La durée des baux

La durée des baux

La durée du contrat de location est une modalité de protection du locataire, du droit au logement, droit fondamental affirmé par le premier article de la loi du 6 juillet 1989. Le droit à la reconduction du bail en est une application pratique. Le bailleur ne peut y faire échec que pour des motifs limitativement prévus et encadrés :
  • pendant le cours du bail : résiliation ;
  • au terme du bail : congé.
Le droit à la reconduction suppose une occupation régulière des lieux loués à titre de résidence principale. La résidence principale est entendue par la loi du 6 juillet 1989 comme le logement occupé au moins huit mois par an, sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure, soit par le preneur ou son conjoint, soit par une personne à charge au sens du Code de la construction et de l'habitation. Il appartient au bailleur de prouver que le logement n'est plus la résidence principale du locataire pour sortir du champ d'application de cette loi.
La loi du 6 juillet 1989 apporte une protection accrue au locataire. Nous avons choisi de présenter les différentes dispositions dans un tableau synoptique et comparatif. Voir tableau grand format en pièce externe disponible à la fin du rapport. Les développements qui suivent ont été choisis pour leur technicité et/ou leur nouveauté.
- Congé pour vente ou reprise. Incidence de la vente du logement en cours de bail. - Si le logement nu à titre de résidence principale a été vendu en cours de bail, le nouveau propriétaire doit respecter un certain délai avant de pouvoir donner congé pour vendre ou pour habiter au locataire en place :
Congé pour reprise. Le terme du bail survient :
  • moins de deux ans après la vente : le bailleur peut donner congé à l'échéance du bail, mais il ne prendra effet qu'à l'expiration d'un délai de deux ans à partir de la date d'achat ;
  • plus de deux ans après la vente : le bailleur peut donner congé à l'échéance du bail.
Congé pour vente. Le terme du bail survient :
  • moins de trois ans après la vente : pour le terme du premier renouvellement ou de la première reconduction du bail en cours au moment de l'achat ;
  • plus de trois ans après la vente : pour l'échéance du bail.

Exemple

Vente du logement : 1er mars 2015.
Terme du bail : 31 mai 2017.
Le congé doit être délivré au plus tard le 30 novembre 2019, soit six mois avant le 31 mai 2020, terme de la première reconduction.
S'agissant du dispositif de prorogation résultant de l'article 11 de la loi de 1989, nous renvoyons au tableau comparatif figurant infra, au no .
- Interprétation complexe. - Le texte emploie trois termes anodins, mais dont l'interprétation est loin d'être aisée :
  • en cas d'acquisition : faut-il entendre « vente », le texte visant à « lutter contre des opérations immobilières purement spéculatives visant à racheter des logements occupés et à les reprendre dans la foulée pour réaliser une plus-value financière » ou également tout moyen d'acquérir la propriété comme les successions, donations ? Nous retiendrons la première lecture mais en incluant les adjudications ;
  • d'un bien : l'acquisition doit-elle avoir porté sur :
  • occupé :
- Sanctions. - Le texte ne prévoit pas de sanction spécifique à défaut de respect de ce dispositif de report du délai de congédiement. Il nous semble que les sanctions encourues seraient :
  • inopposabilité du congé, ne faisant pas échec à la reconduction tacite du bail à son échéance ;
  • report des effets du congé qui serait alors considéré comme « prématuré » : le locataire ne pourrait pas encore exercer son droit de préemption (devant attendre les deux premiers mois du délai de préavis de six mois qui précède la fin du bail), ni renoncer à l'offre, le droit n'étant pas encore ouvert. Sans que le propriétaire puisse retirer son congé en vertu d'une jurisprudence constante , ou relouer le bien libéré par le locataire à la suite de ce congé. Un joli casse-tête d'inaliénabilité temporaire qu'il conviendrait d'éviter !
- Le congé reprise pour habiter, un congé à justifier. - Ce congé doit indiquer les nom et adresse du bénéficiaire de la reprise, ainsi que la nature du lien existant entre le bailleur et le bénéficiaire de la reprise , qui ne peut être que le bailleur, son conjoint, le partenaire auquel il est lié par un pacte civil de solidarité enregistré à la date du congé, son concubin notoire depuis au moins un an à la date du congé, ses ascendants, ses descendants ou ceux de son conjoint, de son partenaire ou de son concubin notoire.
Par ailleurs, le bailleur doit justifier du caractère réel et sérieux de sa décision de reprise . Depuis le 1er janvier 2018, le bailleur doit joindre à la lettre de congé une notice d'information relative aux obligations du bailleur et aux voies de recours et d'indemnisation du locataire , laquelle prévoit notamment que le congé pour reprise doit comporter plusieurs mentions spécifiques :
  • la mention que le bailleur entend reprendre le logement pour l'habiter ou pour y loger l'un de ses proches ;
  • les nom et adresse du bénéficiaire de la reprise ;
  • la nature du lien de parenté qui existe entre le bénéficiaire et le bailleur ;
  • une mention justifiant du caractère réel et sérieux de la décision de reprise ;
  • dans le cas où le bailleur est une société civile immobilière familiale, le congé doit indiquer le nom et l'adresse de l'associé bénéficiaire de la reprise.
Cette exigence supplémentaire de justification issue de la loi Alur vise à permettre au juge en cas de contestation de contrôler la justification du congé, mais suscite des difficultés d'interprétation. S'agit-il d'un contrôle de la réalité du congé ou de son opportunité ? Il nous semble que le contrôle doit s'attacher à la réalité du congé au risque de vider ce motif de congé de tout contenu .
La loi Alur a renforcé les pouvoirs de contrôle du juge afin de lutter contre les congés frauduleux. Ce dernier exerce deux contrôles :
  • contrôle a priori :
  • contrôle a posteriori :
Les sanctions encourues sont les suivantes :
  • sanctions civiles :
  • sanctions pénales : le fait pour un bailleur de délivrer un congé justifié frauduleusement par sa décision de reprendre ou de vendre le logement est puni d'une amende pénale dont le montant ne peut être supérieur à 6 000 € pour une personne physique et à 30 000 € pour une personne morale. Le montant de l'amende est proportionné à la gravité des faits constatés. Le locataire est recevable dans sa constitution de partie civile et la demande de réparation de son préjudice .
- Locataires protégés et droit au relogement. - Le bailleur ne peut s'opposer au renouvellement du bail en donnant congé à l'égard de tout locataire :
  • âgé de plus de soixante-cinq ans (à la date d'échéance du bail) ;
  • et dont les ressources annuelles sont inférieures (à la date de notification du congé) à un plafond de ressources en vigueur pour l'attribution des logements locatifs conventionnés fixé par arrêté du ministre chargé du logement ;
  • ou ayant à sa charge une personne de plus de soixante-cinq ans (à la date d'échéance du bail) vivant habituellement dans le logement et remplissant la condition de ressources (à la date de notification du congé), et que le montant cumulé des ressources annuelles de l'ensemble des personnes vivant au foyer est inférieur audit plafond de ressources (à la date de notification du congé) ;sans qu'un logement correspondant à ses besoins et à ses possibilités lui soit offert dans les limites géographiques prévues à l'article 13 bis de la loi no 48-1360 du 1er septembre 1948 précitée.
Le locataire bénéficie dans ce cas d'un droit au relogement.
Il résulte du renvoi à la loi de 1948 que le logement offert doit être :
  • en bon état d'habitabilité, remplissant des conditions d'hygiène normales ou au moins équivalentes à celles du local objet de la reprise et correspondant à ses besoins personnels ou familiaux et, le cas échéant, professionnels, et à ses possibilités ;
  • situé :
Par exception, ces dispositions ne sont pas applicables :
  • lorsque le bailleur est une personne physique âgée de plus de soixante-cinq ans (à la date d'échéance du bail) ;
  • ou si ses ressources annuelles sont inférieures (à la date de notification du congé) audit plafond de ressources ;
  • ou s'il reloge le locataire.
Ainsi, en présence d'un locataire protégé, le bailleur ne peut donner congé et le bail est automatiquement renouvelé sauf si le bailleur :
  • a plus de soixante-cinq ans (à la date d'échéance du bail) ;
  • ou possède (à la date de notification du congé) des revenus inférieurs aux mêmes plafonds de ressources ;
  • ou s'il reloge le locataire.
Ce dispositif de protection est applicable aux logements nus et aux logements meublés loués à titre de résidence principale.
- Le droit au maintien dans les lieux des titulaires de baux soumis à la loi de 1948. - Les occupants de bonne foi bénéficient d'un droit au maintien dans les lieux . Le bailleur ne peut délivrer un congé pour vendre, et ne peut donner congé que pour deux motifs dans des conditions restrictives.
  • Reprise pour habiter :
  • Reprise en vue de construire :