Le droit de préemption du preneur en place
Le droit de préemption du preneur en place
La priorité du preneur lors des mutations à titre onéreux
L'existence du droit de préemption du preneur en place
L'information due au tiers acquéreur
Le vendeur d'un bien donné à bail rural est tenu d'informer l'acquéreur de l'existence du bail. À ce titre, il convient notamment d'aviser l'acquéreur de l'obligation de prise en charge des indemnités éventuellement dues à l'exploitant en fin de bail (C. rur. pêche marit., art. L. 411-69 et s.).
Principales aliénations échappant au droit de préemption du fermier
- partage amiable ;
- donation-partage ;
- vente assortie d'un bail à nourriture ;
- apport en société ;
- échange, même réalisé avec soulte. En effet, le preneur n'est pas en mesure de donner au bailleur la contrepartie attendue de l'échange 1506768577923. Bien entendu, cette règle ne vaut qu'en l'absence de fraude caractérisée, par exemple une soulte trop importante dissimulant une vente.
- soit par l'envoi d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception. L'absence de réclamation de cette lettre par le preneur n'empêche pas l'écoulement du délai légal de deux mois permettant au preneur de faire connaître sa position 1508676033141. Ce délai commence à courir à compter de la date du premier avis postal ;
- soit par acte extrajudiciaire ;
- soit par remise en main propre contre émargement 1508676706086.
- l'identité complète de tous les vendeurs ainsi que leur adresse. La mention de l'identité de l'acquéreur n'est pas obligatoire, mais présente parfois un intérêt, notamment lorsqu'il prend l'engagement de ne pas exercer son droit de reprise pendant une durée déterminée (C. rur. pêche marit., art. L. 412-8, al. 3) 1509021199216, peu important d'ailleurs qu'elle ne permette pas au preneur d'atteindre l'âge de la retraite. Le moment venu, le preneur sera en droit de s'opposer à la reprise de son nouveau bailleur, soit parce qu'il n'a pas atteint l'âge de la retraite, soit parce que le délai auquel l'acquéreur bailleur s'était engagé n'est pas encore écoulé 1509020547928 ;
- le prix de vente et l'éventuelle commission due à un intermédiaire par l'acquéreur 1509044908336, même si le preneur n'en est pas redevable 1508679005593. Le notaire chargé de la notification n'étant pas juge, cette mention doit figurer dans la notification, sous peine de voir sa responsabilité engagée par l'intermédiaire 1509020759991 ;
- les charges et conditions de la vente ;
- l'éventuelle élection de domicile en l'étude du notaire instrumentaire.
La méconnaissance du droit de préemption du preneur en place
- en nullité de la vente (C. rur. pêche marit., art. L. 412-12, al. 3) ;
- en nullité avec substitution : vente avant l'expiration du délai de deux mois, ou à des conditions différentes (prix ou paiement), ou tendant à empêcher l'acquisition à son profit (C. rur. pêche marit., art. L. 412-10).
L'indispensable notification post-vente
Il est indispensable d'informer le preneur de la réalisation de la vente. À défaut, le délai imparti au fermier pour agir en nullité ne commence pas à courir. Le notaire instrumentaire dispose d'un délai de dix jours pour envoyer cette notification (C. rur. pêche marit., art. L. 412-9, al. 3).
L'exercice du droit de préemption du preneur en place
- à son conjoint ou son partenaire pacsé participant à l'exploitation ;
- ou à ses descendants.
- son conjoint, son partenaire pacsé ou ses descendants participant à l'exploitation ;
- et ses héritiers descendants de plus de seize ans bénéficiant de la continuité du bail (C. rur. pêche marit., art. L. 411-34).
La vente de biens excédant les biens loués
Il convient de permettre au preneur d'exercer son droit de préemption sur le bien qu'il exploite. Ainsi, la notification globale d'un ensemble composé de biens loués à plusieurs preneurs est irrégulière (C. rur. pêche marit., art. L. 412-6)
<sup class="note" data-contentnote=" S. Crevel, Régularité de la vente forcée en un seul lot d'un ensemble immobilier loué seulement en partie en raison de l'indivisibilité des biens vendus : RD rur. 2008, n° 368, comm. 232.">1509134024816</sup>.
Par exception, en cas d'indivisibilité caractérisée de l'ensemble, le preneur est tenu de préempter le tout
<sup class="note" data-contentnote=" L'indivisibilité se caractérise par exemple par l'implantation et l'imbrication matérielle des parcelles, leurs liens économiques interdépendants, ou encore par la configuration complexe des lieux : Mémento Lefebvre Agriculture 2017, n° 36650.">1508794235910</sup>.
L'obligation de mise en vente séparée ne s'impose au propriétaire bailleur que lorsque le fonds vendu comprend plusieurs exploitations distinctes, et que plusieurs baux ont été conclus au profit de différents preneurs à bail rural
<sup class="note" data-contentnote=" Cass. 3<sup>e</sup> civ., 30 nov. 1983 : JurisData n° 1983-702440. – Cass. 3<sup>e</sup> civ., 7 févr. 1996, n° 94-13.837 : Bull. civ. 1996, III, n° 39.">1509133652136</sup>. Afin d'éviter toute fraude liée au morcellement des parcelles par le propriétaire, le droit de préemption est applicable lorsque la vente porte sur une partie seulement des biens loués, même inférieure au seuil défini pour les petites parcelles (C. rur. pêche marit., art. L. 411-3).
Lorsque la vente porte sur un ensemble divisible, l'exploitant bénéficie de la priorité pour la partie louée. Le droit de préemption de la SAFER ne peut primer si par ailleurs toutes les conditions légales sont remplies par le preneur
<sup class="note" data-contentnote=" Cass. 3<sup>e</sup> civ., 7 déc. 2011, n° 10-24.000 : JurisData n° 2011-027667. – S. Crevel, Diviser pour mieux régler (les conflits de droit de préemption) : RD rur. 2012, n° 400, comm. 13.">1509047991184</sup>.
- il préempte aux conditions proposées. Le droit de préemption étant classiquement analysé comme un droit de substitution, la vente se poursuit à son profit. Une difficulté est susceptible de naître en cas de copreneurs 1508791360900. Le bail rural est par nature indivisible 1508791902455, toutefois chaque copreneur a la possibilité d'exercer individuellement son droit de préemption sur la totalité du bien vendu 1508687446391. Si l'un d'eux seulement l'exerce, le bail se poursuit au profit des autres. Si plusieurs l'exercent conjointement, l'acquisition est réalisée sous le régime de l'indivision. Lorsque les deux copreneurs entendent l'exercer individuellement, sous réserve que la difficulté soit tranchée sous l'angle de la règle de la superficie maximale 1508793204875, l'acquisition ne peut se réaliser qu'en indivision forcée ;
- il renonce ou garde le silence pendant le délai de deux mois imparti pour répondre, le silence valant renonciation tacite. La vente intervient alors au profit du tiers acquéreur, sous réserve du droit de préemption de la SAFER. En toute hypothèse, le fermier est maintenu dans son exploitation. À défaut de notification préalable, la pratique consistant à faire reconnaître au preneur dans l'acte de vente qu'il était au courant de l'opération depuis un certain temps et qu'il renonce à exercer son droit de préemption est à proscrire. Le délai de deux mois est en effet à la fois un délai de réflexion et un délai d'exercice du droit de préemption. En revanche, l'intervention à l'acte du preneur ayant reçu une notification est valable 1508681693265 ;
- il notifie au propriétaire sa volonté de préempter à d'autres conditions. Dans cette hypothèse, il est tenu de saisir le tribunal paritaire des baux ruraux (C. rur. pêche marit., art. L. 412-7). Le juge détermine ensuite les conditions de la vente, chaque partie ayant la possibilité d'accepter ou de refuser. Dans le cadre d'un bail rural cessible hors cadre familial (C. rur. pêche marit., art. L. 418-1), le fermier est privé de la faculté de saisir le tribunal pour contester le prix et les conditions de la vente.
- de l'apport à un groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) si le preneur poursuit personnellement l'exploitation (C. rur. pêche marit., art. L. 331-15) ;
- de l'apport à un groupement foncier agricole (GFA) à la condition de se consacrer personnellement à l'exploitation des biens du groupement (C. rur. pêche marit., art. L. 412-12).
Les principes gouvernant la réitération de la vente après préemption
La réitération de la vente par acte authentique intervient dans le délai de deux mois à compter de la préemption, notamment pour permettre au preneur d'obtenir un financement. Ce délai court à compter de la date d'envoi de la réponse du preneur, ou lorsque la réponse a été effectuée par acte d'huissier, à compter de la signification faite au propriétaire ou au domicile élu du notaire.
À défaut de réitération dans le délai de quinze jours après une mise en demeure de réitérer la vente faite par acte d'huissier de justice restée sans effet, la déclaration de préemption est nulle de plein droit
<sup class="note" data-contentnote=" Cass. 3<sup>e</sup> civ., 21 mai 2014, n° 12-35.083 : Bull. civ. 2014, III, n° 67.">1507455076569</sup>. La vente intervient alors au profit du tiers acquéreur. L'initiative de la mise en demeure appartient au bailleur et au tiers acquéreur (C. rur. pêche marit., art. L. 412-8).