Les ressources tirées d'un contrat d'assurance

Les ressources tirées d'un contrat d'assurance

- Deux types de contrats. - Sans nul doute l'assurance constitue aujourd'hui un instrument précieux de prévoyance dans l'optique d'une éventuelle vulnérabilité. Actuellement, deux types de contrats d'assurance sont offerts aux personnes désireuses d'anticiper une situation de dépendance : d'une part, les contrats d'assurance-vie, non spécifiques au risque de dépendance, mais dont la souscription peut concourir indirectement à se constituer à terme, par la voie de l'anticipation patrimoniale, une épargne susceptible d'être mobilisée en cas de survenue de la dépendance (Sous-section I) ; d'autre part, les contrats d'assurance spécifiquement dédiés au risque dépendance, dont l'objet est de permettre au souscripteur, selon les choix de garanties qu'il a effectués, de faire face financièrement et/ou matériellement, à la survenue de la dépendance (Sous-section II).

Les contrats utilisés pour financer la dépendance

- L'utilisation du contrat d'assurance-vie. - La personne qui cherche des ressources pour financer son éventuelle vulnérabilité peut utiliser l'assurance-vie, dont on connaît le succès auprès de nos concitoyens , liée à un régime juridique attractif, tant sur le plan civil que sur le plan fiscal. La notion de contrat d'assurance-vie, on le sait, est un terme générique qui recouvre en réalité une diversité de contrats aux caractéristiques diverses et variées, dont le seul point commun réside dans l'existence d'un aléa. Utilisée comme un produit de transmission du patrimoine « en cas de décès », l'assurance-vie peut également être souscrite « en cas de vie », aux fins de se constituer une épargne, généralement dans une perspective de retraite, ce en quoi elle se rapproche d'un produit d'épargne-retraite classique (Perp, PEA, Pere, Préfon Retraite, contrat Madelin, etc.).
- L'utilisation du contrat à son dénouement. - Dans l'optique spécifique du financement de la dépendance, ce sont les vertus économiques et fiscales attachées à l'assurance en cas de vie qui peuvent être recherchées. Dans ce type de contrat, l'assureur s'engage, en contrepartie du versement de primes uniques ou périodiques, à verser au bénéficiaire un capital ou une rente si l'assuré est vivant à un âge ou à une date donnés. En pratique, les souscripteurs ont tendance à privilégier la rente, qui évacue le souci de la gestion d'un capital et procure une source constante et rassurante de revenus jusqu'à son décès. Les sommes ainsi perçues vont constituer une source de ressources complémentaires disponibles, au gré des besoins du souscripteur alors devenu senior, ce qui peut indirectement lui permettre de faire face à une situation de dépendance.
Rappelons que l'assurance-vie en cas de vie constitue un contrat à fonds perdu, car si l'assuré - qui est aussi le souscripteur et le bénéficiaire - n'est plus en vie à la date convenue, l'assureur ne verse rien. C'est pourquoi, pour pallier le risque de perte financière pour l'assuré, les assureurs proposent aujourd'hui, le plus souvent, des contrats où se juxtaposent les deux assurances : l'une en cas de vie, l'autre en cas de décès. Seule l'une d'elles prendra effet. C'est le cas des « assurances-vie mixtes » ou des « assurances-vie avec contre-assurance décès ». En pareille occurrence, le contrat d'assurance-vie présente l'intérêt, pour le souscripteur, de concilier tant son objectif d'anticipation de sa retraite, et par-delà de son éventuelle entrée en dépendance, que son objectif de transmission d'un capital à ses proches à son décès.
- L'utilisation du contrat par anticipation. - Le contrat d'assurance-vie présente également l'avantage pour le souscripteur de se constituer une épargne liquide, c'est-à-dire susceptible d'être mobilisée, par anticipation, en cas de survenue de la dépendance, au moyen des opérations de rachat ou d'avance sur police.
D'une part, il est possible pour le souscripteur de se procurer un revenu, ponctuel ou régulier, pour faire face aux besoins de sa dépendance, en procédant à des rachats partiels : trimestriel, semestriel, annuel ou à tout moment, sur simple demande. Le rachat du contrat d'assurance-vie consiste à mettre un terme prématurément audit contrat. Total ou partiel , il peut être envisagé par le souscripteur qui aurait un besoin urgent de liquidités, pour faire face aux frais médicaux ou d'assistance engendrés par sa dépendance, ou encore pour financer l'aménagement de son logement. L'assureur procède alors au versement de la provision mathématique constituée au jour du rachat. Il s'agit d'un véritable droit pour le souscripteur, dont l'assureur ne peut lui refuser l'exercice (C. assur., art. L. 132-21 et s.).
D'autre part, le souscripteur peut solliciter une avance sur police, laquelle peut se définir comme « l'opération par laquelle l'assureur consent à remettre au souscripteur une partie de la provision mathématique de son contrat, l'assurance devenant ainsi un instrument de crédit qui utilise la provision comme un compte courant » . L'avance se distingue du rachat en ce qu'elle ne met pas un terme au contrat d'assurance-vie, mais constitue seulement un « prêt à durée déterminée », le souscripteur recevant de l'assureur des liquidités qu'il s'engage à rembourser. Elle permet de répondre à un besoin de trésorerie du souscripteur à court ou moyen terme, tout en laissant fructifier l'épargne investie au contrat, sans perte de l'antériorité fiscale du contrat . L'avance, qui ne peut être supérieure à la valeur du contrat, ne peut intervenir avant une certaine antériorité dudit contrat. À la différence du rachat, l'avance ne constitue pas un droit pour le souscripteur, elle doit être acceptée par l'assureur. Tout comme un contrat de prêt, l'avance fait l'objet d'un règlement strict qui varie en fonction de la compagnie d'assurance.
La solution privilégiée par le souscripteur qui devient vulnérable sera bien entendu le rachat, dans la mesure où, le plus souvent, sa situation ne lui permettra pas, à l'avenir, de reconstituer et donc de restituer l'avance perçue, laquelle produit en sus des intérêts.

Les contrats dédiés au financement de la dépendance

- Une double option. - Actuellement, la personne inquiète de la survenance d'une éventuelle perte d'autonomie future a le choix entre deux types de contrats, dédiés spécifiquement au financement de la dépendance : les contrats d'assurance dépendance (§ I) et les contrats d'assurance-vie assortis d'une option dépendance (§ II).

Le contrat d'assurance dépendance

- Un instrument d'anticipation dédié à la dépendance. - À côté de l'assurance-vie, qui reste le placement préféré des Français, les assureurs (au sens large : sociétés d'assurance, mutuelles banques et institutions de prévoyance) ont élargi leur offre pour appréhender le marché de la dépendance. Non seulement ils ont adjoint la dépendance en garantie optionnelle de certains contrats existants (garantie complémentaire), mais surtout, ils ont créé des produits dédiés à la dépendance : les contrats d'assurance dépendance (garantie principale) .
Ces derniers sont des contrats en vertu desquels, moyennant le versement de cotisations périodiques par l'assuré, l'assureur s'engage à lui fournir des prestations déterminées au contrat lorsque la dépendance survient. Le contrat d'assurance dépendance est un contrat de prévoyance et non d'épargne. Par principe, ces contrats sont donc considérés à fonds perdu. Si la dépendance ne survient pas, les cotisations versées par l'assuré ne lui seront pas restituées : elles restent acquises à l'assureur .
Ces contrats, qui visent à garantir la survenance du risque dépendance, présentent à la fois une telle diversité qu'il est souvent bien difficile pour le candidat à l'assurance de faire son choix (A) et une relative inefficacité qui finit, encore trop souvent, par décourager celui-ci d'y avoir recours (B).

La diversité des contrats d'assurance dépendance

- Dualité des modalités de souscription. - Les contrats d'assurance dépendance connaissent deux modalités de souscription : d'une part, la souscription individuelle : le contrat est alors souscrit directement par un particulier auprès de l'assureur de son choix et, d'autre part, la souscription collective par une entreprise ou une association auprès d'un assureur, au profit des membres du souscripteur, qui adhèrent au contrat. Cette adhésion peut être obligatoire lorsque l'adhésion des membres d'un groupe assuré résulte de la seule qualité de membre de ce groupe, ou facultative, lorsque, en plus d'appartenir au groupe assuré, le membre de ce groupe doit exprimer son consentement pour adhérer au contrat d'assurance. Dans les faits, la plupart des contrats d'assurance dépendance sont collectifs.
- Diversité du risque garanti. - Les contrats couvrent systématiquement la dépendance totale et, sur option, la dépendance partielle. Mais, que la dépendance couverte au contrat soit totale ou partielle, elle doit être irréversible pour donner lieu à garantie.
Avant de souscrire ce type de contrat, il faut étudier le degré de dépendance qui sera couvert par le contrat : les contrats d'entrée de gamme proposent uniquement le versement d'une rente en cas de dépendance totale (lourde), les contrats plus élaborés proposent à la fois le versement d'une rente en cas de dépendance totale et le versement d'une demi-rente en cas de dépendance partielle ; les contrats les plus complets couvrent, en plus de la dépendance totale et partielle, la dépendance légère.
La difficulté réside dans la définition de ces différents états de dépendance. En effet, on constate, et l'on peut regretter, qu'il n'existe pas de définition légale de la notion de dépendance et, par-delà, aucune méthode d'évaluation commune aux assureurs, qu'ils seraient tenus d'utiliser. L'examen des conditions générales des contrats présents sur le marché révèle ainsi que le risque de dépendance n'y est pas défini : chaque assureur se contente de définir le niveau de dépendance pris en charge par le contrat, au moyen d'une méthode d'évaluation qui lui est propre. Pour ce faire, les assureurs utilisent divers référentiels pour déterminer l'état de dépendance. La majorité d'entre eux utilise la grille Aggir , laquelle permet de calculer le degré de perte d'autonomie physique et psychique d'une personne pour accomplir seule, ou en ayant besoin d'aide, dix actes essentiels de la vie . Cette grille est toutefois systématiquement combinée avec d'autres critères pour que la garantie joue. La grille la plus généralement utilisée par les assureurs, en complément de la grille Aggir pour mesurer le degré de perte d'autonomie d'une personne, est celle des Activités de la vie quotidienne (AVQ), laquelle répertorie six actes de la vie quotidienne (la toilette, l'habillage, l'alimentation, la continence, le déplacement, les transferts) pour définir ensuite quatre niveaux de dépendance, en fonction du nombre d'actes qui ne peuvent plus être effectués seuls . Certains assureurs utilisent également la grille des Activités instrumentales de la vie quotidienne (AIVQ) .
Dans les faits, on constate cependant un manque d'harmonisation dans les critères utilisés par les assureurs . Ainsi un même degré de dépendance ouvrira ou non droit à garantie suivant la compagnie auprès de laquelle la personne dépendante est assurée. L'offre est donc difficilement lisible pour le souscripteur, qui doit être particulièrement vigilant, puisque de la définition même du risque garanti dépend l'effectivité de sa prise en charge. Cette absence de définition commune de la dépendance et d'un référentiel commun pour l'évaluation de la perte d'autonomie est dénoncée par l'ensemble des rapports d'information élaborés par les instances publiques sur le sujet ces dernières années.

Le label GAD (Garantie Assurance Dépendance)

Les assureurs ont cherché à travailler pour améliorer la transparence, la compréhension et le niveau des garanties des contrats d'assurance dépendance. Pour permettre aux personnes à la recherche d'une garantie dépendance de choisir leur contrat de manière éclairée, la Fédération française des sociétés d'assurance (FFSA) a ainsi créé, en 2013, le label GAD (Garantie Assurance Dépendance). Ce label est accordé aux garanties d'assurance couvrant la dépendance lourde. Les contrats labellisés GAD doivent respecter neuf points essentiels :
  • l'utilisation d'un vocabulaire permettant une grande clarté des garanties ;
  • la définition unitaire de la « dépendance lourde » par la grille AVQ (Actes élémentaires de la Vie Quotidienne) ;
  • le format viager de la garantie, sans tenir compte de la date d'apparition de la dépendance lourde ;
  • l'instauration d'une rente dépendance minimale de 500 ? par mois, en cas de dépendance lourde ;
  • la définition contractuelle des revalorisations des garanties et des cotisations ;
  • aucune sélection médicale pour les souscriptions avant cinquante ans ;
  • dès la signature du contrat, proposition d'actions de prévention et d'accompagnement proposés à l'assuré et aux aidants ;
  • une information annuelle du montant des cotisations et des garanties ;
  • la possibilité de maintenir les droits en cas de suspension du paiement de la cotisation dépendance.
- Diversité des garanties proposées. - Au-delà de la définition fluctuante du risque assuré, on observe également une grande diversité des garanties proposées. Une caractéristique est néanmoins commune à l'ensemble des contrats : les garanties prévues sont forfaitaires, ce qui signifie que l'assureur garantit un supplément de revenu en cas de dépendance, et parfois, une assistance, à la différence des garanties indemnitaires qui consisteraient en un remboursement des frais occasionnés par la dépendance. Ces garanties forfaitaires varient selon que la dépendance qui survient est totale ou partielle.
Dans le cas d'une dépendance totale, la garantie de base est constituée par le versement d'une rente viagère, dont le montant est choisi par le souscripteur à la conclusion du contrat. À cette rente s'ajoutent sur option, dans la plupart des contrats, des services d'assistance , voire le versement d'un capital « premiers frais » prévu pour faire face aux frais d'aménagement du logement de la personne dépendante. Ces garanties « satellites » varient en fonction de l'assureur et du contrat, tant dans leur principe que dans leurs conditions de mise en ?uvre. Ainsi certaines garanties sont mobilisables dès la date d'adhésion au contrat d'assurance dépendance mais aussi, par exemple, si l'assuré devient lui-même aidant d'une personne dépendante.
Dans le cas d'une dépendance partielle, les contrats prévoient soit le versement d'un pourcentage de la rente convenue en cas de dépendance totale, soit le versement d'un capital. Certaines compagnies d'assurance proposent en sus la fourniture de prestations de service et, ce qui est plus rare, le versement d'un capital « premiers frais ».

Exemple

Une personne âgée de soixante ans a souscrit un contrat d'assurance dépendance pour elle-même. Un de ses parents, dépendant, a besoin qu'elle s'occupe de lui. Le souscripteur devient alors aidant et peut bénéficier des garanties d'assistance en tant qu'aidant, si le contrat le prévoit.

Conseil pratique

Face à la diversité des garanties offertes, le souscripteur doit être particulièrement vigilant et bien identifier les coûts pris en charge par l'assureur. En particulier, s'agissant des prestations de services mentionnées dans la plupart des contrats, il importe de bien distinguer les simples garanties d'assistance à la recherche d'un prestataire des véritables garanties de prise en charge des prestataires. En réalité, l'intervention des différents prestataires reste le plus souvent à la charge de l'assuré, l'assureur ne jouant qu'un simple rôle d'intermédiaire. Une lecture trop rapide des conditions générales du contrat risque donc d'induire l'assuré en erreur sur l'étendue de la garantie qu'il souscrite.

- Diversité des conditions d'accès au contrat. - La souscription d'un contrat d'assurance dépendance n'est pas libre. Elle est doublement conditionnée.
D'une part, il existe des conditions tenant à l'âge du candidat à l'assurance. Les assureurs prévoient non seulement un âge limite, au-delà duquel il n'est plus possible de souscrire ce type de contrat, généralement compris entre soixante-quatorze et soixante-dix-sept ans, mais aussi un âge en deçà duquel le candidat à l'assurance ne peut pas s'assurer, la plupart du temps entre quarante-cinq et cinquante ans. Si l'on comprend l'idée d'un « âge plafond », justifié par le fait que les personnes âgées sont plus exposées au risque de dépendance, l'instauration d'un « âge plancher » laisse davantage perplexe dans la mesure où il apparaît en contradiction manifeste avec les incitations faites à nos concitoyens d'anticiper au plus tôt le risque d'une éventuelle dépendance. En tout état de cause, et sans surprise, plus l'assuré souscrit tard, plus le risque de devenir dépendant est important et plus le montant des cotisations est élevé.
D'autre part, il peut exister des conditions tenant à l'état de santé du candidat à l'assurance. En effet, si les contrats d'assurance collectifs à adhésion obligatoire ne peuvent imposer aucune sélection médicale des adhérents, en revanche, en présence d'une souscription à un contrat individuel ou à un contrat collectif facultatif, il peut être demandé de répondre à un questionnaire de santé, au besoin complété par un examen médical. En fonction des résultats à ces questionnaires et/ou examens, le médecin-conseil de l'assureur décide d'accepter ou non la souscription. Cette sélection médicale des assurés dépendance lors de la souscription du contrat est réelle, ainsi qu'en atteste le taux de refus opposé par les assureurs, de l'ordre de 15 % à 20 % .

L'inefficacité des contrats d'assurance dépendance

- Plan. - Certaines stipulations contractuelles peuvent venir contrarier, d'une part, la mise en ?uvre de l'assurance dépendance, alors même que la réalisation du risque est reconnue par l'assureur (I) et, d'autre part, la pérennité des garanties souscrites (II).
Les obstacles à la mise en ?uvre de l'assurance
- Délai de carence. - C'est le cas, tout d'abord, de la stipulation d'un délai de carence, pendant lequel l'assuré n'est pas garanti en cas de dépendance. Il démarre à la date d'effet de la souscription (ou de l'adhésion pour les contrats collectifs) et sa durée est définie par le contrat . En cas de dépendance d'origine accidentelle postérieure à la souscription (ou à l'adhésion), il n'y a pas de délai de carence et les garanties du contrat sont acquises immédiatement. En revanche, si la dépendance est consécutive à une maladie de l'assuré, elle n'est pas couverte si elle survient immédiatement après la souscription du contrat. Les délais de carence, sensiblement uniformes quel que soit l'assureur, sont compris entre trois ans en cas de dépendance consécutive à une maladie neurodégénérative (maladie d'Alzheimer, sclérose en plaques, maladie de Parkinson, etc.) à un an pour toute autre maladie. Si, durant la période de carence, l'assuré déclare une dépendance consécutive à une maladie, les contrats prévoient le remboursement des cotisations versées.

Exemple

Une personne déclare une maladie de Parkinson vingt-six mois après avoir signé son contrat. L'assureur ne lui versera ni rente ni capital ; il résiliera son contrat et la remboursera de ses cotisations.
- Délais de franchise. - C'est le cas ensuite de la stipulation de délais de franchise. Il s'agit d'un délai d'attente imposé par l'assureur entre la reconnaissance de la réalisation du risque et le versement des prestations prévues au contrat. Durant ce délai, qui est en général de trois mois, l'assureur ne verse pas les prestations convenues au contrat, alors même que l'état de dépendance est déclaré . Les assureurs justifient la stipulation d'un délai de franchise en expliquant que l'assurance dépendance a pour objet la prise en charge de personnes qui entrent dans un risque pour plusieurs années, en les accompagnant dans leur maintien à domicile ou dans leur suivi en établissement. Elle n'a pas donc pas vocation, selon eux, à couvrir la très courte période de fin de vie. Il n'en reste pas moins que ce délai de franchise est particulièrement difficile à admettre pour l'assuré. On peut imaginer que la reconnaissance par l'assureur de son état de dépendance ne sera pas immédiate, mais prendra plusieurs mois. La stipulation d'un délai d'attente supplémentaire pour percevoir la rente prévue au contrat sera donc mal vécue, d'autant plus que lors de son entrée en dépendance, l'assuré devra faire face à de nombreux frais, notamment d'adaptation de son logement à sa nouvelle situation.
- Exclusions de garantie. - C'est le cas enfin des exclusions de garantie, qui permettent aux assureurs de conditionner la prise en charge de la dépendance de l'assuré au respect par ses soins de certaines règles de prudence, plus ou moins élémentaires . Ainsi les assureurs ne garantissent pas les maladies et accidents consécutifs à la prise d'alcool, de stupéfiants ou de médicaments non prescrits à l'assuré. De même, certains contrats excluent les conséquences de la pratique de certains sports à risque. L'incidence de telles stipulations est importante : dès lors que le sinistre intervient dans une hypothèse visée par une exclusion de garantie, l'assureur ne sera pas tenu de verser la prestation convenue au contrat. Il convient donc pour les candidats à l'assurance d'être particulièrement vigilants au contenu des exclusions conventionnelles de garanties énumérées aux conditions générales des contrats proposés, le principe étant que tout ce qui n'est pas exclu est garanti.
Les obstacles à la pérennité des garanties souscrites
- Des zones d'ombre. - Le souscripteur d'un contrat d'assurance dépendance ignore, lorsqu'il souscrit, dans quel délai sa mise en ?uvre interviendra, et même si elle interviendra un jour : l'opération d'assurance est aléatoire, ce qui est dans sa nature profonde. Mais, plus étonnamment, des zones d'ombre supplémentaires entourent spécifiquement le contrat d'assurance dépendance, lequel peine ainsi à apparaître comme une opération pérenne aux yeux des souscripteurs.
- Absence de certitudes concernant la tarification future. - La tarification future des contrats est teintée d'incertitudes, dans la mesure où la cotisation fixée à l'origine peut, en cours de contrat, être revalorisée en application des dispositions contenues au contrat, ou encore être révisée en application des principes gouvernant la modification du contrat d'assurance. Dans les faits, la plupart des assureurs prévoient une clause qui leur permet d'augmenter leur cotisation si le contrat n'est plus rentable. Résultat des courses : les cotisations peuvent s'envoler, au grand dam du souscripteur. Et c'est bien ce qui s'est produit dans un passé récent sur certains contrats, qui ne sont plus commercialisés aujourd'hui, avec des hausses de 5 % à 10 % par an. Certes, l'assuré est libre de les accepter ou pas, mais en cas de refus ses garanties diminuent alors dans les mêmes proportions.
- Absence de revalorisation automatique du montant de la rente. - Le montant de la prestation garantie - la plupart du temps une rente - est déterminé lors de la conclusion du contrat, c'est-à-dire des années avant sa mise en ?uvre, en fonction du coût actuel de la dépendance. Ni l'assureur ni l'assuré ne peuvent, à la souscription du contrat, maîtriser l'évolution ultérieure du coût de la dépendance. Au jour de la mise en ?uvre du contrat, l'inflation risque donc d'avoir déprécié la valeur de la prestation initialement convenue au contrat, qui ne correspondra peut-être plus aux besoins de l'assuré pour faire face à la situation de perte d'autonomie à laquelle il sera confronté.
Certes, les contrats actuellement présents sur le marché prévoient une revalorisation de la rente définie au contrat, mais - pour la très grande majorité d'entre eux - seulement à compter de la prise d'effet de son versement, en fonction d'un indice lui-même prévu au contrat (indice du coût de la vie, valeur du point Arrco ou Agirc, etc.). Ainsi, au jour de la prise d'effet du contrat, la rente servie par l'assureur est celle fixée initialement, au moment de la souscription. Si le montant de cette rente est alors devenu, par l'effet de l'inflation, dérisoire par rapport au coût réel de la dépendance, il reste néanmoins figé tel que fixé au contrat, bien des années plus tôt.
Ainsi l'assuré qui souscrit très tôt, pensant se prémunir au mieux contre une éventuelle perte d'autonomie, risque de voir ses efforts de cotisation réduits à peu de chose si les prestations convenues initialement ne sont pas en adéquation avec le coût actuel de la dépendance, au moment du dénouement du contrat.
Afin de garantir aux souscripteurs jeunes des prestations adaptées, au jour de la mise en ?uvre du contrat, au coût réel de la dépendance, il est nécessaire que le législateur mette en place un système de revalorisation ou d'indexation des prestations convenues avant la réalisation du risque dépendance.
- Absence de portabilité des contrats. - Aujourd'hui, le marché se caractérise par l'absence de portabilité des droits des assurés dépendance, qui exclut que l'assuré puisse transférer son contrat en cours, pour l'avenir, chez un autre assureur, en conservant le bénéfice des cotisations déjà versées. Il en résulte concrètement, qu'une fois souscrit, il est impossible de changer de contrat - même au sein d'une même compagnie - sans perdre tout ou partie des droits acquis. La faculté pour les assurés de transférer les droits qu'ils détiennent au titre d'un contrat d'assurance dépendance permettrait une meilleure concurrence entre les assureurs, au bénéfice des assurés. Pour lors, le principal obstacle à l'introduction de cette portabilité réside dans la diversité des caractéristiques des contrats distribués.
- Conclusion sur l'assurance dépendance. - Au fil des années, les compagnies d'assurances ont modernisé leur offre en matière d'assurance dépendance et ont revu leurs garanties et prestations : les premiers produits commercialisés dans les années 1990 couvraient uniquement la dépendance totale, alors que ceux proposés à partir de début 2000 intégraient aussi la dépendance partielle et que, depuis la décennie 2010, les contrats proposent des prestations de services et d'assistance élargies, qui répondent à une demande des personnes vulnérables qui ne se limite plus à des considérations seulement financières, mais aussi à des aides en nature au quotidien.
En dépit de ces évolutions, on constate que le marché de l'assurance dépendance, certes en développement, souffre d'un manque de lisibilité et d'homogénéité des produits qui, à tout le moins, limite la confiance que les souscripteurs peuvent avoir, quand elle ne les décourage pas d'opter pour ce type de contrat.
S'agissant de la souscription du contrat, les difficultés liées à l'absence de définition du risque dépendance et à la variabilité des définitions du niveau de dépendance couvert par les contrats ont été signalées. Si l'on peut saluer la création du label GAD, il n'en demeure pas moins que la plupart des contrats demeurent complexes et abscons, source de confusion pour l'assuré .
S'agissant de la mise en ?uvre du contrat, on constate que les litiges entre assureurs et assurés sont de plus en plus fréquents. Bien plus, la difficulté à faire jouer les garanties souscrites, les contentieux constatés relatifs à la date de reconnaissance de l'état de dépendance de l'assuré , l'envolée potentielle des primes, les délais de carence et de franchise entraînent de sérieuses déceptions chez les assurés en même temps qu'ils constituent autant de signes négatifs envoyés aux souscripteurs potentiels.
On sait que le rapport Libault sur le grand âge et l'autonomie, tout en affirmant que le financement privé de la dépendance, notamment par la généralisation d'une assurance dépendance obligatoire, ne constituait pas une solution à privilégier, a cependant souligné qu'il convenait d'accompagner la maturation de ce marché en mettant en place un cadre clair et homogène pour ces contrats afin de sécuriser les souscripteurs et favoriser leur développement . Plusieurs propositions, attendues, auxquelles on ne peut que souscrire, ont été formulées dans cette optique. Afin de faire émerger un standard de la couverture dépendance, il a été proposé d'inciter les organismes complémentaires à inclure certaines garanties dans les contrats d'assurance dépendance et des mécanismes de revalorisation clairs permettant d'éviter l'érosion du pouvoir d'achat de la rente. Le rapport incite, par ailleurs, les assureurs à mettre en place une meilleure continuité et une plus forte transférabilité des droits acquis dans le cadre de couvertures viagères, à harmoniser les référentiels de perte d'autonomie et à encadrer les pratiques de gestion de l'antisélection, et notamment des pratiques de sélection médicale. Enfin, le rapport souligne que le renforcement de l'attractivité des produits d'assurance contre la perte d'autonomie, aujourd'hui insuffisante, peut passer par la généralisation de services d'assistance dans le cadre de ces contrats, lesquels pourraient être mobilisables dès la souscription dudit contrat (aide psychologique, information, assistance téléphonique, etc.) .
Enfin, il convient d'inviter les assureurs à délivrer une information pédagogique et synthétique afin de rappeler le contenu des garanties couvrant spécifiquement des affections neurodégénératives, tout particulièrement quand les assurés dépassent l'âge de soixante-dix ans. Il s'agit ainsi d'éviter, ce qui risque d'arriver de plus en plus fréquemment avec le vieillissement de la population, que l'assuré atteint d'une affection neurodégénérative n'ait plus en mémoire l'existence d'une garantie, dont ses proches ignorent l'existence, avec le risque évident pour ces derniers de ne pas faire jouer le bénéfice de l'assurance souscrite ou, à tout le moins, de ne déclarer la perte d'autonomie que tardivement.
Il s'agit là de quelques pistes destinées à donner un nouvel élan à l'assurance dépendance, lesquelles constituent autant de défis que les assureurs devront s'atteler à relever, car derrière ces contrats, que certains pourraient appréhender à l'aune d'une analyse purement commerciale, se cache un enjeu sociétal national où l'assurance est appelée à tenir un rôle prépondérant. Destinés à une personne appelée à devenir vulnérable, ces contrats doivent être plus protecteurs. Pour ce faire, il convient, sans ambiguïté, de mettre en place des règles qui en facilitent l'accès et en garantissent l'exécution lorsque le risque survient, ce qui suppose, à l'évidence, une volonté chez les promoteurs de l'assurance dépendance de véritablement jouer le jeu.

Le contrat d'assurance-vie avec option dépendance

- La teneur de l'option. - Les assureurs ont développé ces dernières années, pour concilier l'attraction des Français pour l'assurance-vie et la nécessité de développer des garanties dépendance, de nouveaux contrats d'assurance-vie teintés de dépendance. Cette intégration de la dépendance au contrat d'assurance-vie prend la forme d'une simple « option dépendance » que le souscripteur peut adjoindre à son contrat.
Cette option peut concerner aussi bien des contrats d'assurance de capital différé que des contrats d'assurance de rente .
Dans les contrats d'assurance de capital différé, l'assureur s'engage au versement d'un capital à l'assuré, s'il est vivant au terme du contrat. Mais, à cette garantie principale, s'ajoute pour l'assuré la faculté de souscrire une option dépendance qui lui permettra, s'il devient dépendant en cours de contrat, d'obtenir la conversion du capital garanti en une rente viagère. À la différence des contrats d'assurance dépendance, la rente ici versée en cas de dépendance n'est donc pas déterminée à la souscription du contrat : elle sera définie au moment de la mise en ?uvre de l'option dépendance, et sera fonction de l'épargne accumulée jusque-là. Ainsi, si le souscripteur devient dépendant, il peut à son choix demander la mise en ?uvre de son option dépendance et bénéficier du versement d'une rente viagère, ou poursuivre le contrat d'assurance-vie, en effectuant par exemple des rachats. Il est à noter qu'une fois l'option dépendance mise en ?uvre, le souscripteur ne peut revenir sur son option : le capital est définitivement acquis à l'assureur, l'assuré ne pouvant plus effectuer de rachat. De plus, le capital étant définitivement acquis à l'assureur, le jeu de la garantie dépendance est exclusif de celui de la garantie décès : dès lors que le souscripteur bénéficiera de l'option dépendance, aucun capital ne sera versé au bénéficiaire, puisque aucune épargne disponible ne figurera au contrat. Bien évidemment, la définition de la dépendance retenue au contrat doit retenir particulièrement l'attention du souscripteur, puisqu'à l'instar des contrats d'assurance dépendance, la notion de dépendance est variable suivant le contrat envisagé. De même, l'accès à l'option dépendance est enfermé dans des conditions d'âge et de santé comparables à celles envisagées au titre des contrats prévoyance dépendance.
Dans les contrats d'assurance de rente, la souscription de l'option dépendance permettra à l'assuré de voir le montant des arrérages de la rente principale prévue au contrat majoré (en général doublé) en cas de dépendance. Là encore, le montant de la rente servie dépendra du montant de l'épargne accumulée sur le contrat au moment de la mise en service de la rente ; il ne sera donc pas déterminé dès la conclusion du contrat. À la différence des contrats de capital différé, les contrats d'assurance de rente ne comportent pas de valeur de rachat. En conséquence, le souscripteur qui devient dépendant aura « seulement » droit au versement de la rente convenue. Il convient donc ici d'être encore plus vigilant à la définition de la dépendance retenue au contrat, puisque si la dépendance qui touche le souscripteur n'est pas celle définie au contrat, il ne bénéficiera pas de la rente convenue et ne pourra en aucun cas mobiliser son contrat par un rachat ou une avance pour faire face au coût de la dépendance. Par ailleurs, et là encore par opposition à l'option dépendance insérée dans les contrats d'assurance-vie de capital différé, celle incluse dans les contrats d'assurance de rente n'est pas exclusive du versement de la garantie décès aux bénéficiaires désignés par le souscripteur. Cependant, le montant des arrérages de rente servis au souscripteur sera déduit du capital convenu au contrat en cas de décès de l'assuré.
- L'intérêt de l'option. - Ce type de contrat s'adresse aux épargnants souhaitant profiter de tous les avantages de l'assurance-vie tout en prévenant (via l'option) une éventuelle future perte d'autonomie. En effet, contrairement à l'assurance dépendance, les versements effectués dans un contrat d'assurance avec option de dépendance ne se font pas à fonds perdu. Si la dépendance ne se révèle pas, le capital épargné reste la propriété de l'assuré. Cet aspect de produit d'épargne est séduisant pour le souscripteur : le contrat d'assurance-vie lui permettra non seulement d'épargner un capital en vue de faire face à son entrée en dépendance, mais également, si la dépendance ne survenait finalement pas, de transmettre le capital ainsi accumulé aux bénéficiaires de son choix.
Souscrire un contrat d'assurance-vie avec une option de ce type peut donc être une bonne solution. Mais attention, l'option dépendance des contrats d'assurance-vie ne fonctionne, dans la majorité des cas, qu'en cas de dépendance totale, et ne couvre pas, contrairement aux contrats d'assurance dépendance, les cas de dépendance partielle. De plus, aucun volet assistance n'est intégré, à l'instar de ce « petit plus » qui existe dans la plupart des contrats de prévoyance dépendance.
De facto, l'option dépendance s'adresse aux personnes qui disposent d'une véritable capacité d'épargne. En effet, non seulement le recours à ce type de contrat suppose le versement, dès la souscription, d'un capital minimum souvent conséquent, qui le rend difficilement accessible mais, plus encore, pour que la rente - même majorée en cas de perte d'autonomie - soit suffisante pour financer le coût de la dépendance éventuelle, il faudra que le contrat soit bien garni au moment de la sortie. De ce fait, l'option dépendance d'une assurance-vie se destine principalement aux personnes plutôt « jeunes » (40/50 ans) qui auront le temps et les moyens de constituer un capital important sur leur contrat d'assurance-vie, et qui acceptent que la sortie se fasse nécessairement en rente. Rajoutons que ce type de contrat affiche souvent des frais de gestion élevés.