Le contrôle des structures répond en principe à des objectifs d'exploitation du territoire rural réalistes et cohérents. Ainsi, il convient de porter un regard critique sur la législation existante en redéfinissant les objectifs actuels (§ I) et de proposer une vision prospective répondant aux défis de l'agriculture de demain (§ II).
Le besoin de nouveaux objectifs
Le besoin de nouveaux objectifs
La redéfinition des objectifs actuels
– L'apport de la LAAF. – Les objectifs actuels, souvent marqués politiquement, résultent de nombreuses évolutions législatives. L'alternance politique de la Cinquième République se retrouve dans le contrôle des structures, oscillant entre aggravation et libéralisation. Avant 2006, les objectifs du législateur s'articulaient autour de la défense de l'exploitation de type familial
1501565333646. Ensuite, jusqu'en 2014, il s'agissait principalement de contrôler la dimension des exploitations
1501225085165. La LAAF a fait apparaître des objectifs d'installations, économiques et environnementaux, se voulant à la fois ambitieux et réalistes. Ils sont toutefois critiquables.
– Élargir la notion d'installation. – À première vue, l'installation d'agriculteurs apparaît comme un objectif sociétal louable. Toutefois, en y regardant de plus près, cet objectif est recherché sans succès depuis le début des années 1980. Ainsi, plutôt que viser la seule installation d'agriculteurs, l'objectif principal devrait être élargi à « l'exploitation optimale du territoire rural ».
– Renforcer la viabilité économique. – La viabilité économique des exploitations est un objectif indispensable. Dans de nombreux cas, il n'est atteint qu'à la condition de disposer d'une taille d'exploitation adaptée au projet d'entreprise. Il peut s'agir d'une surface allant de quelques ares
1502648620561à plusieurs centaines d'hectares
1502648632538. Les objectifs actuels continuent néanmoins de faire référence à la limitation de la taille des exploitations (C. rur. pêche marit., art. L. 331-1, 3°)
1502648831154. Il est indispensable de sortir de cette question et d'appréhender concrètement le projet de l'entreprise agricole concernée. En effet, l'agriculture économiquement et écologiquement vertueuse implique parfois des regroupements aboutissant à des agrandissements d'exploitations. Par ailleurs, dans la logique de l'exploitation maximale du territoire, il est contre-productif d'empêcher l'installation sur une petite surface ou l'agrandissement d'une exploitation. Certaines parcelles inexploitées et d'autres dépendant d'exploitations en difficulté permettent de nouvelles installations ou le renfort d'exploitations en plein essor. Enfin, pour permettre une agriculture riche en emplois, l'exploitation doit disposer d'un modèle économique adapté.
Ainsi l'objectif économique deviendrait : consolider, maintenir ou agrandir les exploitations en leur permettant d'exploiter les superficies adaptées à un projet d'entreprise économiquement viable et riche en emplois.
– Accroître et contrôler la transition agroécologique. – La transition agroécologique est un objectif général indispensable à la préservation des ressources à long terme. Toutefois, poser un principe général et faire référence à la seule production biologique est trop limité par rapport aux enjeux. En effet, alors qu'elle représente environ 6 % des exploitations agricoles, l'agriculture biologique ne remplacera pas à court terme l'agriculture conventionnelle
1502649800567. Il existe d'autres modes de production écologiquement responsables pouvant être utilisés dès aujourd'hui. Il est préférable de s'assurer que l'ensemble des exploitations atteigne un niveau suffisant en matière de préservation des sols et de qualité des produits. Finalement, les objectifs en la matière devraient plutôt s'orienter vers l'assujettissement des exploitations à un système de production « écologiquement contrôlé ».
Ainsi, l'objectif environnemental deviendrait : faire entrer chaque exploitation dans un régime de contrôle de qualité environnementale tel que la certification environnementale, l'agriculture raisonnée ou l'agriculture biologique.
Une proposition de nouveaux objectifs
Au-delà de l'amélioration des objectifs actuels, il est indispensable d'en fixer de nouveaux pour accompagner l'agriculture française vers demain.
– L'augmentation du niveau de compétence. – La protection des sols, la gestion de l'eau en quantité et en qualité, l'utilisation des nouvelles technologies, la maîtrise de l'agronomie et le respect des règles de certification forment la base de la transition agroécologique. Il est désormais indispensable que les agriculteurs disposent d'un savoir-faire technique et diversifié pour relever ces nombreux défis. L'augmentation du niveau de compétence est un objectif préalable permettant la réussite de tous les autres.
Ainsi, un objectif préalable serait posé : permettre une élévation de la compétence des agriculteurs en matière environnementale, de nouvelles technologies, d'agronomie et de qualité des produits.
– Inclure la multifonctionnalité du territoire dans les objectifs. – La désertification rurale fait peser sur un petit nombre de personnes le poids de l'animation du territoire. Il s'agit à la fois de missions de service public telles que l'entretien des sites, des paysages ou des voiries, mais également d'activités privées souvent liées au tourisme. La multifonctionnalité du territoire rural est une source de revenus additionnels pour les exploitants. Ces activités indirectement liées à l'exploitation agricole méritent d'être encouragées afin d'assurer une exploitation complète du territoire.
Ainsi, un objectif complémentaire serait posé : encourager les activités liées à la multifonctionnalité du territoire afin de faire vivre la ruralité.