une première appréciation soulignant l'intérêt de l'intervention d'une association (§ II).

Régime juridique du contrat de cohabitation intergénérationnelle solidaire

Les principes

– Exclusion du droit commun. – Avant toute chose, la loi no 89-462 du 6 juillet 1989 relative aux baux d'habitation est inapplicable au contrat de cohabitation intergénérationnelle. Aucune des règles très protectrices de ce dispositif ne peuvent s'y appliquer telles que celles liées au préavis, au paiement du loyer, ou encore aux travaux de réparation du bien loué. L'esprit libre et adaptable de ce nouveau mode de logement est plutôt préservé par la loi Elan. Il n'en demeure pas moins qu'un cadre, certes léger, est quand même fixé.
– Les parties. – L'article L. 631-17 du Code de la construction et de l'habitation définit la relation de cohabitation intergénérationnelle comme le contrat par lequel un propriétaire ou un locataire d'au moins soixante ans s'engage à louer ou sous-louer une partie de son habitation à une personne de moins de trente ans. Dans le cas d'une sous-location, le locataire doit informer préalablement son propriétaire bailleur ; à cette condition, celui-ci ne peut s'opposer à la sous-location intergénérationnelle.
– L'objet du contrat. – Chaque acteur du projet doit bénéficier de l'intimité d'un espace privatif, a minima une chambre individuelle. Ceci suppose une dissociation entre les pièces communes que peuvent être la cuisine et la salle de bains et les pièces assurant un espace de vie privée.
– La durée du contrat. – La durée du contrat est librement convenue. Un préavis d'un mois est prévu pour y mettre fin, pour l'une des parties comme pour l'autre.

Les obligations du locataire (ou sous-locataire)

Le locataire est tenu de s'acquitter d'une contribution et peut, facultativement, avoir à rendre de menus services.
– Une contribution modeste. – Le locataire ou sous-locataire doit s'acquitter d'une contribution modeste. Le caractère modeste de la contribution du locataire est un élément majeur. Elle ne doit en aucun cas pouvoir être assimilée à un véritable loyer. Elle est, en principe, librement fixée, sauf s'il s'agit d'un logement social, pour la sous-location duquel la contribution doit être proportionnelle à la surface mise à la disposition du sous-locataire intergénérationnel.
– Les menus services. – Le contrat (c'est sa philosophie première) peut imposer au locataire de rendre au bailleur de menus services. Aucune définition n'en est donnée et ceux-ci peuvent se limiter à lui demander simplement un temps minimal de présence dans le logement. L'essentiel est que l'importance des services demandés ne caractérise jamais l'existence d'un lien de subordination, et qu'aucune concurrence ne puisse se créer avec les professionnels de la prestation de services à domicile. En ce sens :
  • il ne peut en aucun cas s'agir de services d'ordre médical ou paramédical, fût-ce la simple prise de médicaments ;
  • et les services demandés ne doivent pas être « assimilables à une prestation régulière normalement fournie par un prestataire ou par l'emploi direct ou en mandataire d'un salarié à domicile ».

Première appréciation. Intérêt d'une intervention associative

– Première appréciation. – Le contrat de cohabitation intergénérationnelle se veut volontairement libre et peu contraignant afin que les parties puissent aisément accorder leurs attentes, mais il possède en quelque sorte les défauts de ses qualités en ce qu'il peut engendrer des risques ou de l'insécurité pour les deux parties. C'est pourquoi certains estiment que ce nouveau contrat laisse une place trop grande à la liberté contractuelle. En particulier, la libre durée du contrat peut se révéler préjudiciable, tant pour le senior qui trop rapidement se retrouvera seul, que pour le jeune qui peut éprouver de grandes difficultés à se reloger. Pour notre part, nous estimons que ces inconvénients ne doivent pas être exagérés. La cohabitation intergénérationnelle est une réponse à la pénurie et aux coûts élevés des logements, inabordables pour certains étudiants. Elle répond aussi aux questions environnementales en mutualisant les charges et coûts énergétiques, et répond de ce fait aux questions environnementales. Enfin, le complément d'assistance qu'elle apporte peut contribuer au maintien à domicile de certains seniors.
– Rôle des associations. – Pour sécuriser cette nouvelle relation contractuelle, il est possible de faire appel à une association, qui choisira les candidats après les avoir questionnés sur leurs attentes, rédigera le contrat adapté aux besoins spécifiques des parties (heures de présence, menus services…), visitera préalablement le logement afin de déterminer s'il est adapté et veillera au bon déroulement de la cohabitation. Ces structures ou associations ne sont pas soumises à la loi Hoguet. Elles proposent l'adhésion à une charte qui sert de support « moral » à une cohabitation harmonieuse.
À nouveau destinée aux seniors, mais aussi aux personnes handicapées, une autre forme de cohabitation réglementée se développe dans le paysage du Vivre ensemble : l'habitat inclusif.

L'habitat inclusif

– Un moyen terme entre la maison et l'établissement spécialisé. – Troisième voie, intermédiaire entre la vie à domicile et l'hébergement en structure, l'habitat inclusif est aussi appelé « habitat accompagné ». Il concerne au premier chef les personnes en perte d'autonomie, soit en raison de l'âge, soit en raison d'un handicap, qui font le choix, personnellement ou en famille, d'un mode d'habitat regroupé favorisant les liens humains entre elles et, parfois, avec d'autres habitants parfaitement autonomes, tous manifestant une volonté commune de Vivre ensemble. Comme l'indique un auteur, l'enjeu de l'habitat inclusif est de sortir les personnes concernées des institutions spécialisées dans le handicap ou la vieillesse pour leur offrir une vie plus harmonieuse, se rapprochant, autant que faire se peut, de la normalité d'un logement classique. La personne – ou sa famille – participe à ce choix plutôt que de le subir en étant placée dans un établissement.
– Les apports de la loi Elan. – L'habitat inclusif est, lui aussi, régi par la loi Elan, que nous retrouverons plus loin dans notre étude de l'adaptation du logement au handicap et à la vieillesse. Il est destiné aux personnes handicapées et aux personnes âgées en perte d'autonomie, qui font le choix de se regrouper dans un lieu de vie commun, autour duquel existe un projet de vie sociale et partagée et défini par un cahier des charges national. Afin d'encourager ce dispositif, un forfait pour l'habitat inclusif, alloué par les agences régionales de santé (ARS) a été créé pour le financement de tels projets.

Le forfait ARS pour l'habitat inclusif

Un forfait financé par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) est attribué aux personnes handicapées bénéficiaires de l'allocation adulte handicapé (AAH), de la prestation de compensation du handicap (PCH) ou d'une pension d'invalidité, ainsi qu'aux personnes âgées. Le montant, la durée et les modalités de versement et de suivi de l'utilisation du forfait font l'objet d'une convention avec l'ARS, qui sélectionne les projets et leurs porteurs. Le versement forfaitaire est attribué au porteur du projet de vie sociale et partagée de l'habitat inclusif : association, collectivité, opérateur social ou médicosocial… Mais il est calculé au regard des caractéristiques individuelles de chaque résident de l'habitat inclusif : peuvent ainsi y prétendre les personnes handicapées titulaires de l'AAH, de la PCH, de l'allocation compensatrice ou d'une pension d'invalidité, ou encore les personnes majeures orientées vers un établissement ou un service spécialisé par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH). Le forfait pour l'habitat inclusif peut également être attribué aux personnes âgées classées dans les GIR 1 à 5 (groupes iso-ressources). Se détermine alors un montant individuel du forfait compris entre 3 000 et 8 000 € par an et par habitant, sans que le total versé pour un même habitat inclusif puisse excéder 60 000 €. Le montant, la durée et les modalités de versement et de suivi de l'utilisation et, le cas échéant, du reversement de l'aide font l'objet d'une convention avec l'ARS, dans des conditions fixées par le décret no 2019-629 du 24 juin 2019. Ces sommes servent essentiellement à rémunérer les intervenants et non la construction de cet habitat.
Un peu comme au théâtre, nous présenterons tout d'abord le public de l'habitat inclusif (§ I), ses acteurs (§ II) puis, pour planter le décor, les logements auxquels il s'applique (§ III).

Le public concerné par l'habitat inclusif

– L'âge et le handicap. – La loi de 2018 définit l'habitat inclusif comme étant « destiné aux personnes handicapées et aux personnes âgées qui font le choix, à titre de résidence principale, d'un mode d'habitation regroupé, entre elles ou avec d'autres personnes, le cas échéant dans le respect des conditions d'attribution des logements locatifs sociaux (...) et des conditions d'orientation vers les logements-foyers (...), et assorti d'un projet de vie sociale et partagée défini par un cahier des charges national fixé par arrêté des ministres chargés des personnes âgées, des personnes handicapées et du logement ». La qualification d'habitat inclusif peut donc être retenue dès lors que deux personnes, âgées ou handicapées, au moins, exercent le choix, pour leur résidence principale, d'une habitation groupée. Pour autant, ni l'âge ni le handicap ne sont définis par l'article L. 281-1 du Code de l'action sociale et des familles. M. Zalewski-Sicard propose de retenir l'âge minimum de soixante ans si la personne est reconnue inapte au travail et soixante-cinq ans dans les autres cas. En ce qui concerne les personnes handicapées, il propose de se référer à l'article L. 114 du même code : « Constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d'une altération substantielle, durable ou définitive d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santé invalidant ».
– L'ouverture aux valides. – Pour autant, ces critères précédemment énumérés quant à la vieillesse et au handicap ne sont pas restrictifs, car les personnes valides non concernées par ces problématiques et attirées par ce type d'habitat y sont également accueillies, sous réserve qu'au moins deux personnes âgées ou handicapées y résident. Cela permet notamment d'accueillir les conjoints des personnes âgées ou handicapées qui ne sont eux-mêmes ni âgés ni handicapés. Bien entendu, le logement concerné, bien qu'accueillant des personnes valides, comportera les équipements nécessaires aux besoins de ses habitants en perte d'autonomie.

Les acteurs de l'habitat inclusif

– Le porteur de projet. – Construire un habitat inclusif nécessite l'intervention d'un porteur de projet chargé d'élaborer le projet de vie commune et apte à percevoir le forfait délivré par l'agence régionale de santé à l'issue de l'obtention de l'agrément correspondant. Le porteur de projet peut être une association, une collectivité, un opérateur social ou médicosocial, un bailleur social ou encore un prestataire de services à la personne ou un gestionnaire d'établissements et services médicosociaux. Ces personnes morales ont notamment pour mission, aux termes du décret du 24 juin 2019, d'élaborer avec les habitants un projet de vie sociale et partagée, en s'assurant de la participation de chacun d'entre eux, et d'animer et réguler la vie quotidienne de l'habitat inclusif. Ils ont la possibilité de recourir à des services d'accompagnement pour la réalisation des activités de la vie quotidienne, assurés tant par l'intervention des services sociaux et médicosociaux que par la présence ponctuelle d'animateurs.
– Les habitants et leurs proches. – Il est déterminant que le projet soit élaboré avec les habitants ou leurs familles. Ce projet doit nécessairement envisager :
  • la prévention de la perte d'autonomie ;
  • l'anticipation des risques liés à l'évolution de la situation des habitants ;
  • les activités mises en place (ludiques, culturelles, sportives) ;
  • la facilitation de la vie sociale et citoyenne (proximité des commerces, transports, centres de soins, services publics).
Le projet est matérialisé par la rédaction d'une charte à laquelle tous les habitants et les acteurs de l'habitat inclusif concernés devront adhérer, y compris les bailleurs et les tiers participant au projet. Cette charte doit satisfaire à certaines obligations de conformité.
– La charte : une double obligation de conformité. – La charte doit porter un projet conforme au modèle de cahier des charges national figurant en annexe I de l'arrêté du 24 juin 2019 relatif au modèle du cahier des charges national du projet de vie sociale et partagée de l'habitat inclusif. Ce document constitue, ainsi, le socle commun de tout projet d'habitat inclusif.
On peut consulter ici l'intégralité du texte de cet arrêté :
En outre, la charte doit être compatible avec le règlement de copropriété ou les statuts de l'association syndicale si le groupe de logements est concerné par ces dispositifs.

Le type de logement adapté à l'habitat inclusif

Un logement unique ou un ensemble de logements, meublés ou non

Le champ d'application de l'habitat inclusif est largement défini (I), mais le statut qui en découle peut être amené à se cumuler avec d'autres régimes impératifs (II).
Un champ d'application large
Large dans sa définition, le champ d'application de l'habitat inclusif ressortit avant tout à un socle commun : le modèle national de cahier des charges.
– Le logement au sens large, mais non l'hébergement. – Il n'est pas nécessaire que les habitants soient propriétaires de leur logement, ils peuvent aussi le louer pour profiter de ce type d'habitat. Le parc privé comme le parc public sont donc concernés. De même n'est-il pas nécessaire que le logement soit unique, il peut aussi s'agir d'un ensemble de logements indépendants, qui peuvent eux-mêmes revêtir plusieurs formes. En revanche, sont exclus les résidences hôtelières, même à vocation sociale, les résidences universitaires, sociales ou services, les pensions de famille, les Ehpad, les résidences autonomie, les foyers d'accueil médicalisés.

L'habitat inclusif : une réalité protéiforme

Un habitat inclusif peut correspondre à des types d'ensembles immobiliers très différents.
L'habitat regroupé. Consiste en de petits ensembles de logements indépendants, auxquels sont associés des espaces de vie partagée, dans un environnement adapté et sécurisé. L'Association des paralysés de France (APF) affiche aujourd'hui quatre cents logements qui répondent à des formules différentes d'habitat inclusif, permettant d'organiser l'aide humaine entre les différents locataires et d'assurer leur sécurité avec souvent une présence d'auxiliaires de vie 24 heures sur 24.
L'habitat éclaté correspond à l'institution « hors les murs », foyers d'accueil médicalisés ou maisons d'accueil spécialisées, comprenant des petits logements indépendants plus agréables et plus humains que des chambres dans un grand bâtiment unique.
L'habitat ou hébergement transitoire qui permet aux personnes concernées de tester leur autonomie, ou de proposer du répit aux aidants. Il peut s'agir d'appartements « tremplin » où l'on s'entraîne à l'autonomie, ou d'habitats d'insertion où l'on apprend sur une durée plus longue à gérer son budget, son suivi médical, faire ses courses, cuisiner, etc.
– Logements sociaux. Résidences autonomie (ex-logements-foyers). – Lorsque le projet est le fait d'un organisme de logement social, une autorisation préfectorale doit être sollicitée dans son dossier de demande d'agrément, en mentionnant notamment le pourcentage de logements dédiés et les adaptations prévues. L'organisme peut alors bénéficier de subventions ou de prêts aidés, en contrepartie desquels le préfet peut réserver une partie des logements construits ou aménagés pour l'habitat inclusif. Les résidences autonomie accueillant les personnes âgées ou handicapées sont également éligibles au dispositif.
L'application cumulative de certains statuts
L'habitat inclusif peut relever cumulativement du statut de la copropriété et du régime juridique impératif des baux d'habitation principale, nus ou meublés.
– Cas de l'ensemble de logements. – Lorsque le projet inclusif s'inscrit dans un ensemble de logements, ceux-ci doivent être destinés à l'habitation dans la continuité du projet social et partagé. Il faut qu'ils soient pourvus de locaux communs affectés au projet d'habitat inclusif. Les droits conférés à la personne âgée ou handicapée peuvent être réels ou personnels. Si chaque habitant est propriétaire de son propre logement, le critère de locaux communs étant déterminant, le statut de la copropriété s'appliquera nécessairement à cet ensemble.
– Cas du logement unique. – Si l'habitat inclusif s'établit dans un logement unique, l'article L. 281-1 du Code de l'action sociale et des familles précise qu'il peut être meublé ou non. Il sera régi par le régime de la colocation défini par la loi du 6 juillet 1989 ou à l'article L. 442-8-4 du Code de la construction et de l'habitation. On peut rappeler que la colocation est « la location d'un même logement par plusieurs locataires, constituant leur résidence principale, formalisée par un contrat unique ou plusieurs contrats entre les locataires et le bailleur » (loi Alur, art. 8-1). Ce n'est que dans l'annexe I du modèle national de cahier des charges qu'il est dit que « l'occupant peut être propriétaire ou locataire (y compris dans le cadre d'une colocation ou d'une sous-location avec l'accord du propriétaire) ». On a pu s'étonner du fait que le modèle de cahier des charges lui-même n'y fait pas allusion. Il ne faut pas, à notre sens, y lire une restriction qui n'a pas lieu d'être : où serait l'intérêt de réserver la formule aux seuls locataires ?

Comportant les équipements nécessaires

– Un logement adapté. – Pour qu'un logement entre dans le cadre de l'habitat inclusif, il faut nécessairement qu'il possède des caractéristiques fonctionnelles adaptées aux besoins spécifiques de ses habitants. C'est ainsi qu'il devra être équipé en matière de domotique et comporter les aménagements ergonomiques adaptés au handicap et/ou à la vieillesse, qui favoriseront l'autonomie, l'accessibilité et les déplacements. Le logement doit être construit ou aménagé spécifiquement pour l'accueil des personnes en perte d'autonomie.
– Conclusion (nécessairement provisoire) : un premier bilan de l'habitat inclusif. – Selon la CNSA, le soutien apporté à l'habitat inclusif permet de répondre à la volonté de nombreux Français de vieillir chez eux, grâce à un accompagnement adapté à leur situation, au moyen notamment du forfait pour l'habitat inclusif créé par la loi Elan. Le nombre de projets d'habitat inclusif financés a triplé depuis 2019, malgré la période de pandémie qui a sévi dans l'intervalle. La CNSA a alloué aux agences régionales de santé (ARS), au cours de l'exercice 2021, jusqu'à 25 millions d'euros pour financer les forfaits de vie sociale et partagée au sein d'habitats inclusifs.
Le tour d'horizon actuel du Vivre ensemble ne serait pas complet sans évoquer l'essor de l'habitat participatif.

L'habitat participatif

– Histoire. – Dès le XIX e siècle émanent des systèmes de propriété mutualisée, de vie collective et d'autogestion de l'habitat, modèles fondateurs des communautés de mai 68. Depuis le début des années 2000, les projets d'habitat participatif fleurissent aux quatre coins de la France : Les Pipistrelles de la Durance à Mallemort (13), en partenariat avec une coopérative HLM ; L'Abrique partagée à Lille (59), projet de petit habitat participatif abritant sept foyers et un logement solidaire à loyer modéré ; Ecoravie en habitat participatif intergénérationnel et écologique à Dieulefit (26) ; Aux 4 Vents dans l'écoquartier de la Cartoucherie à Toulouse (31), 3 000 logements pour 10 000 habitants, le plus vaste projet en habitat participatif en France. Ces projets revêtent des aspects très variés quant à leur taille et leur architecture, et peuvent constituer de la construction autant que de la réhabilitation.
Nous évoquerons successivement les principes directeurs (§ I) puis les structures porteuses des projets d'habitat participatif (§ II).

Les principes directeurs de l'habitat participatif

– Le citoyen au cœur du projet. – Comme son nom l'indique, l'habitat participatif est une démarche de construction ou de rénovation de logements qui place le citoyen au centre de son projet d'habitat. De fait, on peut en trouver aussi bien en centre-bourg qu'en milieu rural, en neuf qu'en réhabilitation. Cette démarche est caractérisée par trois invariants :
  • le collectif d'habitants se constitue avant d'emménager et participe activement à la réalisation du projet ;
  • les habitants partagent entre eux des espaces communs ;
  • après leur installation, l'ensemble immobilier est autogéré par les habitants.
Au-delà de ses principes, il est certain que la démarche participative trouve son inspiration dans diverses sources dont la transposition en droit positif n'est pas toujours évidente. Ainsi on distinguera ce qu'est, positivement, l'habitat participatif (A), de ce qu'il pourrait ou voudrait être (B).

Ce qu'est l'habitat participatif

On peut affirmer avec certitude que l'habitat participatif est une démarche de logement à visée citoyenne, qualitative, écoresponsable et d'intérêt sociétal.
– Une démarche citoyenne. – L'habitat participatif est une alternative au cadre de production classique du logement, une réponse face à l'augmentation continuelle de son coût, et un facteur de lien social. Depuis la loi Alur, l'habitat participatif est défini à l'article L. 200-1 du Code de la construction et de l'habitation comme « une démarche citoyenne qui permet à des personnes physiques de s'associer, le cas échéant avec des personnes morales, afin de participer à la définition et à la conception de leurs logements et des espaces destinés à un usage commun, de construire ou d'acquérir un ou plusieurs immeubles destinés à leur habitation et, le cas échéant, d'assurer la gestion ultérieure des immeubles construits ou acquis ».
– Une démarche qualitative. – L'habitat participatif redonne de l'attractivité au logement collectif en ce qu'il le personnalise. L'intervention et l'engagement des habitants au projet de construction ou de rénovation permettent la personnalisation du projet. De ce fait, les habitants porteront probablement une attention plus grande à la qualité des logements produits.
– Une démarche écoresponsable. – Dans le même ordre d'idées, de nombreux projets d'habitat participatif ont l'ambition de limiter l'empreinte écologique des logements créés. La qualité environnementale du bâtiment, l'écoresponsabilité de ses habitants, dans un souci de gestion responsable des ressources, sont en général assez naturellement privilégiées dans ce type de démarches.
– Une démarche à forte valeur sociétale. – Dans un esprit de partage et de solidarité, la construction, la mise à disposition et la valorisation d'espaces collectifs sont mises à l'honneur dans l'habitat participatif. De ce fait, l'habitat participatif contribue, avec force, au dynamisme des villages ou des quartiers dans lesquels il s'implante. La salle commune servira tantôt pour une Amap, tantôt pour un cours de sport collectif, ou encore pour des activités extrascolaires le mercredi après-midi, en invitant les citoyens extérieurs à en bénéficier ponctuellement.

Ce que l'habitat participatif pourrait ou voudrait être

On discerne aussi, dans la démarche d'habitat participatif, une « inspiration » venue de systèmes juridiques étrangers, sur laquelle il ne nous appartient pas de porter de jugement de valeur, mais dont il faut bien constater qu'elle est difficile à transposer dans l'ordre juridique national.
– Un nouveau type de démembrement de la propriété ? – Selon certaines conceptions, le foncier, qui peut être acquis par voie de préemption ou par un bail emphytéotique, représenterait une « propriété collective » des habitants, tandis que le bâti s'assimilerait à un droit d'usage individuel de chaque habitant. Ce concept existe dans les pays de common law sous le nom de community land trust. Bien que le célèbre arrêt Maison de Poésie ait ouvert la voie à la création de droits réels innommés, il n'y a en France, à notre connaissance, aucun exemple d'habitat participatif reposant sur la création d'un tel droit réel de jouissance spéciale. C'est par la constitution de sociétés spécifiques qu'un résultat voisin a été recherché.
– Une démarche anti-spéculative ? – Sur le modèle de certaines organisations étrangères, l'habitat participatif peut aussi constituer un moyen de réguler le marché immobilier, voire d'en soustraire purement et simplement certains logements. L'idée est alors de créer des logements pour y vivre, mais non d'offrir à leurs propriétaires l'espoir d'une plus-value. Autrement formulé, l'habitat participatif se voudrait un système dans lequel la fonction d'habitat et l'intérêt collectif priment sur l'investissement immobilier et l'enrichissement individuel. Il fonctionne d'ailleurs comme tel dans certains pays étrangers qui nous sont proches.

La coopérative d'habitants, un instrument anti-spéculatif

Connues du droit suisse, allemand ou québécois, les coopératives d'habitants possèdent, dans ces législations, une fonction anti-spéculative. C'est la coopérative qui est propriétaire des logements qu'elle loue à ses coopérateurs en échange d'un loyer et de l'achat de parts sociales. Les habitants sont donc propriétaires collectivement du bien immobilier, mais locataires individuellement de parts sociales. Afin d'éviter la spéculation sur la revente des logements, chacun doit adhérer à des clauses d'agrément. La cession des parts d'un associé quittant la coopérative est soumise à l'approbation de l'assemblée générale qui est en droit d'encadrer le prix de revente des parts. En outre, pour que ce bien immobilier ne revienne pas sur le marché en cas de dissolution de la coopérative d'habitants ou de la société civile créée, les statuts peuvent prévoir qu'il sera proposé en priorité à la collectivité (d'autant plus facilement si c'est elle qui avait consenti un bail sur le foncier).
Pour la France, l'article L. 201-5 du Code de la construction et de l'habitation prévoit un mécanisme d'agrément du cessionnaire de parts et la limitation du prix de cession à leur montant nominal, augmenté d'une majoration qui, « dans la limite d'un plafond prévu par les statuts, tient compte de l'indice de référence des loyers ». Mais on a alerté à juste titre sur « la faiblesse économique que peut représenter une telle règle pour le cédant des parts sociales, allant jusqu'à mettre à mal la viabilité du projet ». Les banques peuvent voir dans ces clauses une source d'insécurité en raison de la liquidité encadrée du bien financé.

Les structures porteuses de l'habitat participatif

Pour réaliser une construction neuve ou une réhabilitation en autopromotion, il est nécessaire que les futurs habitants et leurs partenaires (notamment les collectivités territoriales et organismes de logement social) se rassemblent au sein d'une société en sorte de se constituer en interlocuteur unique (maître d'ouvrage) afin d'acheter ou de prendre à bail le terrain, de déposer un permis de construire, de souscrire les assurances obligatoires et de gérer les travaux de construction. Aussi les notaires peuvent-ils être consultés sur la structure juridique capable de porter un projet d'habitat participatif. Le choix offert a évolué avec le temps.

Les anciennes structures porteuses des projets d'habitat participatif et leurs limites

Avant la loi Alur, les projets d'habitat participatif ont utilisé essentiellement trois types de sociétés : les sociétés civiles immobilières d'attribution (SCIA), les sociétés civiles immobilières d'accession progressive à la propriété (SCI APP), les sociétés civiles coopératives de construction (SCCC). Ces différentes structures ne parvenaient cependant ni à organiser une propriété réellement collective, ni à limiter la spéculation, comme le souligna, en 2011, un Livre blanc de l'habitat participatif.
Bien que n'ayant pas entendu répondre à toutes les attentes du mouvement participatif, le gouvernement a néanmoins proposé une évolution. La loi Alur a créé deux types de sociétés nouvelles dites « d'habitat participatif » : les sociétés coopératives d'habitants et les sociétés d'attribution et d'autopromotion. Visant à compléter l'arsenal juridique existant, la loi nouvelle a maintenu les anciennes formes de sociétés. Le législateur incite toutefois à leur évolution, en édictant que la transformation des anciennes sociétés vers une des deux nouvelles formes n'entraînera pas création d'une personne morale nouvelle.

L'habitat participatif avant la loi Alur

1. La société civile immobilière d'attribution (SCIA) a pour caractéristique de lier les parts sociales détenues par chaque sociétaire au lot qui constituera son futur logement. Au choix du groupe, ce logement lui est attribué en jouissance ou en pleine propriété après la fin de la construction. Les statuts doivent donc décrire précisément les futurs lots d'habitation et leur poids respectif dans le budget global de manière à déterminer la répartition du capital entre les associés. Il faut donc avoir réalisé un projet architectural et un état descriptif de division avant de pouvoir l'immatriculer.
2. En deuxième lieu, les sociétés civiles immobilières d'accession progressive à la propriété (SCI APP) détiennent, gèrent et entretiennent des immeubles ayant fait l'objet d'un apport par un organisme HLM, en vue de leur division afin d'être loués à des personnes physiques dont les ressources ne dépassent pas certains plafonds. On a principalement formulé à leur égard trois reproches :
  • n'étant pas une coopérative, le droit de vote est proportionnel au capital détenu. De ce fait, la valeur des parts évolue. Ce type de société ne pouvait donc traduire la volonté anti-spéculative de ses associés ;
  • elle ne peut conduire qu'à une propriété individuelle des logements. Les amateurs de propriété collective restaient donc sur leur faim ;
  • étant nécessairement créées par des organismes à loyer modéré, elles ne permettaient pas le « brassage » des publics nécessaire à la mixité sociale.
3. En troisième lieu, les sociétés civiles coopératives de construction (SCCC) dont l'objet est la construction d'immeubles en vue de leur division par lots destinés à être attribués ou vendus aux associés, encouraient les deux mêmes reproches : l'absence de propriété collective et la spéculation.

L'apport de la loi Alur : les nouvelles structures porteuses des projets d'habitat participatif

– Le choix de la structure : critère distinctif des deux types de sociétés. – Les notaires peuvent être consultés sur le montage juridique d'un projet d'habitat participatif. La première décision à prendre sera le choix d'un type de structure. À cet égard, c'est la philosophie du projet qui permettra de se déterminer. Comme le démontre un auteur, le choix pour l'un ou l'autre statut juridique dépend essentiellement de la volonté des associés de rendre possibles ou non les attributions de propriété :
  • s'ils veulent que la société demeure propriétaire des logements et que les associés/habitants n'en aient que la jouissance, il faut opter pour la coopérative d'habitants ;
  • s'ils veulent pouvoir choisir entre une attribution en propriété ou en jouissance, il est préférable de choisir la société d'attribution et d'autopromotion.
Ce choix étant formulé, le praticien pourra évoquer l'organisation et le fonctionnement des sociétés d'habitat participatif (I), puis les moyens de pallier les risques qu'elles présentent (II).
Organisation et fonctionnement des sociétés d'habitat participatif
Nous présenterons rapidement ici les principes qui président à la constitution (a) puis au fonctionnement (b) des sociétés d'habitat participatif.
Constitution
– Forme de la société. – La coopérative d'habitants comme la société d'attribution et d'autopromotion peuvent être civiles ou commerciales. Lorsque la première forme est choisie, les associés ne répondent des dettes sociales à l'égard des tiers qu'à hauteur de leurs apports. Elles sont nécessairement à capital variable afin de prendre en compte l'évolution des besoins de l'habitat, l'arrivée ou le départ de nouveaux associés.
– Associés. – Même si le principe est celui d'une constitution par des personnes physiques entre elles, les personnes morales peuvent toutefois être associées de ces deux types de sociétés sans pouvoir détenir plus de 30 % du capital. Une dérogation existe cependant pour les offices publics de l'habitat, les sociétés d'économie mixte et les organismes agréés mentionnés aux articles L. 365-2 ou L. 365-4 du Code de la construction et de l'habitation, détenant un droit de jouissance sur un ou plusieurs logements. Dans cette hypothèse, le pourcentage de leur participation dans la société d'habitat participatif est fixé à proportion de leur participation dans le capital de la société.
– Objet principal. – Chaque société d'habitat participatif doit limiter son objet à des opérations de construction et/ou de gestion comprises dans un même programme, comportant une ou plusieurs tranches, d'un même ensemble immobilier. Le fait de spécialiser l'objet social de la société créée permet de limiter les risques pris par la société et ainsi de protéger ses associés. Le nombre de logements créés doit figurer dans les statuts. En revanche, ce n'est qu'en assemblée générale, et non dès le stade des statuts, que les conditions techniques et financières du projet seront fixées. C'est également à ce stade que les prix des logements seront fixés en fonction du goût global de l'opération.
– Activités connexes. – En complément de cet objet spécifique, des activités et services peuvent être proposés par la société aux associés ainsi qu'aux personnes extérieures à l'habitat participatif. Il est notamment possible de louer les espaces communs à des personnes extérieures à cet habitat, en prenant toutefois soin d'assurer une comptabilité séparée.
– Apports. Spécificité de la coopérative. – La société procède à des appels de fonds auprès de ses associés. Le versement en est sécurisé par une garantie financière sur laquelle nous reviendrons. Pour la coopérative d'habitants, il existe une spécificité. En principe, le travail d'un coopérateur participe de l'essence même de la coopérative, voire en constitue une obligation. Le travail ne devrait donc pas constituer un apport. Toutefois, l'article L. 201-13 du Code de la construction et de l'habitation prévoit que des parts sociales en industrie, correspondant à un apport-travail, peuvent être souscrites par les coopérateurs lors de la phase de construction ou de rénovation du projet immobilier, ou lors de travaux de réhabilitation du bâti, sous réserve notamment d'un encadrement technique adapté et d'un nombre d'heures minimal. Ce nombre sera fixé en assemblée générale. Ces parts en industrie doivent être libérées avant la fin des travaux et sont plafonnées au montant de l'apport initial demandé aux coopérateurs. Par exception au second alinéa de l'article 1843-2 du Code civil, les parts concourent à la formation du capital social. Ces parts sociales en industrie sont cessibles ou remboursables après un délai de deux ans à compter de la libération totale des parts, déduction faite d'un montant, réparti, correspondant aux coûts spécifiques engendrés par cet apport-travail.
Fonctionnement
– Usage des logements. – Les personnes physiques associées doivent utiliser le logement qui leur est attribué à titre de résidence principale (huit mois par an). Il en résulte nécessairement qu'une personne physique ne peut être associée dans plusieurs sociétés d'habitat participatif. Des dérogations existent, notamment dans les cas suivants :
  • pour les héritiers et légataires d'un associé d'une telle société ;
  • lorsque le domicile conjugal est attribué au conjoint non associé dans une procédure de divorce ;
  • si l'associé devient incapable ou invalide ;
  • lorsque l'associé met à disposition le logement concerné à un parent en ligne directe jusqu'au deuxième degré, en situation de handicap ou d'invalidité ;
  • en cas de mobilité professionnelle : lorsque l'associé est amené, dans le cadre de son activité professionnelle, à effectuer des déplacements l'obligeant à résider dans un autre logement ;
  • en cas de perte d'emploi de l'associé.
Les risques de l'habitat participatif et les moyens de les prévenir
– Un système économique, mais dangereux. – L'un des avantages principaux de l'habitat participatif dans son ensemble réside dans une diminution certaine des coûts liés à la réalisation du projet de logements (montage de l'opération, maîtrise d'ouvrage, assistances technique et juridique, etc.). Le revers de la médaille est une exposition plus importante des habitants aux risques liés à la maîtrise d'ouvrage. En effet, ce sont eux qui assurent la mission sans forcément posséder les connaissances techniques ou financières propres à en assurer la bonne fin. Toutefois, une garantie imposée par la loi peut pallier le risque financier, et le risque technique peut être contourné par l'assistance d'experts ou professionnels dans la mise en œuvre de l'habitat participatif.
Parer le risque financier : la garantie financière d'achèvement et de souscription
– Des garanties palliatives. – Pour prévenir les principales difficultés, et quel que soit le type de société choisi, la loi impose deux garanties d'ordre public :
  • en premier lieu, les constructions ne peuvent être entamées qu'à partir du moment où au moins 20 % des logements ont été souscrits ;
  • en second lieu, une garantie financière d'achèvement et de souscription du reliquat des lots doit être fournie aux associés avant tout démarrage des travaux ; celle-ci consiste en une ouverture de crédit bancaire garantissant l'éventuelle défaillance d'une entreprise ou de l'un des associés de la société d'habitat participatif.
– Un obstacle économique. – Le coût de cette dernière garantie, pourtant essentielle, peut s'avérer élevé, privant alors la technique de son avantage économique. C'est pourquoi la loi apporte au cadre qu'elle fixe une double dérogation en écartant l'obligation, pour la société, de fournir à ses membres cette garantie financière :
  • soit lorsque la société acquiert les logements projetés dans le cadre d'une vente en état futur d'achèvement (puisqu'elle bénéficie alors des garanties liées au secteur protégé) ;
  • soit encore lorsque la société conclut avec un professionnel un contrat de promotion immobilière (puisque le promoteur est lui-même tenu à une garantie propre à ce type de contrat par l'article L. 222-3 du Code de la construction et de l'habitation).

Point d'attention : habitat participatif, une garantie financière limitée

La garantie financière accordée à une société d'habitat participatif n'est pas aussi protectrice que celle du secteur protégé des Vefa. En effet, elle peut prendre la forme d'un cautionnement, et surtout elle peut être limitée en fonction des risques encourus . Elle s'oppose sur ce point à la garantie d'achèvement des Vefa dans laquelle doit figurer un engagement d'achever les travaux, sans exclusion ni limitation de montant. Notamment, en cas de travaux supplémentaires rendus nécessaires en cours de chantier, le garant ne sera pas tenu de les financer. On rappellera donc une nouvelle fois la nécessité de s'entourer de nombreuses compétences.

Habitat participatif, une garantie financière encadrée

La fourniture de la garantie exigée des sociétés d'habitat participatif fait l'objet d'une procédure soigneusement balisée par le Code de la construction et de l'habitation.
En amont de la construction, a lieu une délibération de l'assemblée générale des associés portant sur les éléments suivants :
  • le dossier de demande de permis de construire ;
  • les plans des bâtiments ;
  • les devis de travaux (conditions générales et particulières) ;
  • les modalités de remboursement des prêts ;
  • la garantie financière ;
  • le montant des versements à effectuer par les associés.
L'arrêté du 26 mars 2018 précise la composition minimale des pièces à fournir au garant afin de solliciter la garantie prévue à l'article R. 200-8 du Code de la construction et de l'habitation. Ainsi, devront être remis au garant :
  • les documents liés à la structure (statut) ;
  • la gouvernance de la société ;
  • la liste des professionnels avec leurs justificatifs d'assurance construction, d'immatriculation et les lettres d'engagement ;
  • les justificatifs concernant le montage financier de l'opération ;
  • le permis de construire.
La fourniture de ces pièces doit guider le garant dans son appréciation de la capacité de la société à construire et assurer la viabilité de son projet. Les dispositions précitées de l'arrêté sont entrées en vigueur le 20 avril 2018.
Parer le risque technique : la professionnalisation
– Professionnalisation de l'habitat participatif. – Compte tenu de ces observations, et à la lumière des opérations déjà réalisées par ces nouvelles sociétés d'habitat participatif, il semble que l'avenir de la formule soit conditionné à la professionnalisation de ce type d'opérations, soit auprès d'un promoteur du secteur privé, soit plus encore auprès d'un organisme de logement social.
Mais vivre ensemble ne suppose pas nécessairement d'élaborer un projet, forcément de longue haleine, recouvrant la construction et l'utilisation de logements. Il peut s'agir, bien plus simplement, de se loger en profitant des bienfaits de la mutualisation de locaux et de prestations qui contribuent à faire du simple logement un habitat. Telle est la démarche, plurielle et parfois problématique, du coliving.