Les objectifs du contrôle des structures

Les objectifs du contrôle des structures

La législation des cumuls avait essentiellement pour objectif de limiter la taille des exploitations afin de permettre au plus grand nombre d'agriculteurs de s'installer. Les dispositifs ultérieurs ont pris en compte la baisse considérable du nombre d'agriculteurs et les nouveaux enjeux de l'exploitation agricole, tels que l'écologisation, l'amélioration de la qualité, la mondialisation des échanges, etc. La loi d'orientation agricole de 2006 a opéré un changement important 1503604302544. L'objectif de maintien d'une agriculture familiale n'apparaît plus formellement comme un objectif du contrôle des structures 1503604352884. Ainsi, les objectifs de cette réglementation varient dans le temps. Ils prennent actuellement en compte plusieurs aspects de l'exploitation agricole (Sous-section I). Il convient toutefois de s'interroger sur l'opportunité de leur donner une nouvelle dimension (Sous-section II).

Les objectifs actuels du contrôle

Les objectifs du contrôle des structures sont au nombre de trois (C. rur. pêche marit., art. L. 331-1) : l'installation d'agriculteurs (§ I), la viabilité économique des exploitations (§ II) et le développement de l'agroécologie (§ III).

L'installation d'agriculteurs

– Un objectif majeur. – Depuis 1980, l'installation d'agriculteurs est un objectif majeur du contrôle des structures 1501306569063. Il répond au risque de pénurie d'agriculteurs. La législation actuelle y fait toujours référence, ajoutant les démarches d'installation progressive (C. rur. pêche marit., art. L. 331-1, al. 2). Cet objectif principal s'accompagne d'une politique d'installation et de transmission en agriculture (C. rur. pêche marit., art. L. 330-1 à L. 330-5), s'appuyant sur un régime d'aides à l'installation et à la transmission, de couverture sociale adaptée et d'incitation à la formation 1506532831259. L'accompagnement financier est conditionné à l'intégration progressive au sein de l'exploitation d'un candidat à la reprise autre qu'un parent ou allié jusqu'au troisième degré. Il existe également un répertoire à l'installation permettant la mise en relation des cédants avec des potentiels repreneurs 1501308030761. À ce titre, l'exploitant a l'obligation de confirmer son départ à la retraite et la disponibilité de l'exploitation trois ans à l'avance (C. rur. pêche marit., art. L. 330-5). L'ensemble de ces mesures forme un contrat de génération entre agriculteurs, permettant une transmission progressive des exploitations.

La viabilité économique

– Un objectif réaliste. – À l'instar des autres activités économiques, une exploitation agricole perdure en réalisant des bénéfices réguliers permettant de rémunérer à la fois le travail réalisé et le capital investi. Historiquement, cette notion de viabilité économique était supplantée par la volonté de limiter la taille des exploitations et de favoriser une agriculture familiale. Aujourd'hui, il convient d'offrir des perspectives saines aux nouveaux exploitants. Ces objectifs économiques sont envisagés sous trois angles :
  • consolider ou maintenir les exploitations afin de leur permettre d'atteindre ou de conserver une dimension économique viable (C. rur. pêche marit., art. L. 331-1, 1°) ;
  • combiner performance économique et environnementale (C. rur. pêche marit., art. L. 331-1, 2°) ;
  • maintenir une agriculture diversifiée, riche en emplois et créatrice de valeur ajoutée (C. rur. pêche marit., art. L. 331-1, 3°).
Ainsi, en cherchant des modèles d'exploitation économiquement pérennes, l'agriculture française fait preuve de réalisme.

La transition agroécologique

Le besoin de nouveaux objectifs

Le contrôle des structures répond en principe à des objectifs d'exploitation du territoire rural réalistes et cohérents. Ainsi, il convient de porter un regard critique sur la législation existante en redéfinissant les objectifs actuels (§ I) et de proposer une vision prospective répondant aux défis de l'agriculture de demain (§ II).

La redéfinition des objectifs actuels

– L'apport de la LAAF. – Les objectifs actuels, souvent marqués politiquement, résultent de nombreuses évolutions législatives. L'alternance politique de la Cinquième République se retrouve dans le contrôle des structures, oscillant entre aggravation et libéralisation. Avant 2006, les objectifs du législateur s'articulaient autour de la défense de l'exploitation de type familial 1501565333646. Ensuite, jusqu'en 2014, il s'agissait principalement de contrôler la dimension des exploitations 1501225085165. La LAAF a fait apparaître des objectifs d'installations, économiques et environnementaux, se voulant à la fois ambitieux et réalistes. Ils sont toutefois critiquables.
– Élargir la notion d'installation. – À première vue, l'installation d'agriculteurs apparaît comme un objectif sociétal louable. Toutefois, en y regardant de plus près, cet objectif est recherché sans succès depuis le début des années 1980. Ainsi, plutôt que viser la seule installation d'agriculteurs, l'objectif principal devrait être élargi à « l'exploitation optimale du territoire rural ».
– Renforcer la viabilité économique. – La viabilité économique des exploitations est un objectif indispensable. Dans de nombreux cas, il n'est atteint qu'à la condition de disposer d'une taille d'exploitation adaptée au projet d'entreprise. Il peut s'agir d'une surface allant de quelques ares 1502648620561à plusieurs centaines d'hectares 1502648632538. Les objectifs actuels continuent néanmoins de faire référence à la limitation de la taille des exploitations (C. rur. pêche marit., art. L. 331-1, 3°) 1502648831154. Il est indispensable de sortir de cette question et d'appréhender concrètement le projet de l'entreprise agricole concernée. En effet, l'agriculture économiquement et écologiquement vertueuse implique parfois des regroupements aboutissant à des agrandissements d'exploitations. Par ailleurs, dans la logique de l'exploitation maximale du territoire, il est contre-productif d'empêcher l'installation sur une petite surface ou l'agrandissement d'une exploitation. Certaines parcelles inexploitées et d'autres dépendant d'exploitations en difficulté permettent de nouvelles installations ou le renfort d'exploitations en plein essor. Enfin, pour permettre une agriculture riche en emplois, l'exploitation doit disposer d'un modèle économique adapté.
Ainsi l'objectif économique deviendrait : consolider, maintenir ou agrandir les exploitations en leur permettant d'exploiter les superficies adaptées à un projet d'entreprise économiquement viable et riche en emplois.
– Accroître et contrôler la transition agroécologique. – La transition agroécologique est un objectif général indispensable à la préservation des ressources à long terme. Toutefois, poser un principe général et faire référence à la seule production biologique est trop limité par rapport aux enjeux. En effet, alors qu'elle représente environ 6 % des exploitations agricoles, l'agriculture biologique ne remplacera pas à court terme l'agriculture conventionnelle 1502649800567. Il existe d'autres modes de production écologiquement responsables pouvant être utilisés dès aujourd'hui. Il est préférable de s'assurer que l'ensemble des exploitations atteigne un niveau suffisant en matière de préservation des sols et de qualité des produits. Finalement, les objectifs en la matière devraient plutôt s'orienter vers l'assujettissement des exploitations à un système de production « écologiquement contrôlé ».
Ainsi, l'objectif environnemental deviendrait : faire entrer chaque exploitation dans un régime de contrôle de qualité environnementale tel que la certification environnementale, l'agriculture raisonnée ou l'agriculture biologique.

Une proposition de nouveaux objectifs

Au-delà de l'amélioration des objectifs actuels, il est indispensable d'en fixer de nouveaux pour accompagner l'agriculture française vers demain.
– L'augmentation du niveau de compétence. – La protection des sols, la gestion de l'eau en quantité et en qualité, l'utilisation des nouvelles technologies, la maîtrise de l'agronomie et le respect des règles de certification forment la base de la transition agroécologique. Il est désormais indispensable que les agriculteurs disposent d'un savoir-faire technique et diversifié pour relever ces nombreux défis. L'augmentation du niveau de compétence est un objectif préalable permettant la réussite de tous les autres.
Ainsi, un objectif préalable serait posé : permettre une élévation de la compétence des agriculteurs en matière environnementale, de nouvelles technologies, d'agronomie et de qualité des produits.
– Inclure la multifonctionnalité du territoire dans les objectifs. – La désertification rurale fait peser sur un petit nombre de personnes le poids de l'animation du territoire. Il s'agit à la fois de missions de service public telles que l'entretien des sites, des paysages ou des voiries, mais également d'activités privées souvent liées au tourisme. La multifonctionnalité du territoire rural est une source de revenus additionnels pour les exploitants. Ces activités indirectement liées à l'exploitation agricole méritent d'être encouragées afin d'assurer une exploitation complète du territoire.
Ainsi, un objectif complémentaire serait posé : encourager les activités liées à la multifonctionnalité du territoire afin de faire vivre la ruralité.