Le prêt viager hypothécaire

Le prêt viager hypothécaire

- Définition du prêt. - Tout droit importée des pays de common law, cette forme particulière de prêt a été insérée dans notre droit positif par l'ordonnance no 2006-346 du 23 mars 2006 relative aux sûretés et amendée, à plusieurs reprises, depuis lors. Son régime est aujourd'hui codifié aux articles L. 315-1 et suivants, L. 341-53 à L. 341-61 et R. 315-1 et suivants du Code de la consommation. Le prêt viager hypothécaire peut se définir comme « un contrat par lequel un établissement de crédit ou un établissement financier consent à une personne physique un prêt sous forme d'un capital ou de versements périodiques, garanti par une hypothèque constituée sur un bien immobilier de l'emprunteur à usage exclusif d'habitation et dont le remboursement-principal et intérêts capitalisés annuellement ne peut être exigé qu'au décès de l'emprunteur ou lors de l'aliénation ou du démembrement de la propriété de l'immeuble hypothéqué s'ils surviennent avant le décès » (C. consom., art. L. 315-1, al. 1er) . Nous allons procéder à une analyse descriptive du prêt viager hypothécaire (§ I), avant de jeter un regard critique sur cet instrument (§ II).

L'analyse descriptive du prêt viager hypothécaire

- Objet du prêt. - Le prêt viager hypothécaire est destiné à permettre à une personne propriétaire d'un bien immobilier, en échange de la mise en garantie de ce bien, d'emprunter une somme d'argent sans avoir à rembourser ni le capital, ni les intérêts de son vivant. Ce faisant, il peut sans nul doute constituer un outil financier aux fins d'anticiper une éventuelle vulnérabilité. Il s'agit là encore d'une anticipation tardive dans la mesure où le prêt viager hypothécaire cible principalement les personnes âgées. En effet, si les textes ne soumettent la souscription d'un tel prêt à aucune condition d'âge, on constate, dans les faits, que les établissements bancaires possédant ce type de produits dans leurs catalogues ne les présentent qu'aux propriétaires seniors, âgés de soixante-cinq ans et plus. En cela, il constitue un produit financier qui permet l'accès au crédit à la consommation à des personnes propriétaires de leur logement mais qui, compte tenu de leur âge, n'ont plus la faculté d'obtenir un prêt classique, en mobilisant, sans s'en départir, leur résidence principale. La somme empruntée peut être versée en une seule fois pour un besoin ponctuel ou par le biais de versements périodiques (tous les mois ou tous les trimestres par exemple). Sous réserve de ne pas financer une activité professionnelle (C. consom., art. L. 315-1, al. 3), elle peut servir à financer tout type de projet personnel. Il peut s'agir notamment de financer des dépenses courantes, en complément de la retraite, des dépenses de santé, ou encore des travaux de mise aux normes ou d'adaptation de son logement à sa fin de vie.
- Conditions du prêt. - De prime abord, les conditions de l'obtention du prêt viager hypothécaire sont peu contraignantes dans la mesure où l'emprunteur n'a pas l'obligation de souscrire à une assurance de prêt, et qu'il n'est soumis à aucune condition de ressources ou d'état de santé , l'idée étant ici - faut-il le rappeler - de proposer un produit à l'attention des retraités, lesquels n'ont pour la plupart, outre une santé fragilisée, que de faibles revenus. En revanche, pour pouvoir souscrire un prêt viager hypothécaire, et c'est la condition de base, il faut être propriétaire d'un bien immobilier, lequel va servir de garantie à l'établissement prêteur. Ce bien doit être un bien à usage exclusif d'habitation, ce qui exclut du mécanisme un bien immobilier à usage mixte (habitation et professionnel) , le bien détenu sous forme de société civile immobilière, le terrain nu ou encore le bien en état futur d'achèvement (Vefa). Par ailleurs, le dispositif légal ne saurait utilement s'appliquer en présence d'un bien indivis ou détenu en démembrement de propriété .
- Obligations des parties. - On constate toutefois que derrière cette souplesse de façade, le prêt viager hypothécaire obéit à un cadre réglementaire strict. Ainsi, pour souscrire un tel prêt, l'emprunteur doit se soumettre à plusieurs obligations légales.
Parce que le bien immobilier sert de garantie et qu'il est donc au C?ur du prêt viager hypothécaire, l'évaluation de sa valeur est essentielle. Un expert indépendant, choisi en accord avec l'organisme prêteur mais dont l'emprunteur supporte entièrement la charge financière, doit réaliser cette évaluation, sous l'?il attentif du notaire instrumentaire qui doit veiller à sa cohérence.
Au cours du contrat, aucune obligation de rembourser le prêt de son vivant ne pèse sur l'emprunteur, sauf à ce que le contrat ait prévu le paiement périodique des intérêts de l'emprunt avant son échéance (C. consom., art. L. 315-1, al. 2). En revanche, l'emprunteur doit « apporter à l'immeuble hypothéqué tous les soins raisonnables » (C. consom., art. L. 315-12), ce qui revient à faire peser sur lui une obligation d'entretenir le bien hypothéqué afin de ne pas en réduire la valeur de son propre fait (ravalement de façade, entretien du jardin, etc.). Par ailleurs, si l'emprunteur entend mettre son bien en location, il doit obtenir, pour ce faire, l'accord écrit de l'organisme prêteur.
De son côté, compte tenu de la spécificité attachée à ce contrat de prêt, le prêteur est soumis à une obligation d'information renforcée, destinée à protéger l'emprunteur (C. consom., art. L. 315-4 à L. 315-11). Cette obligation se concrétise dès les modalités de commercialisation du produit et se retrouve dans le contenu de l'offre, l'une comme l'autre faisant l'objet d'une réglementation très encadrée : mentions obligatoires dans l'offre de prêt, maintien de l'offre de prêt pendant trente jours et délai de réflexion en vue de l'acceptation d'au moins dix jours, acte notarié, interdiction du démarchage, publicité loyale et informative, etc.
- Montant du prêt. - S'agissant du montant du prêt, les pouvoirs publics ont laissé une large marge d'appréciation aux banques. Ce montant, capital et intérêts cumulés, dépend de l'âge de l'emprunteur et de la valeur du logement offert en garantie, étant ici souligné qu'il ne saurait cependant excéder la valeur du bien, appréciée lors de l'échéance du terme (C. consom., art. L. 315-15, al. 1er). Dans les faits, ce montant est compris entre 15 % et 75 % de la valeur du bien estimée. Comme le prêt est d'une durée viagère, plus l'emprunteur est âgé, plus le montant est élevé. Le sexe de l'emprunteur est également pris en compte. Dans la mesure où, en France, les femmes ont (encore) une espérance de vie plus élevée que celle des hommes, elles peuvent ainsi prétendre à disposer d'une somme d'argent plus importante qu'eux, à âge et situation égale.
- Dénouement du prêt. - Le contrat de prêt est destiné à prendre fin avec le décès de l'emprunteur, auquel cas l'organisme prêteur se rembourse en vendant le bien, sauf aux héritiers à rembourser les fonds prêtés pour conserver le bien (C. consom., art. L. 315-20).
En cas de mise en ?uvre de l'hypothèque, les textes sont fluides et prévoient que le montant du capital et des intérêts ne peut pas être supérieur à la valeur du bien hypothéqué estimée à la fin du contrat (C. consom., art. L. 315-15, al. 1er). L'emprunteur peut donc contracter en toute sérénité, sachant que ses héritiers ne seront pas tenus au-delà de cette valeur. À l'inverse, si la dette est inférieure à cette valeur, fixée par expert, le différentiel doit être restitué aux héritiers (C. consom., art. L. 315-15, al. 2).
L'hypothèse d'un paiement spontané des héritiers laisse plus dubitatif, non pas dans son principe, mais dans ses modalités de mise en ?uvre, nullement organisées et manifestement supposées aller de soi. Les questionnements, pour ne pas dire les inquiétudes, sont pourtant nombreux . S'agissant des héritiers, s'ils sont plusieurs, la loi n'a prévu aucun délai ni aucune procédure de concertation leur permettant d'exercer sereinement, et par une décision collective, le choix que leur ménage la loi soit de payer la dette, soit de laisser le créancier se désintéresser sur le bien grevé . La banque, armée d'un titre exécutoire, pourrait ainsi faire valoir ses droits huit jours à peine après l'avoir signifié aux héritiers (C. civ., art. 877), sans même attendre l'exercice de l'option successorale que l'article L. 315-20, alinéa 2 du Code de la consommation tient ici pour indifférente . En ce qui concerne le prêteur, il peut craindre que les héritiers ne prêtent pas la main à un dénouement rapide et heureux, notamment s'ils découvrent l'existence du prêt à la mort de l'emprunteur. Le prêteur risque alors de se trouver confronté sinon à l'opposition, du moins à l'inertie des survivants.
Le prêt viager hypothécaire peut également prendre fin, de manière prématurée, à l'initiative du propriétaire. D'une part, il peut vendre lui-même son bien, auquel cas la banque récupère son capital et a l'autorisation de contester la vente si elle juge le montant du bien sous-estimé. D'autre part, il peut décider de procéder à un remboursement anticipé, total ou partiel, du prêt (C. consom., art. L. 315-16 et s.), ce qui peut toutefois représenter une mauvaise opération financière, car un tel remboursement entraîne le paiement de pénalités qui dépendent du moment où il intervient dans le temps (C. consom., art. L. 315-17).

Les regards critiques sur le prêt viager hypothécaire

- Une destinée décevante. - Le prêt viager hypothécaire permet d'emprunter à un âge avancé et de se procurer des ressources sans avoir à procéder à des remboursements de son vivant et donc sans ponctionner dans son épargne, sans vendre son patrimoine, sans obérer son niveau de vie et sans solliciter ses enfants ou des proches . Il présente au surplus l'avantage de permettre la perception d'un versement, susceptible d'être périodique, de la part d'un cocontractant - un établissement financier - par essence solvable.
Et pourtant, « l'innovation la plus médiatisée de la réforme des sûretés » n'a pas connu l'engouement que ses promoteurs lui prédisaient, faute d'avoir su trouver son public, qu'il s'agisse des banques ou bien des clients eux-mêmes . De leur côté, les établissements prêteurs y voient un mécanisme bien trop risqué, car trop aléatoire. À vrai dire, la crainte est doublement fondée. D'une part, les prêteurs s'exposent au risque d'une sous-évaluation de l'espérance de vie de l'emprunteur et du retournement du marché immobilier ; la dette étant impérativement plafonnée à la valeur du bien, si la dette est supérieure au prix de vente du bien pour l'une des deux raisons évoquées, c'est l'établissement financier qui supportera cette perte et non le débiteur ou ses héritiers. D'autre part, ils s'exposent au risque de « non-liquidité » du bien immobilier dans la mesure où le délai entre le décès et la liquidation de la succession peut s'avérer très long. Si l'on rajoute que le prêt viager hypothécaire ne fait l'objet d'aucune aide publique, on comprend que l'établissement prêteur assume seul la totalité de ces risques, ce qui explique peut-être la modicité des sommes prêtées eu égard à la valeur du bien.
Les emprunteurs, quant à eux, éprouvent une réelle « méfiance vis-à-vis d'un mécanisme qui promet le beurre (un prêt), l'argent du beurre (non remboursable de leur vivant) et le sourire du banquier » . En réalité, l'emprunteur ne percevra pas un prêt d'un montant égal à la valeur de son bien et contractera sur la base d'un taux d'intérêt plus élevé que ceux pratiqués en matière de prêt immobilier classique . Si l'on y ajoute les frais d'expertise du bien, objet de la garantie, et les frais d'inscription de l'hypothèque, le coût de ce crédit peut devenir prohibitif. Par ailleurs, le ratio montant prêté/valeur du bien est jugé trop faible. Enfin, il ne faut pas oublier non plus que l'emprunteur est certes toujours chez lui et propriétaire de son logement, mais sous surveillance du créancier qui veillera à la conservation de la valeur de son bien et à son utilisation selon ce qui aura été convenu. L'avantage d'être « propriétaire » doit donc être relativisé.
Le tableau ne serait pas complet si l'on passait sous silence la situation des héritiers de l'emprunteur. Il convient, en effet, d'avoir à l'esprit qu'avec le prêt viager hypothécaire, et ce ne pas la moindre de ses particularités, l'emprunteur n'est pas le débiteur ! Dès lors qu'elle n'use pas de sa faculté de remboursement anticipé, ce n'est pas la personne âgée elle-même qui aura à pâtir du remboursement du prêt, mais ses héritiers. C'est ainsi que sans être initialement parties au contrat, ces derniers, tenus d'en supporter les conséquences, en sont les victimes par ricochet. Certes, la dette est plafonnée à la valeur de l'immeuble au jour de l'ouverture de la succession. Mais le de cujus peut avoir contracté d'autres dettes que les héritiers envisageaient de payer en vendant l'immeuble, l'actif disponible au jour du décès se révélant insuffisant. Une telle aliénation étant juridiquement irréalisable, les héritiers pourront alors n'avoir d'autre choix que de renoncer à la succession.
Le choix de cet instrument de financement doit se faire, dès l'origine, et parfois sous l'?il attentif du notaire, à l'aune des intérêts respectifs, et susceptibles d'être divergents, au sein de la famille. Sauf à céder à une stricte logique individualiste, qui peut « confiner à l'égoïsme » , l'emprunteur qui entend se procurer des ressources pour faire face à sa vulnérabilité doit avoir conscience, lorsqu'il souscrit à ce crédit particulier, qu'il impose à ses héritiers la charge d'un prêt remboursable post mortem, qui peut s'avérer très lourde en raison de l'accumulation des intérêts, notamment dans le cas d'emprunteurs jeunes, au point de risquer d'aboutir de facto à leur exhérédation.

Proposition du 113 Congrès des notaires de France pour une promotion du prêt viager hypothécaire aux fins d'adaptation des logements

Qu'il nous soit permis de rappeler que, constatant qu'il convenait de rendre plus attractif le prêt viager hypothécaire en garantissant aux établissements de crédit et aux établissements financiers le remboursement de l'intégralité de leur créance lorsque les fonds prêtés servent à l'adaptation du logement à la perte d'autonomie, le 113e Congrès des notaires de France, par l'intermédiaire de sa commission « Solidarité » a proposé « que soit créé un fonds de garantie de l'État dont le rôle serait de prendre en charge la différence entre le montant total de la créance (en principal et intérêts) et la valeur du bien immobilier donné en garantie, afin d'assurer aux établissements de crédit et aux établissements financiers le remboursement total de la dette de l'emprunteur lorsque les fonds prêtés, au titre d'un prêt viager hypothécaire, ont servi à financer l'adaptation du logement à la perte d'autonomie ». En l'état, cette proposition n'a pas été suivie d'effet.

La création du prêt avance mutation

Pour remédier à cet inconvénient, et accessoirement pour impulser une nouvelle dynamique au prêt viager hypothécaire (PVH), la loi no 2015-992 du 17 août 2015 a créé le prêt avance mutation (PAM), « titre mystérieux et vide de sens » , qui, fondamentalement est un PVH classique, à la seule différence que l'emprunteur peut rembourser progressivement les intérêts selon une périodicité convenue (C. consom., art. L. 315-1, al. 2). L'objectif est de limiter le montant dû par les héritiers et donc la charge potentiellement considérable qu'ils peuvent avoir à supporter. Force est de constater que cette évolution n'a cependant rien changé : le nombre de PVH n'a pas décollé et les PAM sont rarissimes. Les raisons de ce flop sont connues. Outre l'interdiction de démarchage, très liée à la perception « amorale » du viager, qui s'applique aussi au PAM , le fait que les intérêts soient remboursables et non obligatoirement capitalisés est apparu comme une source de complexité pour les banques, notamment en ce que cela conduit à accroître l'incertitude sur la durée du prêt, ce qui perturbe la gestion du refinancement et donc la fixation du taux d'emprunt. Par ailleurs, cette faculté nouvelle est venue brouiller la compréhension des emprunteurs sur la nature du PVH, l'argumentaire commercial reposant sur le fait que le prêt viager n'a pas à être remboursé du vivant de l'emprunteur.
- Une articulation imparfaite avec les règles successorales. - Au-delà de ces considérations pragmatiques qui expliquent le peu d'engouement suscité par ce produit, on constate, à l'analyse, que le prêt viager hypothécaire est doté d'un régime juridique lacunaire en ce qu'il se caractérise, tout particulièrement, par l'absence regrettable d'un véritable effort d'articulation avec le droit successoral. Outre les interrogations soulevées par l'exercice de l'option offerte aux héritiers au décès de l'emprunteur, qui ont déjà été révélées, plusieurs difficultés en témoignent.
La première se manifeste lorsqu'un emprunteur marié contracte seul, sur le logement de la famille, un prêt viager hypothécaire avec la bénédiction de son époux (C. civ., art. 215). En pareille occurrence, et dans le silence malencontreux des textes, comment combiner les droits du conjoint survivant de demeurer dans les lieux avec la créance hypothécaire de la banque devenue exigible au décès ? S'agissant du droit temporaire au logement (C. civ., art. 763), on peut certainement considérer, sous l'impulsion d'un auteur , que son caractère d'ordre public semble impliquer « une suspension du prêt viager hypothécaire » pendant la durée de la jouissance gratuite conférée au conjoint . En revanche, la question est plus délicate, et la doctrine partagée, concernant le droit viager au logement (C. civ., art. 763). « Parce qu'il serait choquant de voir le droit viager au logement s'appliquer à une richesse déjà « consommée » par le défunt » , il semble bien toutefoisque le droit viager ne puisse être opposé au prêteur titulaire d'une hypothèque antérieure . Cette solution n'est pas anormale. Si le prêt a été, et c'est généralement le cas compte tenu de l'âge des emprunteurs, octroyé en cours de mariage, l'époux survivant a nécessairement autorisé son conjoint à contracter le prêt litigieux (C. civ., art. 215, al. 3). On peut légitimement considérer que, ce faisant, il a sciemment et nécessairement renoncé à la protection attachée au logement de la famille . En conjuguant les deux solutions, celle prépondérante, relative au droit temporaire, et celle, sacrifiée, inhérente au droit viager, on constate que le mécanisme du prêt peut contraindre le conjoint survivant, passé l'année qui suit le décès, à libérer les lieux avant la vente de l'immeuble ou sa saisie. Destiné à protéger l'un des époux du besoin, le « dispositif déshabille son conjoint en le privant de son toit » , sauf à espérer que les autres actifs successoraux soient suffisants pour régler la dette.
La seconde difficulté, également identifiée par la doctrine, est celle, peu probable mais néanmoins envisageable, du legs du bien hypothéqué par voie testamentaire à un tiers, lequel va alors choisir de payer la dette ou, faute de moyens d'en accepter la saisie par la banque. Dans tous les cas, le légataire aura réglé la dette d'autrui, de sorte qu'il pourra exercer en toute logique un recours contre les héritiers acceptants , qui seront alors soumis à une double peine : celle de voir sortir un immeuble du patrimoine familial et d'avoir à supporter la dette qui le grève !
- L'avenir du prêt viager hypothécaire. - Devant pareils inconvénients, nombreux sont ceux qui s'interrogent sur l'avenir du prêt viager hypothécaire en France. Alors que certains lui prédisent un avenir radieux au regard de la proportion croissante des personnes âgées dans la population et des difficultés à financer leurs besoins dans un contexte budgétaire contraint , d'autres, à l'inverse, réclament sa suppression . Peut-être la solution, comme souvent, est à rechercher entre ces deux extrêmes : elle consisterait, conformément à la proposition de M. Riffard, à repenser cet instrument non pas tant dans son fonctionnement mais dans sa finalité et à préconiser « une restriction drastique, mais salutaire, de son domaine d'intervention en abandonnant toute référence au crédit à la consommation et en le transformant en un crédit affecté à un but déterminé » . Et l'auteur de rappeler, au soutien de cette idée, que le Conseil économique et social, allant dans ce sens, avait d'ailleurs proposé dès 2008 de limiter le recours au prêt viager hypothécaire au seul financement de l'aménagement du logement grevé, de manière à permettre l'accompagnement du handicap.
Les pouvoirs publics ont amorcé une réflexion en ce sens, puisque le récent rapport Libault sur le grand âge et l'autonomie a proposé d'adapter le prêt viager hypothécaire au cas de la dépendance, en proposant la création d'un prêt viager dépendance réservé aux personnes en dépendance lourde (GIR 1 et 2). Ce prêt serait destiné à fonctionner comme un prêt viager hypothécaire classique, mais ne serait proposé que dans les cas de perte d'autonomie avérée nécessitant un choix de famille .
En attendant de connaître le sort éventuellement réservé à cette piste de réflexion dans le cadre de la loi grand âge et autonomie, il faut constater que ce produit destiné, de manière ingénieuse, à transformer la « pierre » en liquidités immédiatement consommables afin d'accroître le pouvoir d'achat des seniors en quête de compléments de retraite, occupe une place marginale à cette fin. Loin derrière les dispositifs de prévoyance liés à l'assurance, il souffre même de la comparaison avec des mécanismes, pourtant considérés comme désuets, comme la vente en viager , pour ne constituer aujourd'hui, et c'est regrettable, qu'une solution de dernier recours .