Les pouvoirs du mandataire

Les pouvoirs du mandataire

- Entre anticipation contractuelle et ordre public. - La nature hybride, institutionnelle et contractuelle du mandat de protection future se cristallise lors de la détermination des pouvoirs du mandataire. Mesure de protection des personnes, l'ordre public imprègne le régime juridique du mandat et contraint fortement la liberté contractuelle. Technique au service des familles pour organiser la protection de leurs proches, le mandat de protection future doit permettre d'atteindre un objectif essentiel pour établir un mandat efficace : l'anticipation. Comme nous l'avons déjà démontré, l'anticipation constitue la clé de l'efficacité et de la pertinence du mandat. Beaucoup d'éléments déterminants du mandat, liés à la situation du mandataire ou du bénéficiaire, demeurent incertains et évolutifs au moment de sa conclusion.
- Un délicat exercice de rédaction. - Le notaire doit donc trouver un délicat équilibre lors de la rédaction du mandat de protection, car plusieurs écueils menacent sa validité et son efficacité .
Tout d'abord, le contrat doit naturellement respecter la loi et particulièrement les dispositions d'ordre public qui régissent la matière. Ainsi des limites tenant à la protection de la personne et de son cadre de vie comme des limites tenant à la protection de son patrimoine et aux modalités d'exercice de la mission du mandataire sont arrêtées par la loi, sans dérogation possible. Les pouvoirs du mandataire sont donc circonscrits par les règles d'ordre public.
Le deuxième écueil serait de consentir au mandataire des pouvoirs trop restreints . Sans marge de man?uvre, le mandataire ne pourrait remplir efficacement sa mission et devrait, du fait de situations de blocage récurrentes, requérir une autorisation.
Le troisième écueil serait, à l'inverse, de lui reconnaître des pouvoirs trop larges. Le fonctionnement du dispositif s'en trouverait notablement fluidifié mais le risque serait alors l'abus de pouvoir et le détournement de son objet. Pour prévenir ce risque, il convient de nommer plusieurs mandataires et d'organiser un contrôle de la gestion du mandataire par des organes extérieurs.
- L'impossibilité d'adapter les pouvoirs du mandataire après l'activation du mandat. - L'anticipation lors de la rédaction du mandat est d'autant plus cruciale qu'il n'est plus possible de la modifier après son activation. Tant qu'il n'a pas été activé, il est possible de le modifier pour notamment réviser les pouvoirs du mandataire. Après son activation, ces adaptations ne sont plus permises car les parties au contrat ne sont plus, par hypothèse, en capacité juridique de contracter. Cette impossibilité d'adapter les pouvoirs du mandataire en cours de mandat ne peut être résolue par le juge. Ce dernier n'a pas le pouvoir de modifier le contrat pour combler des lacunes ou suppléer le manque de prévision. Si le mandat ne permet pas d'assurer efficacement la protection de l'enfant, le juge n'aura pas d'autre choix que de le remplacer par une autre mesure de protection. L'anticipation et la rédaction appropriée du mandat conditionnent donc son efficacité.
- La détermination des pouvoirs du mandataire. - Le contrat doit donc déterminer de manière exhaustive les pouvoirs qui sont attribués au mandataire. Dans la mesure où il n'y a pas de différence significative entre le mandat de protection future pour soi et pour autrui sur la question des pouvoirs du mandataire, nous renvoyons sur ce point aux développements qui y sont consacrés au titre suivant.
- Liberté contractuelle encadrée. - Il appartient au contrat de définir l'étendue des pouvoirs confiée au mandataire. Cela étant, s'il est imprégné de liberté contractuelle, le mandat de protection future n'en demeure pas moins une mesure de protection juridique. C'est pourquoi, en droit, la volonté des parties se trouve atténuée par un certain nombre de dispositions impératives. En pratique, l'objet du mandat postule, par ailleurs, que le rédacteur de l'acte soit particulièrement vigilant quant aux clauses susceptibles d'y être insérées. En vue d'une parfaite exécution du mandat, celui-ci doit envisager les nombreuses questions qui se posent autour des pouvoirs du mandataire, mais si le mandat de protection future est trop précis, il risque d'être source de blocage ; à l'inverse, s'il est trop imprécis, il pourra s'avérer inutile et finalement être écarté au profit d'une mesure judiciaire de protection. L'exercice est rendu d'autant plus délicat qu'il s'agit ici d'anticiper sur des difficultés certes prévisibles dans leur survenance, mais souvent floues quant à leurs contours.
- Plan. - Pour déterminer les pouvoirs du mandataire, il est nécessaire de distinguer selon que la mission du mandataire vise la protection des biens du mandant (A) ou la protection de sa personne (B).