– Le cadre. – Dispositif maintenant ancien, la déclaration d'insaisissabilité, qui a connu de nombreuses modifications, s'inscrit dans la mouvance visant à la création, au moins de fait, d'un patrimoine non affecté à l'activité professionnelle.
La déclaration d'insaisissabilité
La déclaration d'insaisissabilité
Une évolution fulgurante sur le plan législatif
– Une genèse déjà ancienne, plus qu'on ne le pense. – La loi du 1er août 2003 pour l'initiative économique a marqué un tournant majeur pour le statut de l'entreprise individuelle. L'objectif du législateur, conscient de la fragilité patrimoniale de l'entrepreneur, et du frein qu'elle représente à la création d'entreprise, a fait le choix de permettre de « mettre à l'abri » de créanciers professionnels l'actif patrimonial le plus important, tant symboliquement que financièrement : la résidence principale. Reculant, à cette époque, par respect du principe de l'unicité du patrimoine, devant la création d'un patrimoine professionnel d'affectation, il a cependant défriché un chemin existant qui, comme nous le verrons ensuite, a été rapidement poursuivi, et largement élargi.
Aucune autre disposition d'ordre juridique ne reflétait plus l'attachement fusionnel qu'entretiennent les Français avec leur résidence principale, et l'importance évidente qu'elle représente pour protéger sa famille.
Un nouvel acte notarié était né : la déclaration d'insaisissabilité. Il fallut en recevoir plusieurs avant de pouvoir parfaitement le prononcer !
– L'ouverture à d'autres actifs immobiliers. – Très vite, la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie a fait œuvre d'ouverture en permettant à l'entrepreneur d'ajouter à sa résidence principale déclarée insaisissable, l'ensemble de ses biens immobiliers, bâtis et non bâtis, non affectés à un usage professionnel.
À partir de cette date, la quasi-totalité du patrimoine immobilier personnel de l'entrepreneur a pu échapper au droit de gage général de ses créanciers professionnels. C'est à nouveau une reconnaissance majeure de l'importance consacrée par la France à la chose immobilière.
Elle en est presque devenue mystique et surréaliste, puisqu'elle laisse totalement de côté l'ensemble du reste du patrimoine personnel de l'entrepreneur. Alors même qu'il résulte d'une saine et prudente gestion de patrimoine de diversifier autant que possible l'allocation de ses actifs et de ses investissements. On peut donc naturellement s'en étonner, et s'interroger puisque cette protection du droit sacré immobilier pourrait aboutir à biaiser la gestion patrimoniale personnelle de l'entrepreneur. Celui-ci, poussé à mobiliser des actifs non couverts par la déclaration d'insaisissabilité (actifs financiers notamment) dans l'acquisition de biens et droits immobiliers qu'il pourrait déclarer insaisissables, pourrait finalement être amené à n'avoir qu'une inclination immobilière, et prendre des décisions économiquement malsaines sur l'autel de la limitation de ses risques.
– La résidence principale, protégée simplement et automatiquement. – Pour parachever ce dispositif, la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques a apporté une amélioration notoire à l'insaisissabilité de la résidence principale de l'entrepreneur.
La loi a créé une insaisissabilité légale, cantonnée à la résidence principale, protégeant cette dernière pour l'ensemble des entrepreneurs de France ayant déjà créé leur activité ou dès la création de celle-ci.
Même s'il peut paraître curieux de s'en réjouir au sein du rapport du Congrès des notaires de France, cette amélioration a notamment consisté à exclure le notaire de ce processus. Il faut avouer sans se voiler la face que l'acte notarié présentait sans conteste plusieurs contraintes assez peu compatibles avec un large déploiement de l'insaisissabilité de la résidence principale, au rang desquelles : la nécessité de connaître l'existence même du dispositif, la nécessité de se rapprocher d'un notaire (nous sous-estimons trop fréquemment que pousser la porte d'un office est loin d'être un geste anodin ou naturel pour nombre de nos concitoyens), la procédure de régularisation de l'acte (nécessité de retrouver et transmettre le titre de propriété, vérifications d'état civil, du statut d'entrepreneur, de la situation hypothécaire), et enfin le coût de celle-ci (de l'ordre de 500 €, pouvant sembler faible pour la profession dans la mesure où il s'agissait d'un acte dont le temps de préparation n'était pas couvert par les émoluments tarifés, mais coût qui excluait tout un pan des entrepreneurs calculant par le triptyque : intérêt supposé / temps consacré / coût).
Réservant ainsi l'acte notarié aux éventuels autres biens et droits immobiliers que la résidence principale, la loi a fait œuvre utile en protégeant de fait « l'essentiel », tout en permettant, dans une démarche volontaire de précaution, d'élargir le champ de la protection à d'autres actifs, et partant du principe qu'un entrepreneur ayant plusieurs biens immobiliers est naturellement plus coutumier de la profession, et réciproquement !
Le conseil primordial à l'entrepreneur lors de ses acquisitions immobilières
L'intervention notariale reste essentielle pour protéger la totalité des biens immobiliers de l'entrepreneur, en les déclarant insaisissables.
Cette solution doit être proposée systématiquement à nos clients.
Qui peut déclarer ?
– Un déclarant très circonscrit. – Après ce bref rappel des évolutions législatives, nous aborderons les questions d'ordre technique et les points pratiques permettant d'utiliser au mieux cet outil à la disposition des citoyens et du notariat.
Pour voir ses biens immobiliers déclarés insaisissables, il faut d'abord être un entrepreneur individuel. L'affirmation peut paraître d'une affligeante banalité, mais cette première condition mérite quelques commentaires. Seules les personnes ayant personnellement la qualité d'entrepreneur pourront accéder à la protection. La propriété de l'entreprise elle-même n'a aucune influence sur ce point. Cela signifie que les entrepreneurs gérant partiellement ou totalement une entreprise pour le compte d'un tiers (location-gérance, entreprise gérée par un seul conjoint, indivision, société en participation) pourront bénéficier de la protection. À l'inverse, cela exclut de plein droit toutes les entreprises exploitées sous forme sociétaire :
- que ces formes soient à responsabilité limitée ou non (y compris les sociétés civiles professionnelles, et même les sociétés en nom collectif) ;
- et ce quand bien même les dirigeants (ou associés) seraient juridiquement assimilés à des indépendants, ou directement responsables sur leurs biens de leurs actes professionnels (on pense notamment aux professionnels libéraux dont l'activité professionnelle est exercée dans le cadre d'une société, et qui pourtant disposent en plus d'une identification personnelle au répertoire Sirene).
Au-delà de cette exigence, l'entrepreneur doit être immatriculé à un registre de publicité à caractère professionnel, ou relever des professions indépendantes non immatriculées.
L'écran de la personnalité morale restreint la protection
Les associés des sociétés, y compris ceux y exerçant leur activité professionnelle ou responsables des dettes sociales, ne peuvent pas bénéficier du régime de protection.
– Décès de l'entrepreneur. – Le décès de l'entrepreneur peut soulever des difficultés au regard du devenir de cette déclaration d'insaisissabilité. L'article L. 526-3 in fine du Code de commerce prévoit que le décès emporte révocation de la déclaration. En conséquence, les saisies nées postérieurement au décès retrouveront les effets habituels.
– Créance postérieure au décès. – Une difficulté intervient en présence d'un créancier professionnel, titulaire d'une créance née postérieurement à la publication de la déclaration mais antérieurement au décès, qui a initié une saisie avant le décès. Ce cas n'a, à ce jour, pas été tranché par la jurisprudence. Il sera conseillé au créancier de renouveler sa saisie après le décès, dans la mesure où la déclaration d'insaisissabilité n'aura plus d'effet.
– Insaisissabilité et régime matrimonial. – Enfin, pour clôturer cette question, précisons que pour l'entrepreneur marié, si le bien dépend d'une communauté il pourra seul le déclarer insaisissable dans la mesure où il s'agit d'un acte de conservation et non de disposition. Si le bien est indivis, seule la quote-part indivise appartenant à l'entrepreneur pourra être déclarée insaisissable.
Peut-on « tout » déclarer ?
– Deux conditions. – En ce qui concerne l'objet de la déclaration, deux conditions cumulatives sont exigées : sa nature immobilière, et son affectation à l'usage non professionnel de l'entrepreneur.
Pour la nature immobilière des biens et droits, le notaire n'aura pas de difficulté à cerner le champ des possibilités. Cela inclut l'ensemble des droits possibles sur les immeubles (pleine propriété, usufruit, nue-propriété, droit réel de jouissance spéciale, etc.). Le véritable point d'attention concerne les sociétés immobilières. En effet, seules les parts de société civile d'attribution et de sociétés immobilières de copropriété constituent des droits immobiliers et, en conséquence, bénéficient de la protection. Tout autre droit social en sera exclu.
– Et un regret. – C'est d'ailleurs un point qui est regrettable puisque l'ingénierie notariale et patrimoniale peut amener dans nombre de situations à loger les immeubles au sein de structures sociales diverses, et pour la plus commune et la plus emblématique d'entre elles, la société civile immobilière (SCI). D'autant que notre législation est capable de réserver de plus en plus à ces structures des traitements juridiques particuliers et dérogatoires… alors même que la SCI ne dispose d'aucune définition légale ! On peut particulièrement penser aux dispositions de l'article L. 213-1, 3o du Code de l'urbanisme qui soumettent certaines cessions de droits sociaux au droit de préemption, en visant particulièrement les SCI, et en circonscrivant précisément le type de SCI concerné par ses actifs sociaux et la composition de son capital : « les cessions de la majorité des parts d'une société civile immobilière (…) lorsque le patrimoine de cette société est constitué par une unité foncière, bâtie ou non, dont la cession serait soumise au droit de préemption. Le présent 3o ne s'applique pas aux sociétés civiles immobilières constituées exclusivement entre parents et alliés jusqu'au quatrième degré inclus ».
Il est vrai que la question est complexe dans la mesure où une SCI peut, parfaitement et très souvent, détenir d'autres actifs que les seuls biens et droits immobiliers (notamment de la trésorerie). Il ne serait pas légitime que ces autres actifs puissent bénéficier de la protection par le jeu de l'interposition de la personne morale, alors qu'ils n'en bénéficieraient pas s'ils étaient détenus en direct.
Quitte à ne cantonner cette protection qu'à concurrence de la valeur représentative de l'actif immobilier dans la valeur de la part sociale. D'autres textes envisagent déjà cette prise en compte partielle de valorisation d'un actif au sein de la valeur d'un droit social. On pense notamment aux dispositions, certes plus fiscales que civiles, de l'article 787 B du Code général des impôts : « L'exonération s'applique également lorsque la société détenue directement par le redevable possède une participation dans une société qui détient les titres de la société dont les parts (…) font l'objet de l'engagement de conservation. Dans cette hypothèse, l'exonération partielle est appliquée (…) dans la limite de la fraction de la valeur réelle de l'actif brut de celle-ci représentative de la valeur de la participation indirecte ayant fait l'objet d'un engagement de conservation ».
Combiner la protection immobilière et la stratégie patrimoniale
Étendre la protection aux parts sociales de SCI est pourtant plus que souhaitable, si celle-ci dispose naturellement d'un actif social immobilier éligible.
La stratégie de détention immobilière peut aller à l'encontre d'une protection de l'actif immobilier
Les droits sociaux, à quelques rares exceptions, ne peuvent pas bénéficier de l'insaisissabilité, même si ces sociétés détiennent la résidence principale de l'entrepreneur ou un actif immobilier éligible.
– Un champ large d'usage. – Désormais ouverte à d'autres biens que la résidence principale de l'entrepreneur, l'insaisissabilité va pouvoir s'y appliquer, sous réserve que ces biens ne soient pas à son usage professionnel.
En conséquence, et de manière parfaitement logique malgré l'importante lourdeur de la procédure, l'article L. 526-1, alinéa 2 in fine du Code de commerce envisage que les biens de nature mixte (professionnel, et autre usage, sans les énoncer) ne peuvent bénéficier de la protection qu'à la condition que la partie non affectée à l'usage professionnel soit désignée dans un état descriptif de division.
– Une notion d'usage devenue inadaptée. – Nous relèverons que la référence à l'usage est incontestablement devenue une lacune, dans la mesure où les dispositions relatives à l'usage des biens immobiliers ne peuvent être retrouvées qu'au titre de l'article L. 631-7 du Code de l'urbanisme. La difficulté réside dans le fait que l'usage est une notion purement factuelle puisqu'il est relatif à ce à quoi un immeuble est utilisé (utilisation qui peut être très évolutive, et compatible, ou pas, avec la réglementation).
La désynchronisation des réglementations commerciales et urbanistiques pourrait être de nature à créer une complexité certaine. D'abord parce que l'usage n'est que peu vérifiable par le notaire instrumentaire, sauf s'il décide d'aller le constater physiquement lui-même et qu'il considère que le bien paraît affecté à ce jour à l'usage professionnel de l'entrepreneur (ce qui ne relève pas toujours de l'évidence, et qui n'a pas de lien avec la régularité, ou non, de cet usage). Ensuite parce que la notion d'affectation n'est pas clairement définie. On pourrait considérer que l'affectation à « son usage professionnel » est présumée si le bien en question est inscrit à l'actif de l'entreprise individuelle. Mais peut-on se fier à cet unique geste comptable que représente l'inscription au bilan professionnel d'un actif personnel ? En outre, quid si le bien est effectivement affecté à l'usage professionnel de l'entrepreneur, mais qu'il a été omis au sein de son bilan ? Enfin, certains entrepreneurs (régime dit « micro », notamment auto-entrepreneurs) tiennent une comptabilité de trésorerie, sans considération des actifs affectés.
– Une limitation d'usage objectivement légitime. – Cette obligation d'usage non professionnel peut paraître légitime dans la mesure où la protection des biens ne s'applique qu'à l'égard des créanciers professionnels. Permettre de protéger les biens à l'usage professionnel reviendrait alors à priver lesdits créanciers de ces actifs… qu'ils financent pourtant. Cela pourrait, d'une part, paraître parfaitement incohérent voire injuste et, d'autre part, cela limiterait de facto de manière considérable l'accès et la distribution des crédits immobiliers aux professionnels.
Contre qui/quoi l'immeuble sera-t-il protégé ?
– Une question d'identité. – Le principe de la déclaration est de soustraire l'actif immobilier aux créances professionnelles, c'est-à-dire celles qui ont pris naissance du fait de l'activité professionnelle de l'entrepreneur, excluant de fait ses créanciers personnels. Elle exclut aussi les créanciers au bénéfice desquels le déclarant a renoncé à ce dispositif protecteur, les plaçant ainsi dans une situation tout à fait privilégiée comparativement à ceux qui ne bénéficieraient pas de cette renonciation.
– Une question de datation. – Sur cette base, se pose d'abord une question chronologique.
L'insaisissabilité légale de la résidence principale, qui ne nécessite pas d'acte notarié, et donc pas d'inscription auprès du service de la publicité foncière, a été conçue pour annihiler les problématiques de date. Deux situations peuvent se présenter :
- si l'entrepreneur était déjà installé avant le 8 août 2015, l'ensemble des créances postérieures seront concernées ;
- si l'entrepreneur a créé son entreprise postérieurement à cette date, l'ensemble de ses créances professionnelles seront concernées.
En ce qui concerne l'insaisissabilité volontaire (hors résidence principale, donc par acte notarié), les biens seront soustraits au recouvrement des créances nées après la publication de la déclaration. Il y a donc lieu de comparer le fait générateur de la créance (équivalent à la naissance de celle-ci) et la date de dépôt régulier
de la déclaration auprès du service de publicité foncière par les soins du notaire (et non la date de l'acte, ni plus la date d'inscription de la formalité ou de retour de celle-ci).
– Plusieurs causes de cessation de la protection. – L'issue de la protection peut consister en plusieurs types d'événements : la vente de l'actif sans remploi dans les conditions prévues par le texte, la renonciation (globale, ou au profit d'un ou plusieurs créanciers déterminés), la licitation de l'immeuble indivis au profit d'un autre indivisaire, le décès, mais aussi la cessation d'activité (totale ou résultant d'une mise en société), ou le changement de résidence principale sans vente de celle qui été protégée.
À ce dernier titre, l'attention du notaire sera fondamentale en cas d'acquisition d'un bien par un entrepreneur individuel : ce bien constituera-t-il sa résidence principale ?
Dans l'affirmative, a-t-il vendu sa précédente résidence principale ? Si tel n'est pas le cas, ne faut-il pas déclarer cette dernière volontairement insaisissable dans la mesure où elle ne bénéficiera plus de l'insaisissabilité de plein droit ?
Dans la négative, et si le bien n'est pas affecté à son usage professionnel, il sera impératif de le déclarer insaisissable.
Les conditions tenant à l'activité
L'activité doit être exercée de façon professionnelle. En effet, la déclaration d'insaisissabilité doit être mentionnée au registre d'immatriculation.
La première conséquence est donc que l'entrepreneur individuel doit être immatriculé sur un registre de publicité légale.
Les conditions relatives aux biens
– Les biens concernés. – Depuis la loi du 4 août 2008, l'insaisissabilité peut concerner tous les biens fonciers bâtis et non bâtis appartenant à l'entrepreneur individuel et non affectés à l'usage professionnel.
Les parts de sociétés immobilières ou à prépondérance immobilière ne sont donc pas concernées, sauf s'il s'agit d'une société civile d'attribution.
Pour ce qui concerne la résidence principale, qui bénéficie de droit de l'insaisissabilité, la loi n'a pas défini ce qu'il faut entendre par résidence principale. Dans le silence des textes, nous en reviendrons à une définition fiscale.
Par contre, si un immeuble n'est que partiellement occupé à titre de résidence principale, c'est cette seule partie qui pourra faire l'objet de l'insaisissabilité de droit ; le surplus devra faire l'objet d'une insaisissabilité formelle, sous réserve qu'elle ne soit pas affectée à l'activité professionnelle.
Des droits spécifiques sur l'immeuble sont également éligibles au dispositif de l'insaisissabilité, notamment un droit d'usufruit, un droit de nue-propriété ou bien enfin un droit à un bail emphytéotique.
La formalisation de la déclaration d'insaisissabilité
– S'agissant de droits immobiliers. – La forme notariée est exigée par l'article L. 526-2 du Code de commerce à peine de nullité lorsque nous ne sommes pas en présence de la résidence principale de l'entrepreneur.
La plupart du temps, la déclaration d'insaisissabilité sera un acte seul à part entière, mais rien n'interdit de faire une déclaration d'insaisissabilité à l'occasion d'une acquisition, d'un acte de partage ou d'une donation.
Comme en matière d'affectation pour l'EIRL, si l'immeuble n'est que partiellement déclaré insaisissable, un état descriptif de division devra être préalablement établi.
Les effets de la déclaration d'insaisissabilité
– Les effets. – De façon assez logique, la déclaration d'insaisissabilité « n'a d'effet qu'à l'égard des créanciers dont les droits naissent postérieurement à la publication ».
Il y a donc deux dates à analyser.
En premier lieu, la date à laquelle naît la créance n'est pas la date à laquelle elle est exécutoire. Pour définir cette date, il faut s'en remettre au droit des contrats et aux règles de la date certaine.
Si la créance est assortie d'une sûreté, ce n'est pas la date de la sûreté qui doit être prise en compte, mais bien la date de la créance.
En second lieu, la date de publication doit se comprendre comme la date à laquelle l'acte de déclaration d'insaisissabilité est déposé au fichier immobilier, et non la date à laquelle le service procède à la formalité.
Origine de la créance
– Les créanciers professionnels. – Seuls les créanciers professionnels seront concernés par l'insaisissabilité, qu'elle soit automatique ou qu'elle résulte d'une déclaration formelle.
La déclaration d'insaisissabilité au regard d'une procédure collective
– Déclaration d'insaisissabilité et procédure collective. – Aucun texte ne prévoit les conséquences d'une déclaration d'insaisissabilité en présence d'une procédure collective !
C'est donc la jurisprudence et la doctrine qui ont apporté des débuts de réponse, même si toutes les questions ne sont pas aujourd'hui tranchées.
– La période suspecte. – En ce qui concerne tout d'abord la déclaration d'insaisissabilité conclue pendant la période suspecte, l'ordonnance no 2014-326 du 12 mars 2014 l'a insérée dans la liste des actes visés par les nullités de la période suspecte des articles L. 632-1 et suivants du Code de commerce.
– Opposabilité à la procédure collective. – Pour ce qui est de l'opposabilité ou de l'inopposabilité de la déclaration d'insaisissabilité à la procédure collective, l'enjeu était de savoir si une telle déclaration était opposable à l'ensemble des créanciers ou bien si les créanciers auxquels la déclaration n'était pas opposable pouvaient faire vendre le bien et se répartir le prix. Cette question, qui a longtemps divisé la doctrine, est aujourd'hui tranchée par la jurisprudence qui a connu des revirements.
La Cour de cassation a considéré que le liquidateur judiciaire n'avait pas le pouvoir de faire vendre un bien visé par une déclaration d'insaisissabilité dès lors que certains créanciers de la procédure collective sont privés de ce droit. Mais, par une décision du 15 novembre 2016, la Cour de cassation a indiqué que rien n'empêche le liquidateur de contester la déclaration d'insaisissabilité non mentionnée au registre de publicité légale auquel est immatriculé l'entrepreneur individuel.
Dans ce cas, se pose la question du sort du prix de vente de cet immeuble : doit-il bénéficier à tous les créanciers ou aux seuls créanciers pour lesquels la déclaration d'insaisissabilité est inopposable ? La Cour de cassation n'a pas encore eu l'opportunité de se prononcer sur la question, mais une cour d'appel a considéré que le prix de vente ne revenait qu'aux seuls créanciers auxquels la déclaration d'insaisissabilité était inopposable.
Enfin, précisons que dans une décision du 14 mars 2018, la Cour de cassation a indiqué que le bien indivis ayant fait l'objet d'une déclaration d'insaisissabilité régulièrement publiée avant le jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire du déclarant ne peut être vendu à la demande du liquidateur judiciaire, car ce dernier n'a pas qualité pour agir en partage et en licitation de l'immeuble indivis.
Régime juridique de la déclaration d’insaisissabilité
Voir JurisClasseur Entreprise Individuelle, Fasc. 952.