Dans le délai de trois mois qui suit sa saisine, la commission doit rendre une décision sur la recevabilité de la demande du débiteur. La recevabilité de la demande emporte la suspension des mesures d'exécution (§ I) et celle des mesures d'expulsion (§ II).
La recevabilité de la demande et ses effets de protection
La recevabilité de la demande et ses effets de protection
La suspension des mesures d'exécution
La suspension des mesures d'exécution est régie par l'ordonnance du 14 mars 2016
qui a recodifié la matière aux articles L. 722-2 à L. 722-5 du Code de la consommation. Il sera distingué le principe général de la suspension des mesures d'exécution et les conséquences spéciales sur la procédure de saisie immobilière.
- Le principe général de la suspension et de l'interdiction des procédures d'exécution diligentées à l'encontre des biens du débiteur ainsi que des cessions de rémunération consenties par celui-ci et portant sur des dettes autres qu'alimentaires est énoncé par l'article L. 722-2 du Code de la consommation.
« Il s'agit d'une étape supplémentaire vers le caractère collectif de la procédure de surendettement »
.
Les créanciers ne peuvent plus introduire de nouvelles voies d'exécution, ni mettre en œuvre les mesures d'exécution à l'encontre du débiteur surendetté. Ces effets ne peuvent être levés qu'en contestant, devant le juge d'instance, la décision de recevabilité rendue par la commission de surendettement. L'exercice d'un tel recours ne suspend pas les effets de la décision de recevabilité
.
La suspension de plein droit des mesures d'exécution n'empêche pas les créanciers de poursuivre une action en justice déjà engagée, voire d'en engager une nouvelle. La Cour de cassation a même reconnu au créancier la faculté d'obtenir un titre exécutoire nonobstant l'adoption des mesures de redressement
.
La suspension concerne le recouvrement de toutes les dettes, y compris les dettes fiscales et celles envers les organismes de sécurité sociale. Seules les dettes alimentaires échappent à la suspension.
Le débiteur surendetté voit donc sa situation figée jusqu'à la mise en œuvre du traitement de son surendettement.
- La particularité de la saisie immobilière. - La saisie immobilière en cours ne bénéficie pas de la suspension des poursuites et fait l'objet d'une procédure spécifique (V. infra, no ). Le juge compétent est le juge de la saisie immobilière, et non plus le juge d'instance.
Selon l'état d'avancement de la procédure de saisie, les poursuites peuvent être suspendues ou non :
Si l'un des indivisaires est admis au bénéfice de la procédure de surendettement, la procédure de saisie n'est pas suspendue à l'égard de l'autre coïndivisaire
.
La suspension des mesures d'expulsion
La seconde conséquence de la recevabilité de la demande de traitement de la situation est la suspension des mesures d'expulsion
. Comme dans la section précédente, il sera distingué le principe général de la suspension des mesures d'expulsion et les incidences pratiques de la suspension.
- Le principe général. - Dès que la décision de recevabilité de la demande de traitement de la situation de surendettement est intervenue, la commission peut saisir le juge du tribunal d'instance aux fins de suspension des mesures d'expulsion du logement du débiteur. Cette faculté, longtemps refusée, a été introduite à l'article L. 722-6 du Code de la consommation par la loi du 1er juillet 2010
. En cas d'urgence, la saisie du juge peut intervenir à l'initiative du président de la commission, du délégué de ce dernier, du représentant de la Banque de France ou du débiteur
.
Contrairement à la procédure de suspension de la saisie ci-dessus énoncée, le débiteur peut lui-même prendre l'initiative de cette demande auprès du juge d'instance et non du juge de la saisie immobilière.
À la demande du débiteur, la commission peut saisir, à compter du dépôt du dossier et jusqu'à la décision statuant sur sa recevabilité de la demande de traitement de la situation de surendettement, le juge d'instance aux fins de suspension des procédures d'exécution diligentées à l'encontre des biens du débiteur
. La procédure d'urgence peut être introduite sans attendre que la commission ait statué sur la recevabilité de la demande de surendettement
.
Si la situation du débiteur l'exige, le juge prononce la suspension provisoire des mesures d'expulsion de son logement, à l'exception de celles fondées sur un jugement d'adjudication rendu en matière de saisie immobilière et de celles ordonnées sur le fondement du troisième alinéa de l'article 2198 du Code civil
.
Le débiteur qui se trouve dans cette situation a donc tout intérêt à utiliser cette procédure qui lui permettra de bénéficier d'une suspension maximale de deux ans
et, sitôt la recevabilité de sa demande de traitement de sa situation de surendettement intervenue, de voir rétablis ses droits à l'aide personnalisée au logement
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La commission peut également demander au juge de suspendre les mesures d'expulsion du logement du débiteur pendant la procédure d'orientation du dossier à la demande de la commission
.
- Incidences pratiques de la suspension des mesures d'expulsion. - Lorsqu'il est porté à la connaissance de la commission de surendettement de la Banque de France que la personne surendettée risque d'être expulsée de son logement, la suspension est la règle. Aux dires d'un directeur départemental de la Banque de France, la présence d'enfants aux foyers est un des critères pour suspendre toute expulsion
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Le décret no 2019-455 du 16 mai 2019 précise que le bailleur doit être informé des conséquences de l'absence de contestation des décisions de la commission de surendettement ou du juge relatives à l'acquisition de la clause résolutoire et accordant au locataire défaillant des délais de paiement. Mais, dans les faits, la suspension des effets de la clause résolutoire permet au locataire de se maintenir dans les lieux. Quant au bailleur, il verra la plupart du temps sa créance éteinte par l'effet d'une orientation de son débiteur vers un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire
. Et la part des situations orientées vers le rétablissement personnel est en croissance constante depuis l'instauration de cette procédure en 2003.
Si les organismes de logement social sont majoritaires au titre des créanciers des débiteurs surendettés (50,7 %), les particuliers portent 24,9 % des dettes de loyers
. Ce qui signifie qu'un retraité peut facilement se retrouver propriétaire d'un logement dont il ne perçoit aucun loyer, mais dont il assume les charges, tout en voyant sa créance effacée à l'issue de sa procédure.
Lorsque la personne surendettée est propriétaire de son logement, la commission de surendettement lui accorde en principe vingt-quatre mois pour trouver un acquéreur. Toutefois dans près de 40 % des cas, à l'expiration de ce délai un nouveau dossier est déposé par le débiteur, qui aboutit dans 30 % des cas à un effacement de dette.