- Notion d'attribution préférentielle. - L'article 831 du Code civil dispose que le conjoint survivant ou tout héritier copropriétaire peut demander qu'un bien lui soit attribué par préférence à un autre indivisaire, à charge de soulte s'il y a lieu. Il s'agit d'une opération de partage emportant tous les effets du partage, notamment son effet déclaratif
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Protection par attribution préférentielle du logement au survivant
Protection par attribution préférentielle du logement au survivant
- Domaine et conditions de l'attribution préférentielle. - Sont concernés les indivisions successorales mais également le partage des biens dépendant de la communauté et les indivisions postcommunautaires (C. civ., art. 1475 et s.), les indivisions entre époux séparés de biens après la dissolution du mariage par le décès (C. civ., art. 1542) et, depuis la loi du 23 juin 2006, les indivisions entre partenaires pacsés (C. civ., art. 515-6). Si les concubins se sont vu refuser le bénéfice de l'attribution préférentielle en cas de séparation
, en cas de décès le survivant peut en bénéficier si des droits successoraux lui ont été conférés (par testament)
. Celui qui l'invoque doit :
- occuper le bien à titre de résidence principale ;
- être titulaire de droits en pleine propriété ou en nue-propriété sur le bien , la qualité de simple usufruitier ne suffit pas ;
- présenter sa demande d'attribution préférentielle aux copartageants. Cette demande peut être faite dès l'ouverture de la succession et jusqu'à la clôture des opérations de partage ;
- ne pas avoir été privé expressément ou tacitement de ce droit par le de cujus (legs ou attribution du logement à une autre personne).
- Attribution préférentielle du partenaire et du conjoint. - L'article 515-6 du Code civil renvoie pour le partenaire à l'attribution préférentielle du conjoint survivant
. Il s'agit d'une attribution préférentielle de droit, c'est-à-dire que si ses conditions sont remplies le juge est lié et doit la prononcer. Pour autant, l'époux bénéficie de cette protection en ce que sa seule qualité de conjoint la lui confère, alors que le partenaire ne peut l'invoquer que si le partenaire décédé la lui a conférée.
Le conjoint survivant ou le partenaire pacsé ainsi attributaire du logement peut exiger de ses copartageants, pour le paiement d'une fraction de la soulte égale au plus à la moitié, des délais de paiement ne pouvant excéder dix ans
. La somme restant à devoir portera intérêt au taux légal sauf convention contraire. En cas de vente de la totalité des biens attribués, la fraction de la soulte y afférente devient immédiatement exigible. En cas de ventes partielles, le produit de ces ventes est versé aux copartageants et imputé sur la fraction de la soulte encore due (C. civ., art. 832-4, al. 2 et 3).
- L'attribution préférentielle du concubin. - Le concubin est traité comme n'importe quel héritier. Aussi il peut en bénéficier s'il a des droits successoraux sur le bien. Par ailleurs, cette attribution préférentielle est facultative en ce sens que le juge apprécie son opportunité. Elle viendra en concurrence avec d'autres héritiers qui pourraient la revendiquer. La protection du concubin est donc bien moindre. La soulte en ce cas est payable comptant.
- Conclusion sur la protection du logement du couple. - Le régime de l'attribution préférentielle reflète bien la gradation statutaire de la protection du couple selon la nature du lien qui l'unit. Le mariage procure une protection renforcée automatique, le pacte civil de solidarité n'en procure une que si, par convention, le couple y adhère ; enfin, les concubins sont relégués à une protection qui nie leur lien affectif, en ce sens qu'ils sont traités comme des personnes étrangères entre elles. Le notaire, intervenant notamment lors des acquisitions de logement par les couples, se doit d'attirer leur attention sur cette gradation et s'enquérir du modèle de protection que souhaitent ses clients.