À l'instar de tous les milieux professionnels, les exploitations agricoles sont concernées par les nouvelles technologies. Elles permettent le développement rapide de l'agriculture de précision (Sous-section I). L'agriculture bénéficie également de l'accès à une nouvelle richesse : le Big Data (Sous-section II).
Les nouvelles technologies en agriculture
Les nouvelles technologies en agriculture
L'agriculture de précision
– Définition. – L'agriculture de précision désigne un mode d'exploitation prenant en compte la variabilité intraparcellaire et permettant un rendement optimal. Elle s'appuie sur une analyse précise de la situation permettant une adaptation du travail traditionnel de l'exploitant, et notamment une meilleure gestion des intrants. Ce travail ciblé est ainsi moins coûteux économiquement, humainement et écologiquement. Sa mise en place impose une surveillance efficace des productions (§ I) et permet d'améliorer les conditions d'exploitation (§ II). Elle tient également compte du bien-être animal (§ 3).
La surveillance des productions
– L'utilisation des drones. – Les drones permettent une visualisation sans équivalent des parcelles. Leur faible altitude de vol, couplée à des appareils photographiques sophistiqués allant du cliché classique aux images infrarouges, offre une visibilité parfaite
1495385441550. La législation française est assez souple en matière d'utilisation civile des drones. Après avoir déclaré leur activité, les drones ont librement accès à l'espace aérien hors agglomérations jusqu'à une altitude de 150 mètres
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– La vidéosurveillance intelligente. – Les équipements de vidéosurveillance sont munis de caméras ou de lunettes connectées. Ces dernières bénéficient d'une intelligence artificielle permettant de détecter des anomalies : présence d'insectes nocifs, retard de croissance, etc., ou d'identifier les moments clés de la production : moment de taille, début de récolte, etc.
– Les capteurs. – Les capteurs servent à collecter des données au plus près de la production. Ils sont enterrés dans le sol, embarqués dans des machines ou placés directement sur les végétaux et les animaux. Ils permettent de relever les données de la terre, des plantes ou des animaux, telles que la température ou le taux d'humidité
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– L'aide à la décision. – Les outils de détection sont en général couplés à des logiciels de conseil et d'aide à la décision
1495567205766susceptibles de déclencher des opérations ponctuelles.
L'amélioration des conditions de production
De nouvelles technologies permettant à la fois de réduire l'impact environnemental de la production et d'améliorer les conditions humaines de production sont effectives
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– La robotisation. – La robotisation en agriculture recouvre l'utilisation de nombreuses techniques parmi lesquelles :
- les tracteurs autonomes, dont le guidage GPS permet d'effectuer les travaux les plus adaptés ;
- les drones, moyens de transport et de largage précis des intrants ;
- les robots tracteurs désherbants, évitant l'utilisation de produits chimiques ;
- les robots de traite (fixes ou mobiles) ou de distribution de nourriture pour l'élevage.
– L'irrigation connectée. – L'usage de l'eau est un enjeu stratégique de l'exploitation d'un territoire par ses différents acteurs. Les systèmes d'irrigation connectés permettent de réaliser des apports hydriques adaptés aux données du sol et de la météorologie, évitant ainsi le gaspillage.
– L'utilisation améliorée des intrants. – Grâce aux outils de surveillance de l'exploitation, les agriculteurs disposent de données pertinentes utilisables immédiatement. Couplée aux nouvelles technologies de production, l'agriculture de précision devient efficiente
1495702969919. Elle permet d'ajuster très précisément la quantité de traitement aux besoins de production
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L'élevage de précision
Les nouvelles technologies réduisent également la pénibilité de certaines tâches en matière d'élevage. Elles améliorent ainsi le confort de travail des agriculteurs et la performance économique de leurs exploitations.
- La géolocalisation des animaux : l'utilisation de la géolocalisation renforce la surveillance du troupeau et permet de mettre en place des clôtures virtuelles.
- L'alimentation : les étables connectées personnalisant l'alimentation optimisent les coûts d'approvisionnement et le contrôle de la croissance des animaux.
- Le vêlage : les capteurs permettent d'assurer une surveillance accrue des animaux prêts à mettre bas tout en limitant les interventions humaines.
- Les soins vétérinaires : les capteurs contrôlant la température, l'activité ou l'alimentation de l'animal permettent d'assurer un soin anticipé, moins quantitatif pour l'animal et limitant le risque de contamination des troupeaux.
Le bien-être animal
– Principes. – Le bien-être animal n'est pas une question uniquement liée aux nouvelles technologies, mais l'élevage de précision permet de s'en approcher. L'Organisation mondiale de la santé animale (OIE) en donne une définition. Elle renvoie aux grands principes énoncés par le Farm Animal Welfare Council (FAWC) :
- ne pas souffrir de faim et de soif, grâce au libre accès à de l'eau fraîche et à un régime alimentaire apte à entretenir pleine santé et vigueur ;
- ne pas souffrir de contrainte physique, grâce à un environnement approprié, comportant des abris et des zones de repos confortables ;
- être indemne de douleurs, de blessures et de maladies, grâce à la prévention ou au diagnostic et au traitement rapide ;
- avoir la liberté d'exprimer des comportements normaux, grâce à un espace et des équipements adéquats, et au contact avec des animaux de la même espèce ;
- être protégé de la peur et de la détresse, grâce à des conditions d'élevage et à un traitement évitant la souffrance mentale.
– Réglementation et contrôles. – La réglementation a profondément évolué grâce à la prise de conscience croissante de l'homme relative aux conditions de vie des animaux. Désormais, le droit français énonce clairement que les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité (C. civ., art. 515-14)
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Les directions départementales en charge de la protection des populations font appliquer les textes en la matière. Elles exercent des actions d'inspections régulières et des enquêtes ciblées. La Brigade nationale d'enquêtes vétérinaires et phytosanitaires (BNEVP) apporte son concours aux services vétérinaires lorsque les investigations dépassent le cadre départemental
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Par ailleurs, selon le ministère de l'Agriculture, plusieurs travaux de recherche sont en cours au sein de l'Union européenne pour évaluer plus précisément le bien-être des animaux d'élevage
1497735355807. L'objectif est de mettre en place des indicateurs de bien-être ou de mal-être mesurables. Ces recherches scientifiques feront évoluer les textes européens et nationaux en les recentrant sur des obligations de résultat plutôt que des obligations de moyens.
Le Big Data en agriculture
– Notion de Big Data. – Il n'existe pas de définition universelle du Big Data
1495706140258. Cette notion fait référence à de grandes quantités de données non différenciées devant être traitées au moyen d'outils spécifiques permettant de les valoriser
1502781231269. Elles sont distinctes du Small Data visant des données précises et vérifiées portant sur un objet défini. Le Big Data en agriculture représente ainsi l'ensemble des données agricoles collectées et traitées permettant d'accroître les connaissances des exploitants sur leurs sols et leurs productions animales ou végétales. L'analyse de ces données permet d'améliorer la qualité des produits.
Les outils de surveillance recueillent les données de l'exploitation. La masse d'éléments rassemblés est exponentielle. Elle constitue une nouvelle richesse pour le monde agricole. Il convient de les utiliser pleinement (§ I) et les partager (§ II).
L'utilisation des données
– Les données primaires de l'exploitation. – Les nouvelles technologies modernisent la prise d'informations primaires par les agriculteurs : pluviométrie, températures, maladies, présence de ravageurs. Elles élargissent également le champ de ces informations primaires : états physique et chimique du sol, enregistrement des pratiques et des rendements. Des décisions ponctuelles résultant d'éléments suffisamment précis sont prises dans le cadre de l'agriculture de précision.
– L'apport du
Big Data
. – Outre les données primaires propres à leurs exploitations, les agriculteurs ont accès à un ensemble d'informations complémentaires (notamment sur les climats et les comportements variétaux). La massification des données permet d'envisager de très nombreux croisements de variables. Il en résulte des possibilités d'analyses prédictives de plus en plus efficaces. Les interventions techniques deviennent alors optimales, permettant une conduite d'exploitation efficiente aux plans économique, environnemental et humain.
Le partage des données
– Les difficultés de l'échange d'informations. – Le principe même du Big Data est de s'appuyer sur les informations les plus quantitatives possible. Pour cela, il est indispensable de les échanger très largement. En effet, la valeur des données d'une exploitation isolée augmente lorsqu'elles sont partagées et traitées avec celles d'autres exploitants. Une double difficulté se présente néanmoins :
- la perte de confidentialité : la mise en ligne des informations en supprime de facto l'exclusivité. Au surplus, l'absence de frontière numérique fait craindre une perte de souveraineté ;
- le coût de traitement des informations : le travail nécessaire pour transformer les données brutes en ressources exploitables engendre des coûts très importants.
Il n'existe pas de modèle pérenne permettant de résoudre l'équation entre les bénéfices escomptés et les inconvénients existants. Les grands groupes du monde agricole et quelques start-up utilisent leurs liens avec les agriculteurs pour collecter gratuitement les informations. Certains acteurs locaux tels que les chambres d'agriculture tentent également de se positionner sur ce marché. La revente des informations traitées se fait directement par des prestations de services de conseils. Elle est également indirecte par l'augmentation du prix des produits commercialisés
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– La recherche de solutions. – Ce sujet encore un peu abstrait nécessite une véritable stratégie garantissant la souveraineté de l'exploitation du territoire agricole. Deux grandes propositions voient le jour :
- une solution nationale consistant en la mise en place d'une plate-forme unique rassemblant la totalité des données agricoles françaises et favorisant l'émergence de nouveaux services 1495781364528 ;
- et une solution locale consistant à confier ces missions aux coopératives agricoles pour un traitement des données à l'échelle de leur territoire 1495784869096.
– L'agriculture de décision. – Les nouvelles technologies sont indispensables à l'agriculture de demain. Au sens strict, il s'agit d'outils permettant à l'homme de s'épargner certaines tâches pénibles ou à faible valeur ajoutée. Mais, plus généralement, elles constituent de véritables aides à la décision, donnant à l'exploitant les informations utiles avant d'agir. L'agriculture de précision devient finalement une « agriculture de décision »
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