Les descendants ont toujours été réservataires. Le conjoint ne l'est que depuis 2001. Quant aux ascendants, ils ont perdu cette qualité.
Le cercle des héritiers réservataires
Le cercle des héritiers réservataires
- Les descendants : les réservataires historiques. - La détermination des héritiers réservataires par la loi revient à définir les personnes envers lesquelles on a le devoir de transmettre un minimum de biens, les proches parmi les proches, les héritiers que la loi présume être ceux, pour le standard juridique, envers lesquels on éprouve le plus d'affection, mais aussi envers qui l'on a le plus de devoirs. Très naturellement les premiers de ces héritiers privilégiés sont les enfants, bien évidemment les descendants au premier degré mais aussi ceux des degrés suivants, c'est-à-dire aussi les petits-enfants et les arrière-petits-enfants. Par contre, pour être réservataire encore faut-il venir en rang utile à la succession, et ce de son propre chef ou par représentation. La nature de la filiation est indifférente : tous les descendants sont réservataires, que leur filiation soit par le sang ou adoptive. Pour cette dernière filiation, il faut simplement ajouter que l'adopté simple n'acquiert pas la qualité de réservataire à l'égard des ascendants de ses parents adoptifs (C. civ., art. 368, al. 2). Les descendants ont toujours été les premiers réservataires, leur vocation successorale est rivée à la qualité de réservataire. La réserve des descendants est donc fondamentale.
- Le conjoint survivant : le dernier promu. - Jusqu'en 2001, le conjoint survivant, sur le plan successoral, était le mal-aimé, l'exclu, l'étranger, l'héritier irrégulier. Aussi sa vocation légale était-elle très maigre et dans bien des cas ne lui offrait pas une bonne protection. La loi no 2001-1131 du 3 décembre 2001, complétée par celle du 23 juin 2006, a non seulement accru de manière conséquente les droits légaux du conjoint survivant, mais lui a, en plus, conféré la qualité d'héritier réservataire en l'absence de descendants. Le conjoint survivant est réservataire dès lors qu'il n'est pas divorcé. Ainsi ni la séparation de corps ni l'ouverture d'une procédure en divorce (par une assignation) ne privent le conjoint de sa réserve héréditaire. Si une convention de divorce par consentement mutuel a été signée mais qu'elle n'a pas été déposée au rang des minutes du notaire, au jour du décès, le divorce n'étant pas effectif, le conjoint demeure réservataire. On peut malgré tout s'interroger sur la pertinence de cette réserve au bénéfice de l'époux survivant. En premier lieu sur un plan purement juridique : le lien de mariage (qui l'unit au de cujus) a été fortement fragilisé par les réformes successives du divorce (abaissement des conditions du divorce pour altération du lien conjugal, déjudiciarisation totale de certains divorces, etc.). En second lieu, si autrefois on ne se mariait qu'une seule fois et pour la vie, aujourd'hui l'évolution sociale de la famille fait qu'une même personne a pu se marier plusieurs fois. Ainsi, en changeant de conjoint, le réservataire va changer également. Ce qui peut surprendre d'autant plus qu'il va pouvoir recueillir des biens d'origine familiale du de cujus, ce à quoi il ne prétend pas vraiment. On revient un peu à la quarte du conjoint pauvre du Code de Justinien
. Cette nouvelle réserve du conjoint peut se justifier par une sorte de parallélisme à la prestation compensatoire, cette dernière palliant une « perte de train de vie en cas de divorce ». La réserve du conjoint compense la même perte de train de vie, mais en cas de décès de son époux
.
- Les ascendants : les derniers relégués ! - La réserve des ascendants a toujours existé dans notre système juridique, la plupart des anciennes coutumes la reconnaissaient. Les ascendants, souche de la famille, avaient un droit impératif à hériter de leurs enfants. Cette réserve était naturelle dans l'ancienne société française imbibée par cette forte solidarité intergénérationnelle. Les nouvelles configurations de la cellule familiale, l'affaiblissement de la solidarité entre ses membres (dont le cercle diminue) et la volonté de faire une place au conjoint survivant ont poussé le législateur à sacrifier la réserve des ascendants. Aussi la loi du 23 juin 2006 a-t-elle abrogé la réserve des ascendants
. Il a toutefois été accordé un maigre substitut aux ascendants privilégiés désormais titulaires d'un droit de retour (C. civ., art. 732-8), lequel n'est pas véritablement une bonne protection en raison de son côté obscur
et de sa maigreur.