La multifonctionnalité de l'agriculture

La multifonctionnalité de l'agriculture

– Une situation de fait. – « La multifonctionnalité de l'agriculture est un fait. » 1510351820731Elle résulte en effet de ses trois fonctions principales :
  • sa fonction économique : l'acte de production agricole est une activité créatrice de richesses ;
  • sa fonction sociale : les exploitations agricoles sont une source d'emplois locaux :
  • et sa fonction environnementale : par le développement de pratiques éco-responsables, mais également par la réalisation de différentes missions écologiques de conservation de l'espace naturel, notamment dans les opérations de compensation 1510353093394.
– Une prise en compte juridique. – Un regard juridique mérite toutefois d'être posé sur la réalisation des activités des entreprises agricoles 1510388687480. Alors que l'activité agricole a longtemps été limitée à l'exploitation d'une terre en vue d'une production animale ou végétale, sa définition légale est désormais élargie (C. rur. pêche marit., art. L. 311-1) 1510385777283.
Ses contours restant imprécis, la détermination du caractère agricole des activités s'appuie sur la distinction entre :
  • les activités agricoles par nature. Réalisées à titre habituel, elles respectent au surplus trois conditions :
  • les activités agricoles par détermination de la loi. Visées par un texte, il s'agit des cultures marines, des activités équestres et de la méthanisation agricole 1510500513257 ;
  • et les activités agricoles par relation. Il s'agit des activités réalisées en aval de l'exploitation, impliquant ainsi une activité agricole par nature préalable, et s'appuyant sur la théorie de l'accessoire.
Ainsi, la multifonctionnalité agricole s'appuie d'abord sur les activités réalisées à la suite de l'acte de production (Sous-section I). Mais elle résulte également d'activités décorrélées de la production agricole (Sous-section II).

Les activités réalisées en prolongement de l'acte de production

– L'agriculteur commerçant. – L'agriculture n'étant plus de subsistance, les exploitants deviennent vendeurs de leurs productions. Lorsque la vente est réalisée dans le prolongement de l'acte de production, elle est comprise dans l'activité agricole (C. rur. pêche marit., art. L. 311-1, al. 1). Elle porte nécessairement sur les produits de l'exploitation. Au contraire, dans l'hypothèse où l'exploitant achète des produits agricoles en vue de les revendre, il s'agit d'un acte de commerce (C. com., art. L. 110-1) 1510387447673pouvant être réalisé parallèlement à l'activité agricole. Il convient toutefois d'être prudent.
En effet :
  • les actes de commerce doivent rester exceptionnels et étroitement liés à l'activité de production agricole ;
  • lorsqu'ils deviennent majoritaires, l'ensemble de l'exploitation revêt un caractère commercial.
Compte tenu des risques de requalification encourus 1510388263765, la prudence recommande de réaliser ces activités commerciales au sein d'une structure créée à cet effet 1510388387417.
– L'agriculteur transformateur. – Traditionnellement, certains agriculteurs transforment leurs produits afin de leur apporter une valeur ajoutée lors de la vente 1510500327282. Ces activités, commerciales par nature, sont susceptibles d'être agricoles (C. rur. pêche marit., art. L. 311-1, al. 1), à condition d'être réalisées :
  • par un exploitant dans le prolongement de l'acte de production 1510397689920 ;
  • et exclusivement avec les produits de l'exploitation concernée.
Les agriculteurs sont toutefois autorisés à réaliser des achats extérieurs :
  • pour les éléments additionnels non produits sur l'exploitation, sous réserve qu'il s'agisse d'achats d'usage, faibles en proportion du produit fini, et nécessaires (condiments et emballages) ;
  • pour les produits normalement issus de la ferme, la jurisprudence admet les apports extérieurs à condition qu'ils soient strictement nécessaires, en faible quantité 1510390228107, ou justifiés par une diminution ou une perte de récolte.
Le périmètre agricole de l'activité de transformation étant là encore incertain, la prudence invite à exercer cette activité dans une structure commerciale séparée.

Les activités non liées à la production agricole

– Agrotourisme. – L'agrotourisme regroupe les activités d'hébergement, de restauration et de loisirs en général, réalisées par l'exploitant sur son exploitation (C. rur. pêche marit., art. L. 311-1 et D. 722-4 ; C. tourisme, art. L. 343-1). Cette diversification est rattachée à l'activité agricole en raison d'un critère territorial : l'exploitation en est le support. En revanche, il est indispensable qu'une activité agricole par nature soit déjà exercée pour pouvoir y attacher une activité touristique. Par ailleurs, la question de la proportion à respecter pour chacune des activités agricole et touristique se pose. Les textes et la jurisprudence manquent à ce titre de précision 1510485055960. À nouveau, la prudence incite à séparer ces activités au moyen de sociétés dédiées.

La diversité du tourisme rural

Le tourisme rural est à la mode. L'offre d'activités se diversifie un peu plus chaque année 1510498780677 :
  • hébergement 1510499106982 : chambres d'hôtes, gîtes ruraux, camping à la ferme, etc. ;
  • restauration : table d'hôte, ferme auberge, goûter à la ferme ;
  • œnotourisme : visite des domaines, vendanges, dégustations, etc. ;
  • loisirs : ferme pédagogique, découverte du patrimoine agricole et rural, pêche, chasse, sports de nature, etc.
Pour gagner en visibilité et en clientèle, le réseau « Bienvenue à la ferme » a été créé en 1988 par des agriculteurs 1510501048865. Il est aujourd'hui composé de plus de 8 000 agriculteurs adhérents, animé par des relais régionaux et départementaux conseillant les agriculteurs, garantissant la qualité des produits et des activités, aidant à l'installation, assurant la promotion de la marque, etc.
– Déneigement et salage. – Bien avant la compensation écologique 1510485554746, les exploitants agricoles rendaient déjà des services à la collectivité, notamment au moyen de leurs engins d'exploitation. Cette situation a été légalisée pour le déneigement et le salage au profit des communes, intercommunalités et départements 1510486945094. Toutefois, cette activité est nécessairement accessoire et n'apporte aucune concurrence déloyale aux entreprises privées spécialisées. Elle ne se substitue pas non plus aux missions des services publics 1510488867413.
– Le besoin d'une nouvelle définition de l'activité agricole. – Ainsi les agriculteurs réalisent des activités diverses. Elles sont bien souvent indispensables à l'équilibre économique de l'exploitation, et plus généralement du territoire. Malheureusement, la multifonctionnalité de l'agriculture est insuffisamment intégrée à la définition des activités agricoles 1510496633017. Ces incertitudes posent des difficultés dans l'organisation de l'entreprise agricole, souvent obligée de multiplier les structures sociétaires pour se diversifier. Il est désormais indispensable de prendre en compte cette réalité économique et territoriale 1510497698544.
Ainsi, à travers une définition rénovée des activités agricoles, apparaîtront l'agriculture et l'agriculteur de demain.