L'exception du Livre foncier d'Alsace-Moselle

L'exception du Livre foncier d'Alsace-Moselle

– Le Livre foncier d'Alsace-Moselle. – Compte tenu de leur héritage germanique, la publicité foncière dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin se caractérise par l'existence d'un Livre foncier, tenu sous l'autorité d'un juge du Livre foncier qui dépend ainsi du ministère de la Justice et non pas de la DGFiP.
Il existe un bureau foncier par tribunal judiciaire et un Livre foncier par commune qui forme une circonscription foncière.
Les conditions de la publicité sont principalement les mêmes que celles prévues par les décrets de 1955, à savoir :
  • l'exigence de la forme authentique de l'acte (L. 1er juin 1924, art. 42, al. 1er) ;
  • la règle de l'effet relatif de la publicité.
Le Livre foncier est régi par un dispositif particulier, principalement une loi du 1er juin 1924 L. 1er juin 1924, mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle (JO 3 juin 1924, no 0151), aujourd'hui aux articles 36 à 65. Principalement modifiée par la loi no 2002-306 du 4 mars 2002 et complétée par un décret no 2009-1193 du 7 octbre 2009. , et sauf exception, les dispositions des décrets de 1955 V. Cass. 3e civ., 1er oct. 2020, no 18-16.888 (D. no 55-22, 4 janv. 1955 et D. no 55-1350, 14 oct. 1955 cités supra, no ). ne lui sont pas applicables. Bien qu'effectuée sous le contrôle d'un juge judiciaire, l'inscription au Livre foncier produit des effets très proches de la publicité auprès des services de la publicité foncière, notamment parce qu'elle est requise aux fins d'opposabilité L. 1er juin 1924, art. 38. des droits réels sur les immeubles ou aux fins d'information des tiers.
L'architecture du Livre foncier est assez proche du fichier immobilier des services de la publicité foncière :
  • cadastre séparé administré par les services de l'État (DGFiP comme pour le reste de la France) ;
  • requête en inscription auprès du juge du Livre foncier (idem SPF) d'actes dressés en la forme authentique, principalement par les notaires ;
  • inscription au registre des dépôts qui donne le rang à l'inscription (idem SPF) ;
  • contrôle par le juge foncier qui rend une ordonnance d'inscription (équivalent inscription SPF), une ordonnance intermédiaire (équivalent d'un rejet à régulariser), et une ordonnance de rejet (équivalent à un refus pur et simple de la requête) ;
  • le contrôle exercé par le juge est plus étendu que celui offert aux services de la publicité foncière. Le juge peut notamment soulever des cas de nullité absolue des actes juridiques ;
  • publication aux fins d'opposabilité ou information ;
  • l'effet attaché à l'inscription au Livre foncier des droits inscrits à peine d'inopposabilité est toutefois plus puissant que celle au service de la publicité foncière, puisque le contrôle du juge confère à la formalité une présomption d'existence du droit (L. 1er juin 1924, art. 41 et 38). Cette présomption renverse la charge de la preuve, ce qui dispense le titulaire du droit inscrit d'avoir à prouver son droit. Étant rappelé qu'à l'inverse, la publication au service de la publicité foncière n'a aucune force probante sur l'existence des droits immobiliers inscrits et la charge de la preuve en cas de litige sur un droit.
– Le Livre foncier informatisé Amalfi : un fichier public mais asynchrone. – Le Livre foncier est, depuis le 1er juillet 2008, accessible au moyen d'un système informatique dénommé « Amalfi » (Alsace-Moselle application pour le Livre foncier Informatisé). Le fonctionnement technique d'Amalfi a été confié à un établissement public distinct dénommé « Epelfi » Établissement public national à caractère administratif dénommé « Epelfi » (Établissement public d'exploitation du Livre foncier informatisé) organisé par la loi no 2002-306 du 4 mars 2002 et le décret no 2007-1852 du 26 décembre 2007. .
Ce système assure la dématérialisation totale de la procédure d'inscription, de la numérisation de la requête à la signature électronique de l'inscription par le juge du Livre foncier. Il est construit dans une architecture à la fois plus ouverte que l'ANF, dans la mesure où l'accès est ouvert à d'autres professionnels que les notaires La requête électronique (eRIN) ne peut être formée que par les notaires, géomètres-experts, huissiers de justice, agents de l'État, des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale, ainsi que par les avocats (D. no 2009-1193, 7 oct. 2009, art. 76). , mais en même temps plus fermé dans la mesure où il faut justifier d'un titre pour avoir un accès aux annexes (Livre foncier complet) et copies des actes.
En ce qui concerne les inscriptions, le système se rapproche de Télé@ctes et Fidji pour la gestion des formalités.
S'agissant de l'accès aux informations et annexes et copies des actes publiés au Livre foncier, l'informatisation est assez proche de l'ANF dans un modèle ouvert à d'autres professionnels, mais également ouvert informatiquement aux particuliers dans un modèle indirect, en distinguant :
  • l'accès avec visualisation directe pour les notaires et professionnels (dont les avocats) et administrations admises, pour les consultations par immeuble ou personne (D. no 2009-1193, 7 oct. 2009, art. 6, al. 3) ;
  • l'accès avec visualisation indirecte sous forme de demande/réponse ouvert à tous pour les consultations par immeuble ;
  • l'accès avec visualisation indirecte sous forme de demande/réponse ouvert à toute personne justifiant d'un titre, à savoir les professionnels susvisés ou les personnes autorisées sur demande par le juge du Livre foncier ;
  • l'accès en navigation dans le fichier global qui permet d'effectuer des recherches en ligne et de déposer des requêtes en ligne (eRIN), ouvert aux mêmes acteurs que l'accès direct sauf les avocats ;
  • la consultation des annexes et copies sous forme de demande/réponse ouverte aux mêmes acteurs que l'accès direct sauf les avocats, ou aux personnes autorisées sur demande par le juge du Livre foncier.
La différence par rapport à Fidji-Stock semble être que toutes les annexes existantes antérieurement au 1er juillet 2008 n'ont pas été informatisées ; il y a donc un délai de numérisation.