La cession de cryptoactifs

La cession de cryptoactifs

Le particulier, détenteur d'actifs numériques, peut être amené à les céder soit en échange de nouveaux actifs numériques, soit en contrepartie d'un prix payé au moyen d'une monnaie ayant un cours légal.
L'engouement des Français pour les actifs numériques n'a d'ailleurs pas échappé au législateur qui, dans le cadre de la loi de finances pour 2019 L. fin. no 2018-1317, 28 déc. 2018, art. 41 : JO 30 déc. 2018. , a mis en place un régime fiscal codifié sous un nouvel article 150 VH bis du Code général des impôts, afin d'imposer les plus-values réalisées lors d'une cession d'actifs numériques à titre onéreux (§ I) . Toutefois, le nouveau régime mis en place présente un risque d'évasion fiscale (§ II) .

Régime fiscal des plus-values sur cession d'actifs numériques et nouvelles obligations déclaratives

Préalablement à la loi du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, il n'existait pas de régime fiscal spécifique.
Les gains liés à la cession d'actifs numériques pouvaient alors être soumis à l'un des trois régimes d'imposition suivants :
  • lorsque les gains étaient réalisés à titre occasionnel et qu'ils n'étaient pas constitutifs de revenus issus d'une activité de minage, s'appliquait le régime des plus-values de cessions de biens meubles (CGI, art. 150 UV). Le taux d'imposition était de 19 % auquel s'ajoutaient 17,2 % au titre des prélèvements sociaux, soit une imposition globale de 36,2 % ;
  • lorsque les gains étaient issus d'une activité de minage occasionnelle, s'appliquait le régime des bénéfices non commerciaux (BNC) (CGI, art. 92) ;
  • lorsque les gains provenaient de la cession à titre habituel d'actifs numériques acquis en vue de leur revente dans des conditions caractérisant l'exercice d'une profession commerciale (CGI, art. 34), s'appliquait le régime des bénéfices industriels et commerciaux (BIC).
La loi du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, en son article 41, a précisé le régime fiscal des cessions d'actifs numériques en introduisant un nouvel article 150 VH bis dans le Code général des impôts. L'instauration de ce régime fiscal spécifique aux actifs numériques a été complétée par un décret du 27 juin 2019 D. no 2019-656, 27 juin 2019 : JO 28 juin 2019. relatif aux obligations déclaratives incombant aux redevables réalisant de telles cessions.
La délimitation du champ d'application de ce régime (A) permettra de déterminer l'existence d'une éventuelle plus-value. Dans l'affirmative, la loi a défini de manière précise les modalités d'imposition (B) .

Le champ d'application du régime fiscal des plus-values sur cession d'actifs numériques

À compter du 1er janvier 2019, les plus-values réalisées lors de la cession d'actifs numériques ou de droits s'y rapportant relèvent du régime d'imposition des plus-values des particuliers prévu à l'article 150 VH bis du Code général des impôts.
Le champ d'application de ce nouveau régime est toutefois limité à certains actifs, certaines personnes et certaines opérations.
Les actifs imposables sont les actifs numériques définis par l'article L. 54-10-1 du Code monétaire et financier.
Ils comprennent, aux termes de ce texte :
  • « les jetons, à l'exclusion de ceux répondant aux caractéristiques des instruments financiers mentionnés à l'article L. 211-1 et des bons de caisse mentionnés à l'article L. 223-1 ». Sont ainsi concernés les jetons définis par l'article L. 552-2 du Code monétaire et financier comme « tout bien incorporel représentant, sous forme numérique, un ou plusieurs droits, pouvant être émis, inscrits, conservés ou transférésau moyen d'un dispositif d'enregistrement électronique partagé permettant d'identifier, directement ou indirectement, le propriétaire dudit bien ».
  • « toute représentation numérique d'une valeur qui n'est pas émise ou garantie par une banque centrale ou par une autorité publique, qui n'est pas nécessairement attachée à une monnaie ayant cours légal et qui ne possède pas le statut juridique d'une monnaie, mais qui est acceptée par des personnes physiques ou morales comme un moyen d'échange et qui peut être transférée, stockée ou échangée électroniquement ». Ces actifs numériques sont communément dénommés cryptomonnaies.
La loi n'a donné aucune précision pour les jetons non représentatifs d'actifs financiers, tels que des biens immeubles ou des biens corporels ou incorporels (droit de propriété intellectuelle).
Les cessions de tels jetons devront connaître de la fiscalité applicable à la catégorie à laquelle les droits qu'ils confèrent conduisent à les assimiler. Ainsi, dans la mesure où les jetons numériques sont relégués au rang de simple instrumentum, leur cession relève du régime applicable au bien représenté (plus-value mobilière, plus-value immobilière…) et non du dispositif propre aux actifs numériques.
Les personnes imposables sont les particuliers qui réalisent des plus-values dans le cadre de la gestion de leur patrimoine privé (CGI, art. 150 VH bis I">Lien).
Ce nouveau régime ne s'applique donc pas en présence de profits réalisés dans le cadre d'une activité professionnelle.
La notion de foyer fiscal est retenue pour l'application de ce nouvel article. Ainsi seront prises en compte les cessions réalisées par le contribuable lui-même ou les époux soumis à une imposition commune (ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité), mais également celles réalisées par les personnes considérées comme étant à charge pour le calcul de l'impôt sur le revenu, y compris les personnes rattachées au foyer fiscal en application de l'article 6, 3, 2odu Code général des impôts (enfants majeurs âgés de moins de vingt et un ans ou de moins de vingt-cinq ans s'ils sont étudiants, enfants mariés remplissant les mêmes conditions d'âge et leurs conjoints) BOI-RPPM-PVBMC-30-10, no 10. .
Ce régime sera également applicable en cas de cessions réalisées à titre occasionnel par personnes interposées (CGI, art. 150 VH bis, I). Sont considérés comme des personnes interposées les sociétés ou groupements exerçant une activité civile telle que l'acquisition et la gestion d'un portefeuille d'actifs numériques et de droits s'y rapportant qui sont soumis au régime d'imposition des sociétés de personnes visées à l'article 8 du Code général des impôts et qui déterminent le montant des gains de cession des actifs numériques selon les règles prévues pour les particuliers conformément au II de l'article 238 bis K du Code général des impôts (CGI, art. 238 bis K">Lien) BOI préc, nos 20 et 30. .
Sont donc exclues du nouveau dispositif fiscal les sociétés et autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés.
Sont également exclues les sociétés de personnes ayant un objet industriel, commercial, artisanal, agricole ou non commercial. Les plus-values réalisées par de telles sociétés relèvent alors du régime des plus-values professionnelles, que les cessions d'actifs soient réalisées à titre habituel ou occasionnel.
  • de monnaie ayant cours légal ;
  • de l'échange d'un bien autre qu'un actif numérique ;
  • de l'échange avec soulte d'un actif numérique ;
  • d'un service.
Dès lors que les cessions impliquent un avantage en contrepartie du transfert de propriété des actifs numériques, peu importe la nature de cette contrepartie, qu'elle soit monétaire (prix en euros) ou en nature (biens ou services), la plus-value dégagée sera alors imposée.
Ainsi, utiliser ses actifs numériques comme une monnaie pour acquérir un bien va donc conduire le contribuable à déclarer une plus-value (ou une moins-value le cas échéant), calculée en fonction de la valeur du bien acquis.
Les opérations d'échange sans soulte entre actifs numériques ou droits s'y rapportant bénéficient d'un sursis d'imposition (CGI, art. 150 VH bis, II, A).
Enfin, la loi exclut totalement de ce régime d'imposition les cessions d'actifs numériques dont la somme des prix n'excède pas 305 € au cours d'une année d'imposition (CGI, art. 150 VH bis, II, B).
Les opérations imposables BOI préc, no 70. sont les cessions à titre onéreux d'actifs numériques ou de droits s'y rapportant, en contrepartie :

L'imposition de la plus-value

Au cours d'une année d'imposition, est imposée l'éventuelle plus-value globale réalisée au titre des cessions d'actifs numériques contre de la monnaie ayant cours légal ou contre l'obtention de tout service, bien ou avantage.
Le III de l'article 150 VH bis du Code général des impôts (CGI, art. 150 VH bis, III">Lien) détermine le mode de calcul de la plus-value brute.
La plus ou moins-value brute est égale à la différence entre, d'une part, le prix de cession et, d'autre part, le produit du prix total d'acquisition de l'ensemble du portefeuille d'actifs numériques par le quotient du prix de cession sur la valeur globale de ce portefeuille.
Plus ou moins-value brute = Prix de cession – [Prix total d'acquisition × Prix de cession / Valeur globale du portefeuille].
Le prix de cession est constitué du montant reçu en monnaie ayant cours légal ou de la valeur du bien acquis (autre qu'un actif numérique ou droit s'y rapportant remis à l'échange sans soulte) ou du service fourni en contrepartie des actifs numériques cédés.
Dans l'hypothèse où une soulte est versée, en sus de l'échange avec un actif numérique, le prix de cession comprend la valeur de l'actif numérique et la soulte reçue.
Deux charges diminutives permettront de minorer le prix de cession :
  • sur justificatifs, les frais supportés à l'occasion de la cession (frais de transaction perçus par les plateformes ou les « mineurs ») ;
  • la soulte versée par le cédant.
Le prix total d'acquisition du portefeuille d'actifs numériques est égal à la somme :
  • des prix effectivement acquittés en monnaie ayant cours légal à l'occasion de l'ensemble des acquisitions d'actifs numériques ou de droits s'y rapportant réalisées avant la cession ;
  • et de la valeur de chacun des services et des biens (autres que des actifs numériques ou droits s'y rapportant remis lors d'échanges ayant bénéficié du sursis d'imposition prévu au A du II de l'article 150 VH bis du Code général des impôts), comprenant le cas échéant les soultes versées, remis en contrepartie d'actifs numériques ou de droits s'y rapportant avant cette même cession.
Comme en matière de calcul de plus-value immobilière, en cas d'acquisition à titre gratuit, ce prix d'acquisition à retenir est la valeur prise en compte pour la détermination des droits de mutation à titre gratuit.
La valeur globale du portefeuille d'actifs numériques est égale à la somme des valeurs, évaluées au moment de la cession imposable, des différents actifs numériques et droits s'y rapportant détenus par le cédant et les différents membres du foyer fiscal avant de procéder à la cession.
Il est admis, pour la détermination de la valeur globale de son portefeuille au moment de la cession imposable, que le contribuable use de dispositifs communément utilisés de valorisation tels que des sites internet proposant des historiques de cotation moyenne journalière sur les principales plateformes d'échange.
Sur la plus-value brute ainsi obtenue, il sera possible d'imputer des moins-values brutes de même nature réalisées au cours de la même année par le redevable (foyer fiscal).
Le contribuable peut donc compenser ses moins-values sur actifs numériques de l'année avec ses plus-values sur actifs numériques, afin de dégager une plus ou moins-value globale sur l'année. Toutefois, il ne pourra pas imputer l'éventuelle moins-value globale ainsi dégagée, ni sur les plus-values de cessions de biens d'une autre nature (telle une plus-value sur actions), ni sur des futures plus-values de cessions sur actifs numériques.
Alors que pour les valeurs mobilières traditionnelles, comme les actions, on calcule la plus ou moins-value par simple différence entre le solde en début et fin d'année, en matière d'actifs numériques, le calcul de la plus ou moins-value doit être réalisé pour chaque cession.
La conséquence de ce calcul systématique est qu'en cas de cessions successives, il convient de minorer le prix total d'acquisition de la fraction de capital initial déduite lors de la précédente cession.
À la fin de l'année, il y a donc lieu d'additionner l'ensemble des plus-values et moins-values pour déterminer la plus ou moins-value globale.
La plus-value nette ainsi dégagée est alors soumise à l'impôt sur le revenu au taux forfaitaire de 12,8 % (CGI, art. 200 C">Lien) ainsi qu'aux prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine au taux global de 17,2 %.
La plus-value concernée est donc imposée à un taux global de 30 %.
Aucune option n'est instituée pour l'imposition des revenus selon le barème progressif de l'impôt sur le revenu.

Calcul de plus-value

En janvier N, M. X acquiert 100 bitcoins d'une valeur globale de 1 200 €.
Dans le courant de l'année, il réalise trois cessions :
  • En février N, il cède 20 bitcoins pour 400 €.La valeur globale de son portefeuille est de 1 500 €.La plus plus-value brute alors réalisée = Prix de cession (400) – [Prix total d'acquisition (1 200 €) × Prix de cession (400) / Valeur globale du portefeuille (1 500)] = 400 – 320 = 80 €.
  • ŸPuis en mars N, il achète un smartphone d'une valeur de 400 € au moyen de bitcoins.La valeur globale de son portefeuille est de 1 600 €.La plus plus-value brute alors réalisée = Prix de cession (400) – [Prix total d'acquisition sous déduction fraction capital initial (1 200 – 320) × Prix de cession (400) / Valeur globale du portefeuille (1 600)] = 400 – 220 = 180 €.
  • ŸEt, en mai N, il échange 10 bitcoins contre 5 éthers d'une valeur globale de 250 € et une somme de 350 €.La valeur globale de son portefeuille est de 1 800 €.La plus plus-value brute alors réalisée = Prix de cession (600) – [Prix total d'acquisition sous déduction fraction capital initial (1 200 – 320 – 220) × Prix de cession (600) / Valeur globale du portefeuille (1 800)] = 600 – 220 = 380 €.
Dans notre exemple, le contribuable devra déclarer, pour l'année N, une plus-value globale de : 80 + 180 + 380 = 640 €.
Il sera imposé au taux global de 30 %, soit une imposition de 192 €.
N.B. : Les valeurs ici mentionnées sont irréalistes compte tenu de la valeur actuelle des cryptomonnaies, mais elles ont été retenues pour faciliter la compréhension de l'exemple.
– Modalités de déclaration et de paiement. – Une fois le montant de l'impôt déterminé, le décret no 2019-656 du 27 juin 2019 précise les modalités de déclaration et de paiement. Ainsi, depuis 2020, il y a lieu de déclarer, pour la première fois dans les revenus de l'année 2019, les gains réalisés en cas de cession d'actifs numériques.
Les redevables doivent porter sur la déclaration annuelle prévue à l'article 170 du Code général des impôts le montant global de la plus ou moins-value réalisée au titre des cessions imposables de l'année. Ils joignent à cette déclaration une annexe conforme à un modèle établi par l'administration Annexe no 2086, Cerfa no 16043*01. , sur laquelle ils mentionnent et évaluent l'ensemble des plus ou moins-values réalisées à l'occasion de chacune des cessions imposables effectuées au cours de l'année ou les prix de chacune des cessions exonérées en application du B du II de l'article 150 VH bis du Code général des impôts.

Le risque d'évasion fiscale

Même si le législateur a déterminé précisément les modalités d'imposition, en pratique le risque d'évasion fiscale demeure présent.
En effet l'administration se heurte à de nombreuses difficultés dans le contrôle du respect des obligations déclaratives (A) . De plus, en l'état actuel des dispositions législatives et des commentaires de l'administration, le contribuable dispose d'outils juridiques permettant l'optimisation de ces transmissions (B) .

Difficultés dans le contrôle du respect des obligations déclaratives

La loi no 2018-1317 du 28 décembre 2018 a modifié l'article 1649 bis C du Code général des impôts (CGI, art. 1649 bis C">Lien) en créant l'obligation pour les personnes physiques, les associations, les sociétés n'ayant pas la forme commerciale, domiciliées ou établies en France, de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes d'actifs numériques mentionnés à l'article 150 VH bis du Code général des impôts ouverts, détenus, utilisés ou clos auprès d'entreprises, personnes morales, institutions ou organismes établis à l'étranger.
Le non-respect de cette obligation entraîne des sanctions financières (amende de 750 € par compte non déclaré ou de 125 € par omission ou inexactitude, dans la limite de 10 000 € par déclaration. Quand la valeur vénale dudit compte est supérieure à 50 000 € à un moment quelconque de l'année concernée, les montants des amendes sont portés à 1 500 € par compte non déclaré et 250 € par omission ou inexactitude).
L'administration entend donc exercer son pouvoir de contrôle sur la détention d'actifs numériques par le contribuable. Les mesures prises sont toutefois en pratique inefficaces en raison des difficultés liées à l'identification des détenteurs d'actifs numériques et à l'exercice du droit de communication par l'administration fiscale pour de tels actifs.
– Difficultés quant à l'identification. – Bien que les transactions de cryptomonnaies fassent l'objet d'un enregistrement sur une blockchain dont l'historique est librement consultable, celle-ci ne fait pas apparaître l'identité réelle des individus mais leur adresse, suite de chiffres et de lettres sans signification. Le fonctionnement même de la blockchain ne se prête donc pas à une identification directe des détenteurs d'actifs numériques.
De plus, il existe des cryptomonnaies issues de blockchains traçables et d'autres de blockchains intraçables.
Ces niveaux variables d'anonymat et de traçabilité vont compliquer la tâche de l'administration fiscale pour faire respecter et sanctionner, le cas échéant, cette obligation de déclaration des comptes détenus à l'étranger.
– Difficultés quant à l'exercice du droit de communication. – La loi relative à la lutte contre la fraude a aménagé, à compter du 1er janvier 2019, le droit de communication de l'administration fiscale auprès des opérateurs de communications électroniques, des fournisseurs d'accès à internet et des fournisseurs d'hébergement L. no 2018-898, 23 oct. 2018, art. 15 ; LPF, art. L. 96 G. .
Le droit de communication de l'administration fiscale auprès de ces opérateurs est désormais limité à la recherche et à la constatation des infractions les plus graves (exercice d'une activité occulte ou illicite, manquement aux obligations déclaratives relatives à des avoirs étrangers, infractions aux règles de facturation, etc.).
Cependant, la détention des actifs numériques s'effectue le plus souvent par l'intermédiaire de plateformes établies à l'étranger et à l'encontre desquelles l'administration fiscale n'est pas en mesure d'exercer son droit de communication.

Les optimisations en cas de plus-value

– La donation avant cession. – Comme mentionné ci-dessus V. supra, no . , le prix d'acquisition pour déterminer la plus-value brute est, en cas d'acquisition à titre gratuit, la valeur qui a servi de base au calcul des droits de mutation.
À l'instar de tout autre actif mobilier ou immobilier, la donation d'actifs numériques n'est pas un fait générateur de plus-value. Il est possible par conséquent d'effectuer une donation avant cession afin d'éviter une éventuelle taxation au titre des plus-values sur cession d'actifs numériques P.-H. Conil, Le notaire ou l'heureuse rencontre du notariat traditionnel et des nouvelles technologies : JCP N 2018, no 11, act. 302. .
Afin de ne pas encourir la sanction d'abus de droit, il est nécessaire que la donation préalable d'actifs numériques ne soit pas fictive et comporte des effets civils et patrimoniaux.
Il est utile de noter à ce sujet que le Comité consultatif pour la répression des abus de droit et la jurisprudence considèrent que lorsque la donation est réelle et antérieure à la cession, qu'elle participe d'une réelle intention libérale et que les opérations successives ne conduisent pas à une réappropriation du prix par le donateur, l'administration n'est pas fondée à mettre en œuvre la procédure de répression des abus de droit CE, 28 nov. 2014, no 359911. – CE, 9 avr. 2014, no 353822. – CAA Lyon, 7 nov. 2013, no 12LY02321. .
De plus, la brièveté du délai de revente semble indifférente Un avis favorable du Comité de l'abus de droit fiscal a été émis dans le cas d'une donation précédant la vente de seulement deux jours, sans que cette circonstance ne soit de nature à remettre en cause l'intention du donateur d'avoir voulu donner les titres et non pas les fonds représentatifs du prix de cession (avis no 2004-40, 2005-9, 2005-21). .
Ainsi, dans la mesure où ces précautions sont prises, il peut être opportun pour le détenteur d'actifs numériques de procéder à une donation préalablement à la cession afin d'optimiser la fiscalité globale de l'opération.
Toutefois, il conviendra également de rester vigilant au regard de la nouvelle procédure d'abus de droit fiscal instituée par la loi no 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 LPF, art. L. 64 A. .
Cette loi a introduit l'abus de droit pour motif principalement fiscal.
Mais la doctrine P. Fernoux, Revisitons le passé à l'aune du but principalement fiscal : Dr. fisc. 2019, no 22, 279. confirme que la réforme de l'abus de droit fiscal n'aurait pas d'incidence sur les donations avant cession. Seule la première branche de l'abus de droit, la fictivité est susceptible d'impacter les donations avant cession.
Cependant l'abus de droit pour motif principalement fiscal ne s'appliquera qu'aux rectifications notifiées à compter du 1er janvier 2021 portant sur des actes passés ou réalisés à compter du 1er janvier 2020. Plusieurs années vont donc s'écouler avant que le Conseil constitutionnel n'ait l'occasion de se pencher sur l'abus de droit pour motif principalement fiscal à l'occasion d'une question prioritaire de constitutionnalité. D'ici là, les contribuables et leurs conseils devront composer avec « l'obscure clarté » des textes fiscaux et l'insécurité fiscale inhérente à l'abus de droit pour motif principalement fiscal.
L'optimisation fiscale recherchée sera cependant atténuée par les modalités de calcul des plus-values qui tiennent compte de la plus-value latente de l'ensemble du portefeuille V. supra, no . .
Dans la mesure où le contribuable détient plusieurs types de cryptomonnaies et qu'il n'en cède que certaines, le calcul de la plus-value sera influencé par la valeur globale du portefeuille.
En pratique, conserver des cryptomonnaies qui sont restées stables et donner celles qui ont pris de la valeur ne sera pas la meilleure marche à suivre.
L'idéal serait de donner l'ensemble de son portefeuille pour arriver au résultat espéré Pour un exemple chiffré, V. R. Vabres, La donation de cryptomonnaies : JCP N 2019, no 47, 1313. .