Les propriétaires de bois et forêts ou les ASGF ont la possibilité de confier la maîtrise d'œuvre à des professionnels indépendants (Sous-section I) ou à l'Office national des forêts (Sous-section II). Il s'agit d'alternatives à la gestion par les coopératives forestières (OGEC et OP). Les experts forestiers gèrent environ un million d'hectares en France
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La gestion par des professionnels indépendants et l'ONF
La gestion par des professionnels indépendants et l'ONF
Les professionnels indépendants
– Deux types de professionnels indépendants. – Les experts forestiers (§ I) coexistent avec les gestionnaires forestiers professionnels (§ II).
Les experts forestiers
– Statut protégé de l'expert forestier. – Les experts forestiers sont des personnes physiques exerçant, le cas échéant, dans le cadre d'une structure sociétaire, en leur nom personnel et sous leur responsabilité, des missions d'expertise en matière forestière. Cette profession indépendante est incompatible avec les statuts d'officiers publics et ministériels (C. rur. pêche marit., art. L. 171-1, al. 1).
Bénéficiant d'un titre protégé, ils doivent justifier d'un niveau de formation et d'expérience, d'une assurance de responsabilité professionnelle, et s'engager à respecter l'indépendance nécessaire à l'exercice de ce métier (C. rur. pêche marit., art. L. 171-1, al. 8).
Le titre s'acquiert par l'inscription sur une liste nationale tenue par le Conseil national de l'expertise foncière agricole et forestière (CNEFAF), organisme doté de la personnalité morale (C. rur. pêche marit., art. L. 171-1) et regroupant les experts forestiers et les experts fonciers agricoles.
En septembre 2017, 166 experts forestiers figurent sur la liste tenue par le CNEFAF.
– Missions. – L'expert forestier a pour principale mission la gestion forestière. Il analyse le territoire boisé (peuplements, sols, climat), rédige les plans simples de gestion, conçoit et assure la maîtrise d'œuvre de travaux, le marquage des coupes, et organise la vente des bois pour le compte des propriétaires. Dans ce cadre, il élabore également des dossiers de subvention, aide au recrutement et au management du personnel forestier, gère les relations avec les chasseurs, les collectivités et les assureurs.
À titre accessoire, l'expert forestier estime les territoires forestiers en valeur technique
1505052036449et en valeur vénale dans le cadre de mises en vente, de dossiers de sinistres ou judiciaires. Enfin, il est susceptible d'exercer des activités de gestion et d'entremise immobilière si elles ne portent pas sur une opération faisant l'objet de ses missions d'expertise (C. rur. pêche marit., art. L. 171-1, al. 2). À ce titre, les experts forestiers ne sont pas soumis à la loi Hoguet
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– Sociétés d'épargne forestière. – Dans le cadre de la gestion des sociétés d'épargne forestière
1505057779183, un ou plusieurs experts forestiers sont nommés par la société de gestion pour fixer la valeur du patrimoine forestier. Ce mandat de cinq ans prend effet après acceptation de leur candidature par l'assemblée générale ordinaire des associés (C. monét. fin., art. R. 214-170).
– Garantie de gestion durable. – Le territoire forestier d'un propriétaire recourant à un expert forestier par contrat d'une durée d'au moins dix ans est considéré comme présentant des garanties de gestion durable s'il est géré conformément à un règlement type de gestion (C. for., art. L. 313-2). Cette garantie permet d'accéder aux aides de l'État et de bénéficier des dispositions d'allègements fiscaux telles que le régime Monichon.
– Accès aux données cadastrales. – Afin de favoriser le regroupement de la gestion forestière, les experts forestiers ont accès aux données cadastrales au même titre que les organisations de producteurs (OP) et les gestionnaires forestiers professionnels
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Les gestionnaires forestiers professionnels
– Un statut récent. – Le gestionnaire forestier professionnel (GFP) est un statut créé en 2010
1505059659485. L'objectif poursuivi par les pouvoirs publics est d'accroître le nombre de professionnels susceptibles d'assurer des conseils et de gérer des propriétés privées.
La reconnaissance en tant que GFP est délivrée pour une durée de cinq ans (C. for., art. D. 314-6) à toute personne physique justifiant d'un diplôme spécifique ou d'une expérience professionnelle suffisante (C. for., art. D. 314-3). La demande est adressée au préfet de région du lieu d'exercice de l'activité du demandeur ou du siège social de l'entreprise dans laquelle il travaille (C. for., art. D. 314-6). Après avis du CNPF, le préfet délivre une attestation reconnaissant au demandeur la qualité de GFP. Ce dernier dispose alors d'une compétence nationale.
Aucune disposition ne régit l'assurance de responsabilité civile professionnelle du GFP, échappant au surplus à la loi Hoguet (C. for., art. L. 315-1, al. 2).
– Garantie d'indépendance. – Afin d'éviter les conflits d'intérêts, les GFP ont l'interdiction d'acheter directement ou indirectement les bois issus des forêts dont ils assurent la gestion sous mandat. Ces dispositions ne sont pas applicables aux sociétés coopératives ayant un objet conforme à celui des OGEC (C. for., art. L. 332-6) et dont les salariés sont titulaires de l'attestation reconnaissant la qualité de GFP dans leurs relations avec leurs adhérents (C. for., art. D. 314-8).
– Missions. – Le GFP assure une gestion durable des bois. À ce titre, il est tenu de respecter les documents de gestion durable en vigueur (C. for., art. L. 315-1). Son activité participe à la conservation et à la régie des forêts, mais également à la mise en marché de bois. Il a accès au cadastre au même titre que les experts forestiers
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La gestion par l'Office national des forêts : le régime Audiffred
– La gestion par l'ONF, une solution originale. – Le propriétaire privé de bois et forêts a la faculté de confier la gestion de son territoire à l'Office national des forêts. Cette solution, ouverte depuis 1913
1505115728038, reste toutefois très peu usitée
1505116632421. Ces conventions, dénommées Audiffred
1505120039659, sont régies par les articles L. 315-2 et D. 315-1 à D. 315-9 du Code forestier.
– Missions de l'ONF. – Le particulier a la possibilité de confier la garde et la surveillance de l'exploitation des coupes de ses bois à l'ONF, sur tout ou partie de son territoire. Dans cette hypothèse, les agents de l'ONF sont chargés de la répression des infractions forestières et, sauf convention contraire, de celles liées à la chasse (C. for., art. D. 315-2).
Le propriétaire peut également confier à l'ONF la régie de ses bois.
En pratique, cela recouvre :
- la marque et l'estimation des coupes, la préparation des ventes ;
- le récolement des coupes ;
- la marque et l'estimation des chablis, bois dépérissants et autres produits accidentels ;
- et l'étude, la direction et la surveillance de travaux de boisement et d'entretien.
La convention précise les missions déléguées à l'ONF (C. for., art. D. 315-3).
Par conventions spéciales, le propriétaire délègue à l'ONF la rédaction du plan simple de gestion (PSG), les travaux d'amélioration, les partages et les bornages (C. for., art. D. 315-5).
– Une convention authentique. – La convention est dressée en la forme notariée ou administrative (C. for., art. D. 315-6). Sa durée est de dix ans minimum (C. for., art. L. 315-2, al. 1). Elle contient l'engagement du propriétaire (ou de l'usufruitier) de se soumettre aux règles et décisions de l'ONF pour les opérations lui étant confiées (C. for., art. D. 315-7, al. 2). Elle fixe également les redevances annuelles dues à l'Office.
– Un rôle prééminent. – Dès lors qu'un bois se trouve soumis à une convention Audiffred, le propriétaire sollicite l'accord de l'ONF
1512308705875pour consentir toute coupe ou tout droit d'usage, sous peine de nullité des droits et coupes consentis (C. for., art. L. 315-2).
– Encourager le regroupement de la gestion. – Indépendamment du regroupement de la propriété forestière, les pouvoirs publics ont mis en place une série de dispositifs visant à regrouper la gestion et l'exploitation des bois dans le respect de la multifonctionnalité et de la gestion durable. Les outils existent. Une cohérence se dégage, permettant de grouper les propriétés forestières de petites et moyennes surfaces (de un à vingt-cinq hectares), voire plus vastes dans des GIEEF avec un plan simple de gestion unique. Les associations syndicales de gestion forestière (ASGF) offrent un cadre adapté aux relations économiques et juridiques des membres du GIEEF. Ces organismes ont la possibilité de confier la maîtrise d'œuvre des travaux forestiers et la commercialisation de leur production aux coopératives forestières labellisées OGEC ou OP. Elles peuvent aussi préférer s'en remettre à un expert forestier ou à un gestionnaire forestier professionnel (GFP). Dans tous les cas, le respect de la gestion durable est assuré.
Néanmoins, le manque de clarté des textes engendre une confusion regrettable entre les structures juridiques (ASGF, coopératives) et les agréments (GIEFF, OGEC et OP).
En outre, des améliorations juridiques s'imposent pour les associations syndicales autorisées de gestion forestière (ASAGF). Ces groupements ont en effet vocation à devenir un instrument majeur de la politique de mobilisation et de gestion des bois de petites surfaces de moins de quatre hectares. À cet effet, l'objet de l'ASAGF devrait prévoir dans tous les cas l'élaboration d'un plan simple de gestion concerté. L'association syndicale devrait également assurer la maîtrise d'ouvrage de l'ensemble, sans avoir à solliciter des mandats de la part des propriétaires. Dans les massifs fortement morcelés, il devrait être autorisé de constituer des ASAGF sur le modèle des associations foncières forestières réservées à ce jour aux zones de montagne
1505124468807, permettant de passer outre les propriétés en déshérence. Enfin, de nouveaux modes de gestion sont à imaginer. Certains propriétaires de bois et forêts préféreraient donner à bail leur propriété, plutôt que d'en assurer la gestion, même indirectement par l'intermédiaire d'une coopérative ou d'une association syndicale.
Aujourd'hui, tous les acteurs de la forêt française
1512308834188sont déterminés à améliorer la mobilisation du bois et la gestion des fonctions économique, environnementale et sociale des forêts. Les dispositifs de gestion groupée y contribuent. Est-ce suffisant ? Ne faut-il pas envisager une politique plus coercitive ? La question est sensible : « c'est probablement une question sans vraie solution libérale »
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