- Des prémices de statut du logement des concubins ? - Adopté sans bruit, le nouvel article 373-2-9-1 du Code civil issu de l'article 32 de loi no 2019-222 du 19 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a souhaité, ainsi que le rappelle la circulaire en date du 25 mars 2019 (annexe 13) prise pour son application, « sécuriser le logement de tous les enfants lors de la séparation parentale, quel que soit le statut matrimonial des parents ». Le législateur a pris en compte l'inégalité qui existait entre la protection offerte aux conjoints et aux enfants issus de couples mariés et celle restreinte ou quasi inexistante ouverte aux partenaires pacsés et concubins en union libre et à leurs enfants. Cet article, d'application immédiate, est opposable aux instances en cours.
L'article 373-2-9-1 du Code civil autorise le juge aux affaires familiales, saisi d'une demande relative à l'autorité parentale, d'attribuer provisoirement le logement de la famille à l'un des deux parents. Cette disposition se justifie par la prise en compte de l'intérêt de l'enfant et par son caractère provisoire. Peu importe dès lors que le bien qui constitue le logement de la famille soit la propriété des deux époux ou de l'un d'eux ou qu'il soit loué. Le législateur ne prévoit aucune exclusion.
L'article 373-2-9-1 du Code civil prévoit que le juge peut, dans son ordonnance, constater l'accord des parties sur le montant d'une indemnité d'occupation. Les parties ont par ailleurs toute latitude pour convenir que la jouissance sera gratuite.
La circulaire du 25 mars 2019, dans son annexe 13, apporte la précision suivante : « Dans la mesure où, par hypothèse, les parents ne sont pas mariés, la gratuité de la jouissance provisoire du logement au titre du devoir de secours, spécifique aux époux, est ici exclue ». La circulaire fait ici référence aux requêtes qui seront déposées à l'initiative d'un parent pacsé ou en union libre. La circulaire rappelle également que l'adoption du nouvel article 373-2-9-1 du Code civil ne remet pas en cause la faculté pour l'un des parents d'avoir recours aux dispositions du quatrième alinéa de l'article 373-2-2 du même code. Cet alinéa prévoit que la contribution à l'éducation et à l'entretien des enfants peut être servie en tout ou en partie sous la forme d'un droit d'usage et d'habitation, ce qui conduit à une jouissance gratuite du logement.
Pour le cas où le logement de la famille est loué, que les deux parents aient la qualité de locataire ou qu'un seul soit titulaire du bail, la circulaire du 25 mars 2019 dans son annexe 13 précise : « L'attribution de la jouissance provisoire du logement n'affecte pas l'ensemble des droits et obligations résultant du bail ».
Par ailleurs le juge fixe la durée de la jouissance pour une période qui ne peut dépasser six mois. Toutefois, lorsque le bien appartenant aux parents est en indivision, la mesure peut être prorogée à la demande de l'un ou l'autre des parents si, durant ce délai, le tribunal a été saisi des opérations de liquidation et de partage par la partie la plus diligente.
Cet article, qui figure dans le Code civil dans le titre traitant de l'autorité parentale, a vocation à s'appliquer au bénéfice de tout enfant mineur, que ses « parents » soient mariés, partenaires pacsés ou concubins en union libre. Sa raison d'être est la protection de l'enfant. Toutefois, ainsi que s'en étonne à juste titre M. Boisson
, l'article L. 213-3 du Code de l'organisation judiciaire, qui définit les missions dévolues au juge des affaires familiales, a été complété dans un souci de coordination par un alinéa 4 dont la rédaction risque de laisser planer un doute s'agissant du domaine d'application de l'article 373-2-9-1 du Code civil : « Le juge aux affaires familiales connaît : (…) 4o Des demandes d'attribution à un concubin de la jouissance provisoire du logement de la famille en application de l'article 373-2-9-1 du Code civil », ce qui semble limiter l'application de l'article 373-2-9-1 aux seuls concubins. Ce serait oublier que l'article L. 373-2-9-1 ne fait aucune allusion au mode de conjugalité, ce qui est réaffirmé par la circulaire du 25 mars 2019
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