De l'agriculture biologique à l'agroécologie

De l'agriculture biologique à l'agroécologie

De tous les modes d'exploitation écologiquement responsables, l'agriculture biologique est à la fois la plus connue du grand public 1493464805483et la plus pratiquée par les exploitants 1493461007406.
Pour comprendre l'attrait grandissant pour cette filière, il convient d'abord d'en connaître les fondements (§ I). Son développement exponentiel impose ensuite d'en maîtriser le cadre juridique (§ II).

Évolution de la production bio en France

Le développement de cette filière est spectaculaire. Quelques chiffres en témoignent :
  • évolution des opérateurs et des surfaces certifiées bio de 1995 à 2016 :
  • surfaces bio et en conversion et part dans la SAU de chaque département en 2016 :
  • superficies cultivées en bio (certifiées et en conversion), nombre d'exploitations bio et part de la SAU totale en bio dans les pays de l'Union européenne en 2016 :
Source : www.agencebio.org.

Les fondements de l'agriculture biologique

– Les principes de l'agriculture biologique. – L'agriculture biologique est fondée sur plusieurs principes philosophiques, juridiques et agricoles complémentaires. Elle s'appuie d'abord sur les meilleures techniques environnementales permettant un haut degré de biodiversité et la préservation des ressources naturelles. Le bien-être animal et l'utilisation de procédés naturels internes au système (sans OGM et avec une stricte limitation des intrants chimiques) sont également au cœur de ces pratiques. Elle permet ainsi d'améliorer la santé des sols, de l'eau, des animaux, des végétaux et l'équilibre entre eux, mais aussi de viser une production variée de qualité 1493535677032.
– L'accompagnement politique. – Compte tenu de son rôle dans l'agriculture moderne, l'Union européenne a été un véritable moteur de ce mode d'exploitation. De nombreux règlements européens ont accompagné le développement de l'agriculture biologique 1493537024297. Actuellement, le règlement communautaire du 28 juin 2007 et le règlement d'application du 5 septembre 2008 sont les documents de base en la matière 1493537153216. En droit interne, la prise en compte de « l'écologisation » de l'activité agricole a été progressive jusqu'à la loi d'avenir agricole du 13 octobre 2014 1493537811794.
– Proposition de définition. – Compte tenu de ses fondements, l'agriculture biologique se définit comme un système global de production agricole et alimentaire, soumis à un contrôle indépendant, recherchant une efficacité environnementale et territoriale durable.

Un cadre juridique indispensable

Les principes de l'agriculture biologique étant posés, il est indispensable de mettre en place des règles précises d'exploitation, ainsi qu'un contrôle en assurant le respect. La démarche vers une production biologique commence par une phase de conversion (A) et se poursuit par une exploitation encadrée (B).

La conversion

– Une question de durée. – Les modes d'exploitation traditionnels sont incompatibles avec l'agriculture biologique. La conversion nécessite une période minimum tenant compte du type de culture ou d'élevage 1493546278241 :
  • pour les végétaux : deux ans pour les cultures annuelles et trois ans pour les cultures pérennes. Par exemple, le délai minimum de conversion est de trois ans pour l'arboriculture ou la viticulture et de deux ans pour les céréales ou le maraîchage ;
  • pour les animaux : deux ans pour les animaux présents sur l'exploitation en début de conversion. Ce délai est réduit pour les animaux introduits dans une unité d'élevage 1499783704433.
La période de conversion commence à compter de la déclaration d'activité. Celle-ci déclenche alors son assujettissement au système de contrôle.

Les aides à la conversion en agriculture biologique

Pour la programmation 2015-2020, les aides à la conversion en agriculture biologique sont financées avec le 2e pilier (développement rural) de la PAC. En France, ces aides sont ouvertes dans tous les programmes de développement rural (PDR) élaborés par les régions. Elles visent à compenser tout ou partie des surcoûts et manques à gagner liés à l'adoption de cette pratique.
Pour le maraîchage, l'aide représente 900 €/ha/an, et en culture céréalière, 300 €/ha/an 1500361013184.
Au total, les aides en faveur de la conversion en agriculture biologique représenteront 160 millions d'euros par an (crédits européens et contreparties nationales) versés en moyenne sur la période 2015-2020, à comparer aux 90 millions d'euros versés en 2012.

Une exploitation encadrée

– La notification. – L'exploitation en agriculture biologique fait l'objet d'une notification à l'autorité compétente par chaque opérateur avant tout commencement d'activité 1493547405228. Les opérateurs sont les producteurs, les préparateurs, les transformateurs et les commercialisateurs. Cette notification précise la nature de l'exploitation ainsi que sa localisation. Elle contient également l'engagement de se conformer à la réglementation et le nom de l'organisme de contrôle agréé.
– Les règles de production. – Les règles de production soumises à contrôle sont principalement fixées dans les règlements européens 1493584981731. Elles sont parfois complétées en droit interne par des cahiers des charges spécifiques ou des guides de lecture informatifs 1493748892681. Leurs caractéristiques principales sont les suivantes :
  • pour les productions végétales :
  • pour les productions animales :
Le respect de ces règles permet d'obtenir la certification en agriculture biologique. Les diverses productions sont ensuite commercialisées avec la mention « produit issu de l'agriculture biologique » 1493587726988.
L'agriculture biologique est actuellement le fer de lance des politiques agricoles écologiquement responsables en France et en Europe. Il existe un autre mode d'exploitation qui retient désormais l'attention de nos élus.

L'agroécologie : une voie d'avenir pour le législateur français

  • Inspirations et définitions : L'agroécologie a pris son essor en France dans les années 1990 sous l'impulsion de Pierre Rabhi. Ce dernier la présente comme une technique inspirée des lois de la nature. Il considère que la pratique agricole ne doit pas se cantonner à une technique, mais envisager l'ensemble du milieu dans lequel elle s'inscrit avec une véritable écologie. Il souhaite également mettre les acquis de la modernité au service d'un projet humain. Enfin, il insiste sur la relocalisation de la « production-transformation-distribution-consommation » 1490042321548. Selon la Fondation Nicolas Hulot, l'agroécologie est à la fois une discipline scientifique (la recherche), un mouvement (les sans-terre au Brésil par exemple), et une pratique (les techniques agricoles). Elle ne se cantonne pas à une technique. Elle prend en compte avant tout la protection de l'environnement et le respect des ressources naturelles 1490045847297. Ainsi, il s'agit d'une philosophie de la production agricole fondée sur la connaissance des techniques biologiques, le respect de la nature et le respect de l'homme et de son territoire.
  • Description et méthodes : L'agroécologie est une conception des systèmes de production s'appuyant sur les fonctionnalités offertes par les écosystèmes. Elle les amplifie tout en visant à diminuer les pressions sur l'environnement. Il s'agit d'utiliser au maximum la nature comme facteur de production en maintenant ses capacités de renouvellement. Elle met l'agronomie au centre des systèmes de production à travers une dizaine de règles de production agricole 1490046372534.Elle implique également le recours à un ensemble de techniques modernes prenant en compte l'exploitation agricole dans son ensemble. À ce titre, l'agroécologie autorise l'utilisation des technologies modernes : diagnostic des maladies des plantes, régulation de l'irrigation par satellite, sélection des semences et plantes bas intrants, etc. L'agroécologie réintroduit de la diversité dans les systèmes de production agricole, restaure une mosaïque paysagère diversifiée et renforce le rôle de la biodiversité comme facteur de production. L'agriculteur adapte ces techniques à son territoire à travers une série d'expérimentations en fonction notamment du territoire et des objectifs de l'exploitant. Il s'agit d'une démarche individuelle et collective révisant les systèmes de production en profondeur, la parcelle agricole et le territoire devant être intégrés de façon cohérente.
  • Consécration législative : La loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt 1490048825935 s'est appuyée sur ce concept pour défendre l'idée d'une double performance économique et environnementale. Dans son rapport d'information sur la mise en application de cette loi 1490049555824, la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale confirme ce positionnement. L'agroécologie y est décrite comme un axe fort de la loi, permettant de développer des productions agricoles respectueuses de l'environnement sans sacrifier l'objectif de performances économiques des exploitations. Ce rapport souligne également qu'elle participe à la qualité et la mise en valeur des productions agricoles et doit porter une attention particulière aux territoires 1500961654728.