Les certificats d'économies d'énergie (CEE)

Les certificats d'économies d'énergie (CEE)

Les certificats d'économies d'énergie (CEE) ont été créés par la loi « POPE » (C. énergie, art. L. 221-1 à L. 222-9) 1493642845741.
Ils concernent d'abord les fournisseurs d'énergie (§ I), mais peuvent également être valorisés par les consommateurs (§ II).

L'obligation des fournisseurs d'énergie

Les certificats d'économies d'énergie constituent un dispositif original inspiré par la Grande-Bretagne et d'Italie.
L'idée est d'assigner des objectifs d'économie aux fournisseurs d'énergie, leur non-respect entraînant des sanctions financières 1493643154998.
– Les obligés. – Le législateur fixe un objectif chiffré d'économies d'énergie en kilowattheures sur une période donnée aux fournisseurs d'énergie, appelés dans ce cadre « les obligés ». Ils œuvrent au profit des consommateurs pour tout type d'énergie : électricité, gaz, fioul domestique, chaleur et froid, carburants automobiles.
Pour chaque type d'énergie, un décret spécifique fixe le montant de l'économie à réaliser, directement par les obligés, ou indirectement par leurs clients au moyen d'actions d'économies d'énergie.
En contrepartie, des certificats d'économies d'énergie sont délivrés aux obligés.
– Les éligibles. – Ce dispositif permet à d'autres acteurs de s'engager volontairement à réaliser des économies d'énergie éligibles à la délivrance de certificats d'économies d'énergie (CEE). Ces acteurs singuliers, dénommés « éligibles », sont limitativement énumérés (C. énergie, art. L. 221-7). Il s'agit :
  • des collectivités territoriales, des groupements de collectivités territoriales et de leurs établissements publics, ainsi que des associations les regroupant ;
  • des sociétés d'économie mixte, des sociétés publiques locales et des sociétés d'économie mixte à opération unique dont l'objet social inclut l'efficacité énergétique ou permet de fournir un service de tiers financement (CCH, art. L. 381-1) ;
  • de l'Agence nationale de l'habitat ;
  • des organismes d'habitations à loyer modéré (CCH, art. L. 411-2), de leurs groupements, ainsi que des associations les regroupant ;
  • des sociétés d'économie mixte exerçant une activité de construction ou de gestion de logements sociaux.
Ce choix limitatif a pour objectif de recentrer la réalisation d'économies d'énergie sur la rénovation énergétique des bâtiments.
– La nature juridique des CEE. – Les CEE sont des biens meubles négociables dont l'unité de compte est le kilowattheure d'énergie finale économisé. Le nombre d'unités de compte est déterminé en fonction des caractéristiques des biens et procédés utilisés pour réaliser les économies d'énergie, et de l'état de leurs marchés à une date de référence fixe. Il est pondéré en fonction des bénéficiaires des économies d'énergie, de la nature des actions entreprises, et de la situation énergétique de la zone géographique concernée (C. énergie, art. L. 221-8).
Les CEE sont inscrits au crédit de l'obligé ou de l'éligible sur un compte spécial dans un registre national 1493645071787.
– L'obligation de l'obligé. – À la fin de la période déterminée par décret, l'obligé justifie de l'obtention de CEE en quantité suffisante pour remplir les objectifs imposés.
Dans l'hypothèse où l'obligé ne satisfait pas à son obligation, le ministre chargé de l'énergie le met en demeure d'acquérir les certificats manquants auprès d'autres obligés bénéficiant d'un crédit de CEE ou d'éligibles.
S'il ne répond pas à cette mise en demeure, il est contraint de verser une pénalité au Trésor public (C. énergie, art. L. 221-4) 1495380602615.
– Les CEE « précarité ». – Depuis le 1er janvier 2016, une obligation d'économies d'énergie est instaurée au bénéfice des ménages en situation de précarité énergétique en complément des obligations déjà existantes (C. énergie, art. L. 221-1-1).
Les ménages en situation de précarité énergétique sont ceux ne dépassant pas les seuils de ressources des ménages « modestes » et « très modestes » fixés par l'ANAH 1493646429096.
Les CEE « précarité » sont identifiés distinctement sur le registre national.
Certaines opérations de cette catégorie de CEE sont bonifiées. Ainsi, les obligés et éligibles participant à ces opérations limitativement énumérées reçoivent un nombre plus important de CEE « précarité » 1495381692973.
– Les CEE ne sont pas une aide d'État. – Le Conseil d'État rejette la qualification d'aide d'État pour les CEE, retenant qu'il n'existe pas de lien suffisamment direct entre la faculté de négocier ces certificats et une renonciation par l'État à une ressource existante ou potentielle 1493647880879.

L'intérêt du CEE pour les consommateurs

– La valorisation des travaux éligibles. – Les consommateurs ne sont ni obligés ni éligibles au dispositif des CEE.
Néanmoins, ils ont la faculté de valoriser leurs travaux de rénovation énergétique auprès des obligés.
Les travaux éligibles, définis par arrêté ministériel, sont classés par secteur : agriculture, résidentiel, tertiaire, industrie, réseau et transport 1494174425680. Des fiches techniques indiquent les caractéristiques des travaux éligibles et le forfait de kilowattheures attaché à l'action concernée.
En vue d'encourager les opérations innovantes, les travaux d'économies d'énergie ne figurant pas dans l'arrêté ministériel peuvent néanmoins bénéficier de CEE sur dossier.
Certains obligés proposent « d'acquérir » les factures de travaux d'économies d'énergie contre remise de bon d'achat, prime ou somme d'argent, voire de conseils gratuits.
Les consommateurs ont la faculté de contracter avec l'obligé de leur choix, aux conditions financières déterminées entre eux. En pratique, la rémunération versée au consommateur est inférieure au prix du marché du CEE dont bénéficie à terme l'obligé. Le prix moyen mensuel du kilowattheure est consultable auprès du registre national.
D'un côté, le consommateur perçoit une rémunération suite aux travaux d'économies d'énergie réalisés, et de l'autre, l'obligé devient propriétaire d'un CEE moyennant un coût moindre qu'un certificat acquis auprès d'un autre obligé ou d'un éligible.
Pour le consommateur particulier souhaitant contracter avec un obligé, il convient de signer les devis de travaux en aval afin que le rôle incitateur de l'obligé soit reconnu. L'entreprise choisie par le particulier est nécessairement certifiée « Reconnu garant de l'environnement » (RGE).
– Le succès inattendu du dispositif. – Malgré la complexité du processus, ce dispositif fonctionne parfaitement. Les objectifs sont en effet largement dépassés. À titre d'exemple, concernant les deux premières périodes courant du 1er juillet 2006 au 30 novembre 2014, les objectifs cumulés de 514 térawattheures (TWh) ont été dépassés pour atteindre 595 TWh, ce qui représente environ un tiers de la consommation annuelle française d'énergie 1506794231353.
La quatrième période du dispositif, courant du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2020, fixe un objectif de 1 200 TWh majoré d'un objectif de 400 TWh au bénéfice des ménages en situation de précarité énergétique.
En outre, le mécanisme français a été généralisé au niveau européen 1506182261032.

Un dispositif prépondérant au Royaume-Uni

Afin de limiter le financement public de la rénovation énergétique, le Royaume-Uni s'appuie fortement sur la contribution des acteurs privés. Cette contribution est néanmoins insuffisante. Le financement des travaux est également assuré grâce à des prêts consentis :
— par un consortium à but non lucratif : laGreen Deal Finance Company, dont les taux d'intérêt sont élevés ;
— et par les fournisseurs d'énergie eux-mêmes, en s'attachant à ce que le coût de l'opération ne dépasse pas les économies attendues suite aux travaux, l'efficacité de ceux-ci étant évaluée en amont par un expert technique. Le respect de cette condition limite fortement le nombre de projets finançables.
Ce dispositif peu attractif favorise malheureusement les rénovations partielles, au détriment des rénovations lourdes.