CGV – CGU

Partie I – Les grands principes du droit international privé
Titre 2 – Les conflits de lois et de juridictions
Sous-titre 2 – Les conflits de juridictions
Chapitre II – La reconnaissance des décisions étrangères en France et leur exécution

1314 Au Moyen Âge, seul le souverain pouvait juger ses sujets, et par conséquent une décision étrangère concernant des sujets français ne pouvait pas être reconnue ni avoir d’effet en France. La maxime « Nul sujet de France ne peut être tiré de sa juridiction naturelle, nonobstant qu’il soit allé s’habituer hors du royaume » protégeait les prérogatives du souverain sur ses sujets. S’agissant des décisions étrangères prises au sujet d’étrangers, elles ne pouvaient être reconnues et produire d’effet qu’après une procédure de contrôle.

Historiquement, dans l’Ancien droit un jugement français n’avait autorité de plein droit que dans le ressort du Parlement qui l’avait rendu, et un jugement étranger n’avait aucune autorité de plein droit. La procédure de pareatis, décision rendue sur lettres rogatoires de la juridiction d’origine, par la chancellerie d’un Parlement (pareatis du Petit-Sceau) ou par la chancellerie de France (pareatis du Grand-Sceau) rendait le jugement français ou étranger exécutoire dans le ressort de l’autorité qui le délivrait396.

1315 Dans le contexte de mondialisation actuelle, les États ont le souci de régler de façon harmonieuse les relations internationales afin de ne pas les entraver. Ils cherchent, au moyen de leurs règles de droit international privé, à garantir aux citoyens une continuité dans leur situation juridique. Cela implique notamment d’accepter que des décisions étrangères puissent produire des effets dans leur ordre juridique étranger. Les effets peuvent être de deux natures. Il peut d’abord s’agir d’une simple reconnaissance d’une situation juridique créée par une décision étrangère, par exemple une personne pourra invoquer, en France, un jugement de divorce rendu à l’étranger pour se remarier. Aucune procédure ne sera imposée dans ce cas. Ensuite se pose la question de l’exécution proprement dite d’une décision étrangère. Il s’agit de la possibilité pour une partie de donner à la décision rendue à l’étranger une force exécutoire en France au moyen de la procédure d’exequatur.

Les principes de la reconnaissance et d’exécution des décisions étrangères ont été posés par la jurisprudence Münzer397.

1316 Les décisions judiciaires, lorsqu’elles émanent d’États qui ne sont pas membres de l’Union européenne, ou qui ne sont pas liés avec la France par des conventions, seront accueillies en France à la suite d’un contrôle dont le contenu est fixé par la jurisprudence Münzer. On observera que, même si les motifs de contrôle vont s’amenuisant, les règles de reconnaissance des décisions étrangères apparaissent moins libérales que les règles européennes, dans la mesure où il semble plus difficile d’y voir une communauté de droit.

1317 L’étude se limitera aux décisions concernant les relations privées entre individus (les décisions répressives, fiscales, administratives… soit ne produisent pas d’effets en France, soit en produisent selon des procédures qui leur sont propres). Quelle que soit la nature de la juridiction ayant rendu la décision, dès lors que celle-ci concerne des relations privées, son efficacité en France sera recherchée.

L’efficacité des décisions étrangères en France n’a fait l’objet, pendant longtemps, que de peu de textes ; son régime était surtout de source jurisprudentielle (Section II). Depuis, les conventions internationales et les règlements européens ont pris une place déterminante, ne serait-ce qu’en raison de leur fréquence d’application, ce qui justifiera qu’ils soient étudiés en premier lieu (Section I).

Section I – Les conventions internationales et les règlements européens

1318 L’Union européenne, à la recherche d’un espace de liberté, de sécurité et de justice, a adopté un certain nombre de conventions fixant des règles concernant les effets des décisions judiciaires entre États membres. L’une des plus importantes a été la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, remplacée par le règlement Bruxelles I du 22 décembre 2000, lui-même remanié et devenu le règlement Bruxelles I bis du 12 décembre 2012. D’autres règlements sont venus poser des règles d’accueil des décisions des États membres, de façon plus ponctuelle en se limitant à certaines matières : régime matrimonial et autorité parentale, divorce, successions, partenariats enregistrés, injonction de payer, petits litiges, saisies des avoirs bancaires. Ils seront présentés dans une première partie (Sous-section I).

L’Union européenne a également signé avec les États de l’AELE la Convention de Lugano de 2007, laquelle comporte des règles similaires à la convention de Bruxelles(Sous-section II).

Enfin, la France a par ailleurs conclu des traités bilatéraux en matière de reconnaissance des décisions (Sous-section III).

Sous-section I – Les règlements européens

1319 Les règlements Bruxelles I et I bis concernant la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale constituent aujourd’hui le droit commun de la reconnaissance et de l’exécution des décisions étrangères. Les autres règlements en matière matrimoniale et autorité parentale398, en matière d’obligations alimentaires399, en matière successorale400, en matière de régimes matrimoniaux401, en matière des effets patrimoniaux des partenariats enregistrés402allègent les conditions de reconnaissance et d’exécution des décisions étrangères (§ I).

Par ailleurs, en matière de titres exécutoires européens403, de procédures d’injonction de payer404, de règlements de petits litiges405et de saisies conservatoires406, les règlements conduisent à une suppression ou quasi-suppression des conditions de reconnaissance et d’exécution des décisions étrangères (§ II).

§ I – Les règlements qui allègent les conditions de reconnaissance et d’exécution des décisions étrangères
A/ Les règlements Bruxelles I et Bruxelles I bis : droit commun

1320 Le règlement Bruxelles I est applicable à toute décision rendue par le juge d’un État membre, dans le cadre d’un litige (interne ou international) à la suite d’une action intentée après le 12 décembre 2012 ; il a été remanié par le règlement Bruxelles I bis, lequel s’applique aux jugements rendus à la suite d’actions introduites après le 10 janvier 2015 dans tous les États membres sauf le Danemark.

On signalera que le règlement Bruxelles I bis ne concerne plus les actions relatives aux obligations alimentaires depuis le 18 juin 2011, date d’entrée en vigueur du règlement n° 4/2009 du Conseil du 18 décembre 2008 qui leur est propre.

1321 Le règlement prévoit, ainsi qu’il a été étudié dans le chapitre précédent, les règles de compétence des juridictions dans l’Union européenne et, dès lors que la décision a été prise conformément à ces règles de compétence, elle doit pouvoir circuler librement. L’idée du règlement est donc de faciliter cette circulation des décisions par une simplification de leur reconnaissance et de leur exécution au sein de l’Union européenne en fixant des conditions réduites au minimum (I) et en mettant en place une procédure de contrôle sommaire (II).

I/ Les conditions de la régularité

1322 Dans l’Union, les États membres se font mutuellement confiance pour l’application des règles de compétence, et le règlement Bruxelles I bis ne prévoit ni le contrôle de la compétence du juge (sauf exception par exemple en matière de litiges de consommation) qui a pris la décision, ni le contrôle de la décision au fond407. Les décisions circulent donc librement. Le règlement pose la reconnaissance de plein droit des décisions408et envisage les cas où il y aura non-reconnaissance409, à savoir :

si la reconnaissance est manifestement contraire à l’ordre public de l’État membre requis ;

dans le cas où la décision a été rendue par défaut, si l’acte introductif d’instance ou un acte équivalent n’a pas été notifié ou signifié au défendeur ;

si la décision est inconciliable avec une décision ayant déjà autorité de chose jugée dans l’État requis.

Pour que cette décision soit régulière et donc que sa reconnaissance ne soit pas refusée, elle doit respecter, d’une part, les règles de compétence exclusive posées par le règlement410et, d’autre part, les règles en matière de protection de parties faibles411. Ces articles ont été étudiés plus amplement dans le chapitre précédent.

1323 La décision étrangère doit avoir respecté la procédure. En cas d’irrégularité pour non-respect de la notification ou de la signification de l’acte introductif d’instance, soit le défendeur n’a pas contesté et l’irrégularité a été couverte, soit il l’a contesté mais sa contestation n’a pas été entendue et cela implique un non-respect des droits de la défense. Or, le non-respect des droits de la défense est une contrariété à l’ordre public et on reviendrait donc au premier point de l’article 45 susvisé.

Précision est ici apportée que cette irrégularité ou les modalités d’une éventuelle régularisation doivent être appréciées au regard de la loi du pays du juge ayant pris la décision412.

La cour est venue préciser que devait également être sanctionnée par le recours à l’ordre public, sur le fondement de l’article 45, la violation manifeste des exigences du droit au procès équitable reconnue par l’article 6, § 1 de la Convention européenne des droits de l’homme413. La cour veille à ce que l’utilisation de l’ordre public par les juridictions nationales ne contrarie pas les objectifs du droit communautaire.

1324 S’agissant du caractère inconciliable de la décision avec une décision ayant autorité de chose jugée, cela implique que les parties au litige pour lequel une décision ayant autorité de chose jugée aurait déjà été prononcée, ne pourront saisir les tribunaux pour le même litige, et de la même manière une autre décision concernant ce même litige ne peut être reconnue414.

1325 Pour ce qui est de la contrariété à l’ordre public, il est clair qu’une décision étrangère ne pourra pas être reconnue si elle est contraire aux principes essentiels de l’ordre juridique français. Par ailleurs, la Cour de justice a précisé que pour opposer un refus fondé sur la contrariété à l’ordre public, il faut que celle-ci soit manifeste415.

1326 Il peut être remarqué que l’article 45 du règlement Bruxelles I bis ne vise pas le cas de décision obtenue par la fraude à la loi. On peut penser qu’une telle situation sera absorbée par la contrariété à l’ordre public.

1327 Enfin, pour que la décision ait un caractère exécutoire dans l’État requis, elle doit d’abord être déclarée exécutoire dans l’État d’origine416.

Aux fins de l’exécution, le demandeur devra alors communiquer à l’autorité compétente chargée de l’exécution une copie de la décision réunissant les conditions nécessaires pour en établir l’authenticité ainsi que le certificat (annexe I), délivré conformément à l’article 54, attestant que la décision est exécutoire417.

En France, l’autorité compétente est le greffier du tribunal de grande instance. Pour les autres pays, il convient de se référer à l’autorité indiquée à l’annexe II, puis de rechercher sur le site de l’Atlas judiciaire européen418l’autorité territorialement compétente.

II/ La procédure de contrôle de l’efficacité des jugements européens

1328 Les décisions émanant d’États membres sont reconnues de plein droit (a) et ne sont plus soumises à exequatur (b).

a) La reconnaissance de la décision européenne

1329 En matière civile et commerciale, les décisions d’un autre État membre sont reconnues de plein droit dans un autre État conformément à l’article 36, § I du règlement Bruxelles I bis. Cela signifie que la décision est reconnue en France sans qu’il soit nécessaire de recourir à un juge français, la France acceptant l’effet normatif de celle-ci. Par exemple, une décision de divorce prononcée dans un autre pays européen sera reconnue en France et permettra aux personnes concernées de se remarier immédiatement.

Mais cela n’empêche pas une partie, qui y aurait un intérêt, de saisir le juge français afin que cette décision ne puisse pas produire ses effets.

Dans le cadre d’une action en contestation de la régularité, la partie qui défend la régularité pourra faire constater qu’elle doit être reconnue en utilisant la procédure de l’exécution.

1330 L’efficacité d’une décision va résulter, d’une part, de l’autorité de la chose jugée qui lui est attachée et, d’autre part, de sa force exécutoire. La première empêchera que la question déjà jugée ne soit soumise à nouveau à un juge et la seconde permet de faire exécuter la décision. Il n’y a pas de reconnaissance de plein droit de l’autorité de la chose jugée, pour cela les parties devront s’adresser à un juge français. Et le jugement ne sera pas systématiquement exécutoire de plein droit ; dans l’exemple ci-dessus des personnes divorcées, la demande d’exécution de la prestation compensatoire passe par le juge. Toutefois, il y a lieu de préciser que dans le règlement Bruxelles I bis, les décisions ont autorité de chose jugée et sont exécutoires.

b) L’exécution de la décision européenne

1331 Ainsi qu’il vient d’être dit, le règlement Bruxelles I bis prévoit qu’une « décision rendue dans un État membre et qui est exécutoire dans cet État membre jouit de la force exécutoire dans les autres États membres sans qu’une déclaration constatant la force exécutoire soit nécessaire »419. Il n’y a plus d’exequatur420.

La décision européenne sera immédiatement efficace, comme si elle émanait des autorités du pays. Si l’une des parties ne souhaite pas qu’elle produise effet ou qu’elle soit exécutée, elle doit saisir le juge français d’une demande en refus de reconnaissance ou d’exécution pour l’une des causes étudiées ci-avant.

B/ Les autres règlements

1332 De nombreux règlements organisent la reconnaissance et l’exécution des décisions émanant d’États membres : le règlement en matière matrimoniale et autorité parentale (Bruxelles II bis) (I), le règlement en matière d’obligations alimentaires (II), le règlement en matière de successions (III), le règlement en matière de régimes matrimoniaux (IV), le règlement en matière d’effets patrimoniaux des partenariats enregistrés (V).

Les règles de reconnaissance et d’exécution des décisions étrangères pour chacun de ces règlements seront rappelées de manière non exhaustive, les trois autres commissions étudiant ceux-ci de manière particulière.

I/ Le règlement « Matière matrimoniale et autorité parentale » ou Bruxelles II bis

1333 Le règlement n° 2201/2003 du 27 novembre 2003, relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale abrogeant le règlement (CE) n° 1347/2000 dit « Bruxelles II bis » prévoit que les décisions rendues dans un État membre sont reconnues dans les autres États membres, sans qu’il soit nécessaire de recourir à aucune procédure421.

Les seuls cas où la reconnaissance pourra être refusée sont ceux visés aux articles 22 et 23 : la contrariété à l’ordre public, un acte introductif d’instance (ou un acte équivalent) non signifié ou notifié au défendeur en temps utile qui n’aurait pas pu se défendre ; une décision ayant autorité de chose jugée avec laquelle elle serait inconciliable.

1334 En matière de responsabilité parentale, les décisions rendues dans un État membre, qui y sont exécutoires et qui ont été signifiées ou notifiées, sont mises en exécution dans un autre État membre sur simple requête de toute partie intéressée (sauf pour le Royaume-Uni)422. Une solution particulière est prévue aux articles 41 et 42 pour les décisions relatives au droit de visite ainsi que celles relatives au retour immédiat d’un enfant illicitement déplacé, lesquelles sont exécutoires de plein droit.

II/ Le règlement « Obligations alimentaires »

1335 Avant son entrée en vigueur, la compétence et la loi applicable aux obligataires alimentaires étaient fixées par la Convention de La Haye du 2 octobre 1973 sur la loi applicable aux obligations alimentaires et par le règlement Bruxelles I. La convention n’a pas été ratifiée par tous les pays et le règlement n’était valable que pour les États de l’Union européenne. Une réforme s’avérait nécessaire pour sécuriser et unifier les procédures. Le règlement n° 4/2009 du 18 décembre 2008, relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l’exécution des décisions et la coopération en matière d’obligations alimentaires, entré en vigueur le 18 juin 2011, remplace par conséquent le règlement Bruxelles I. Le 1er août 2014, la convention est entrée en vigueur dans l’Union européenne à l’égard d’États tiers parties à cette convention.

Ce règlement s’applique à toutes les obligations alimentaires « découlant des relations de famille, de parenté, de mariage, d’alliance qui existent dans les États membres ».

1336 Depuis le 18 juin 2011, la procédure d’exequatur est totalement supprimée lorsque la décision a été rendue dans un État membre lié par le Protocole de La Haye de 2007, c’est-à-dire tous les pays de l’Union européenne, sauf le Danemark et le Royaume-Uni. La décision est reconnue dans un autre État membre sans qu’il soit nécessaire de recourir à aucune procédure et sans qu’il soit possible de s’opposer à sa reconnaissance423.

Lorsque la décision a été rendue dans un État membre non lié par ledit protocole, la décision sera également reconnue dans un autre État membre sans qu’il soit nécessaire de recourir à aucune procédure424. Cependant, sa reconnaissance pourra être contestée. Les motifs de refus de reconnaissance sont prévus à l’article 24 du règlement : contrariété à l’ordre public, non-respect des droits de la défense, caractère inconciliable avec une décision déjà̀ rendue et exécutoire ou exécutable dans un des États membres.

La décision ne pourra faire l’objet d’une décision de révision au fond dans le pays où la reconnaissance ou l’exécution est demandée.

1337 Le règlement prévoit que les décisions, rendues dans un État membre lié par le Protocole de La Haye de 2007, et qui sont exécutoires dans cet État, jouissent de la force exécutoire dans un autre État membre sans qu’une déclaration constatant la force exécutoire soit nécessaire425. Quant à une décision rendue dans un État membre, non lié par le Protocole de La Haye de 2007, et qui y est exécutoire, elle est mise à exécution dans un autre État membre après y avoir été déclarée exécutoire sur demande de toute partie intéressée426. La juridiction à l’origine de la décision pourra toujours déclarer une décision exécutoire par provision.

S’agissant de l’exécution proprement dite de la décision, il revient à l’autorité centrale désignée par l’État (en France, il s’agit du Bureau du recouvrement des créances alimentaires du ministère des Affaires étrangères) d’engager les démarches nécessaires au recouvrement des aliments. Les États membres sont tenus de fournir une aide judiciaire gratuite pour les demandes d’aliments destinées aux enfants introduites par l’intermédiaire des autorités centrales427. Pour faciliter la mise en œuvre du règlement, le Réseau judiciaire européen (RJE) met à disposition un formulaire type à usage facultatif pour la déclaration d’arriérés de pension alimentaire (document visé à l’article 20, § 1, pt c). Il conviendra d’appliquer les règles de procédure du pays d’exécution.

III/ Le règlement « Successions »

1338 Le règlement n° 650/2012 du 4 juillet 2012, relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l’exécution des décisions, et l’acceptation et l’exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d’un certificat successoral européen est entré en vigueur 5 juillet 2012 et s’applique à toutes les successions à cause de mort ouvertes à partir du 17 août 2015. Ce règlement fixe des nouvelles règles de droit international privé pour le règlement des successions et surtout, ce qui nous préoccupe présentement, de nouvelles règles simplifiant le régime juridique de la reconnaissance et de l’exécution des décisions ou actes rendus ou établis dans le cadre d’une succession. Ce règlement ne concerne que l’aspect civil de la succession. Compte tenu de la fréquente d’utilisation de ce règlement par le notariat, sa présentation sera volontairement plus exhaustive.

1339 Le règlement prévoit que les décisions rendues dans un État membre sont reconnues dans les autres États membres, sans qu’il soit nécessaire de recourir à aucune procédure428.

Le terme «  décision  » est défini par le règlement comme toute décision en matière de successions rendue par une juridiction d’un État membre, quelle que soit la dénomination qui lui est donnée, y compris une décision concernant la fixation par le greffier du montant des frais du procès429.

Le règlement donne un sens large au terme juridiction, et les décisions seront celles des juridictions au sens strict qui exercent des fonctions juridictionnelles, mais également celles des notaires ou des services de l’état civil dans certains États membres qui exercent des fonctions juridictionnelles en vertu d’une délégation de pouvoirs accordée par une juridiction, ce qui n’est pas le cas du notaire en France.

Toutes les juridictions au sens du présent règlement devraient être liées par les règles de compétence prévues dans le présent règlement. Inversement, le terme « juridiction » ne devrait pas viser les autorités non judiciaires d’un État membre qui, en vertu du droit national, sont habilitées à régler les successions, telles que les notaires dans la plupart des États membres, lorsque, comme c’est généralement le cas, ils n’exercent pas de fonctions juridictionnelles.

La décision peut faire l’objet d’une demande de reconnaissance430ou demande incidente431. Cette décision pourra être refusée pour contrariété à l’ordre public, pour non-respect des droits de la défense, ou si elle est inconciliable avec une décision ayant autorité de chose jugée432.

1340 Le règlement pose également le principe de la libre circulation des actes authentiques établis dans le cadre des successions. Ces actes auront la même force probante dans un autre État membre que dans l’État membre d’origine, où ils y produiront au moins les effets les plus comparables, sous réserve qu’ils ne soient pas manifestement contraires à l’ordre public de l’État membre concerné433.

Lorsque deux actes authentiques incompatibles, dans le cadre de l’application du règlement sont présentés à l’autorité chargée du règlement de la succession, celui-ci ne pourra relever le caractère inconciliable de l’acte à établir avec le premier acte et il devra examiner la question de savoir auquel, le cas échéant, il conviendra de donner la priorité, compte tenu des circonstances de l’espèce434. Si les circonstances n’ont pas permis de déterminer l’acte prioritaire, la question sera tranchée par les juridictions compétentes. En cas d’incompatibilité entre un acte authentique et une décision, il conviendra de revenir aux motifs de non-reconnaissance des décisions prévus par le règlement435.

1341 Afin de faciliter cette libre circulation et de permettre aux héritiers, légataires, exécuteurs testamentaires ou administrateurs de la succession d’être à même de prouver facilement leur statut et/ou leurs droits et pouvoirs dans un autre État membre (à l’exception de trois pays : le Royaume-Uni, l’Irlande et le Danemark), le règlement crée le certificat successoral européen (CSE). En France, le demandeur doit s’adresser à un notaire qui lui remet, contre émargement ou récépissé, une copie certifiée conforme du certificat successoral européen, le notaire conservant l’original436. Cette copie sera valable six mois. Le règlement interdit de demander des pièces justificatives à ce notaire, le certificat successoral européen se suffit à lui-même.

Aucune légalisation ni autre formalité analogue ne pourra être exigée pour les documents délivrés dans le cadre du règlement437. Pour faciliter l’acceptation des actes authentiques au sein de l’Union européenne, toute personne intéressée peut demander au notaire de compléter le formulaire II438pour expliquer la force probante de l’acte en France.

1342 Les décisions, actes authentiques, transactions judiciaires émanant d’un État membre où elles sont exécutoires, sont exécutées dans les autres États membres conformément aux articles 46 à 58439. Les conditions de régularité de la décision étrangère ne seront vérifiées que s’il y a un recours contre la décision statuant sur le caractère exécutoire.

S’agissant de la procédure, la personne doit tout d’abord solliciter la juridiction ou l’autorité compétente de l’État membre d’origine pour qu’elle délivre un formulaire attestant du caractère exécutoire du titre et reprenant les informations nécessaires à son exécution (formulaires I, II ou III annexés) :

lorsque l’attestation doit être établie en France pour être exécutée dans un autre État membre :

lorsque la demande concerne un titre exécutoire français, l’autorité compétente pour délivrer l’attestation est le greffier en chef de la juridiction qui a rendu la décision ou homologué la transaction440,

lorsque la demande concerne un acte authentique, l’autorité compétente pour délivrer l’attestation est le notaire ou la personne morale titulaire de l’office notarial conservant la minute de l’acte reçu441.

Puis la requête est présentée en double exemplaire et porte l’indication précise des pièces invoquées442, la représentation par avocat n’est pas exigée.

Lorsque l’attestation concerne l’exécution en France :

la personne doit demander à l’État français une déclaration constatant le caractère exécutoire de leur décision, actes ou transactions judiciaires. Cette demande doit contenir la copie de la décision réunissant les conditions nécessaires pour en établir l’authenticité ainsi que l’attestation précitée,

Lorsque la requête concerne des décisions et transactions judiciaires, elle doit être portée devant le greffier en chef du tribunal de grande instance443,

lorsque la requête concerne des actes authentiques, la requête est portée devant le président de la chambre des notaires ou, en cas d’absence ou d’empêchement, à son suppléant désigné parmi les membres de la chambre444.

Cette procédure fait l’objet du tableau récapitulatif ci-après :

Le règlement prévoit que la compétence territoriale de l’autorité à même de connaître de ces requêtes est déterminée par le domicile de la partie contre laquelle l’exécution est demandée ou par le lieu de l’exécution.

IV/ Le règlement « Régimes matrimoniaux »

1343 Le règlement n° 2016/1103 du 24 juin 2016 prévoit, comme ceux précédemment étudiés, que les décisions relatives au divorce, à la séparation de corps ou à l’annulation du mariage rendues dans un État membre sont reconnues dans les autres États membres, sans qu’il soit nécessaire de recourir à aucune procédure445.

Le règlement vise dans son article 3.1, d toute décision en matière de régime matrimonial rendue par une juridiction d’un État membre, quelle que soit la dénomination qui lui est donnée, y compris une décision rendue par le greffier, relative à la fixation du montant des frais du procès et précise ce qu’il faut entendre par « juridiction ». Conformément à l’article 3.2, il s’agira donc des décisions rendues par toute autorité judiciaire, ainsi que celles rendues par toute autre autorité et tout professionnel du droit compétents en matière de régimes matrimoniaux qui exercent des fonctions juridictionnelles ou agissent en vertu d’une délégation de pouvoirs d’une autorité judiciaire ou sous le contrôle de celle-ci, pour autant que ces autres autorités et professionnels du droit offrent des garanties en ce qui concerne leur impartialité et le droit de toutes les parties à être entendues. Les décisions prises doivent de surcroît pouvoir faire l’objet d’un recours devant une autorité judiciaire ou d’un contrôle par une telle autorité et avoir une force et un effet équivalents à une décision rendue par une autorité judiciaire dans la même matière.

La liste des autres autorités et professionnels du droit visés par l’article 3, susceptibles donc de rendre de telles décisions, doit être communiquée à la Commission européenne conformément à l’article 64 du règlement.

1344 Qu’en est-il des actes établis par le notaire désigné par le juge dans le cadre de la liquidation d’un régime matrimonial446ou dans le cadre d’un partage447 ? Dans le premier cas, agissant en qualité d’expert, le notaire établit un rapport sous seing privé qui renseignera le juge sur les disparités en capital et en revenus des époux. Il serait difficilement entendable que cet acte puisse circuler de la même manière qu’une décision. Dans le second cas, si l’on admet que l’acte reçu par le notaire est qualifié de décision, cet acte devra respecter toutes les règles en matière procédurale, et le notaire doit garantir non seulement son impartialité, mais aussi le droit de toutes les parties à être entendues448.

Mais l’article 3, § 2 du règlement exige également, pour que les autorités et professionnels du droit puissent être qualifiés de juridiction, que leurs décisions aient « une force et un effet équivalents à ceux d’une décision prononcée par une autorité judiciaire dans la même matière », ce qui n’est pas le cas pour les actes notariés français. Leurs actes ne pourront circuler que par le prisme de l’acceptation et non par celui de la reconnaissance449.

1345 Les seuls cas où la reconnaissance pourra être refusée sont ceux visés à l’article 37 du règlement : la contrariété à l’ordre public, un acte introductif d’instance (ou un acte équivalent) non signifié ou notifié au défendeur en temps utile qui n’aurait pas pu se défendre ; une décision ayant autorité de chose jugée avec laquelle elle serait inconciliable.

1346 Pareillement, les décisions rendues dans un État membre et qui y sont exécutoires sont exécutées dans les autres États membres conformément aux articles 38 à 56 et 58 du règlement. Une procédure simplifiée et non contradictoire sera suffisante.

Les conditions de régularité de la décision étrangère ne seront vérifiées que s’il y a un recours contre la décision statuant sur le caractère exécutoire.

V/ Le règlement « Effets patrimoniaux des partenariats enregistrés »

1347 Le règlement n° 2016/1104 du 24 juin 2016 prévoit, de manière identique au règlement « Régimes matrimoniaux » du même jour, que les décisions relatives aux effets des partenariats enregistrés rendues dans un État membre sont reconnues dans les autres États membres, sans qu’il soit nécessaire de recourir à aucune procédure450.

Les seuls cas où la reconnaissance pourra être refusée sont ceux visés à l’article 37 du règlement : la contrariété à l’ordre public, un acte introductif d’instance (ou un acte équivalent) non signifié ou notifié au défendeur en temps utile qui n’aurait pas pu se défendre ; une décision ayant autorité de chose jugée avec laquelle elle serait inconciliable.

1348 Les décisions rendues dans un État membre et qui sont exécutoires dans cet État sont exécutoires dans un autre État membre lorsque, à la demande de toute partie intéressée, elles y ont été déclarées exécutoires conformément à la procédure prévue aux articles 44 à 57 du règlement451.

Les conditions de régularité de la décision étrangère ne seront vérifiées que s’il y a un recours contre la décision statuant sur le caractère exécutoire.

§ II – Les règlements qui suppriment la phase intermédiaire

1349 Les règlements n° 805/2004 créant un titre exécutoire européen (C), n° 1896/2006 instituant une procédure européenne d’injonction de payer (B), n° 861/2007 instituant une procédure européenne de règlement des petits litiges (A) et n° 655-2014 instituant une procédure d’ordonnance européenne de saisie conservatoire des comptes bancaires (D) diffèrent des règlements précédemment étudiés. Ces règlements vont au-delà du texte de l’article 65 du Traité CE, qui permet à la Commission européenne d’édicter notamment des règles pour améliorer et simplifier la reconnaissance de décisions émanant d’autres États membres. Les décisions prises au vu de ces règlements sont pleinement efficaces dans les autres États membres, lesquels États n’ont aucun pouvoir de non-reconnaissance.

Ces décisions sont assimilées à une décision du for. La Communauté européenne a donc créé deux actes qui transcendent les ordres juridictionnels des États membres qui sont une émanation de leur souveraineté. Ces deux règlements s’appliquent comme le règlement Bruxelles I bis en matière civile et commerciale.

A/ Le règlement « Petits litiges »

1350 Le règlement n° 861/2007 du 11 juillet 2007 instituant une procédure européenne de règlement des petits litiges est entré en vigueur le 1er janvier 2009 et a été refondu par le règlement n° 2015/2421 du 16 décembre 2015. Ce règlement est applicable en matière civile et commerciale dans les litiges transfrontaliers, quelle que soit la nature de la juridiction, lorsque le montant d’une demande ne dépasse pas 5 000 € au moment de la réception du formulaire de demande par la juridiction compétente, hors intérêts, frais et débours452. Le montant était initialement de 2 000 € et le plafond a été augmenté par le règlement de 2015. La décision rendue par un État membre dans le cadre de ce règlement est reconnue et exécutée dans les autres États membres (sauf le Danemark), sans qu’il soit nécessaire de rendre une déclaration constatant sa force exécutoire.

1351 Le demandeur doit introduire la procédure, ainsi qu’il est prévu par l’article 4, § 1 en remplissant un formulaire type A (annexe I) contenant tous les renseignements nécessaires. Ce formulaire est accessible gratuitement sur le site du portail e-justice – onglet « Formulaire dynamique ». Ce formulaire doit être adressé à la juridiction compétente par voie postale ou par tout autre moyen de communication, comme la télécopie ou le courrier électronique, admis par l’État membre devant lequel les poursuites sont engagées. Les moyens de communication acceptés par chaque État membre sont indiqués sur le même portail.

La juridiction peut estimer que la réponse n’est pas claire et demander que le formulaire soit complété et/ou corrigé au moyen du formulaire B (annexe II).

Avant de répondre, la juridiction peut souhaiter tenir une audience.

La juridiction peut soit rejeter, soit accepter la demande. Lorsqu’elle rejette la demande, elle délivre le formulaire C (annexe III) et motive sa décision de refus. Le demandeur peut contester cette décision. Lorsque la juridiction accepte, elle délivre le formulaire C en faisant droit à la demande.

Cette décision est signifiée ou notifiée453au défendeur, qui dispose d’un droit de contester la décision dans un délai de trente jours à compter de la date de signification ou notification. Il doit compléter la partie II du formulaire C accompagné le cas échéant de toutes pièces justificatives utiles. Une nouvelle procédure au fond et contradictoire démarre devant la juridiction ayant délivré le formulaire C (annexe IV).

1352 Lorsque le défendeur n’a pas contesté, la décision devient exécutoire conformément à l’article 15 du règlement. Pour l’exécuter dans tous les États membres, le demandeur doit obtenir le certificat relatif à la décision rendue au moyen du formulaire D454. L’article 20 du règlement prévoit qu’une « décision rendue dans un État membre dans le cadre de la procédure européenne de règlement des petits litiges est reconnue et exécutée dans un autre État membre sans qu’une déclaration constatant sa force exécutoire soit nécessaire et sans qu’il soit possible de s’opposer à sa reconnaissance ». Ainsi, conformément aux règles françaises, il conviendra de contacter un huissier de justice avec la décision et le formulaire D (art. 21).

B/ Le règlement « Injonction de payer »

1353 Le règlement n° 1896/2006 du 12 décembre 2006 instituant une procédure européenne d’injonction de payer est entré en vigueur le 12 décembre 2008, et a été refondu par le règlement n° 2015/2421 du 16 décembre 2015 sus-cité. Le règlement de 2006 a été modifié par le règlement n° 2017/1260 du 19 juin 2017 entré lui-même en vigueur le 14 juillet 2017.

Ce règlement est applicable en matière civile et commerciale dans les litiges transfrontaliers, quelle que soit la nature de la juridiction. Pour les demandes ne dépassant pas 5 000 € au moment de la réception du formulaire de demande par la juridiction compétente, hors intérêts, frais et débours, la personne pourra recourir soit à la procédure européenne de règlements des petits litiges, soit à la procédure d’injonction de payer. Au-delà de cette somme, la procédure de l’injonction de payer devra être respectée.

La décision rendue par un État membre dans le cadre de ce règlement est reconnue et exécutée dans les autres États membres (sauf le Danemark), sans qu’il soit nécessaire de rendre une déclaration constatant sa force exécutoire.

1354 Le demandeur doit introduire la procédure, ainsi qu’il est prévu par l’article 7, § 1 du règlement, en remplissant un formulaire type A (annexe I) contenant tous les renseignements nécessaires. Ce formulaire doit être adressé à la juridiction compétente par voie postale ou par tout autre moyen de communication, comme la télécopie ou le courrier électronique, admis par l’État membre devant lequel les poursuites sont engagées. Les moyens de communication acceptés par chaque État membre sont indiqués sur le même portail.

La juridiction examine la demande455et peut demander que le formulaire soit complété et/ou corrigé au moyen du formulaire B (annexe II). La juridiction peut accepter de donner suite à la totalité de la demande. La juridiction peut n’accepter qu’une partie de la demande et en informer le demandeur par le formulaire C (annexe III) ; le demandeur pourra accepter ou refuser la proposition en retournant le formulaire type C envoyé par le tribunal dans un délai fixé par celui-ci conformément à l’article 9, § 2456. Si le demandeur accepte la proposition du tribunal, ce dernier émettra une injonction de payer européenne pour la partie acceptée de la créance (le surplus de la créance est soumis au droit national). Si le demandeur n’envoie pas sa réponse dans le délai imparti par le tribunal ou rejette sa proposition, le tribunal rejette la demande d’injonction de payer européenne dans son intégralité. La juridiction peut aussi rejeter la demande457. Elle délivre le formulaire D (annexe IV) et motive sa décision de refus. Le demandeur ne pourra pas contester cette décision.

1355 La juridiction qui a accepté la demande délivre le certificat relatif à la décision rendue au moyen du formulaire E458. L’article 20 du règlement prévoit qu’une « décision rendue dans un État membre dans le cadre de la procédure européenne de règlement des petits litiges est reconnue et exécutée dans un autre État membre sans qu’une déclaration constatant sa force exécutoire soit nécessaire et sans qu’il soit possible de s’opposer à sa reconnaissance ». L’injonction de payer européenne pourra être signifiée conformément à la loi nationale de l’État dans lequel la signification doit être effectuée459, à savoir en France par l’huissier de justice.

Deux cas peuvent se présenter alors : soit le défendeur accepte, soit le défendeur forme opposition au moyen du formulaire type F (annexe VI) fourni avec l’injonction de payer européenne dans les trente jours460, et la procédure se poursuit alors devant les juridictions de l’État membre d’origine.

La juridiction déclare en cas d’acceptation et aussi en l’absence d’opposition l’injonction de payer européenne exécutoire à l’aide du formulaire type G (annexe VII). Le règlement prévoit qu’une injonction de payer européenne devenue exécutoire dans l’État membre d’origine est reconnue et exécutée dans les autres États membres sans qu’une déclaration constatant la force exécutoire soit nécessaire et sans possibilité de s’opposer à sa reconnaissance461. La révision de l’injonction de payer est prévue dans des cas exceptionnels par le règlement462.

C/ Le règlement « Titre exécutoire européen » (TEE)

1356 Le règlement n° 805/2004 du 21 avril 2004 a créé un titre exécutoire européen pour les créances incontestées, qui permet de faire appliquer les décisions, les transactions judiciaires et les actes authentiques dans tous les États membres, sans procédure d’exequatur dans l’État membre d’exécution. Ce règlement est entré en vigueur le 21 octobre 2005 et concerne les décisions qui ont été rendues, les transactions judiciaires approuvées ou conclues et les actes authentiques dressés, en matière civile ou commerciale, et pour des créances incontestées dans tous les États membres (à l’exception du Danemark), après le 21 janvier 2005 et, pour la Bulgarie et la Roumanie, après le 1er janvier 2007.

Une créance est considérée comme incontestée conformément à l’article 3, § 1 du règlement :

si le débiteur l’a expressément reconnue en l’acceptant ou en recourant à une transaction qui a été approuvée par une juridiction ou conclue devant une juridiction au cours d’une procédure judiciaire ;

si le débiteur ne s’y est jamais opposé, conformément aux règles de procédure de l’État membre d’origine, au cours de la procédure judiciaire ;

si le débiteur n’a pas comparu ou ne s’est pas fait représenter lors d’une audience relative à cette créance après l’avoir initialement contestée au cours de la procédure judiciaire, pour autant que sa conduite soit assimilable à une reconnaissance tacite de la créance ou des faits invoqués par le créancier en vertu du droit de l’État membre d’origine ;

si le débiteur l’a expressément reconnue dans un acte authentique.

Le règlement s’appliquera aussi aux décisions rendues à la suite de recours formés contre des décisions, des transactions judiciaires ou des actes authentiques certifiés comme étant des titres exécutoires européens.

Le créancier aura toujours le choix entre le titre exécutoire européen et la déclaration constatant la force exécutoire dans l’État membre où l’exécution est demandée et la procédure d’exequatur prévue dans le règlement Bruxelles ci-dessus étudié.

La procédure de certification d’un titre exécutoire européen sera plus rapide et moins coûteuse, pour autant que les conditions de son application soient remplies.

1357 Le règlement prévoit que lorsqu’une décision a été certifiée en tant que titre exécutoire européen dans l’État membre d’origine, elle sera reconnue et exécutée dans les autres États membres, sans qu’une déclaration constatant la force exécutoire soit nécessaire et sans qu’il soit possible de contester sa reconnaissance463.

Pour obtenir cette certification, l’intéressé doit introduire une demande auprès de la juridiction ayant rendu la décision d’origine, ou de l’autorité ayant établi l’acte authentique. La procédure sera différente selon que la demande concerne une décision judiciaire (formulaire annexe I), une transaction judiciaire (formulaire annexe II) ou un acte authentique (formulaire annexe III).

Une décision sera certifiée en tant que titre exécutoire européen si les conditions prévues par l’article 6 du règlement sont remplies :

si la décision est exécutoire dans l’État membre d’origine ;

s’il s’agit d’une « créance incontestée » et si la décision a été rendue dans l’État membre où le débiteur a son domicile ;

s’il s’agit d’une créance incontestée et si elle se rapporte à un contrat conclu par une personne ;

si le consommateur a un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle et si le débiteur est le consommateur.

1358 Pour exécuter la créance, l’intéressé devra fournir aux autorités chargées de l’exécution dans l’État membre d’exécution une expédition de la décision ainsi qu’une expédition du certificat de titre exécutoire européen464.

Le débiteur peut demander un refus d’exécution si la décision certifiée est incompatible avec une décision rendue antérieurement dans tout État membre ou dans un pays tiers, lorsque – ou si – la décision ou sa certification en tant que titre exécutoire européen ne peut en aucun cas faire l’objet d’un réexamen au fond dans l’État membre d’exécution465.

Le certificat de titre exécutoire européen ne produira ses effets que dans les limites de la force exécutoire de la décision466.

D/ Le règlement « Saisie conservatoire des avoirs bancaires »

1359 Le règlement n° 655/2014 du 15 mai 2014 créant une procédure d’ordonnance européenne de saisie conservatoire des comptes bancaires, destinée à faciliter le recouvrement transfrontière de créances en matière civile et commerciale, est entré en vigueur dans les États membres de l’Union européenne, à l’exception du Royaume-Uni et du Danemark, le 18 janvier 2017. L’ordonnance européenne de saisie conservatoire des comptes bancaires (OESC) permet à une juridiction d’un État membre de geler des fonds sur le compte bancaire d’un débiteur dans un autre État membre. Cette procédure concerne uniquement le cas ou le créancier n’est pas domicilié dans le même État membre où se trouve le compte du débiteur (litiges transfrontières uniquement).

1360 Le créancier doit introduire une demande au moyen d’un formulaire type. Cette demande peut être adressée avant l’obtention d’une décision, d’une transaction ou d’un acte authentique ou après son obtention467. La juridiction ne délivre l’ordonnance de saisie conservatoire qu’à la condition que le créancier apporte la preuve de l’urgence, à savoir qu’il existe un risque réel qu’à défaut d’une telle mesure le recouvrement ultérieur de sa créance sera empêché ou rendu sensiblement plus difficile, et si la décision n’est pas obtenue la preuve qu’il sera probablement fait droit à sa demande au fond contre le débiteur468.

L’ordonnance de saisie conservatoire délivrée sera reconnue dans les autres États membres sans qu’une procédure spéciale soit requise et est exécutoire dans les autres États membres sans qu’une déclaration constatant sa force exécutoire soit nécessaire469.

L’ordonnance sera ensuite adressée à la banque du débiteur qui, à réception, bloquera les fonds sans tarder, sous peine d’engager sa responsabilité. La banque devra, sauf exception, informer la juridiction et le créancier au moyen d’un formulaire, dans les trois jours. L’ordonnance sera notifiée ou signifiée au débiteur qui dispose de moyens de recours contre l’ordonnance ou son exécution dans les conditions prévues aux articles 33, 34 et 35 du règlement.

Sous-section II – La convention de Lugano

1361 La (première) Convention de Lugano relative à la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, qui a été abordée dans le chapitre « Compétence internationale des tribunaux français », a été signée le 16 septembre 1988. Cette convention fonctionnait en parallèle de la Convention de Bruxelles de 1968, relative à la même matière. Cette convention a pour objet de déterminer, lorsqu’un procès civil ou commercial présente un caractère transfrontalier, les règles de compétence judiciaire et d’exécution des décisions, et par la même l’État membre dont l’ordre juridictionnel sera compétent.

Cette convention est applicable entre les anciens États membres de l’Union européenne, la Pologne et les États membres de l’AELE (Suisse, Norvège, Islande, à l’exception du Liechtenstein). Elle a été révisée par une nouvelle convention signée le 30 octobre 2007 (« Lugano II ») entrée en vigueur le 1er janvier 2010 dans tous les États membres de l’Union européenne et en Norvège, en Suisse depuis le 1er janvier 2011 et en Islande depuis 1er mai 2011.

Les décisions d’un État membre circulent librement dans tous les autres États membres de l’Union européenne ainsi que dans les États de l’AELE, conformément au règlement Bruxelles I. Leur reconnaissance résulte de la convention de Lugano elle-même.

1362 Conformément à l’article 33 de la convention de Lugano, les décisions rendues dans un État lié par la convention sont reconnues dans les autres États liés par la même convention, sans qu’il soit nécessaire de recourir à aucune procédure.

Les seuls cas de non-reconnaissance sont prévus à l’article 34 de la convention : si la reconnaissance est manifestement contraire à l’ordre public de l’État requis, si l’acte introductif d’instance ou un acte équivalent n’a pas été notifié ou signifié au défendeur défaillant en temps utile et de telle manière qu’il puisse se défendre, si la reconnaissance est inconciliable avec une décision rendue entre les mêmes parties.

Sous-section III – Les traités bilatéraux signés par la France

1363 La France a conclu un certain nombre de conventions avec différents États pour faciliter l’accueil des décisions étrangères. On n’évoquera pas l’ensemble de ces conventions, qui sont simplement rappelées dans le tableau synthétique ci-après. Chacune des conventions fixe ses propres critères de contrôle de la reconnaissance et de l’exécution des décisions prononcées dans l’autre État partie. Par ailleurs, on attirera l’attention sur le fait que ces conventions peuvent prévoir des conditions procédurales spécifiques. Pour un exemple, il peut être cité un cas de contrôle de la compétence indirecte d’un juge burkinabé dans un arrêt rendu par la Cour de cassation le 15 mai 2018470. Par exemple, dans la convention brésilienne, il est repris les cinq critères de l’arrêt Münzer471.

Section II – La jurisprudence

1364 Les règles de reconnaissance et d’exécution des décisions étrangères ont été mises en place par la Cour de cassation dans un arrêt Parker rendu le 19 avril 1819472. Les juges ont décidé qu’un jugement étranger ne sera déclaré exécutoire en France qu’après que le juge français aura procédé à un examen du jugement, qui se pratiquera même si un Français est en cause. Ainsi, l’exécution implique une reconnaissance préalable. Le juge français ne reconnaîtra pas la décision si elle n’est pas conforme à ce que lui-même aurait jugé. La reconnaissance de la décision est ainsi conditionnée par une identité matérielle. Ce principe de révision laissait les parties dans une incertitude juridique pendant toute la procédure où le juge réétudiait leur cas en fait et en droit, et aboutissait en pratique à une non-reconnaissance. Après une longue évolution, l’arrêt Münzer473est venu supprimer ce pouvoir de révision et le transformer en pouvoir de contrôle sur des points précis. Depuis, la liste de ces points de contrôle a elle-même évolué pour en dernier lieu dépendre de l’arrêt Cornelissen474.

Dès lors, pour qu’un jugement étranger puisse produire ses effets en France, il doit être régulier (Sous-section I). Cette condition fait l’objet d’un contrôle par le juge : la procédure d’exequatur (Sous-section II).

Sous-section I – Les conditions de la reconnaissance : la régularité

1365 L’arrêt Münzer fixe les cinq conditions pour que la décision étrangère soit régulière :

le jugement doit avoir été pris par un tribunal compétent ;

la procédure suivie devant ce tribunal doit être régulière ;

la loi doit être compétente au regard des règles de conflit françaises ;

le jugement doit être conforme à l’ordre public ;

et le jugement doit être pris sans fraude à la loi.

1366 Deux conditions ont depuis été abandonnées. En premier lieu, le contrôle de la régularité de la procédure suivie à l’étranger a été abandonné par la Cour de cassation dans un arrêt Bachir475. Ce critère posait la difficulté pour le juge français, d’une part de connaître la procédure étrangère pour vérifier sa régularité et, d’autre part de dire à son homologue étranger comment il aurait dû l’appliquer. Ce critère a été intégré dans la condition de conformité à l’ordre public et des droits de la défense.

En second lieu, le contrôle de la loi appliquée a été purement et simplement abandonné par la Cour de cassation dans un arrêt Cornelissen476. Ce critère imposait au juge étranger d’appliquer la règle de conflit française pour déterminer la loi applicable (identité conflictuelle). À défaut, le jugement étranger ne pouvait pas être déclaré exécutoire. Ce critère avait déjà été assoupli par la technique du renvoi477et par l’exception d’équivalence478. Désormais, on met l’accent sur le conflit de juridictions et le contrôle de la compétence du juge étranger.

Il résulte de l’arrêt Cornelissen, ci-dessus cité, que l’accueil des décisions judiciaires étrangères appelle aujourd’hui de trois conditions : la compétence indirecte du juge étranger (§ I), la conformité de la décision étrangère à l’ordre public international (§ II), et l’absence de fraude (§ III).

§ I – La compétence indirecte du juge étranger

1367 La décision étrangère n’est régulière que si elle a été rendue par un juge compétent. Cette compétence est appréciée au regard de la loi du for. On parle de compétence indirecte (lorsque le juge français est saisi d’une question au fond, on parle alors de compétence directe ; V. chapitre précédent).

Pour que le juge étranger soit régulièrement compétent, doit-on se fier aux règles de compétence françaises ? Il s’agirait donc de bilatéraliser nos règles de compétence. Le juge étranger sera régulièrement compétent si le juge français l’avait été dans la même situation. Si l’on répondait par la positive à cette question, cela nuirait à la circulation des décisions étrangères et aurait pour conséquence la perte pour les parties des droits acquis à l’étranger et l’obligation pour celles-ci de refaire leur procès.

Doit-on alors se fier aux règles étrangères ? Ici au contraire, il s’agirait d’un système unilatéral. Cela conduirait à accepter la décision prise par un juge malgré un lien très éloigné, voire inexistant avec le litige.

Face à cette situation, la Cour de cassation a fixé, dans un arrêt du 6 février 1985 rendu dans l’affaire Simitch479, une règle autonome de compétence indirecte du juge étranger480 : « Toutes les fois que la règle française de solution des conflits de juridictions n’attribue pas compétence exclusive aux tribunaux français, le tribunal étranger doit être reconnu compètent, si le litige se rattache d’une manière caractérisée au pays dont le juge a été saisi, et si le choix de la juridiction n’a pas été frauduleux ».

Dès lors, pour que le juge étranger soit reconnu compétent, trois conditions sont requises : que les tribunaux français n’aient pas de compétence exclusive (A), que le litige ait un lien avec le pays étranger en question (B), et que la saisine ne soit pas frauduleuse (C).

A/ Les tribunaux français ne doivent pas avoir une compétence exclusive

1368 Lorsque les tribunaux français ont une compétence exclusive en vertu d’une règle de compétence directe, l’exequatur doit être refusé.

Pendant longtemps, la compétence exclusive du juge français a résulté de la nationalité française d’une des parties et était fondée sur les articles 14 et 15 du Code civil. L’arrêt Prieur, rendu par la Cour de cassation le 23 mai 2006, a mis fin à cette règle en décidant que « l’article 15 du Code civil ne consacre qu’une compétence facultative de la juridiction française, impropre à exclure la compétence indirecte d’un tribunal, dès lors que le litige se rattache de manière caractérisée à l’État dont la juridiction est saisie et que le choix n’est pas frauduleux ». Dans un arrêt Fercométal rendu le 22 mai 2007, le juge a précisé que l’article 14 du Code civil n’ouvre au demandeur français qu’une simple faculté, et n’édicte pas une règle impérative, exclusive de la compétence indirecte d’un tribunal étranger déjà saisi et dont le choix n’est pas frauduleux. Le juge français pourra se déclarer incompétent en faisant jouer l’exception de litispendance481internationale.

Les juges français ont une compétence exclusive en vertu de l’article 24 du règlement Bruxelles I bis, compétence fondée sur la matière (immobilier, questions relatives aux personnes morales ayant leur siège en France, validité des inscriptions sur les registres publics, inscription des brevets, marques…, et mesures d’exécution).

De la même manière, le juge français pourra être exclusivement compétent en vertu d’une clause attributive de juridiction licite conformément aux articles 25 ou 26 du règlement Bruxelles I bis.

La décision du juge étranger ne pourra pas être reconnue si la protection des parties faibles n’a pas été assurée482.

B/ Le litige doit avoir un lien avec le pays étranger

1369 La Cour de cassation ne donne pas de précision à ce sujet. Ce lien est apprécié en fonction des circonstances et du litige. Ainsi, dans les arrêts Simitch et Prieur (ci-dessus cités), l’exigence est un lien caractérisé avec le pays du juge saisi.

C/ Le choix du juge étranger ne doit pas être frauduleux

1370 Les parties, ou l’une d’elles, pourront être tentées de saisir un juge étranger dans le but d’obtenir à l’étranger un jugement une décision différente de celle qui aurait été prise France. Ce recours, que l’on dénomme le forum shopping, a pour but non pas d’éluder une loi, mais d’éluder le jugement qu’on aurait obtenu en France, même si le contenu du jugement dépendra bien évidemment de la loi appliquée. L’objet de la fraude est bien le jugement, le changement de loi appliquée n’est que le moyen utilisé. Il faut cependant nuancer le propos. Le fait de changer volontairement de nationalité ou de pays pour obtenir un jugement étranger plus favorable n’est pas en soi frauduleux. La fraude exige un élément intentionnel, celui d’aller chercher devant un juge étranger une décision pour qu’elle prenne effet en France alors que par une saisine directe du juge français, la solution n’aurait pas été la même.

1371 La fraude peut consister en la manipulation d’un facteur de rattachement avec une juridiction étrangère. Une jurisprudence abondante concerne les divorces. L’arrêt rendu par la Cour de cassation le 2 octobre 1984483illustre bien ce cas. Rappelons les faits. Un couple marié, tous deux de nationalité américaine et vivant à New York, décident d’un commun accord de fixer fictivement leur résidence aux îles Vierges, uniquement pour obtenir un divorce plus rapidement que dans leur État. Leur divorce est prononcé en 1952. Puis monsieur se remarie en France et par la suite demande l’annulation de son mariage pour bigamie. Les juges refusent de reconnaître le divorce prononcé en statuant que : « La saisine de l’accord des deux époux, d’une juridiction, qui n’était pas compétente, avait été artificielle et frauduleuse et que la loi appliquée au fond, (…) n’avait en vertu de la règle de conflit française aucun titre à régir la dissolution du mariage ». Ici, la fraude ne concernait pas les tribunaux français et l’intention initiale n’était pas d’invoquer le jugement de divorce en France, mais incidemment la fraude au jugement étranger a été constatée par les juges français.

C’est dans le même sens que la cour a refusé de reconnaître le divorce des époux Lemaire484, domiciliés à Paris, et qui étaient allés obtenir leur divorce devant le tribunal de Port-au-Prince en application de la loi haïtienne. Cette loi, plus favorable que la loi française, permettait de divorcer après trois années de séparation.

Ces deux arrêts illustrent non seulement le contrôle des juges sur la saisine frauduleuse d’un juge étranger, mais également sur la loi choisie par cette juridiction incompétente. Le premier critère permettait la non-reconnaissance de la décision, le cumul du second paraît inutile485.

1372 La saisine d’une juridiction étrangère dont le seul but est d’échapper à l’exécution d’une décision française est également considérée comme frauduleuse. Ainsi, dans une affaire Senoussi en date du 1er mars 1988486, la Cour de cassation annule l’arrêt de la cour d’appel de Douai qui avait déclaré recevable le jugement de divorce des époux Senoussi prononcé en Algérie, sans rechercher si le choix de la juridiction algérienne n’avait pas été frauduleux et n’avait pas été fait dans le seul but d’échapper aux conséquences du jugement français qui avait condamné M. Senoussi à contribuer aux charges du mariage.

1373 Il en de même lorsque le juge étranger est saisi dans le but de faire échec à une saisie antérieure du juge français. Dans un arrêt en date du 20 juillet 2012487, les juges ont rejeté le pourvoi de M. Harfouche, lequel reprochait au juge français de ne pas reconnaître l’autorité de chose jugée attachée au jugement de divorce qu’il avait obtenu en Algérie, et de déclarer recevable l’action de son ex-épouse en contribution aux charges du mariage. En l’espèce, les juges ont estimé qu’il y avait eu fraude. M. Harfouche, qui vivait depuis une dizaine d’années en France, avait quitté le domicile familial et avait saisi le juge algérien d’une demande en divorce pour échapper à une condamnation au versement d’une contribution aux charges du mariage pouvant intervenir suite à la requête déposée par son épouse et dont il avait accusé réception.

Les juges se sont prononcés pour une absence de fraude dans un arrêt rendu le 12 juillet 2017488. La décision des juges français avait été annulée au moment de la saisie du juge étranger.

Il résulte d’un arrêt rendu par la Cour de cassation le 17 décembre 2014489que l’existence d’un lien de rattachement entre le litige et le juge étranger saisi n’exclut pas la fraude.

§ II – La conformité de la décision à l’ordre public international

1374 Pour être reconnu en France, le jugement étranger doit être conforme à l’ordre public. L’exception d’ordre public est soulevée par le juge lorsque l’application ou la reconnaissance du jugement étranger risque de perturber notre ordre juridique, car son contenu heurte nos conceptions dominantes du droit490.

La décision étrangère ne respectant pas l’ordre public du for sera simplement évincée. Il n’y aura pas de jugement de substitution comme en matière de conflit de lois où la loi étrangère contraire à l’ordre public est évincée pour être remplacée par la loi française.

1375 Il n’y a pas de définition précise de la conception française de l’ordre public491.

Dans un arrêt Lautour492, les juges de la Cour de cassation s’étaient référés aux « principes de justice universelle considérés dans l’opinion française comme doués de valeur internationale absolue ». Dans un arrêt plus récent, rendu le 8 juillet 2010 en matière d’adoption, la Cour de cassation caractérise l’ordre public par référence aux « principes essentiels du droit français »493. Il s’agit de protéger la personne humaine, ses droits au regard des principes existant dans la société dans laquelle elle vit.

1376 La conception de l’ordre public peut avoir un caractère évolutif. Prenons pour exemple l’égalité des filiations. Jusqu’à la loi du 3 janvier 1972, un enfant naturel avait moins de droits qu’un enfant légitime, ainsi le modèle familial était protégé. La loi de 1972 a posé le principe d’égalité de l’enfant légitime avec l’enfant naturel, mais pas avec l’enfant adultérin. La société protégeait ainsi l’époux ou l’épouse bafoué(e). L’ordonnance du 4 juillet 2005 (faisant suite à la loi du 4 mars 2002) a posé le principe de l’égalité de filiation, qui fait partie aujourd’hui de notre ordre public international.

Cette contrariété peut exister par son contenu (« ordre public de fond ») (A), ou par son mode d’élaboration (« ordre public de procédure ») (B)494.

A/ Contenu de la loi étrangère conforme à l’ordre public : ordre public de fond

1377 La loi étrangère appliquée ne doit pas contrevenir aux valeurs substantielles françaises. À défaut de définition précise de la notion de « valeurs françaises », les solutions jurisprudentielles délimitent le contour de cette notion. Les juges n’appliquent pas le même degré de contrariété à l’ordre public lorsqu’il s’agit de reconnaître des droits acquis à l’étranger ou de créer des droits en France. La décision ayant déjà créé des droits à l’étranger, sera moins perturbatrice en France.

Dans un arrêt Rivière495, la Cour de cassation opère cette distinction : « La réaction à l’encontre d’une disposition contraire à l’ordre public n’est pas la même suivant qu’elle met obstacle à l’acquisition d’un droit en France ou suivant qu’il s’agit de laisser se produire en France les effets d’un droit acquis, sans fraude, à l’étranger ». On parle désormais de l’« effet atténué » de l’ordre public qui vise l’hypothèse dans laquelle les droits acquis à l’étranger vont produire effet en France, par opposition à l’« effet plein » de l’ordre public auquel les juges feront référence lorsqu’il s’agira de créer des droits en France non encore acquis a l’étranger.

Ainsi la Cour de cassation a, dans un arrêt rendu le 3 janvier 1980496, jugé que l’ordre public international ne fait pas obstacle à l’acquisition des droits en France sur le fondement d’un mariage polygamique valablement célébré à l’étranger, alors que ce mariage étant interdit en France. Les mêmes juges, dans un arrêt rendu le 6 juillet 1988497, « s’oppose[nt] à ce que le mariage polygamique contracté à l’étranger par celui qui est encore l’époux d’une Française produise ses effets à l’encontre de celle-ci ».

1378 La jurisprudence est dense, surtout en matière de divorce et d’égalité entre époux.

Ainsi, plusieurs arrêts rendus le 17 février 2004498refusent de reconnaître les décisions de répudiation obtenues en Algérie et au Maroc. En effet, ces décisions qui constatent une répudiation unilatérale du mari sont contraires au principe d’égalité des époux lors de la dissolution du mariage reconnu tant par les textes français que par les textes européens499, et donc contraires à l’ordre public international.

Dans ces arrêts, les juges ont introduit une condition de proximité avec la France (soit la nationalité, soit la domiciliation par l’une ou les deux parties). La tolérance des droits acquis à l’étranger est limitée dès lors qu’il existe un lien avec la France.

Les juges ont réaffirmé à de multiples reprises cette contrariété à l’ordre public après l’entrée en vigueur du nouveau Code de la famille marocain (Moudawana) de 2004, lequel a accru les pouvoirs de l’épouse, sans toutefois parvenir à une égalité entre époux500.

Dans un arrêt rendu le 25 mai 2016501, les juges ont affirmé que le fait pour l’épouse « de solliciter et d’obtenir de la juridiction étrangère une augmentation du don de répudiation ne saurait être considéré comme un acquiescement sans équivoque au jugement étranger constatant une répudiation unilatérale par le mari », et « même si elle résulte d’une procédure loyale et contradictoire, la décision d’une juridiction étrangère constatant une répudiation unilatérale par le mari », est contraire au principe d’égalité des époux et donc contraire à l’ordre public.

1379 La Cour de cassation avait déjà refusé de reconnaître la répudiation sur un autre fondement. En effet, dans un arrêt en date du 16 juillet 1992502, la cour a jugé que la loi marocaine, qui ne prévoit ni prestation compensatoire, ni pension alimentaire pour l’épouse, ni dommages-intérêts pour celle-ci en cas de divorce, est contraire à l’ordre public français. Ainsi, elle reconnaît un ordre public alimentaire.

La Cour de cassation a également érigé en principe essentiel l’égalité parentale au regard de l’autorité sur les enfants503. S’agissant du droit à la filiation, les lois étrangères qui prohibent l’établissement du lien de filiation ne sont en principe pas contraires à l’ordre public international504, mais une loi qui priverait un enfant français ou résidant habituellement en France du droit d’établir sa filiation le sera. Cette solution a été reprise dans un arrêt rendu par la Cour de cassation le 26 octobre 2011505.

La question de la filiation adoptive suscite de nombreuses questions. Quid des pays qui interdisent l’adoption ? Dans un arrêt en date du 15 décembre 2010506, les juges décident que l’interdiction de l’adoption par le droit algérien n’est pas contraire à l’ordre public, dès lors qu’existe la kafala507. La question de l’établissement de la filiation adoptive à l’égard des parents de même sexe se pose également. Il convient de rappeler que le mariage entre personnes de même sexe ayant été autorisé par la loi du 17 mai 2013, dite loi « Taubira », l’adoption de l’enfant de son conjoint est devenue possible, mais également toute autre adoption puisque l’adoption suppose seulement le fait d’être marié.

1380 La Cour de cassation a également érigé, dans un arrêt rendu le 31 mai 1991, relatif aux conventions de mères porteuses, le principe d’indisponibilité de l’état des personnes en principe d’ordre public international français. La convention de mère porteuse passée et exécutée en France contrevient au principe d’indisponibilité du corps humain et à celui de l’indisponibilité de l’état des personnes. La Cour avait déjà refusé de faire produire des effets au regard de la filiation à la gestation pour autrui conduite à l’étranger, par trois arrêts rendus le 6 avril 2011508, sur le fondement du principe de l’indisponibilité de l’état des personnes comme principe essentiel du droit français. La convention de gestation est frappée par une nullité d’ordre public et le lien de filiation en découlant ne pourra être établi. L’intérêt supérieur de l’enfant ne peut contrevenir à ce principe d’ordre public.

1381 Les principes essentiels en droit français comprennent également le principe de proportionnalité de la sanction pécuniaire. La proportionnalité de sanction pécuniaire est analysée au regard du patrimoine du débiteur ou par rapport au montant de la condamnation principale509.

B/ Procédure suivie à l’étranger conforme à l’ordre public : ordre public de procédure

1382 Le jugement étranger ne sera pas reconnu en France si la procédure n’a pas respecté certains principes, principes qui sont fondamentaux en France et qui sont érigés au rang de principe d’ordre public. L’arrêt Bachir510confirme la solution de l’arrêt Munzer de 1964 (sus-cité). La procédure suivie doit être régulière, et la régularité de la procédure devant le juge étranger « doit s’apprécier uniquement par rapport à l’ordre public international français et au respect des droits de la défense ». Les règles de la conduite du procès sont fixées par le Code de procédure civile et complétées par la jurisprudence de la Cour de cassation. Le jugement doit avoir été élaboré dans le respect des garanties fondamentales de la procédure, du principe de motivation et du principe du droit d’accès au juge.

1383 La procédure doit respecter les garanties fondamentales de la procédure.

Les principes directeurs du procès sont prévus aux articles 1er et suivants du Code de procédure civile. Les parties doivent introduire l’instance, en fixer l’objet par leur prétention en fait, et respecter le contradictoire et les droits de la défense.

La procédure doit également respecter les principes édictés par la Convention européenne des droits de l’homme, laquelle a une valeur supra-législative, ainsi que la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. L’article 6, § 1 de ladite convention édicte des conditions pour que le procès soit équitable : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial… ».

Ces principes ont été rappelé tant par la jurisprudence de la Cour de cassation que celle de la Cour européenne.

1384 Le principe du contradictoire renvoie à l’idée d’une confrontation écrite ou orale entre parties opposées. Ce principe est, pour certains, au cœur de l’élaboration du jugement511, et pour d’autres fait partie des droits de la défense. Ainsi la Cour de cassation, dans un arrêt rendu le 6 juin 1990512, a refusé de reconnaître la répudiation prononcée au Maroc au motif que la procédure suivie devant les autorités marocaines n’avait pas permis à l’épouse de faire valoir ses prétentions ou ses défenses.

1385 Pour que la procédure soit régulière,j le juge étranger doit avoir motivé sa décision. Ainsi, dans un arrêt en date du 17 mai 1978513, le juge a décidé qu’« est contraire à la conception française de l’ordre public international la reconnaissance d’une décision étrangère non motivée lorsque ne sont pas produits des documents de nature à servir d’équivalent à la motivation défaillante ». Le jugement qui n’a pas été motivé ne pourra pas être complété par les documents après la date de la saisine du juge514, ces documents devant déjà exister à cette date. Cette solution a été réaffirmée par la Cour de cassation dans un arrêt NML Capital du 28 mai 2014515, dans lequel elle a estimé que le juge américain avait motivé sa décision condamnant la République d’Argentine et que par conséquent elle n’était pas contraire à notre ordre public et pouvait donc recevoir l’exequatur.

1386 Cette procédure, pour être régulière, doit également avoir respecté le principe d’accès au juge. Ainsi en a jugé la Cour de cassation dans un arrêt516opposant l’État d’Israël à la société National Iranian Oil Company (NIOC). Les juges ont considéré que le droit d’accès au juge pour une personne ayant conclu une convention d’arbitrage était le droit d’accès à l’arbitre, que ce principe relevait de l’ordre public international et était consacré tant par les principes de l’arbitrage international que par l’article 6, § 1 de la Convention européenne des droits de l’homme. L’impossibilité d’accéder au tribunal arbitral a été jugée comme constitutive d’un déni de justice et justifiait l’intervention du juge français dès lors qu’un lien avec la France existait.

S’ajoutent également à ces décisions les arrêts rendus par la Cour européenne des droits de l’homme, sur la base de l’article 6, § 1, de la Convention du même nom, qui consacre le « droit au procès équitable ».

§ III – L’absence de fraude

1387 Pour que le jugement étranger puisse être reconnu, le jugement ne doit pas avoir été obtenu frauduleusement. L’absence de fraude est une des conditions édictées par les arrêts Cornelissen et Munzer.

Il existe deux types de fraude :

la fraude aux droits de l’une des parties par l’autre dans le cadre de l’élaboration du jugement, qui est sanctionnée par le principe d’ordre public procédural, étudié ci-avant ;

la fraude à l’égard du pays dont la loi ou les tribunaux sont compétents.

A/ La fraude à la loi

1388 L’une ou les deux parties obtiennent l’application d’une loi étrangère qui, en principe, n’est pas compétente. Des époux français changent de nationalité et obtiennent un jugement de divorce dans un pays étranger alors qu’en France le divorce était interdit et que la loi applicable au divorce était la loi nationale. Il y a une intention de fraude qui s’accompagne souvent d’un forum shopping. Pour refuser de reconnaître ces jugements, il convient de vérifier la loi appliquée par le juge étranger. Or, cette vérification n’existe plus en droit français.

Cette fraude ne pourra être invoquée qu’au moment de la reconnaissance du jugement, en tant que fraude au jugement.

B/ La fraude au jugement

1389 L’une ou les deux parties saisissent les tribunaux étrangers pour obtenir un jugement qu’elles n’auraient pas pu avoir auprès de la juridiction normalement compétente. Ce point a déjà été étudié (V. supra, nos a1370 et s.).

Sous-section II – La procédure de contrôle de l’efficacité des jugements étrangers

1390 En présence d’un jugement étranger, le notaire ou le juge peut-il l’appliquer directement ? L’article 509 du Code de procédure civile dispose : « Les jugements rendus par les tribunaux étrangers et les actes reçus par les officiers étrangers sont exécutoires sur le territoire de la République de la manière et dans les cas prévus par la loi ». Cet article ne vise que l’exécution et pas la reconnaissance.

Un jugement étranger, dès lors qu’il remplit les conditions de régularité, est reconnu de plein droit et a autorité de la chose jugée, à l’exception des jugements patrimoniaux déclaratifs émanant d’États non membres pour lesquels un doute subsiste (§ I). La mise à exécution d’un jugement étranger nécessite, par application des articles 509 du Code de procédure civile et 2412, alinéa 2 du Code civil, la mise en œuvre d’une procédure d’exequatur (§ II).

Il convient ici de préciser que l’expression « le jugement étranger a autorité de chose jugée en France » est impropre, car une norme ne peut avoir d’autorité qu’à l’égard des organes de l’État dont elle émane. Le juge français ne lui confère aucune autorité. Il fait produire des effets à un jugement étranger qui consacre un état de droit.

§ I – La reconnaissance de plein droit, ou l’effet de plano des décisions étrangères

1391 Le jugement étranger n’est soumis à aucune formalité préalable pour être reconnu. Néanmoins, il doit remplir les conditions de régularité internationale (V. supra, a1365 et s.). La Cour de cassation a admis, à partir de 1860, que les jugements en matière d’état des personnes produisent effet de plein droit. Ce principe a été posé par l’arrêt Bulkley517 : une personne régulièrement divorcée à l’étranger peut se remarier en France sans exequatur. La loi interdisait alors le divorce en France518et la reconnaissance des divorces étrangers, qui étaient considérés comme contraires à l’ordre public. Cet arrêt pose le principe d’effet de plein droit des jugements étrangers constitutifs de droits, et ce à l’égard même des Français, puisque Mme Bulkley se remariait avec un Français. Cette solution a été étendue à la nullité du mariage dans un arrêt De Wrède du 9 mai 1900, puis à la filiation dans un arrêt des 11 avril et 1er mai 1945.

La Cour de cassation a posé une limite à l’effet de plein droit desdits jugements, dans un arrêt Hainard rendu le 3 mars 1930519, lorsque «  les jugements doivent donner lieu à des actes d’exécution matérielle sur les biens ou de coercition sur les personnes ».

Puis la Cour de cassation a reconnu de plein droit les jugements constitutifs de droits, par exemple un jugement conférant une qualité ou un titre en matière patrimoniale, la nomination d’un administrateur dans une succession520, un tuteur, un liquidateur en matière de procédures collectives.

1392 S’agissant des jugements patrimoniaux et déclaratifs, ceux-ci ne bénéficiaient pas de la reconnaissance de plein droit, ainsi en avait décidé la Cour de cassation dans un arrêt Negretto rendu le 26 juin 1905521. Mais la cour, évoluant dans sa position, a reconnu dans une affaire Locautra522le jugement allemand qui annulait une vente et sur le fondement duquel le vendeur réclamait les biens vendus se trouvant en France.

Dans un arrêt de principe Société Miniera du Fragne523, la Cour de cassation a jugé recevable l’exception de litispendance internationale en raison d’une instance engagée devant un tribunal étranger également compétent dès lors que la décision à intervenir à l’étranger était susceptible d’être reconnue en France. Si l’on accepte d’arrêter une procédure en France pour tenir compte d’une future décision qui serait applicable, il n’est plus acceptable de ne pas prendre en compte les décisions étrangères existantes524.

§ II – Les procédures indépendantes d’un exequatur

1393 Le jugement étranger (constitutif ou relatif à l’état ou la capacité des personnes) bénéficie d’une reconnaissance de plein droit. Ce jugement peut donc être invoqué lors d’une instance au fond, et s’il est jugé régulier, il aura autorité par incidence (A). Il pourrait également être contesté, et pour empêcher qu’il ne soit produit en cours d’instance, une action peut être introduite en amont pour que le juge statue sur sa non-reconnaissance. Les parties peuvent, pour mettre fin à l’incertitude sur sa reconnaissance, introduire une action déclaratoire en opposabilité ou inopposabilité (B).

A/ La reconnaissance incidente

1394 La question de la reconnaissance peut être posée dans types de procédures :

soit une nouvelle instance a lieu en France avec le même objet qu’à l’étranger ;

soit une instance a lieu en France avec un objet différent de celui tranché par le juge étranger.

Dans tous les cas, le juge saisi de l’action principale vérifiera incidemment la régularité du jugement étranger pour lui donner l’effet demandé.

1395 Lorsque l’instance concerne le même objet que celui du jugement étranger, le défendeur pourra soulever l’exception de chose jugée. Le juge peut également relever d’office525la fin de non-recevoir de la chose jugée526.

Pour que cette exception soit recevable, encore faut-il que la décision étrangère ait autorité de chose jugée dans son état d’origine. Pour vérifier l’autorité de la chose jugée, il faut se référer à la loi étrangère.

1396 Lorsque l’instance porte sur une chose distincte de celle jugée à l’étranger, l’une des parties peut invoquer le jugement étranger.

Le demandeur peut l’invoquer pour soutenir ses prétentions, par exemple une réclamation d’aliments fondée sur le jugement de filiation obtenu à l’étranger527.

Le défendeur peut l’invoquer pour faire échec à la demande. Par exemple, le défendeur à l’action en divorce peut invoquer un jugement étranger prononçant la nullité dudit mariage.

Il reviendra à celui qui conteste la reconnaissance demandée de prouver l’irrégularité. Ainsi en ont décidé les juges dans un arrêt rendu au sujet de la régularité d’une décision de divorce obtenue à l’étranger528.

De la même manière, l’étendue de l’autorité de la chose jugée est déterminée par la loi étrangère.

1397 Une difficulté apparaît lorsque la reconnaissance du jugement étranger est faite devant une personne autre qu’un juge, une personne qui n’a pas le pouvoir de contrôler la régularité, comme l’officier d’état civil. L’officier d’état civil chargé de célébrer un mariage auquel on présente un jugement de divorce rendu à l’étranger doit-il vérifier ou attendre une vérification de la régularité de ce jugement ? La réponse est négative, il doit célébrer le mariage conformément à l’instruction générale relative à l’état civil et à la jurisprudence de l’arrêt Bulkley précité, même si la validité du mariage qu’il célèbre pourra être contestée devant un juge529.

Une fois le jugement reconnu, la solution étrangère sera également consacrée en France. Il ne s’agit pas d’un nouveau jugement. L’état de droit remonte bien au moment arrêté par le jugement étranger, à savoir pour un jugement déclaratif au jour où est survenu le fait qui l’a instauré, et pour un jugement constitutif au jour il a acquis autorité positive de chose jugée à l’étranger, ou à une date indiquée par le jugement lui-même.

B/ L’action déclaratoire en opposabilité ou inopposabilité

1398 Une personne qui ne souhaite pas qu’un jugement rendu à l’étranger puisse un jour lui être opposé peut introduire, à titre préventif, une action déclaratoire en inopposabilité. Cette action a été admise pour la première fois dans l’arrêt Weiller rendu par la Cour de cassation le 22 janvier 1951530, aux termes duquel le mari s’est vu déclarer inopposable le jugement de divorce obtenu frauduleusement par son épouse au Nevada.

Cette action tend au résultat opposé à l’exequatur et suit le même régime procédural.

1399 Puis, dans un arrêt le 3 janvier 1980531, la Cour de cassation a reconnu l’action déclaratoire en opposabilité. Le demandeur met ainsi fin à une incertitude quant à la reconnaissance du jugement étranger.

L’action déclaratoire est ouverte à toute personne qui a un intérêt et peut donc être introduite tant par la personne en faveur de qui le jugement a été prononcé que contre la personne condamnée. La jurisprudence ne distingue pas les catégories de jugements étrangers à cet égard.

Cette action, bien qu’utile, présente dans certaines situations une incohérence. Lorsque l’exequatur est demandé simplement à des fins d’opposabilité par une personne autre que la personne victorieuse à l’étranger, l’instance aboutit à l’octroi de l’effet exécutoire, ce qui est illogique.

Lorsque le juge français constate l’irrégularité du jugement qui est invoqué lors d’une instance ou lors d’une action déclaratoire et décide qu’il ne peut pas faire l’objet de reconnaissance, cette décision a autorité de chose jugée à l’égard des parties qui ne pourront plus en demander l’exequatur.

§ III – La procédure d’exequatur

1400 L’exequatur est une autorisation judiciaire d’exécuter un acte juridictionnel ou gracieux dépourvu de force exécutoire dans l’ordre juridique du juge requis, soit en raison de son extranéité (jugement ou acte public étranger), soit en raison de son caractère privé (sentence arbitrale).

Il sera étudié dans un premier temps les conditions de sa recevabilité (A), puis la procédure elle-même (B).

A/ Les conditions de recevabilité de l’exequatur

1401 Seule la partie victorieuse à l’étranger a en principe intérêt à agir et demander l’exequatur. Pour qu’il y ait exécution forcée sur des biens, il faut de plus établir l’existence de ces biens en France.

1402 L’action doit être introduite devant le tribunal de grande instance statuant à juge unique, conformément à l’article R. 212-8, alinéa 2 du Code de l’organisation judiciaire, qui dispose que : « Le tribunal de grande instance connaît à juge unique : (…) 2° Des demandes en reconnaissance et en exequatur des décisions judiciaires et actes publics étrangers ainsi que des sentences arbitrales françaises ou étrangères ». Les tribunaux français sont compétents internationalement pour connaître de l’exequatur.

Le tribunal compétent est celui du domicile du défendeur. Le demandeur à l’exequatur peut également saisir le tribunal du lieu où il sera procédé à l’exécution forcée. À défaut de domicile, et en l’absence de volonté ou de possibilité de procéder à une exécution forcée, le choix du tribunal est fondé sur une question de bonne administration de la justice.

1403 Pour que la demande d’exequatur puisse être recevable, le jugement étranger doit être exécutoire dans son pays d’origine.Mais la demande d’exequatur peut également avoir pour objectif de vérifier la régularité du jugement étranger et de reconnaître son autorité en France ; cet exequatur aura la même fonction que l’instance en opposabilité ou l’instance en reconnaissance ; le jugement doit avoir un caractère définitif.

Si le jugement étranger est annulé, l’exequatur devient caduc de plein droit.

B/ La procédure d’exequatur

1404 L’exequatur est demandé par voie d’assignation de la partie adversaire au jugement étranger.

Le juge peut accorder ou refuser l’exequatur, ou ne l’accorder que partiellement. Le juge refusera de connaître d’une demande distincte qui accompagnerait la demande d’exequatur. Seules les demandes connexes sont admises.

Le juge ne peut, depuis la fin de la révision, modifier le jugement étranger.

Le jugement d’exequatur est exécutoire, et les voies d’exécution sont celles du droit français. L’exécution provisoire peut être demandée. La prescription de la condamnation est soumise aux règles du droit français.

Le jugement d’exequatur a autorité de chose jugée. Si la décision soumise à exequatur avait un effet de plano, l’exequatur confirme la régularité du jugement et a de ce fait un effet similaire à l’action déclaratoire en inopposabilité ou en reconnaissance incidente. Dans le cas contraire, l’exequatur confère l’autorité de chose jugée, et consacre ainsi l’état de droit créé par le jugement français. Le point de départ de l’état de droit étant celui du jugement étranger et non la date d’exequatur.

1405 Il y a lieu de rappeler que le juge doit, avant d’accorder ou refuser l’exequatur, vérifier que les conditions de l’exequatur sont remplies conformément aux arrêts Munzer et Cornelissen rendus par la Cour de cassation.

Le juge doit, en présence d’un jugement irrégulier dont l’irrégularité n’est pas soulevée par les parties, procéder d’office à ce contrôle et refuser l’exequatur en cas d’irrégularité. Lorsque le juge a un doute sur le jugement étranger et notamment lorsqu’il n’est pas suffisamment motivé, il doit refuser l’exequatur.


396) P. Mayer et V. Heuzé, Droit international privé, LGDJ, 11e édition, p. 294. – Encyclopédie ou dictionnaire raisonné des sciences et des arts et des métiers, t. XXIV, p 615.
397) Cass. 1re civ., 7 janv. 1964 : Rev. crit. DIP 1964, 344, note H. Batiffol.
398) Règl. n° 2201/2003, 27 nov. 2003, dit « Bruxelles II bis ».
399) Règl. n° 4/2009, 18 déc. 2008.
400) Règl. n° 650/2012, 4 juill. 2012.
401) Règl. n° 2016/1103, 24 juin 2016.
402) Règl. n° 2016/1104, 24 juin 2016.
403) Règl. n° 805/2004, 21 avr. 2004.
404) Règl. n° 1896/2006, 12 déc. 2006.
405) Règl. n° 861/2007, 11 juill. 2007.
406) Règl. n° 655-2014, 15 mai 2014.
407) Règl. Bruxelles I bis, art. 52
408) Règl. Bruxelles I bis, art. 36, § 1.
409) Règl. Bruxelles I bis, art. 45.
410) Règl. Bruxelles I bis, art. 24.
411) Règl. Bruxelles I bis, art. 10 à 23, assuré en matière d’assurance, consommateur ou travailleur.
412) Cass. 1re civ., 3 juill. 1990 : Rev. crit. DIP 1991, 161, note Droz.
413) CJCE, 28 mars 2000, aff. C-7/98, Krombach : JCP G 10 oct. 2001, n° 41, II, 1060711, note Nourissat.
414) CJCE, 6 juin 2002 : Rev. crit. DIP 2002, 704, 3e esp., note H. Muir Watt.
415) CJCE, 11 mai 2000, Maxicar : Rev. crit. DIP 2000, 497, note Gaudemet-Tallon. – CJCE, 16 juill. 2005, aff. C-681/13, Diageo Brands c/ Simiramida.
416) Règl. Bruxelles I bis, art. 39 : « Une décision rendue dans un État membre et qui est exécutoire dans cet État membre jouit de la force exécutoire dans les autres États membres sans qu’une déclaration constatant la force exécutoire soit nécessaire ».
417) Règl. Bruxelles I bis, art. 42.
418) http://ec.europa.eu/justice_Œhome/judicialatlascivil/html/index_Œfr.htm.
419) Règl. Bruxelles I bis, art. 39.
420) Définition du dictionnaire Larousse : « Procédure rendant exécutoire sur le territoire français une décision judiciaire rendue à l’étranger ou une sentence arbitrale ».
421) Règl. n° 2201/2003, art. 21, § 1.
422) Règl. n° 2201/2003, art. 28. – CJUE, 9 sept. 2015, aff. C-4/14, Bohez.
423) Règl. n° 4/2009, art. 17, § 1.
424) Règl. n° 4/2009, art. 23.
425) Règl. n° 4/2009, art. 17, § 2.
426) Règl. n° 4/2009, art. 26.
427) Règl. n° 4/2009, art. 46.
428) Règl. n° 650/2012, art. 39, § 1.
429) Règl. n° 650/2012, art. 3, § 1, g).
430) Règl. n° 650/2012, art. 39, § 2.
431) Règl. n° 650/2012, art. 39, § 3.
432) Règl. n° 650/2012, art. 40.
433) Règl. n° 650/2012, art. 59.
434) Règl. n° 650/2012, consid. 66.
435) Règl. n° 650/2012, consid. 67.
436) Règl. n° 650/2012, art. 70.
437) Règl. n° 650/2012, art. 74.
438) Règl. n° 650/2012, ann. 2.
439) Règl. n° 650/2012, art. 43.
440) CPC, art. 509-1, al. 1.
441) CPC, art. 509-3, al. 3.
442) CPC, art. 509-4.
443) CPC, art. 509-2, al. 1.
444) CPC, art. 509-3, al. 1.
445) Règl. n° 2016/1103, art. 36, § 1.
446) C. civ., art. 255, al. 10.
447) CPC, art. 1361.
448) Règl. n° 2016/1103, art. 3, § 2. – CEDH, 28 nov. 2000, req. n° 36350/97, Siegel c/ France. – CEDH, 3 oct. 2003, req. n° 35589/97, Kanoun c/ France.
449) E. Gallant et M. Farge, De l’intérêt pour le notariat de s’intéresser aux règles de compétence juridictionnelle internationale : JCP G 20 avr. 2018, n° 20.
450) Règl. n° 2016/1104, art. 36, § 1.
451) Règl. n° 2016/1104, art. 42.
452) Règl. n° 861/2007, art. 2.
453) Règl. n° 861/2007, art. 13.
454) Règl. n° 861/2007, art. 20, § 2.
455) Règl. n° 2017/1260, art. 8.
456) Règl. n° 2017/1260, art. 10.
457) Règl. n° 2017/1260, art. 11.
458) Règl. n° 2017/1260, art. 12.
459) Règl. n° 2017/1260, art. 13.
460) Règl. n° 2017/1260, art. 16.
461) Règl. n° 2017/1260, art. 19.
462) Règl. n° 2017/1260, art. 20.
463) Règl. n° 805/2004, art. 5.
464) Règl. n° 805/2004, art. 20.
465) Règl. n° 805/2004, art. 21.
466) Règl. n° 805/2004, art. 11.
467) Règl. n° 655/2014, art. 6.
468) Règl. n° 655/2014, art. 7.
469) Règl. n° 655/2014, art. 22.
470) Cass. 1re civ., 15 mai 2018, n° 17-17.546, Sopam.
471) Conv. brésilienne, art. 18.
472) Cass. civ., 19 avr. 1819, Parker : GAJFDIP, n° 2.
473) Cass. 1re civ., 7 janv. 1964, Münzer : Rev. crit. DIP 1964, p. 344.
474) Y. Lequette, Les mutations du droit international privé : vers un changement de paradigme : RCADI 2015, vol. 387, p. 152.
475) Cass. civ., 4 oct. 1967 : Rev. crit. DIP 1968, 98, note P. Lagarde ; GAJFDIP, n° 45.
476) Cass. 1re civ., 20 févr. 2007 : Rev. crit. DIP 2007, p. 420 et s., note B. Ancel et H. Muir Watt.
477) T. civ. Seine, 22 oct. 1956.
478) Cass. req., 29 juill. 1929, Drichemont : JDI 1930, 377.
479) Cass. 1re civ., 6 févr. 1985, n° 83-11.241, Simitch : GAJFDIP, n° 70.
480) V., en ce sens, D. Holleaux, Compétence du juge étranger et reconnaissance des jugements, Dalloz, 1970.
481) Définition du dictionnaire Larousse : « Existence simultanée de deux actions pour le même objet et entre les mêmes parties devant deux tribunaux différents ».
482) Règl. Bruxelles I bis, art. 15, 19 et 23.
483) Cass. 1re civ., 2 oct. 1984, n° 82-14.829.
484) Cass. 1re civ., 6 juill. 1988, Lemaire.
485) V. P. Courbe, Le divorce international : premier bilan d’application de l’article 310 du Code civil, Travaux comité fr. DIP, 1991-9, p. 123-146.
486) Cass. 1re civ., 1er mars 1988, n° 87-12.007.
487) Cass. 1re civ., 20 juin 2012, n° 11-30.120, Harfouche.
488) Cass. 1re civ., 12 juill. 2017, n° 15-18.794, Sté Romak.
489) Cass. 1re civ., 17 déc. 2014, n° 13-21.365, Moyne.
490) B. Audit et L. d’Avout, Droit international privé, LGDJ, 11e éd. 2014, n° 205.
491) Rapp. C. cass. 2013, L’ordre public, Livre 3.
492) Cass. civ., 25 mai 1948, Lautour : D. 1948, 357, note P. Lerebours-Pigeonnière.
493) Cass. 1re civ., 8 juill. 2010, n° 08-21.740.
494) Cass. 1re civ., 20 févr. 2007, Cornelissen.
495) Cass. civ., 17 avr. 1953 : Rev. crit. DIP 1953, p. 412 et s., note H. Battifol.
496) Cass. 1re civ., 3 janv. 1980, n° 78-13.762.
497) Cass. 1re civ., 6 juill. 1988, n° 85-12.743.
498) Cass. 1re civ., 17 févr. 2004, n° 01-11.549 : Bull. civ. 2004, I, n° 47 ; n° 02-11.618 : Bull. civ. 2004, I, n° 48 ; D. 2004, p. 824 ; n° 02-17.479 : Bull. civ. 2004, I, n° 46 ; et n° 02-15.766 : Bull. civ. 2004, I, n° 49.
499) Conv. EDH, Prot. n° 7, art. 5.
500) Cass 1re civ., 10 mai 2006, n° 04-19.444 (Moudawana et répudiation unilatérale de l’époux). – Cass. 1re civ., 19 sept. 2007, n° 06-19.577 (art. 48 du Code algérien et répudiation unilatérale de l’époux). – Cass. 1re civ., 4 nov. 2009, n° 08-20.355 (dispositions relatives à l’allocation d’une somme à l’épouse après divorce) et n° 08-20.574 (Moudawana, divorce sous contrôle du juge).
501) Cass. 1re civ., 25 mai 2016, n° 15-10.532.
502) Cass. 1re civ., 16 juill. 1992, n° 91-11.262
503) Cass. 1re civ., 4 nov. 2010, n° 09-15.302.
504) Cass. 1re civ., 10 févr. 1993, n° 89-21.997.
505) Cass. 1re civ., 26 oct. 2011, n° 09-71.369.
506) Cass. 1re civ., 15 déc. 2010, n° 09-10.439.
507) La kafala s’apparente dans notre droit à la délégation d’autorité parentale ou tutelle.
508) Cass. 1re civ., 6 avr. 2011, nos 09-66.486, 10-19.053 et 09-17.130.
509) Cass. 1re civ., 28 janv. 2009, n° 07-11.729. – Cass. 1re civ., 1er déc. 2010, n° 09-13.303. – Cass. 1re civ., 7 nov. 2012, n° 11-23.871.
510) Cass. 1re civ., 4 oct. 1967 : GAJFDIP, n° 45.
512) Cass. 1re civ., 6 juin 1990, n° 88-15.008.
512) L. Cadiet, Droit judiciaire privé, Litec, 1992, n° 461.
513) Cass. 1re civ., 17 mai 1978, n° 76-14.843.
514) Cass. 1re civ., 7 nov. 2012, n° 11-23.871.
515) Cass. 1re civ., 28 mai 2014, n° 13-10.553, NML Capital.
516) Cass. 1re civ., 1er févr. 2005, n° 02-15.237.
516) CEDH, 20 juill. 2001, Pellegrini : Rev. crit. DIP 2004, p. 106.
517) Cass. 1re civ., 28 févr. 1860, Bulkley : GAJFDIP, n° 4. – Cass. 1re civ., 9 mai 1900, De Wrède : JDI 1900, n° 27, p. 613.
518) La loi dite « Bonald » du 8 mai 1816, abolie par la loi dite « Naquet » en date du 27 juillet 1884, qui a rétabli le divorce.
519) Cass. civ., 3 mars 1930, Hainard : GAJFDIP.
520) Cass. civ., 6 juin 1967, Shapiro.
521) Cass. civ., 26 juin 1905, Negretto : Rev. crit. DIP 1905, 1014.
522) Cass. 1re civ., 9 déc. 1974, Locautra.
523) Cass. 1re civ., 26 nov. 1974, Sté Miniera di Fragne : JDI 1975.
524) H. Gaudemet-Tallon, La reconnaissance des jugements étrangers portant sur une somme d’argent, en matière civile et commerciale : RID comp. 1986, p. 501.
525) CPC, art. 125 : « Le juge peut relever d’office la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt, du défaut de qualité ou de la chose jugée ».
526) Cass. civ., 15 mai 1963, Patino.
527) Cass. 1re civ., 10 janv. 1990 : Bull. civ. 1990, I, n° 4.
528) Cass. 1re civ., 19 janv. 1983, Conlon.
529) P. Mayer et V. Heuzé, Droit international privé, LGDJ, 10e éd. 2010, n° 104.
530) Cass. civ., 22 janv. 1951, Weiller : Rev. crit. DIP 1951, 167, note Francescakis.
531) Cass. 1re civ., 3 janv. 1980, Garino : JDI 1980, p. 341.
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