La saisie immobilière : un souci permanent de protection du logement

La saisie immobilière : un souci permanent de protection du logement

La saisie immobilière, réformée en 2006 , tend à la vente forcée de l'immeuble du débiteur en vue de la distribution de son prix . Tout au long de la procédure, dont nous rappellerons les grandes lignes (Sous-section I), le législateur s'attache à protéger le logement au point qu'il encourage le débiteur à recourir à la vente amiable (Sous-section II).

La procédure de saisie immobilière

Les grandes lignes de la procédure de saisie immobilière peuvent être synthétisées de la manière suivante :
  • Réception d'un commandement de payer :
  • Visite de l'huissier :
  • Assignation à comparaître :
  • Audience d'orientation :
  • Vente amiable :
  • Vente par adjudication :

La prévalence et la persistance de la protection du logement au cours de la procédure

Antérieurement à une décision de la Cour européenne des droits de l'homme , les textes qui régissaient l'expulsion des logements distinguaient entre ceux qui constituaient la résidence principale de la personne expulsée et les autres logements.
Depuis cette décision, rendue au vu de l'article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale et du domicile) de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article L. 412-1 du Code des procédures civiles d'exécution a été modifié et le régime de protection de l'expulsion porte sur tout « lieu habité par une personne expulsée ou par tout occupant de son chef ».
En conséquence, la saisie immobilière, dès l'instant qu'elle nécessite la mise en œuvre de la procédure d'expulsion d'un local ou d'un terrain servant à l'habitation , est soumise aux articles L. 412-1 et suivants du Code des procédures civiles d'exécution étudié en détail ci-après (V. infra, no ).
La protection de la résidence apparaît aux différents stades de la procédure de saisie, que ce soit avant l'adjudication (§ I) ou après le prononcé du jugement d'adjudication (§ II).

Les formalités préalables à l'adjudication

- La signification du commandement de saisie. - Il s'agit de la formalité, prévue à l'article L. 321-1 du Code des procédures civiles d'exécution, qui engage la procédure de saisie. Elle est notifiée par l'huissier de justice au débiteur et, si l'immeuble est propre à l'un des époux et constitue le logement de la famille, le commandement de payer valant saisie devra être dénoncé au conjoint au plus tard le premier jour ouvrable suivant la signification du commandement au conjoint .
L'article L. 321-2 du même code énonce que l'acte de saisie rend l'immeuble indisponible et que le débiteur saisi est constitué séquestre du bien. Il en résulte que le débiteur et sa famille conservent l'usage de l'immeuble, sous réserve de n'accomplir aucun acte matériel susceptible d'en amoindrir la valeur.
Si l'immeuble est occupé par un locataire, celui-ci ne peut être séquestre du bien puisqu'il dispose de droits opposables au créancier poursuivant, qui sont inconciliables avec les règles du séquestre . C'est au titre du bail que le locataire est tenu d'une obligation de conservation. Si le créancier poursuivant considère que le locataire ne respecte pas cette obligation il peut, par le biais de l'action oblique, obtenir le respect de cette règle, voire la résiliation du bail.
- Expulsion du propriétaire. - Lorsque l'immeuble est occupé par son propriétaire, l'article L. 321-2, alinéa 3 du Code des procédures civiles d'exécution indique que les circonstances peuvent justifier l'expulsion du débiteur qui fait l'objet de la saisie. Le texte prévoit que seule une faute grave peut justifier une telle demande (il ne s'agit pas de permettre de valoriser à un prix supérieur le bien en procédant à l'expulsion du débiteur). La faute sera constituée par le non-respect des obligations du séquestre qui pèsent maintenant sur lui en qualité de débiteur saisi. Ainsi la volonté de détruire ou même de dégrader le bien sera contraire à l'obligation de conservation prévue à l'article 1962 du Code civil et justifiera une expulsion. Celle-ci sera demandée au juge en charge de la procédure de saisie sous forme d'une assignation complémentaire pour permettre le respect de la contradiction.
- Information spécifique de l'occupant d'un local à usage d'habitation. - Les textes ne prévoient pas de droit de préemption au profit du locataire lors de la saisie de son logement ; néanmoins, la loi du 31 décembre 1975 , spécialement son article 10, II, rend obligatoire l'information du locataire en cas d'adjudication d'un local à usage d'habitation ou à usage mixte d'habitation et professionnel. Dans cette hypothèse, l'avocat du créancier doit convoquer à l'adjudication, par lettre recommandée, le locataire ou l'occupant de bonne foi. La notification est effectuée au moins un mois avant la date prévue pour l'adjudication et doit indiquer le montant de la mise à prix, les jours, lieu et heure de l'audience d'adjudication ainsi que le tribunal ou le notaire devant lequel elle se fera. Elle indique en outre que les enchères sont portées devant le tribunal par le ministère d'avocat et reproduit les termes du paragraphe II de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1975. Lorsque l'adjudication est reportée, il est procédé à une nouvelle convocation dans les délais et formes prévus ci-dessus.
À défaut de recevoir cette notification, le locataire ou l'occupant de bonne foi peut, pendant un délai d'un mois à compter de la date à laquelle il a eu connaissance de l'adjudication, déclarer se substituer à l'adjudicataire. Le texte ne précise pas les détails de cette substitution, notamment le délai pour le paiement du prix ou la manière dont doit être actée cette substitution. On peut penser que cette sanction est suffisamment grave pour dissuader l'avocat poursuivant de toute négligence en la matière. Reste qu'en cas d'omission, il n'est pas prévu de délai de prescription ou de mécanisme de régularisation de cet oubli.

Conseil pratique

Le notaire qui aura à revendre le bien acquis lors d'une adjudication aura l'obligation de vérifier que le droit d'information du locataire ou de l'occupant de bonne foi aura été respecté. À défaut ce dernier pourrait contester cette revente en se prévalant de son droit de substitution.

- Information du maire. - En cas de vente sur saisie immobilière d'un immeuble ou d'une partie d'immeuble constituant la résidence principale d'une personne qui remplit les conditions de ressources pour l'attribution d'un logement à loyer modéré, il est institué, au bénéfice de la commune, un droit de préemption destiné à assurer le maintien dans les lieux du saisi . La commune peut déléguer ce droit à un office public de l'habitat.
Le texte renvoie au Code de l'urbanisme sur les modalités d'exercice de ce droit, notamment en matière de notification avant la date d'adjudication (trente jours), d'exercice de la notification de la décision de préemption (trente jours), d'établissement de l'acte (trois mois) et de paiement du prix (six mois).
Ainsi, même dans l'hypothèse où le droit de préemption ne peut s'appliquer, la commune dispose tout de même de la possibilité de préempter, mais dans l'unique but d'assurer le maintien dans les lieux du saisi.
On relativisera toutefois la portée de ce texte puisque la Cour de cassation a indiqué, dans un arrêt publié au bulletin , que le non-respect des dispositions de l'article L. 616 du Code de la construction et de l'habitation n'est pas sanctionné par la nullité de la procédure de saisie immobilière.

L'adjudication

L'adjudication emporte vente forcée du bien saisi et en transmet la propriété à l'adjudicataire. Cette sentence comporte des effets vis-à-vis du débiteur, mais également sur les baux en cours.
- Effets du jugement d'adjudication. - La circulaire du 14 novembre 2006 précise que le débiteur est tenu de la garantie de la délivrance du bien et de la garantie d'éviction. En cas de surenchère, le surenchérisseur ne devient propriétaire du bien que par l'effet de l'adjudication sur surenchère ; jusqu'à cette date, l'immeuble demeure aux risques et périls du débiteur. L'adjudication emportant transfert de propriété à sa date, l'adjudicataire a tout intérêt à assurer le bien dès que l'adjudication est définitive (expiration du délai de surenchère) ; par précaution, il peut aussi le faire assurer dès l'adjudication intervenue .
Le jugement d'adjudication doit encore être signifié au débiteur par le créancier poursuivant, mais ce jugement n'est susceptible d'appel que si celui-ci a tranché une contestation. En l'absence de contestation, il n'y a pas d'appel possible, ni de tierce opposition .
La garantie de délivrance à laquelle est tenu le débiteur l'oblige à libérer son logement. À défaut de libération amiable, l'adjudicataire devra engager une procédure d'expulsion.
- L'expulsion du débiteur. - L'article L. 322-13 du Code des procédures civiles d'exécution, applicable depuis le 1er janvier 2007, énonce que le jugement d'adjudication constitue un titre d'expulsion à l'encontre du saisi (préalablement il fallait passer par le tribunal d'instance pour obtenir une ordonnance d'expulsion). La partie réglementaire précise que cet effet est produit à compter du versement du prix ou de sa consignation et du paiement des frais taxés, sauf si le cahier des conditions de la vente prévoit le maintien dans les lieux du débiteur saisi . L'adjudicataire aura tout intérêt à vérifier le cahier des conditions de la vente sur ce point.
Le départ du débiteur ou de tout occupant de son chef n'ayant aucun droit qui lui soit opposable doit intervenir sans délai. Ainsi l'article L. 613-1 du Code de la construction et de l'habitation qui permet, par renvoi à l'article L. 412-3 du même code, de demander au juge des délais pour permettre le relogement n'a pas été retenu applicable dans l'hypothèse d'un débiteur de soixante-neuf ans aux ressources modestes . Toutefois, une cour d'appel a refusé d'assortir d'une astreinte la condamnation du saisi à libérer les lieux.
L'expulsion est ensuite menée par un huissier de justice qui, si l'occupant n'obtempère pas, dresse un procès-verbal de tentative d'expulsion, puis un procès-verbal de réquisition de la force publique adressé au préfet qui le transmet au commissaire de police. Le commissariat de police, mandaté par le service logement/expulsion de la préfecture, est alors chargé d'effectuer une enquête ; la préfecture autorise ou bloque l'expulsion en examinant les possibilités de relogement. Celle-ci dispose de deux mois pour donner sa réponse. À la fin de ces deux mois, l'adjudicataire dispose d'un recours pour le cas où l'administration bloque cette expulsion. Cette procédure consiste à demander à la préfecture (ou au tribunal administratif si celle-ci ne répond pas) le paiement d'indemnités d'occupation, qui sont équivalentes au montant du loyer.
Reste que les dispositions de l'article L. 412-6 du Code de la construction et de l'habitation, qui prévoient un sursis à toute mesure d'expulsion non exécutée à la date du 1er novembre de chaque année jusqu'au 31 mars de l'année suivante, s'appliquent à notre situation (trêve hivernale).
- Incidence de la saisie sur les baux. - L'article L. 321-4 du Code des procédures civiles d'exécution énonce : « Les baux consentis par le débiteur après l'acte de saisie sont, quelle que soit leur durée, inopposables au créancier poursuivant comme à l'acquéreur ». Il précise également que la preuve de l'antériorité du bail peut être faite par tout moyen. Il en résulte que les baux en cours continuent et que l'adjudicataire se substitue à l'ancien propriétaire dans ses droits et ses obligations.
On rappellera que le locataire titulaire d'un droit d'information peut se substituer à l'adjudicataire s'il n'a pas été informé de celle-ci (V. supra, no ).

La vente amiable du bien saisi sur autorisation judiciaire : restituer les pouvoirs de vendre au débiteur

La protection du logement peut également provenir de la faculté, pour le débiteur saisi, de ne plus subir la procédure mais d'agir en procédant lui-même à la vente des biens immobiliers qu'il possède. Cette possibilité est encouragée par le législateur (§ I), les notaires doivent être familiarisés avec cette procédure (§ II) et ne pas omettre la consignation du prix (§ III).

Les encouragements du législateur

La circulaire du 14 novembre 2006 précitée , faisant suite à l'ordonnance du 21 avril 2006 et au décret du 27 juillet 2006, insiste sur les orientations de la réforme de la saisie immobilière, notamment sur le mécanisme de la vente à l'amiable. Tout au long de la procédure, le législateur encourage le recours à cette vente amiable qui participe à la protection des droits du débiteur sur son logement.
La législation actuelle prévoit plusieurs rappels de la faculté de rechercher un acquéreur pour parvenir à une vente amiable. L'article R. 321-3 du Code des procédures civiles d'exécution précise, en premier lieu, que le commandement de payer adressé par le poursuivant au débiteur doit comporter l'indication que le débiteur garde la possibilité de rechercher un acquéreur de l'immeuble saisi pour procéder à la vente amiable ou de donner mandat à cet effet, et la mention que cette vente ne pourra néanmoins être conclue qu'après l'autorisation du juge de l'exécution. L'article R. 322-5 du même code ajoute que l'assignation à comparaître à l'audience d'orientation comprend à peine de nullité l'avertissement que le débiteur peut demander au juge de l'exécution à être autorisé à vendre le bien saisi à l'amiable s'il justifie qu'une vente non judiciaire peut être conclue dans des conditions satisfaisantes. Enfin, l'article R. 322-17 indique que la demande du débiteur aux fins d'autorisation de la vente amiable de l'immeuble, ainsi que les actes consécutifs à cette vente, sont dispensés du ministère d'avocat. Cette demande peut être formulée verbalement à l'audience d'orientation, et si un avocat est mandaté par le débiteur, il peut former la demande de vente amiable oralement à l'audience sans être tenu de le faire par conclusions écrites .
Décision du juge. L'autorisation judiciaire d'une vente amiable n'est pas systématiquement accordée et le débiteur aura tout intérêt à se munir d'une estimation de son bien et de plusieurs mandats de vente. Une promesse de vente ou une offre d'achat soumise à la condition suspensive de l'autorisation judiciaire permettra d'obtenir facilement cette autorisation.
L'article L. 322-21 du Code des procédures civiles d'exécution prévoit que la décision qui autorise la vente doit également contenir :
  • le prix minimum de la vente ;
  • les conditions dans lesquelles la vente pourra intervenir ;
  • la taxe des frais de poursuite ;
  • la date à laquelle l'affaire sera rappelée pour que la vente soit constatée.
La pratique de la vente purement volontaire pendant la procédure de saisie. Au lendemain d'un arrêt de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation du 9 avril 2015 qui déclarait nulle la promesse synallagmatique de vente conclue la veille de l'audience d'adjudication au motif que le jugement d'orientation n'avait pas prévu la vente amiable, les professionnels s'étaient interrogés sur la possibilité de continuer à recevoir ce type de vente négociée avec les créanciers . Mais un arrêt de la même chambre en date du 7 décembre 2017 semble revenir sur cette décision et permettre à nouveau la vente librement négociée avec les créanciers .
La question est aujourd'hui tranchée par le nouvel article L. 322-1 du Code des procédures civiles d'exécution qui valide cette procédure .
Reste qu'il s'agit d'une vente amiable à laquelle devront concourir l'ensemble des créanciers pour donner la mainlevée du commandement de saisie et de leurs inscriptions .
Vente amiable imposée par le saisi au créancier poursuivant. L'article L. 321-5 du Code des procédures civiles d'exécution prévoit que la saisie est opposable aux tiers à partir de sa publication au fichier immobilier. Il ajoute que les aliénations non publiées ou publiées postérieurement sont inopposables au créancier poursuivant comme à l'acquéreur, sauf consignation auprès de la Caisse des dépôts et consignations d'une somme suffisante pour acquitter en principal, intérêts et frais, ce qui est dû aux créanciers inscrits ainsi qu'aux créanciers poursuivants ; la somme consignée leur est affectée spécialement.
Il s'agit d'un moyen d'arrêter la procédure et de procéder à la vente amiable sans avoir à solliciter l'accord des créanciers inscrits inspiré de l'article 687 du Code de procédure civile ancien . Mais, cette procédure ne donnant pas de titre de propriété à l'acquéreur et ne permettant pas la radiation des inscriptions, elle devrait rester confidentielle.

Les difficultés du rédacteur

Le notaire choisi par les parties devra tout d'abord s'interroger sur l'avancement de la procédure de saisie du bien pour lequel il lui est demandé de rédiger un acte de vente. Il est en effet nécessaire de savoir si l'audience d'orientation est intervenue et a validé la possibilité d'une vente amiable.
Préalablement à ce jugement, le notaire pourra recevoir une offre d'achat sous les conditions suspensives habituelles (droit de préemption, financement…), mais également sous la condition suspensive de l'autorisation du juge de l'exécution . Laquelle offre ne permettra pas le versement d'une somme d'argent en application de l'article 1589-1 du Code civil.
Si le jugement est intervenu et a prévu la possibilité d'une vente amiable, le notaire pourra également recevoir un avant-contrat sous les conditions suspensives habituelles, mais cet acte devra respecter les conditions, notamment de prix, prévues par le juge.
Une fois en possession du jugement autorisant la vente, le notaire devra s'assurer que les créanciers inscrits ont tous été assignés à l'audience d'orientation, que le jugement a bien été signifié et qu'il est passé en force de chose jugée . Comme il est précisé ci-dessus (V. supra, no ), le jugement devra contenir la taxe des frais de poursuite qui seront à la charge de l'acquéreur.
Le notaire rédigera alors son acte, constatera le paiement du prix, éventuellement avec une prise de garantie hypothécaire pour le prêteur, consignera le prix et les frais et publiera son acte au fichier immobilier.
L'article L. 322-3 du Code des procédures civiles d'exécution prévoit que « la vente amiable sur autorisation judiciaire produit les effets d'une vente volontaire. Elle ne peut donner lieu à rescision pour lésion ». Ceci signifie que les clauses habituelles d'exonération des vices cachés ne trouvent à s'appliquer que si les diagnostics (saturnisme, amiante, termites…) sont joints à l'acte de vente. Dans l'hypothèse où l'avocat poursuivant ne les fournit pas, il faudra obtenir du débiteur qu'il règle le coût de ces documents. En effet, il sera difficile d'obtenir du diagnostiqueur qu'il attende que sa facture soit comprise dans les frais privilégiés de justice pour en obtenir le règlement.
Il peut être prudent de prévoir, sur le modèle proposé par Jacques Lafond , un report des effets de la vente jusqu'à la constatation de la conformité de l'acte de vente aux exigences de la loi et aux conditions posées par le jugement d'orientation. Cependant, l'acte ne doit pas contenir de condition suspensive de la constatation de sa conformité par le juge de l'exécution. En effet, ce constat ne constitue pas une condition de validité de la vente et aucune disposition légale n'impose que la vente amiable autorisée soit conclue sous la condition suspensive de son constat .
La circulaire du 14 novembre 2006 précitée rappelle que l'article R. 322-23 du Code des procédures civiles d'exécution prévoit que toute somme acquittée par l'acquéreur à quelque titre que ce soit est consignée auprès de la Caisse des dépôts et consignations et acquise aux créanciers participant à la distribution ainsi que, le cas échéant, au débiteur, pour leur être distribuée. Toutefois, elle précise également que cette attribution ne saurait faire échec à la faculté de rétractation d'ordre public prévue par l'article L. 271-2 du Code de la construction et de l'habitation, qui impose le remboursement de toute somme versée par l'acquéreur qui exerce cette faculté dans le délai imparti par ce texte. Il paraît donc prudent d'informer l'acquéreur que le versement d'une indemnité d'immobilisation peut entraîner des difficultés de restitution. C'est la raison pour laquelle nous préconiserons ci-après l'établissement d'une promesse unilatérale d'achat sans versement d'indemnité.
Enfin, à l'audience de constat prévue à l'article R. 322-25 du Code des procédures civiles d'exécution, le juge s'assure que l'acte de vente est conforme aux conditions qu'il a fixées, et que le prix a été consigné. Il ne constate la vente que lorsque ces conditions sont remplies. Le jugement n'est pas susceptible d'appel. Ce jugement est ensuite publié par une mention en marge du commandement de saisie au fichier immobilier par l'avocat du créancier, et à défaut par le notaire rédacteur de l'acte.

Conseil pratique

L'article R. 322-21 du Code des procédures civiles d'exécution précise que le juge qui autorise la vente amiable fixe la date à laquelle l'affaire sera rappelée dans un délai qui ne peut excéder quatre mois. À cette audience, le juge ne peut accorder un délai supplémentaire que si le demandeur justifie d'un engagement écrit d'acquisition et afin de permettre la rédaction et la conclusion de l'acte authentique de vente. Ce délai ne peut excéder trois mois. Le notaire qui sera appelé à rédiger l'acte de vente doit avoir ces délais présents à l'esprit car, en cas de dépassement, son acte ne pourra pas être déclaré conforme par le juge.

- Les relations avec l'avocat poursuivant. - Ces relations devraient s'améliorer , que ce soit au regard de l'obtention des documents nécessaires à la rédaction de l'acte ou du règlement des frais et émoluments de l'avocat poursuivant.
L'article R. 322-24 du Code des procédures civiles d'exécution prévoit que le notaire chargé d'établir l'acte de vente peut obtenir, contre récépissé, la remise par le créancier poursuivant (en fait son avocat) des documents recueillis pour l'élaboration du cahier des conditions de vente. Ces documents font partie intégrante des frais taxés qui sont versés directement par l'acquéreur en sus du prix de vente. Ces frais taxés devant figurer dans le jugement autorisant la vente, le notaire devra les demander à l'acquéreur en sus des frais normaux. Ainsi, l'avocat poursuivant n'ayant plus de crainte à avoir pour le paiement de ses frais, il n'y aura pas de raison pour qu'il ne remette pas l'ensemble de ces pièces au notaire rédacteur.
L'autre cause de friction entre le notaire et l'avocat est liée à la rémunération de l'avocat poursuivant. Avant l'arrêté du 6 juillet 2017 créant l'article A. 444-191 du Code de commerce, l'avocat poursuivant perdait une partie de ses émoluments lorsque le juge autorisait la vente amiable, sauf à les demander à son propre client (ce qui n'était pas toujours envisageable). Depuis le 1er septembre 2017, l'avocat perçoit l'émolument perçu par les notaires en application de l'article A. 444-91 du même code .
Reste qu'il n'est pas prévu que cet émolument soit supporté par l'acquéreur, et comme le développe un auteur, « aucune disposition ne permet d'inclure cet émolument dans les frais taxés, ni même de le faire supporter en sus des frais taxés. C'est le débiteur saisi qui doit a priori être considéré comme débiteur de cet émolument et l'avocat devait être fondé à en solliciter le paiement au titre des frais privilégiés de justice dans le cadre de la procédure de distribution du prix de vente » . Il sera donc souhaitable que, lors de la fixation du prix de vente par le magistrat, l'émolument de l'avocat poursuivant soit compris dans le prix, de manière à éviter un nouveau blocage de cette procédure de vente amiable.

La consignation du prix et ses effets

- La consignation du prix et des frais. - L'acte notarié n'est établi que sur consignation du prix et des frais de la vente auprès de la Caisse des dépôts et consignations et justification du paiement des frais taxés, énonce l'article L. 322-4 du Code des procédures civiles d'exécution. L'article R. 322-23 du même code rappelle cette règle qui n'autorise pas le notaire à remettre le prix de vente à l'avocat poursuivant pour une consignation à la Caisse autonome des règlements pécuniaires des avocats (Carpa).
Certaines agences de la Caisse des dépôts demandaient la consignation du prix et des frais de la vente. La question est maintenant sans objet par le vote du nouvel article L. 322-4 du Code des procédures civiles d'exécution, qui précise que le notaire consigne le prix de vente et non plus les frais .
C'est l'intégralité du prix qui doit être consigné. La commission d'agence à la charge du vendeur et le montant de l'imposition de la plus-value immobilière ne peuvent pas être retirés de cette consignation. Dans cette hypothèse, le paiement de la commission de l'agence immobilière ne pourra avoir lieu que dans le cadre de la distribution du prix de vente, après désintéressement des créanciers hypothécaires et s'il existe un solde disponible sur ce prix. Il est donc préférable de prévoir une rémunération de l'intermédiaire à la charge de l'acquéreur. Par ailleurs, on rappellera que l'article 150 VG, II, 3o du Code général des impôts permet de procéder à la publication de l'acte de vente, sans paiement préalable de l'impôt et sans que le service de publicité foncière puisse opposer un refus.
Le paiement des frais taxés. Ces frais sont limités à ceux de poursuite taxés par le juge à la demande de l'avocat poursuivant . Seul le juge de l'exécution est compétent, dans le cadre du jugement autorisant la vente et c'est l'acquéreur qui est le débiteur de ces frais qu'il verse en sus du prix de vente .
La radiation des inscriptions. Lors du jugement de constat prévu à l'article R. 322-25 du Code des procédures civiles d'exécution, le juge vérifie le respect des conditions de la vente, la consignation du prix et le paiement des frais taxés. Il ordonne également la radiation des inscriptions d'hypothèque et de privilège prises du chef du débiteur.
Lors de sa publication, le service de publicité foncière procède aux radiations des inscriptions correspondantes. Mais cette radiation ne peut être opérée sans le paiement des taxes. Il s'agit de la contribution de sécurité immobilière au taux de 0,10 % calculée sur chacune des inscriptions avec un minimum de 15 €, mais également des frais d'inscription des hypothèques prises au profit du Trésor public pour lesquelles la perception des frais d'inscription est reportée jusqu'à la radiation.
Ces frais devant être réglés lors de la publication du jugement de constat, il n'y a pas d'autre solution que de demander à l'acquéreur d'en faire l'avance, quitte à en requérir le remboursement lors des opérations de distribution. Le notaire qui recevra la vente autorisée devra percevoir la provision sur frais, mais il ne percevra aucun émolument sur ces radiations, celles-ci étant d'origine légale et non constatées dans l'acte de vente.
Les développements qui précèdent peuvent être résumés de la manière suivante .

Vade-mecum de la vente amiable autorisée de l'immeuble saisi

1) Déterminer si le client requiert le notaire en amont de l'audience d'orientation ou en aval de celle-ci.

2) Faire signer à l'acquéreur une promesse unilatérale d'achat sans versement de fonds (si une commission d'agence est envisagée, prévoir qu'elle est supportée par l'acquéreur).

3) Si la promesse doit être établie avant l'audience d'orientation, prévoir une condition suspensive d'autorisation de vente amiable.

4) Fixer le prix de vente en considération des autres frais que l'acquéreur devra supporter : frais taxés, frais de radiation des inscriptions.

5) Après l'audience d'orientation, vérifier que le jugement ne peut plus faire l'objet d'un recours.

6) N'établir l'acte que si le prix minimum est respecté et que les délais ne sont pas expirés.

7) Consigner l'intégralité du prix à la Caisse des dépôts et consignations contre remise d'un bordereau de consignation.

8) Payer à l'avocat poursuivant les seuls frais taxés par le juge de l'exécution.

9) Publier l'acte de vente sans attendre le jugement de constat.

10) Adresser au greffe une copie de l'acte de vente et un état hypothécaire à jour en listant les inscriptions dont il convient d'ordonner la radiation.

11) S'assurer de la publication du jugement de constat et de la radiation des inscriptions. En cas de carence de l'avocat poursuivant, opérer soi-même ces formalités.