C'est lors de l'activation du mandat de protection future que la confiance mise par des parents en la personne du mandataire pour s'occuper de leur enfant handicapé va être éprouvée concrètement
. Lorsque ces parents ne seront plus en mesure de s'en occuper eux-mêmes, ce mandataire doté des pouvoirs prévus au contrat prend leur relais et poursuit cette mission protectrice en leurs lieu et place. Quelle grande preuve de confiance que de confier ainsi son enfant handicapé à un tiers ! L'État recule et délaisse la protection des personnes pour ne traiter en dernier recours que des cas les plus graves. Ce retrait de l'État fait émerger la famille pour assurer la protection des vulnérables. La confiance constitue donc le fil conducteur de la phase d'exécution de ce contrat très spécial.
L'activation du mandat de protection future pour autrui : une exécution contractuelle placée sous le signe de la confiance
L'activation du mandat de protection future pour autrui : une exécution contractuelle placée sous le signe de la confiance
L'activation du mandat de protection future pour autrui
- Les conditions de fond de l'activation du mandat. - L'activation du mandat de protection future pour autrui est subordonnée à la réalisation de deux conditions de fond.
La première condition concerne le mandant. Le mandat prend effet à compter du jour où le mandant, c'est-à-dire le survivant des père et mère, décède ou ne peut plus prendre soin de son enfant handicapé. Elle implique que le mandant soit dans l'impossibilité de pourvoir seul aux intérêts de son enfant par suite d'une altération de ses facultés mentales ou physiques de nature à empêcher l'expression de sa volonté
.
La seconde condition concerne le bénéficiaire du mandat. Pour activer le mandat, son bénéficiaire doit avoir atteint l'âge de la majorité et se trouver dans l'impossibilité de pourvoir seul à ses intérêts par suite d'une altération de ses facultés mentales ou de ses facultés corporelles de nature à empêcher l'expression de sa volonté
. Cette altération est constatée par un médecin mentionné sur la liste du procureur de la République qui établit un certificat médical. Ce certificat médical ainsi exigé pour l'activation du mandat de protection est distinct du certificat médical circonstancié visé à l'article 1219 du Code de procédure civile, constituant le préalable nécessaire à l'ouverture d'une mesure de protection. L'exigence d'un certificat médical circonstancié pour l'ouverture d'une mesure de protection se fonde sur le caractère liberticide et incapacitant de telles mesures. Le mandat de protection n'est pas incapacitant et ne prive pas son bénéficiaire de sa capacité juridique. Le législateur a considéré par conséquent qu'un certificat médical non circonstancié suffisait pour activer le mandat.
- Les conditions de forme de l'activation du mandat. - L'activation du mandat de protection future pour autrui a lieu, à l'initiative du mandataire qui doit se présenter en personne au greffe du tribunal d'instance du ressort de la résidence du bénéficiaire du mandat, accompagné de ce dernier, sauf raison médicale empêchant ce transport. Le mandataire présente au greffier la copie authentique du mandat, un certificat de décès du mandant ou un certificat médical de moins de deux mois émanant d'un médecin inscrit sur la liste mentionnée à l'article 431 du Code civil établissant que le mandant est hors d'état de prendre soin de son enfant handicapé ainsi qu'un certificat médical de moins de deux mois établissant que cet enfant majeur, bénéficiaire du mandat, se trouve également dans l'impossibilité de pourvoir seul à ses intérêts par suite d'une altération de ses facultés mentales ou corporelles de nature à empêcher l'expression de sa volonté. Lorsque le bénéficiaire n'a pas comparu devant le greffier, il est informé par le mandataire de la prise d'effet du mandat de protection par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
- Contrôle purement formel du greffe. - Lors de l'activation du mandat, le greffier n'effectue qu'un contrôle formel des pièces qui lui sont remises par le mandataire
. Lorsque ces vérifications formelles sont réalisées, le greffier paraphe chaque page du mandat, mentionne en fin d'acte qu'il prend effet le jour de sa présentation au greffe, y appose son visa et le restitue au mandataire. Aucune vérification au fond n'est réalisée lors de l'activation du mandat, notamment sur la capacité du mandataire à exercer des charges tutélaires. Aucune copie du mandat avec la mention de son activation n'est conservée. Aucun enregistrement ne constate l'existence d'un mandat de protection activé. Le notaire rédacteur du mandat n'est même pas informé de son activation. Si le client ne l'en informe pas spontanément, le notaire, pourtant détenteur de la minute, peut l'ignorer.
- L'absence de contrôle du juge des tutelles. - Lors de l'activation du mandat de protection, le juge des tutelles n'intervient pas. Le contrôle purement formel exigé par la loi incombe au greffier. Le juge des tutelles peut être saisi par le mandataire en cas de refus du greffier d'activer le mandat. Le juge peut alors se prononcer sans débat et sa décision n'est pas susceptible d'appel. En dehors de ce cas spécifique, le juge n'intervient pas dans la mise en ?uvre du mandat. Il ne peut apprécier l'opportunité de l'activation du mandat. S'il est saisi par une autre voie, il pourra ouvrir une autre mesure de protection qu'il estimerait plus appropriée ; mais il ne peut pas moduler le mandat pour l'adapter, le cas échéant, à la situation s'il s'avérait inapproprié.
- L'absence de rôle du notaire lors de l'activation du mandat. - Le notaire ne joue aucun rôle lors de la procédure d'activation du mandat
. Celle-ci relève de la responsabilité du mandataire, du médecin et du greffier. Nous venons de préciser que l'information officielle du notaire rédacteur n'est même pas prévue par les textes alors que la loi impose la forme notariée pour sa rédaction. Cette absence d'information est d'autant plus surprenante que l'activation du mandat génère une obligation de contrôle du mandataire par le notaire rédacteur. Le rôle du notaire se limite au conseil et au devoir de vigilance. Il peut mettre en observation son client pour lequel un mandat a été régularisé et sensibiliser le mandataire sur la nécessité de l'activer au moment opportun.
- Le rôle du mandataire. - Dans la mesure où le mandat de protection est activé à l'initiative du mandataire, le rôle de ce dernier est crucial. Il l'est même bien avant son activation car en acceptant le mandat, il contracte, dès sa conclusion, implicitement mais certainement, une obligation de surveillance et de vigilance à l'égard du mandant et du bénéficiaire. Incontestablement, la première obligation du mandataire est de mettre en ?uvre le mandat, lorsque les conditions de fond sont réunies. Cela suppose de la part du mandataire une relation suivie et bienveillante à l'égard du mandant et du bénéficiaire, ce qui caractérise la première manifestation de confiance dans l'exécution du contrat.
L'exécution du mandat de protection future par le mandataire
C'est lorsque le mandat de protection future pour autrui sera activé que la confiance placée par les parents en la personne du mandataire pour s'occuper de leur enfant handicapé sera mise à l'épreuve
.
Le mandataire devra alors prendre le relais des parents pour assurer la protection de cet enfant, tant de sa personne que de son patrimoine.
Les commentaires relatifs à l'exécution de la mission du mandataire et ceux relatifs à son contrôle sont identiques pour le mandat de protection pour autrui et pour soi. Aussi nous renvoyons le lecteur aux développements ultérieurs portant sur le mandat de protection future mis en ?uvre pour la protection des majeurs et figurant au titre 2 de la présente partie.