Les communes bénéficient d'un droit de préférence en cas de vente de parcelles boisées situées sur leur territoire (§ I) et, sous certaines conditions, d'un droit de préemption (§ II).
Les droits de priorité de la commune
Les droits de priorité de la commune
Le droit de préférence de la commune
Le droit de préférence des communes (C. for., art. L. 331-24) ressemble à celui des riverains, la commune n'étant toutefois pas tenue d'être propriétaire d'une parcelle boisée contiguë.
– Champ d'application – opérations concernées. – En cas de vente d'une propriété classée au cadastre en nature de bois et forêts d'une superficie inférieure à quatre hectares, la commune de situation du bien bénéficie d'un droit de préférence (C. for., art. L. 331-24). Ce droit de préférence s'applique également en cas de vente de droits indivis ou de droits réels de jouissance, les autres conditions étant par ailleurs remplies. Le champ d'application de ce droit de préférence, les opérations concernées et les cas d'exclusion sont identiques à ceux du droit de préférence des voisins
1501842075912.
– Notification. – Le vendeur
1506176707961notifie au maire le prix et les conditions de la vente projetée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception (C. for., art. L. 331-24, al. 2). Cette formalité est requise même en cas d'affichage en mairie de l'avis de vente prévu pour le droit de préférence des voisins.
– Exercice du droit de préférence. – La commune dispose d'un délai de deux mois à compter de la notification pour faire connaître au vendeur sa décision d'exercer le droit de préférence aux prix et conditions indiqués (C. for., art. L. 331-24, al. 2). À la différence des voisins, la mairie ne peut pas exercer son droit par remise contre récépissé. La commune ne peut pas discuter le prix de vente
1511707487519.
– Choix de l'acquéreur. – La commune se trouve en concurrence avec les voisins. En effet, le vendeur choisit librement son cocontractant parmi les personnes ayant manifesté leur volonté d'acquérir, la commune ne l'emportant pas de plein droit sur les voisins.
– Réalisation de la vente. – L'acte de vente est régularisé dans les deux mois à compter de la réception de la déclaration d'exercice du droit (C. for., art. L. 331-24, al. 5). À défaut, le droit de préférence n'est plus opposable au vendeur. Curieusement, ce délai n'a pas été porté à quatre mois par la loi d'avenir de 2014. Ainsi, les différentes échéances sont parfois inconciliables en pratique, notamment en raison de l'information obligatoire à la SAFER avant la régularisation de la vente
1512294579871. Dans cette hypothèse, le délai de deux mois n'est pas opposable à la commune si elle n'est pas en faute
1501842634639.
Les bois et forêts acquis par les communes au titre de ce droit de préférence sont soumis au régime forestier à l'expiration d'un délai de cinq ans à compter de leur incorporation dans le domaine communal (C. for., art. L. 331-24, al. 7). La commune dispose ainsi du temps nécessaire pour revendre la parcelle si elle le juge souhaitable avant la soumission au régime forestier.
– Sanction en cas de violation du droit de préférence. – Toute vente opérée en violation du droit de préférence de la commune est nulle. L'action en nullité se prescrit par cinq ans (C. for., art. L. 331-24, al. 6)
1512240888410.
Le droit de préemption de la commune
Outre leur droit de préférence, les communes disposent sous certaines conditions d'un autre droit de priorité, qualifié de droit de préemption (C. for., art. L. 331-22).
– Vente d'une propriété boisée au cadastre, avec ou sans limite de superficie. – À l'instar des droits de préférence forestiers, le droit de préemption de la commune s'applique à la vente d'une propriété classée au cadastre en nature de bois et forêts, d'une superficie totale inférieure à quatre hectares (C. for., art. L. 331-22, al. 1). Sur ces notions, il convient de se référer aux développements précédents
1501844879677. En outre, si le vendeur est une personne publique dont les bois et forêts relèvent du régime forestier (C. for., art. L. 211-1, I, 2°)
1501845502418, la commune bénéficie du droit de préemption sans limitation de superficie de la propriété vendue. Dans cette hypothèse, la vente d'une propriété de plus de quatre hectares est soumise au droit de préemption de la commune.
– Conditions tenant au bien de la commune. – Le droit de préemption de la commune résulte de la réunion des trois conditions cumulatives suivantes (C. for., art. L. 331-22, al. 1) :
- la propriété vendue est située sur son territoire ;
- la commune est propriétaire d'une parcelle effectivement boisée contiguë à la propriété vendue, peu important le classement cadastral de la parcelle lui appartenant 1501846168823 ;
- cette parcelle boisée contiguë est soumise à un document d'aménagement (C. for., art. L. 122-3, 1°, a).
Ainsi, le droit de préemption est réservé aux communes gérant leurs bois.
– Absence d'exclusions. – À la différence de son droit de préférence, le droit de préemption de la commune s'applique dans les cas d'exclusions du droit de préférence des voisins. En conséquence, il convient de notifier le droit de préemption en cas de vente à un propriétaire d'une parcelle boisée contiguë. Cette solution s'applique également pour les ventes consenties au conjoint, partenaire pacsé, parent ou allié quel que soit le degré de parenté, etc. Toutefois, la cession de droits indivis à un membre de l'indivision constituant une opération de partage, échappe au droit de préemption (C. civ., art. 883).
– Les biens mixtes. – Si la propriété vendue comprend à la fois des parcelles classées au cadastre en bois et forêts et des parcelles classées autrement, il convient d'effectuer la notification. L'exercice du droit de préemption de la commune se trouve de facto paralysé. La décision de préemption, illégale sur la partie non boisée au cadastre, rejaillit sur la légalité de la délibération de préemption en son entier
1511708647612. Le propriétaire peut toutefois ventiler le prix entre les parcelles classées boisées au cadastre et les autres, avec l'accord de l'acquéreur en présence d'un avant-contrat. Dans ce cas, la commune a la possibilité de préempter les seules parcelles classées boisées au cadastre.
– Propriété située sur plusieurs communes. – Dans l'hypothèse où la propriété vendue est située sur plusieurs communes, le vendeur notifie la vente à toutes les communes concernées, sans être contraint de ventiler le prix. N'ayant pas vocation à préempter hors de leur territoire, les communes concernées sont paralysées dans l'exercice de leur droit de préemption
1501860750161.
– Notification. – La notification contient la liste des parcelles vendues, le prix et les conditions de la vente (C. for., art. L. 331-22, al. 2).
En pratique, la détermination du caractère contigu des parcelles est aisée. En revanche, la connaissance d'un document d'aménagement implique des recherches particulières. Il convient à ce titre d'indiquer que la notification est effectuée sous réserve de la justification de l'existence d'un tel document.
– Exercice du droit de préemption. – La commune dispose d'un délai de deux mois à compter de la notification pour faire connaître au vendeur sa décision d'exercer le droit de préemption dans les conditions notifiées. Elle n'a pas la faculté de contester le prix.
– Réalisation de la vente. – Aucun délai n'est fixé pour la signature de l'acte de vente et le paiement du prix. Ainsi, aucune sanction n'est applicable en cas de régularisation tardive.
– Le droit de préemption exclut le droit de préférence des riverains. – Le dernier alinéa de l'article L. 331-22 du Code forestier relatif au droit de préemption de la commune est curieusement rédigé : « Le droit de préférence prévu à l'article L. 331-19 n'est pas applicable ». Le droit de préemption de la commune efface-t-il le droit de préférence des riverains ou simplement son usage ? Dans le premier cas, les riverains ne disposent pas de la préférence, même si la commune ne préempte pas. Cette solution est manifestement contraire à l'objectif de regroupement de la propriété forestière. Dans le second cas, seul l'exercice du droit de préemption prive les voisins de leur droit. Cette interprétation, plus conforme à l'esprit du texte, est à retenir.
– Cumul des droits de préférence et de préemption de la commune. – Le droit de préférence de la commune est en concurrence avec celui des riverains. Son droit de préemption exclut toutefois la préférence accordée aux voisins. En revanche, le texte est muet sur le cumul des droits de préférence et de préemption de la commune. La question est pourtant importante en pratique. En effet, dans l'hypothèse où la commune bénéficie d'un droit de préemption au titre de la vente d'une propriété de moins de quatre hectares, à s'en tenir au texte, elle est également titulaire d'un droit de préférence si cette opération ne relève pas des cas d'exclusions prévus à l'article L. 331-21 du Code forestier
1502184397232. Faut-il procéder à une double notification ?
En pratique, le vendeur ignore le plus souvent si la parcelle boisée contiguë appartenant à la commune fait l'objet d'un document d'aménagement. Dans ce cas, il est opportun d'effectuer deux notifications distinctes ou d'indiquer dans la notification unique qu'elle est effectuée à la fois au titre du droit de préemption et du droit de préférence de la commune. Il convient également de rappeler à la commune que l'existence de son droit de préemption est conditionnée à l'existence d'un document d'aménagement régissant la parcelle concernée.
– Sanction. – À la différence des droits de préférence, la loi ne prévoit pas de sanction particulière en cas de violation du droit de préemption de la commune. Néanmoins, en présence d'une règle d'ordre public, la nullité est encourue.