Alors que chacun entrevoit aisément ce qu'est la forêt, il n'en existe pas de définition légale. Curieusement d'ailleurs, l'origine du mot forêt est elle-même sujette à discussion
1489327927621. « Grande étendue de terrain couverte d'arbres ; ensemble de grands arbres qui occupent, qui couvrent cette étendue. » Cette définition du dictionnaire Larousse correspond au sens commun du mot. Les situations particulières nécessitent néanmoins d'être précisées : terrains déboisés, pépinières, routes forestières, terrains sous lignes électriques à haute tension, étangs, etc. Les développements suivants traitent de la définition des « bois » et « forêts » sans distinction. En effet, le livre premier du Code forestier est intitulé « Dispositions communes à tous les bois et forêts ». En pratique, un bois est un territoire forestier plus petit qu'une forêt
1491125316335. La définition de la forêt invite également à s'interroger sur la destination forestière d'un territoire : vierge d'arbres, il est susceptible d'être assimilé sous certaines conditions à une forêt.
Les définitions de la forêt
Les définitions de la forêt
Les définitions internationales
– L'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture. – Les définitions suivantes résultent d'un rapport
1492419952702établi par l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO)
1492420035242.
- Forêts : terres occupant une superficie de plus de cinquante ares avec des arbres atteignant une hauteur supérieure à cinq mètres et un couvert arboré de plus de 10 %, ou avec des arbres capables d'atteindre ces seuils in situ. Les terres à vocation agricole ou urbaine prédominante sont exclues.Les deux critères essentiels sont la surface couverte et la hauteur des arbres. Cette définition inclut les zones couvertes d'arbres jeunes devant atteindre un couvert arboré de 10 % et une hauteur de cinq mètres.Par ailleurs, la forêt est déterminée à la fois par la présence d'arbres et l'absence d'autres utilisations prédominantes.Cette définition inclut également :En revanche, les peuplements d'arbres dans les systèmes de production agricole tels que les plantations d'arbres fruitiers, les plantations de palmiers à huile et les systèmes agroforestiers sont exclus.
- Autres terres boisées : terres n'entrant pas dans la catégorie « forêt » et couvrant une superficie de plus de cinquante ares avec des arbres atteignant une hauteur supérieure à cinq mètres et un couvert arboré de 5 à 10 %, ou comprenant des arbres capables d'atteindre ces seuils in situ, ou un couvert mixte d'arbustes, arbrisseaux et d'arbres supérieur à 10 %. Les terres à vocation agricole ou urbaine prédominante sont exclues.
- Autres terres : toute terre n'entrant pas dans la catégorie « forêt » ou « autre terre boisée » : les terres à vocation agricole, les prairies et les pâturages, les zones construites, les terres dénudées, les terres couvertes de glace permanente, etc.
- Eaux continentales : superficie occupée par les grands fleuves, lacs et réservoirs.
Ces définitions ont le mérite d'établir une synthèse applicable à l'ensemble des forêts de notre planète. D'autres organismes internationaux tels que la Commission économique des Nations Unies pour l'Europe (UNECE)
1489342721301ou la Conférence ministérielle sur la protection des forêts en Europe
1489342889779utilisent des définitions similaires.
– La Commission européenne. – La Commission européenne, consciente de la difficulté de l'exercice, considère que les définitions de la FAO constituent une bonne base permettant de mener les études sur la protection de la forêt
1489340023180. Les définitions utilisées par la Commission européenne sont toutefois moins développées que celles de la FAO :
- Forêt : terres ayant un couvert arboré (ou une densité de peuplement) supérieur à 10 % et une superficie supérieure à cinquante ares, où les arbres sont capables d'atteindre une hauteur minimale de cinq mètres à maturité in situ.
- Autres terres boisées : terres ayant soit un couvert arboré (ou une densité de peuplement) de 5 à 10 % d'arbres capables d'atteindre une hauteur d'au moins cinq mètres à maturité in situ, soit un couvert arboré (ou une densité de peuplement) de plus de 10 % d'arbres d'une hauteur inférieure à cinq mètres à maturité in situ et d'arbustes et formations arbustives.
Les définitions françaises
– Le Code forestier. – Le Code forestier ne donne pas de définition précise de la forêt. Des dispositions éparses permettent toutefois d'en définir les contours. Ainsi, les plantations d'essences forestières
1489344527095, les reboisements et les terrains à boiser du fait d'une obligation légale ou conventionnelle sont considérés comme des bois et forêts (C. for., art. L. 111-2). La liste des essences forestières figure sur le portail de l'inventaire forestier géré par l'IGN
1489345194032. Les dispositions du Code forestier relatives à la défense et à la lutte contre les incendies de forêt et les dispositions pénales s'y rapportant (C. for., art. L. 111-2, al. 2) s'appliquent aux landes
1489949240994, maquis
1489949398479et garrigues
1489949518966. Néanmoins, les opérations de remise en valeur des terres occupées par les garrigues, landes et maquis ne constituent pas des défrichements (C. for., art. L. 341-2). Enfin, les dunes sont également soumises à certaines dispositions du Code forestier relatives à la protection des forêts (C. for., art. L. 111-2, al. 3).
Le régime forestier s'applique aux forêts appartenant à l'État et aux collectivités publiques susceptibles d'aménagement, d'exploitation régulière ou de reconstitution (C. for., art. L. 211-1, I). La forêt privée relève quant à elle de la gestion durable par simple application d'un seuil de surface fixé à vingt-cinq hectares (C. for., art. L. 312-1)
1489351471869. Ainsi, les dispositions du Code forestier ne renvoient pas à une définition générale de la forêt. Leur mise en œuvre répond aux finalités propres à chaque texte.
– L'Institut national de l'information géographique et forestière. – L'Institut national de l'information géographique et forestière est chargé de l'inventaire permanent des ressources nationales forestières
1492432032888. Dans le cadre de cette mission, il s'appuie sur la définition suivante : « un territoire occupant une superficie d'au moins cinquante ares avec des arbres capables d'atteindre une hauteur supérieure à cinq mètres à maturité in situ, un couvert arboré de plus de 10 % et une largeur moyenne d'au moins vingt mètres ». Les sites momentanément déboisés ou en régénération sont classés comme forêt même si leur couvert est inférieur à 10 % au moment de l'inventaire. Elle n'inclut pas les terrains dont l'utilisation prédominante du sol est agricole ou urbaine. Les peupleraies (taux de couvert libre relatif des peupliers cultivés supérieur à 75 %) sont considérées comme des forêts. Cette définition n'a toutefois aucune portée juridique.
– Une définition issue des textes relatifs au défrichement. – Le ministère de l'Agriculture a défini les bois et forêts dans une circulaire relative à la taxe sur le défrichement
1492422007035, abrogée depuis.
« Formations végétales comprenant des tiges d'arbres d'essences forestières dont les cimes, si elles arrivaient simultanément à maturité, couvriraient la plus grande partie du terrain occupé par la formation, que celle-ci soit au moment de l'enquête à l'état de semis
1489937360831, de rejets sur souches
1489937139493, de fourrés
1489937264781, de gaulis
1489937562543, de perchis
1489937707732ou de futaies
1489938313440. Il résulte de l'application constante par les tribunaux, des articles 157 et suivants du Code forestier, que les taillis
1489938418653ou futaies sur souches et les peupleraies sont des peuplements forestiers soumis par conséquent à la taxe de défrichement. »
Cette définition, issue d'une ancienne circulaire, n'a pas de portée légale. Elle fournit toutefois des précisions utiles permettant encore aujourd'hui d'appréhender la notion de forêt.
– L'instruction technique du 29 août 2017. – L'instruction technique du 29 août 2017
1490455606430présente les règles applicables en matière de défrichement, notamment suite à la loi « Biodiversité »
1510826062281. Elle permet de mieux cerner la notion de bois et forêts en droit positif.
- Les anciens terrains agricoles et les arbres fruitiers. Les anciens terrains de culture ou de pacage envahis par une végétation spontanée 1492422449958, les garrigues, landes et maquis, n'ont pas de vocation forestière (C. for., art. L. 341-2, 1°). Cette exclusion concerne également les noyeraies, oliveraies, plantations de chênes truffiers et vergers à châtaignes, d'eucalyptus pour leur feuillage, de noisetiers à fruits, d'amandiers et les plantations d'arbres fruitiers (C. for., art. L. 341-2, 2°).
- Les taillis à courte rotation. Les opérations portant sur les taillis à courte rotation normalement entretenus et exploités, implantés sur d'anciens sols agricoles depuis moins de trente ans, n'ont pas non plus de vocation forestière (C. for., art. L. 341-2, 3°).
- Les aménagements forestiers particuliers. La création d'équipements indispensables à la mise en valeur et à la protection des bois et forêts ne fait pas perdre la destination forestière à l'ensemble (C. for., art. L. 341-2, 4°) 1493446525414. Cette disposition concerne les routes forestières, chemins, allées, fossés, dépôts pour le bois, tours de guet, points d'eau, bandes pare-feu et coupures agricoles de protection de la forêt contre les incendies. Un simple pavillon de chasse ne fait pas non plus perdre la destination forestière au terrain.
- Les parcours acrobatiques. L'installation d'un parcours acrobatique en forêt (dans les arbres avec filins et repose-pieds) restant léger et démontable ne constitue pas une modification de la destination forestière du sol. Le raisonnement est le même pour les installations de paintball et de cabanes dans les arbres. En revanche, les aménagements récréatifs ou sportifs « lourds » ou encore les hébergements de plein air sont soumis à la législation sur le défrichement.
- Les peupleraies. Les peupleraies sont considérées comme des terrains forestiers. Le peuplier est une essence. Il ne s'agit ni d'une culture agricole annuelle ni d'une culture fruitière. L'objectif d'une peupleraie est la production de bois à titre principal.
- Les sapins de Noël. Les plantations de sapins de Noël ne sont pas considérées comme des peuplements forestiers. Toutefois, si la plantation a plus de trente ans et n'est plus exploitée, la parcelle est considérée comme un bois.
- L'élevage en forêt. L'exercice du pâturage en forêt n'est pas incompatible avec la destination forestière du fonds lorsqu'il se conforme aux conditions édictées par le Code forestier. La destination forestière est remise en cause si les animaux sont mis à paître dans les jeunes coupes ou si leur nombre est trop élevé par unité de surface. Par ailleurs, l'élevage de gibier en forêt ne doit pas mettre en danger le peuplement forestier.
– Les précisions issues de la jurisprudence. – Une forêt est naturellement composée d'arbres. La caractérisation de l'état boisé ou de la vocation forestière résulte d'une constatation de fait et non de droit. Elle est soumise à l'appréciation souveraine du juge
1489352517302. Un peuplement de plantes ligneuses1489938953180de petite taille comme les arbustes n'est pas une forêt. Une parcelle dont les arbres ont été récoltés est une parcelle forestière, même s'il s'agit d'essences résineuses ne produisant pas de rejet sur souches
1490449391164. Une parcelle dont les arbres ont disparu suite à un incendie ou à une tempête est également soumise au Code forestier
1490454053206. Une parcelle surplombée par une ligne électrique à haute tension ne comportant qu'un nombre limité de pins constitue un bois
1490450597439. À l'inverse, une haie n'est pas soumise au Code forestier
1490454356125. Le classement en nature de terrain boisé au cadastre ne produit aucun effet de droit s'agissant des dispositions du Code forestier
1490452766246. Néanmoins, cette jurisprudence est à nuancer depuis la création du droit de préférence des voisins lors de la vente de parcelles boisées. Ce dispositif repose en effet sur le classement cadastral des parcelles vendues
1505147284072.
Faut-il donner une définition juridique à la forêt ?
Le Code forestier ne fournit aucune définition juridique de la forêt et des terrains à vocation forestière. Cette situation a été rappelée par une réponse ministérielle récente
1491128590588. Le ministre renvoie l'appréciation du caractère forestier d'un territoire à l'administration chargée des forêts, sous contrôle du juge le cas échéant.
Certains auteurs considèrent qu'il serait malvenu de donner une définition juridique de la forêt
1490548551778. Ils estiment préférable de s'en tenir aux statuts (application du régime forestier) ou à des approches pragmatiques (surface supérieure à vingt-cinq hectares par exemple) plutôt que de chercher à définir une notion très protéiforme. Trouver une définition simple est certainement irréaliste. En revanche, certaines institutions donnent des définitions1491136776985 pouvant être reprises et adaptées à la forêt française. Le Code forestier gagnerait en cohérence si l'on donnait une définition légale de la forêt. Les cas particuliers seraient alors traités par voie d'exception
1491284478216. Depuis la création des droits de priorité en cas de vente de parcelles boisées au cadastre
1510831864350, la définition juridique de la forêt n'est plus simplement souhaitable, mais nécessaire. En effet, la référence au cadastre, certes source de simplicité pour la mise en œuvre de ces droits, recouvre imparfaitement la réalité des bois et forêts
1510839253362.