Une fiscalité tendant à une rénovation énergétique partielle

Une fiscalité tendant à une rénovation énergétique partielle

Afin de faciliter la rénovation énergétique des logements, le législateur a instauré un crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) (Sous-section I). Au surplus, ce principal levier est complété par des avantages fiscaux connexes (Sous-section II).

Le crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE)

La loi de finances pour 2018 a prorogé le crédit d'impôt au titre des dépenses de rénovation énergétique supportées jusqu'au 31 décembre 2018 1492120327632.
Il convient de définir le champ d'application du CITE (§ I)avant de déterminer le montant du crédit d'impôt (§ II).

Le champ d'application du CITE

– Les bénéficiaires du CITE. – Le crédit d'impôt bénéficie aux contribuables supportant des dépenses pour la contribution à la transition énergétique au titre de l'habitation principale dont ils sont propriétaires, locataires ou occupants à titre gratuit 1491826941043. Les associés de sociétés de personnes non soumises à l'IS occupant un logement appartenant à la société à titre d'habitation principale bénéficient de ce dispositif à condition d'avoir effectivement supporté les dépenses 1495354676944.
En copropriété, les dépenses peuvent porter sur les parties privatives ou sur les parties communes. En cas de dépenses collectives, chaque contribuable bénéficie du crédit d'impôt pour la quote-part afférente à son logement 1512659561021. Néanmoins, les dépenses concernant les parties communes occupées par une autre personne que le contribuable n'ouvrent pas droit au crédit d'impôt. Cette disposition vise essentiellement les loges de gardien 1491829409750.
Les contribuables occupant le logement à titre de résidence secondaire ou ne l'occupant pas ne bénéficient pas du dispositif de faveur.
Le propriétaire bailleur n'est pas éligible au dispositif. Les travaux sont néanmoins déductibles de ses revenus fonciers 1491827879765.
En pratique, l'utilisation du CITE par les locataires est très marginale. En effet, ils n'ont pas la certitude de bénéficier de leur investissement dans la durée 1492118705918.
Tous les contribuables bénéficient de ce mécanisme sans condition de ressources. S'agissant d'un crédit d'impôt, les personnes non imposables ou dont l'impôt est inférieur au crédit accordé sont remboursées de la part de crédit non imputable sur l'impôt.
– Les immeubles concernés. – Le CITE concerne les immeubles situés en France et achevés depuis plus de deux ans à la date de début des travaux.
L'immeuble doit être affecté à titre principal à usage d'habitation. Le crédit d'impôt s'applique néanmoins aux dépendances immédiates et nécessaires telles que les garages, mais pas aux éléments d'agrément tels que les piscines 1491829909952.
Les dépenses concernant les locaux à usage mixte d'habitation et professionnel sont prises en compte à hauteur de la superficie affectée à l'habitation, sauf à démontrer l'utilisation exclusive de l'équipement pour l'habitation 1491830199001.
Lors du paiement de la dépense, le logement doit constituer l'habitation principale du contribuable ou l'être à bref délai 1495355536886.
– Les dépenses concernées. – Le crédit d'impôt concerne les dépenses payées pendant l'année d'imposition au titre de l'acquisition ou de l'installation d'équipements, matériaux et appareils limitativement énumérés (CGI, art. 200 quater), et présentant des caractéristiques techniques et des critères de performances minimales fixés par arrêté ministériel (CGI, ann. IV, art. 18 bis). Les caractéristiques techniques sont régulièrement revues afin de réserver le crédit d'impôt aux équipements les plus performants.
Ces équipements et matériaux sont fournis et installés par la même entreprise ou par une société sous-traitante, à condition que l'entreprise donneuse d'ordre établisse la facture pour toute l'opération 1491839558971. Pour certains travaux nécessitant une visite du logement préalablement au devis, l'entreprise a l'obligation d'obtenir la qualification « Reconnu garant de l'environnement – RGE » 1491840224566. Les équipements, matériaux ou appareils acquis directement par le contribuable ne sont pas éligibles au CITE, même si la pose ou l'installation est effectuée par un professionnel 1491841361921.

La détermination du montant du CITE

– Le montant de l'avantage fiscal. – Le crédit d'impôt est égal à 30 % du montant des dépenses payées au cours de l'année d'imposition. L'acompte n'étant pas un paiement, l'année à retenir est celle du règlement définitif de la facture de l'entreprise. En cas de paiement échelonné, l'année est celle du premier versement 1491835862231.
Le prix d'acquisition des matériaux résulte de la facture de l'entreprise ayant réalisé les travaux. Il s'entend toutes taxes comprises.
En principe, le coût de la main-d'œuvre n'est pas éligible au crédit d'impôt, à l'exception de la pose :
  • des éléments concernant l'isolation thermique des parois opaques : planchers, plafonds, murs et toitures ;
  • de l'échangeur de chaleur souterrain des pompes à chaleur géothermiques 1505043750087.
Les frais administratifs et financiers sont également exclus. Il s'agit par exemple des frais de dossier ou des intérêts d'emprunt 1505044048254.
Par ailleurs, les primes et subventions versées au contribuable pour des travaux éligibles au CITE viennent en déduction de la base du crédit d'impôt 1491840866526.
Pour un même logement, le montant des dépenses prises en compte est plafonné au titre d'une période de cinq années consécutives à :
  • la somme de 8 000 € pour une personne célibataire, veuve ou divorcée ;
  • la somme de 16 000 € pour un couple marié ou pacsé, soumis à imposition commune.
Cette somme est majorée de 400 € par personne à charge.
Il convient enfin de préciser que le CITE est soumis au plafonnement global des avantages fiscaux (CGI, art. 200-0 A).

Calcul du crédit d'impôt pour la transition énergétique

1) En 2018, un couple marié ayant deux enfants à charge réalise pour la première fois depuis cinq ans des travaux éligibles au CITE pour un montant global de 20 000 €.

Plafond pluriannuel des dépenses prises en compte : 16 000 + (2 × 400) = 16 800 €.

Montant du crédit d'impôt : dépense faite plafonnée à 16 800 € × 30 % = 5 040 €.

Solde du plafond pluriannuel : néant.

2) En 2017, une personne célibataire sans enfant a réalisé des travaux éligibles au CITE pour un montant de 2 000 €. En 2018, elle réalise de nouveaux travaux éligibles pour un montant de 5 000 €.

Plafond pluriannuel de dépenses : 8 000 €.

Montant du crédit d'impôt en 2017 : dépense faite non plafonnée : 2 000 × 30 % = 600 €.

Solde du plafond pluriannuel : 6 000 €.

Montant du crédit d'impôt en 2018 : dépense faite non plafonnée : 5 000 × 30 % = 1 500 €.

Solde du plafond pluriannuel : 1 000 €.

En cas de changement de résidence principale, le contribuable bénéficie du crédit d'impôt pour son nouveau logement, même s'il en a déjà bénéficié auparavant, et même si le précédent occupant a obtenu un crédit d'impôt pour le même logement
<sup class="note" data-contentnote=" Mémento Lefebvre fiscal 2017, n° 3055.">1491838291210</sup>.

Les avantages fiscaux connexes au CITE

Pour permettre un développement accru de l'amélioration énergétique des logements, les travaux concernés bénéficient de la TVA à taux réduit (§ I).
Les collectivités territoriales sont également susceptibles de contribuer à cet effort en exonérant de taxe foncière les propriétaires les plus vertueux en la matière (§ II).

Une TVA à taux réduit

La TVA sur les travaux d'amélioration de la qualité énergétique des locaux à usage d'habitation achevés depuis plus de deux ans est perçue au taux réduit (CGI, art. 278-0 bis A).
Ce taux réduit est de 5,5 % en France métropolitaine et en Corse et de 2,10 % dans les DOM.
– Les équipements et prestations éligibles. – Les travaux bénéficiant de cette faveur consistent en la pose, l'installation et l'entretien des matériaux et équipements éligibles au CITE 1491853416578. Le taux réduit profite également à l'acquisition des matériaux, appareils et équipements éligibles, lorsqu'ils sont fournis et facturés par l'entreprise prestataire 1491900652095.
Le bénéfice du taux réduit n'est pas conditionné aux autres modalités d'application du CITE. Il profite ainsi au propriétaire bailleur et aux travaux réalisés dans une résidence secondaire.
La TVA à taux réduit s'applique également aux travaux induits, indissociablement liés aux travaux d'amélioration énergétique, facturés dans un délai maximum de trois mois avant ou après la facturation des travaux d'amélioration éligibles 1491900829441.
Les travaux d'amélioration sur les biens à usage d'habitation achevés depuis plus de deux ans ne bénéficiant pas du taux réduit relèvent du taux de TVA intermédiaire de 10 % (CGI, art. 279-0 bis).
– L'exclusion du taux réduit et intermédiaire pour les travaux de construction et de rénovation lourde. – Certains travaux réalisés sur une période de deux ans maximum sont exclus du dispositif (CGI, art. 278-0 bis A, 2).
Il s'agit des travaux :
  • concourant à la production d'un immeuble neuf (CGI, art. 257, I, 2, 2°) ;
  • ou augmentant la surface de plancher des locaux existants de plus de 10 %.
Ces travaux relèvent en effet du taux de droit commun à 20 %.

Une possible exonération de taxe foncière

Les collectivités territoriales ont la faculté d'exonérer temporairement de taxe foncière sur les propriétés bâties, à concurrence de 50 % ou de 100 %, les logements achevés avant le 1er janvier 1989 ayant fait l'objet de dépenses d'équipement éligibles au CITE payées par le propriétaire (CGI, art. 1383-0 B) 1491845957483.
L'exonération profite au redevable légal de la taxe foncière, peu important que l'immeuble constitue ou non l'habitation principale du propriétaire 1491896098185.
– Le montant minimal des dépenses. – Pour bénéficier de l'exonération, il convient que le montant total des dépenses payées toutes taxes comprises soit :
  • supérieur à 10 000 € par logement au cours de l'année précédant l'année d'application de l'exonération ;
  • ou supérieur à 15 000 € par logement au cours des trois années précédant l'année d'application de l'exonération.
Il s'agit du montant retenu pour l'application du CITE 1491898106560.
– La durée de l'exonération. – L'exonération s'applique pendant une période de cinq ans à compter de l'année suivant celle du paiement des dépenses supérieures au seuil. Elle est susceptible de bénéficier plusieurs fois au même immeuble. Il convient néanmoins qu'un délai de dix ans s'écoule entre la fin de la première période d'exonération et le début de la suivante.
– Les cotisations concernées. – L'exonération porte uniquement sur la part de taxe foncière revenant à la collectivité territoriale ayant pris la délibération nécessaire. Elle concerne également les taxes spéciales d'équipement additionnelles profitant aux établissements publics fonciers. En revanche, elle ne s'applique pas à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères.
– Un dégrèvement complémentaire de taxe foncière pour les organismes HLM. –Les organismes HLM, les sociétés d'économie mixte de réalisation ou de gestion de logements, ainsi que certains organismes d'aide au logement (CCH, art. L. 365-1) bénéficient d'un dégrèvement de plein droit sur leur cotisation de taxe foncière.
Ce dégrèvement est égal au quart des dépenses de travaux d'économie d'énergie et de fluides bénéficiant du taux réduit de TVA, minorées des subventions perçues (CGI, art. 1391 E).

Le chèque énergie contre la précarité énergétique

Le chèque énergie remplace les tarifs sociaux de l'énergie (C. énergie, art. L. 124-1 et s.). Il est délivré dans la France entière depuis 2018.
Il est adressé automatiquement aux ménages à revenus modestes. Un ménage désigne une ou plusieurs personnes physiques ayant la jouissance d'un local imposable à la taxe d'habitation (C. énergie, art. R. 124-1 et s.).
Le montant du chèque énergie varie de 48 € à 227 € selon le revenu fiscal de référence et le nombre de personnes composant le ménage.
Les bénéficiaires ont le choix de l'utiliser pour le paiement de factures de tout type d'énergie : électricité, gaz, bois, fioul, etc., ou pour des travaux de rénovation énergétique (C. énergie, art. R. 124-4).
Les travaux doivent être réalisés par un professionnel certifié « reconnu garant de l'environnement » et porter sur des équipements, matériaux et appareils éligibles au CITE 1506760680717.
Le chèque énergie est utilisable jusqu'au 31 mars de l'année suivant sa délivrance. Sa validité est prorogée de deux ans à la demande du bénéficiaire. Le chèque énergie prorogé est utilisable uniquement pour des travaux de rénovation énergétique.
– Les conséquences pratiques de ces dispositifs. – La rénovation d'un logement résultant d'un projet global et réfléchi est beaucoup plus efficace qu'une succession d'actions individuelles.
Or, les mécanismes existants favorisent les dépenses ponctuelles. Ils ne permettent pas d'orienter les contribuables vers une démarche d'amélioration énergétique globale de leur logement.
Par ailleurs, seul le coût des équipements est pris en compte. La pose et les travaux connexes en sont exclus. Enfin, le montant du crédit d'impôt est plafonné par périodes de cinq ans, durée insuffisante pour une rénovation globale 1492119573856. En pratique, les avantages fiscaux sont davantage utilisés par effet d'aubaine lors d'un besoin déterminé 1502782831944que dans le cadre d'une démarche volontaire de réduction de la consommation d'énergie.
Le législateur a tenté de remédier à ces inconvénients :
  • en limitant le bénéfice du crédit d'impôt aux bouquets de travaux pour les contribuables les plus aisés ;
  • et en déterminant des taux de crédit d'impôt variant en considération de l'utilité et de la performance de chaque catégorie d'équipement.
Cette réforme trop complexe fut éphémère 1492162318174.
En complément de ces dispositifs, d'autres aides sont consenties par l'Agence nationale de l'habitat (ANAH).