CGV – CGU

Chapitre I – Les dispositifs de protection de l’acquéreur

Partie II – Le formalisme lié à l’efficacité de l’acte juridique
Titre 1 – Le formalisme d’information dans la vente immobilière
Sous-titre 1 – Le formalisme d’information appliqué à la personne du contractant
Chapitre I – Les dispositifs de protection de l’acquéreur

4227 Historiquement, la première loi dite « spéciale de protection » applicable à la vente immobilière du logement fut la loi no 67-3 du 3 janvier 1967 complétée par la loi du 16 juillet 1971 relative à la vente d’immeuble à construire. Cette loi fut l’heureuse combinaison du besoin de développement de la construction française et de la nécessaire sécurité du candidat au logement.

Depuis, en raison de la place prépondérante du logement en France et de la défense croissante des droits du consommateur, le législateur a consacré l’importance spécifique de la vente immobilière par un recul de l’autonomie de la volonté en la matière et le développement de dispositifs légaux de protection du consentement du contractant issus du droit de la consommation.

Nous analyserons ici trois dispositifs spécifiques de protection de l’acquéreur issus des lois Scrivener (Section I), SRU-ENL (Section II), et Alur (Section III), ainsi que le rôle du notaire dans leur application pratique.

Section I – La loi Scrivener : la protection de l’acquéreur-emprunteur dans la vente immobilière

4228 – L’esprit de la loi du 13 juillet 1979 : protéger le consommateur immobilier. – La loi no 79-596 du 13 juillet 1979 relative à l’information et la protection des emprunteurs dans le domaine immobilier, dite « loi Scrivener II », a consacré, comme la loi no 78-22 du 10 juillet 1978 en matière de crédit à la consommation, un lien d’interdépendance entre vente et prêt car le prêt n’a d’intérêt que pour financer la vente ou la construction et doit être résolu si ces opérations ne se réalisent pas et, inversement, la vente et la construction ne sont concevables que si les prêts nécessaires à leur financement sont obtenus.

La loi, dont les dispositions sont intégrées dans le Code de la consommation sous les nouveaux articles L. 313-1 à L. 313-64 issus de la réforme du droit des contrats et des obligations (anciens art. L. 312-1 à L. 312-36), a pour vocation de protéger le consommateur-acquéreur d’un immeuble à usage d’habitation ou à usage professionnel et d’habitation, qui n’est pas un professionnel de l’immobilier et qui recourt à un crédit pour le financement de son acquisition immobilière.

Dès lors, l’opération à financer est conclue sous la condition suspensive de l’obtention du ou des prêts devant servir à ce financement.

4229 – Première atteinte au principe du consensualisme. – Le recours à la condition suspensive a été rendu nécessaire par le principe du consensualisme qui domine le droit français des contrats et spécialement celui de la vente ; en effet, l’article 1583 du Code civil, célèbre illustration de ce principe, prévoit que la vente est parfaite entre les parties et la propriété acquise de droit à l’acheteur à l’égard du vendeur dès que l’on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n’ait pas encore été livrée ni le prix payé475.

En théorie, l’instauration d’une condition suspensive légale relative au financement du contrat, voulue dans l’intérêt de l’emprunteur, marque donc un recul très net du consensualisme et protège en réalité les deux contractants des effets de ce grand principe de notre droit ; l’acquéreur ne peut pas s’engager sans avoir assuré le financement de son achat ; par ailleurs, le vendeur est assuré de percevoir son prix sans difficulté car la vente ne sera conclue définitivement qu’après obtention, par l’acquéreur, du prêt qui lui est nécessaire476.

En pratique, la loi du 13 juillet 1979, qui n’a pas fait l’objet de modification durant ces quarante années d’application (à l’exception de la nouvelle codification suite à l’entrée en vigueur de la réforme du droit des contrats et des obligations), a suscité un important contentieux et a donné lieu à des analyses doctrinales contradictoires, des solutions jurisprudentielles abondantes et désordonnées, et même à des formules notariales diverses et antinomiques.

Dès lors, qu’en est-il après quarante ans d’application de ce dispositif d’ordre public ? Quelles sont les difficultés récurrentes rencontrées de nos jours dans la pratique par les notaires ? Peut-on en conclure que le dispositif, à l’épreuve du temps et de la pratique, assure une protection équilibrée des intérêts du vendeur et de l’acquéreur ?

La synthèse combinée de la doctrine, de la jurisprudence et de la pratique notariale actuelle fait apparaître les principales difficultés lors de l’établissement de la condition suspensive légale puis dans la réalisation de ladite condition.

Sous-section I – L’établissement de la condition suspensive légale

4230 – Retour sur les dispositions textuelles de la loi Scrivener. – Notre pratique quotidienne nous éloigne des sources générales du droit et des textes. Il est important de s’y référer à nouveau pour bien comprendre le mécanisme de la loi Scrivener.

Tout d’abord, en vertu de l’article L. 313-40 du Code de la consommation (ancien art. L. 312-15) : « L’acte écrit, y compris la promesse unilatérale de vente acceptée et le contrat préliminaire prévu à l’article L. 261-15 du Code de la construction et de l’habitation, ayant pour objet de constater l’une des opérations mentionnées au 1o de l’article L. 313-1, doit indiquer si le prix sera payé directement ou indirectement, même en partie, avec ou sans l’aide d’un ou de plusieurs prêts régis par les sections 1 à 5 du présent chapitre ».

Ensuite, l’article L. 313-41 du Code de la consommation (ancien art. L. 312-16) ajoute que : « Lorsque l’acte (…), indique que le prix est payé directement ou indirectement, même partiellement, à l’aide d’un ou plusieurs prêts, (…), cet acte est conclu sous la condition de l’obtention du ou des prêts qui en assument le financement ».

Cet article mentionne également que : « La durée de validité de cette condition suspensive ne peut être inférieure à un mois à compter de la date de signature de l’acte ou s’il s’agit d’un acte sous seing privé soumis à peine de nullité à la formalité de l’enregistrement, à compter de la date de l’enregistrement ».

Le dernier alinéa indique que : « Lorsque la condition suspensive prévue au premier aliéna n’est pas réalisée, toute somme versée d’avance par l’acquéreur à l’autre partie ou pour le compte de cette dernière est immédiatement et intégralement remboursable sans retenue ni indemnité, à quelque titre que ce soit ».

Enfin, l’article L. 313-42, quant à lui, prescrit que : « Lorsque l’acte mentionné à l’article L. 313-40 indique que le prix sera payé sans l’aide d’un ou plusieurs prêts, cet acte, porte, de la main de l’acquéreur, une mention par laquelle celui-ci reconnaît avoir été informé que s’il recourt néanmoins à un prêt il ne peut se prévaloir des dispositions du présent chapitre.

En l’absence de l’indication prescrite à l’article L. 313-40 ou si la mention exigée au premier alinéa manque ou n’est pas de la main de l’acquéreur et si un prêt est néanmoins demandé, le contrat est considéré comme conclu sous la condition suspensive prévue à l’article L. 313-41 ».

C’est autour de ces trois articles du Code de la consommation que la pratique de la « condition suspensive d’obtention de prêt » s’est construite. Les notaires ont, dès l’application de la loi, mis au point des formules dans leurs avant-contrats pour parvenir au résultat recherché par le législateur. La jurisprudence et la doctrine sont venues corriger et modeler avec le temps lesdites formules.

4231 – Une condition implicite. – Il en résulte une première constatation : lors de l’établissement de l’avant-contrat, en raison du caractère d’ordre public des dispositions de la loi et de cette affirmation répétée par la jurisprudence en se référant à l’objectif de protection poursuivi par la loi, la condition suspensive d’obtention de prêt doit être stipulée, et, à défaut, « le contrat est considéré comme conclu sous la condition suspensive prévue à l’article L. 313-41 du Code de la consommation ».

La condition suspensive ne peut donc être éludée par la volonté des parties sans tenir compte de la réalité du financement ou encore par leur silence.

La jurisprudence est d’ailleurs à cet égard très stricte et consacre, au travers de différents arrêts, le caractère implicite de la condition.

Ainsi, en l’absence d’indication dans une promesse de vente d’immeuble sur le point de savoir si le prix sera payé, directement ou indirectement, même en partie, avec ou sans l’aide d’un prêt, et le prêt ayant été néanmoins sollicité, il a été jugé que le contrat doit, par application de l’article L. 312-16, alinéa 2 du Code de la consommation, être considéré comme conclu sous la condition suspensive de l’obtention de ce financement ; la preuve qu’un tel prêt a bien été sollicité se fait par tous moyens, les textes protecteurs du consommateur n’imposant aucun délai pour effectuer la demande477.

De même, la condition suspensive est dès lors présumée lorsqu’il n’est pas établi que l’acquéreur a valablement et expressément renoncé en toute connaissance de cause au bénéfice de la loi du 13 juillet 1979 parce qu’il n’avait alors nulle intention de recourir à un prêt478.

Il résulte également d’un arrêt de la Cour de cassation du 10 mars 1987479 que l’acquéreur ne peut se soustraire lui-même valablement à la protection par une déclaration mensongère, fût-ce pour dissuader son vendeur de lui préférer quelqu’un qui, n’ayant pas besoin de prêt, pourrait s’engager d’emblée, sans condition. En l’espèce, la « fraude à la loi » établie, la loi devenait applicable et la promesse implicitement conditionnelle alors que si l’acquéreur n’avait pas eu l’intention de recourir à un prêt l’avait alors mentionné en toute sincérité, la condition suspensive n’eût pas été établie480.

Il résulte des dispositions ci-dessus une présomption de recours à un prêt que seules à la fois l’indication de non-recours à un prêt et la mention manuscrite sont capables d’écarter.

Mais ces règles ne doivent pas faire oublier qu’à l’inverse, si l’acte indique, en l’absence de tout comportement frauduleux, que le prix sera payé sans l’aide d’un prêt et que l’acquéreur appose la mention manuscrite exigée par l’article L. 312-7, alinéa 1er du Code de la consommation, le jeu de la condition suspensive est définitivement écarté quand bien même un prêt serait sollicité par la suite.

Dès lors, il convient d’être attentif à toute déclaration mensongère ou comportement frauduleux de l’acquéreur lors de l’établissement de l’avant-contrat, car ce dernier pourra, par la suite, prouver par tous moyens qu’il a néanmoins eu recours à un prêt, et ainsi demander l’application du statut protecteur et être délié de tout engagement.

L’intention réelle de l’acquéreur doit être appréciée au moment de la conclusion du contrat et doit être sincère à cet instant, peu importe que le contractant change d’avis par la suite et qu’il décide a posteriori de recourir à un prêt pour le financement de l’opération. Cette intention réelle pourra s’établir par tous moyens et notamment des échanges de courriers ou de courriels antérieurs à l’avant-contrat.

De manière générale, si le formalisme strict que les textes imposent n’est pas respecté dans ses moindres détails, le contrat sera considéré comme conclu sous la condition suspensive de l’obtention d’un prêt. La pratique a donc eu recours de manière systématique à unecondition suspensive expresse d’obtention de prêt. Cette condition expresse a rapidement fait l’objet d’aménagements contractuels afin de définir avec précision les conditions du prêt envisagé.

Une condition expresse encadrée. L’objectif premier de ces aménagements contractuels était de rendre la condition la plus loyale possible vis-à-vis du vendeur, d’une part, en définissant avec une précision suffisante des prêts de nature à permettre le financement de l’acquéreur et compatibles avec ses facultés et, d’autre part, éviter que l’acquéreur soit seul à pouvoir apprécier la qualité des offres de prêt qui lui seraient faites, et ce de manière arbitraire. Ces aménagements contractuels n’ont certes pas de justification légale, mais n’en demeurent pas moins valables et il convient d’être vigilant dans leur rédaction. Ils ont d’ailleurs été régulièrement soumis à l’interprétation des tribunaux.

4232 – Appréciations jurisprudentielles. – De l’analyse de la jurisprudence de la Cour de cassation, il se dégage un principe : ces aménagements ne doivent pas conduire à accroître les exigences de l’article L. 313-41 du Code de la consommation. Ainsi les clauses n’accroissant pas les exigences de l’article L. 313-41 du Code de la consommation sont celles qui ne font qu’apporter des précisions sur le prêt demandé par l’acquéreur, sur la durée de la période conditionnelle ou qui augmente la protection prévue par la loi, et notamment celles qui apportent des précisions sur le montant du prêt, sa durée et son taux d’intérêt ou sur la durée de la période conditionnelle. Ces précisions permettent, en cas de conflit, d’effectuer un contrôle objectif sur le respect par l’acquéreur de son obligation d’effectuer une demande de prêt.

À ce sujet, l’acquéreur ne disposant pas d’une offre de prêt au stade de l’avant-contrat, ni même parfois d’une simulation bancaire, n’a pas forcément une vision claire de son financement. Il est donc important de ne mentionner dans la condition que des limites conformes aux conditions générales du marché. De même, il convient d’être prudent sur les déclarations qui mentionnent que l’emprunt sollicité ne dépasse pas les capacités financières de l’acquéreur. Ce dernier est un non-professionnel de l’immobilier qui n’est pas toujours capable de connaître avec précision ses capacités d’emprunt.

Il nous semble important, dans le cadre du devoir de conseil, d’inciter l’acquéreur à solliciter une simulation bancaire de financement avant la signature de l’avant-contrat.

À l’inverse, les clauses accroissant les exigences de l’article L. 313-41 du Code de la consommation sont régulièrement condamnées par la Cour de cassation. La conséquence en est toujours la même : le non-respect des clauses accroissant les exigences de l’article 313-41 du Code de la consommation par l’acquéreur ne permet pas de retenir que la condition d’obtention du prêt est réputée acquise. Ces clauses sont réputées non écrites sans que l’on puisse précisément les déterminer481.

Nous citerons ici les décisions les plus importantes :

Ainsi l’article L. 313-41 du Code de la consommation dispose que la condition suspensive ne peut être inférieure à un mois à compter de la signature de l’acte. La pratique a donc envisagé une dissociation entre le délai de la réalisation de la condition suspensive et le délai de dépôt de la demande de prêt.

Imposer un délai plus court à l’acquéreur-emprunteur pour déposer une demande de prêt n’est pas forcément contraire à son intérêt, le but étant généralement de l’obliger à faire diligence pour consulter les banques et par là même de fixer le vendeur sur sa capacité à financer le bien dans les plus brefs délais.

La Cour de cassation a décidé qu’il n’était pas possible d’imposer une quelconque obligation contractuelle à l’application d’un texte d’ordre public482.

Cette position a été confirmée dans plusieurs arrêts, et notamment ceux du 6 juillet 2005483 et du 12 février 2014484 dans lesquels la troisième chambre civile de la Cour de cassation a jugé que « les dispositions d’ordre public de l’article L. 312-16 du Code de la consommation interdisent d’imposer à l’acquéreur de déposer une demande de crédit dans un certain délai, cette obligation contractuelle étant de nature à accroître les exigences de ce texte ».

Nous rejoignons ici la position de nos confrères, lors du Congrès de 2011 sur le financement485, sur le fait que « cela ne veut pas dire qu’il n’est pas possible de stipuler une condition de date minimum de dépôt, mais plus exactement que cette clause ne pourra avoir pour effet de considérer la condition suspensive comme réalisée avant un délai de trente jours (à défaut de dépôt dans le délai prévu) (…) il y a une forme de sacralisation du délai de trente jours : pendant ce délai, aucun mécanisme contractuel ne peut mettre en échec la condition suspensive en la réputant réalisée ou défaillie contre la volonté de l’acquéreur ».

4233 – Mise en œuvre de la condition suspensive légale de prêt et pratique notariale. – La pratique notariale actuelle consistant à demander à l’acquéreur de justifier du dépôt de sa demande de prêt auprès d’un établissement bancaire dans le mois de la signature de l’avant-contrat nous paraît être une bonne pratique non susceptible de remise en cause, sauf cas particulier.

La question du point de départ du délai, notamment de le fixer à la date de fin du délai de rétractation, ne semble pas être pertinente, la loi Scrivener ayant été adoptée bien avant la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (dite « loi SRU »).

De même, il est d’usage de préciser la durée exacte de validité de la condition suspensive. À ce sujet, un délai de l’ordre de deux mois paraît généralement conseillé.

Concernant le développement de l’obligation de solliciter plusieurs offres de prêt, nous constatons ici que la jurisprudence ne présente pas toujours la même sévérité. Ainsi et a priori, il peut être soutenu qu’il ne peut être imposé à l’acquéreur d’effectuer plusieurs demandes de prêt car cela conduit à accroître les exigences de l’article L. 313-41 du Code de la consommation. Dès lors, si l’acquéreur prouve qu’il a bien réalisé une demande de prêt conforme à ce qui est prévu dans le contrat et qu’il ne l’a pas obtenu, la condition suspensive du prêt ne devrait pas être réputée accomplie. Pour autant, ce n’est pas la solution qu’a retenue la Cour de cassation dans un arrêt du 22 mai 2008. Elle a estimé que la condition suspensive pouvait être considérée comme réalisée dès l’instant où l’acquéreur ne présentait qu’un refus de prêt, alors que l’avant-contrat stipulait qu’il s’engageait à effectuer une demande notamment auprès d’une banque déterminée486.

En conséquence, il semble possible de stipuler une obligation pour l’emprunteur d’avoir à déposer une demande de prêt auprès de plusieurs organismes bancaires et d’avoir à produire plusieurs refus de prêt pour obtenir la garantie de la condition suspensive.

Sur cette obligation conventionnelle de présenter plusieurs demandes de prêt, l’arrêt rendu par la Cour de cassation apporte une précision intéressante en validant, pour l’acquéreur, la possibilité de satisfaire à cette obligation en recourant à un courtier en prêt.

Conseil pratique

Dans la pratique, si l’acquéreur n’a pas l’intention de recourir à plusieurs banques ni à un courtier, mais seulement de faire appel à sa banque habituelle, il sera malvenu à notre sens de lui imposer de solliciter plusieurs banques. À l’inverse, s’il entend faire jouer la concurrence des banques, notamment en ayant recours à un courtier, la clause pourra être envisagée. Dans cas, il reviendra au notaire de bien expliquer à l’acquéreur novice, dans le cadre de son devoir de conseil, les obligations engendrées par une telle clause, notamment la production de plusieurs refus de prêt, impliquant le dépôt de plusieurs demandes de prêt, et non de simples simulations.

4234 – Mention manuscrite et modalités d’application. – S’agissant de la mention manuscrite, la simple indication, dans l’avant-contrat, que l’opération sera financée sans l’aide d’un prêt est insuffisante pour le faire échapper à la condition suspensive protectrice des droits de l’acquéreur.

L’article L. 313-42 du Code de la consommation prescrit, en outre, que l’acte porte, de la main de l’acquéreur, une mention par laquelle il reconnaît avoir été informé que s’il recourt néanmoins à un prêt, il ne pourra se prévaloir des dispositions relatives au crédit immobilier.

À titre d’exemple, il a été décidé que la simple mention « je renonce au statut protecteur de la loi du 13 juillet 1979 » ne répond pas aux exigences légales, car l’acquéreur doit avoir été informé que si malgré sa déclaration négative, il recourt tout de même à un prêt, il ne pourra se prévaloir de la loi préservant ses droits487. De même, la mention prérédigée d’un acte selon laquelle l’acquéreur déclare réaliser l’acquisition sur ses propres fonds et deniers ne suffit pas488.

Il a également été jugé que l’on ne peut refuser la restitution de l’indemnité d’immobilisation aux acquéreurs ayant renoncé au bénéfice des dispositions de la loi du 13 juillet 1979, si la mention relative à cette renonciation a été portée dans un document distinct auquel la promesse de vente ne contient aucune référence489. Il aurait fallu, pour qu’il en aille autrement, que la mention séparée soit référencée par la promesse490.

Il est à noter que le fait que la mention soit manuscrite est insuffisant. Il faut qu’en plus de la forme manuscrite, donc interpellative par nature, le fond soit probant quant à la conscience qu’a eu l’acquéreur du caractère définitif de la renonciation, même dans l’hypothèse où il changerait d’avis et déciderait de recourir au crédit491.

Formule de mention manuscrite

Nous rappelons ici la formule de mention manuscrite proposée par M. Dagot au lendemain de l’adoption de la loi492 :

« JE SOUSSIGNÉ… déclare ne pas vouloir contracter d’emprunt pour le financement de la présente acquisition. Je reconnais en outre avoir été informé que si je recours néanmoins à un prêt, je ne pourrai me prévaloir du bénéfice de la loi du 13 juillet 1979 prévoyant qu’en cas de financement par un prêt, la vente doit être conclue sous condition suspensive de l’obtention du prêt ».

4235 – Combinaison de la condition suspensive de prêt et de la mention manuscrite. – Concernant à présent la nécessité de cumuler la condition d’obtention de prêt et la mention manuscrite, on notera avec intérêt un arrêt rendu par la cour d’appel de Douai493. Selon la cour, « il résulte clairement de ces textes que les dispositions de l’article L. 315-15 du Code de la consommation sont applicables en cas de financement par le biais d’un emprunt, que celui-ci porte sur la totalité du montant à payer ou seulement sur une partie de ce montant. Les dispositions de l’article L. 312-17 ne s’appliquent qu’aux acquisitions faites sans aucun concours bancaire ». À ce sujet, nous partageons l’avis de Me Anthony Birraux, notaire494, selon lequel « la pratique consistant à cumuler la condition suspensive d’obtention de prêt avec une mention manuscrite nous paraît donc infondée en l’état actuel des textes et de la jurisprudence ».

Focus

Selon nous, par une lecture littérale de l’article L. 313-42 du Code de la consommation, dès lors que l’acquéreur a recours à un prêt total ou partiel pour financer son acquisition, la mention manuscrite n’est pas obligatoire.

En effet, l’article L. 313-42 précité exige la mention manuscrite si l’acquéreur n’a pas recours à un prêt. On en déduit a contrario que lorsque l’acquéreur déclare avoir recours à un prêt, la mention manuscrite n’est pas nécessaire.

4236 – Mention manuscrite et actes instrumentaires. – L’article L. 313-42 du Code de la consommation ne distingue pas, à propos de la mention manuscrite, entre acte authentique et acte sous seing privé.

Depuis la loi no 2011-331 du 28 mars 2011, l’article 1369 du Code civil dispose que : « L’acte authentique est celui qui a été reçu, avec les solennités requises, par un officier public ayant compétence et qualité pour instrumenter. Il peut être dressé sur support électronique s’il est établi et conservé dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. Lorsqu’il est reçu par un notaire, il est dispensé de toute mention manuscrite exigée par la loi ». La mention manuscrite n’est donc plus à présent obligatoire que pour les actes sous seing privé.

La suppression de l’obligation de faire figurer la mention manuscrite de l’article L. 313-42 du Code de la consommation dans les actes notariés emporte à notre sens un renforcement du devoir de conseil du notaire. Il lui revient donc de se réserver la preuve de l’information délivrée à l’acquéreur495.

Conclusion

Gageons que le développement du recours aux avant-contrats authentiques par les notaires viendra tarir le contentieux lié à la mention manuscrite. D’une part, en raison de l’absence de recopiage de la mention dans les actes authentiques et, d’autre part, en raison de la solennité de l’acte reçu par le notaire. En effet, la protection de l’acquéreur est pleinement assurée par le notaire, via l’acte authentique, ce dernier étant le garant de la délivrance d’une information complète à l’acquéreur et du contrôle de la bonne compréhension et de la renonciation en pleine conscience de l’acquéreur à la protection. Il convient de souligner que depuis de nombreuses années déjà, le notaire, de par les explications données aux parties lors du rendez-vous de signature de l’avant-contrat, au-delà de la rédaction des clauses dans l’acte, assure la bonne compréhension par l’acquéreur et le vendeur de leurs droits et obligations dans l’application de la condition suspensive de prêt.

Au-delà de l’établissement de la condition suspensive légale, la difficulté essentielle en pratique semble concerner l’appréciation de l’accomplissement de la condition suspensive de prêt dans le délai prévu.

Il convient de définir ce que l’on entend par obtention des prêts, car de cette définition dépend l’appréciation de l’accomplissement de la condition suspensive exigée par les textes et les conséquences qui s’y attachent.

Sous-section II – La réalisation de la condition suspensive légale

4237 – À la recherche de l’événement constitutif de la condition suspensive de prêt. – Aux termes de l’article L. 313-41 du Code de la consommation, l’événement constitutif de la condition suspensive à laquelle doit être soumise l’opération immobilière est « l’obtention du ou des prêts qui en assument le financement ». La notion d’obtention du prêt, très importante en pratique, a soulevé de sérieuses difficultés, dès la promulgation de la loi no 79-596 du 13 juillet 1979 et a donné lieu à de nombreux commentaires. Si l’on examine le contentieux auquel la loi du 13 juillet 1979 a donné lieu, c’est au sujet de cette notion d’obtention de prêt que la jurisprudence a dû à maintes reprises se prononcer. Ainsi la difficulté réside notamment dans la nécessité d’une participation active de l’une des parties à la réalisation de la condition. Cette difficulté est renforcée lorsque la condition est d’origine légale et d’ordre public. Dans la pratique, la diversité et la complexité des situations rencontrées engendrent une insécurité préjudiciable à tous et des solutions incertaines qu’il faut essayer de clarifier.

La clarification passe par une analyse de la jurisprudence de la Cour de cassation.

4238 – Notion d’obtention de prêt. – La notion d’obtention de prêt, élément essentiel de la réalisation de la condition, n’étant pas définie par le législateur, elle a longtemps divisé la doctrine quant à sa compréhension : se réalise-t-elle par la seule acceptation donnée par l’acquéreur à l’offre de prêt ou doit-elle être considérée comme acquise du seul fait de la formulation par la banque d’une offre de prêt correspondant aux besoins de l’acquéreur496 ? Confrontée à cette interrogation, la Cour de cassation a écarté le système de l’acceptation qui introduisait un critère subjectif, voire potestatif ; la condition suspensive de l’obtention d’un prêt « est réputée réalisée dès la présentation par un organisme de crédit d’une offre régulière correspondant aux caractéristiques du financement de l’opération stipulées par l’emprunteur »497.

De même, l’offre de prêt doit être ferme et sans réserve498. Dès lors, l’accord de l’établissement bancaire sous réserve de l’acceptation à l’assurance des emprunteurs est considéré comme une offre sous condition. Ainsi, en cas de refus de l’assureur, la condition suspensive de l’obtention d’un prêt est censée ne jamais s’être réalisée499.

En revanche, l’accord de principe délivré aux acquéreurs ne constitue pas une offre de prêt500.

4239 – Réalisation ou défaillance de la condition. – Dans quels cas peut-on considérer la condition défaillie ou, au contraire, réputée accomplie ?

L’article 1178 du Code civil dispose qu’une condition est réputée acquise lorsque c’est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché l’accomplissement. Il est dès lors nécessaire de rechercher l’origine de la défaillance.

Les praticiens tentent de limiter le contentieux prévisible lié à l’application de la condition suspensive de prêt en prenant soin de stipuler très précisément les obligations faites à l’acquéreur-emprunteur et notamment en leur imposant une obligation d’information sur l’état d’avancement du dossier (dépôt des demandes de prêt et transmission de l’offre de prêt dès réception). Néanmoins, le contentieux en la matière ne se tarit pas en raison de la facilité pour l’acquéreur à faire défaillir la condition.

Ainsi, après avoir admis avec une certaine automaticité que toute sollicitation d’un prêt non conforme aux caractéristiques définies dans l’avant-contrat de vente s’analysait en une faute de l’acquéreur-emprunteur501, la Cour de cassation a introduit la nécessité de la preuve par le vendeur d’un lien causal entre la faute du débiteur et le refus de l’organisme financier502. Néanmoins, plusieurs arrêts de la Cour de cassation sont, depuis, apparus en rupture avec cette évolution. Selon un arrêt du 16 janvier 2013503, la troisième chambre civile de la cour a approuvé les juges du fond d’avoir considéré que le seul fait de demander un prêt d’un montant supérieur à ce qui est stipulé dans l’avant-contrat suffit à établir que le débiteur est à l’origine de l’empêchement de la réalisation de la condition. De même, la première chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt du 22 juin 2017504, a décidé que la condition suspensive était réputée accomplie du seul fait que l’acquéreur ne justifiait pas d’une demande de prêt conforme aux caractéristiques stipulées dans l’acte, sans avoir à procéder à des recherches complémentaires pour s’assurer qu’une demande conforme aurait été de toute façon refusée.

Ces arrêts consacrent l’existence d’une présomption causale entre le non-respect de la clause et le refus de l’établissement. Ainsi solliciter une somme plus importante que celle initialement prévue fait présumer que cet élément est à l’origine du rejet de la demande505. Une présomption de causalité qu’il serait pertinent d’appliquer également lorsque le demandeur n’a formulé aucune demande ou a attendu les derniers jours pour solliciter l’établissement bancaire.

La mouvance de la jurisprudence de la Cour de cassation en la matière s’analyse en une tentative de trouver un juste équilibre entre la protection de l’acquéreur-emprunteur voulue par le législateur et la loyauté dans l’exécution du contrat. Par la sollicitation d’un emprunt d’un montant supérieur à ce que prévoyait l’avant-contrat, l’acquéreur a empêché la réalisation de la condition qui est alors réputée acquise.

4240 – Conséquences de la défaillance de la condition suspensive. – Il n’est pas possible de réputer le dépôt de garantie acquis au vendeur en cas de non-réalisation de la condition suspensive sans rechercher le comportement fautif de l’acquéreur. La rédaction de la clause à ce sujet est importante afin de ne pas laisser croire au vendeur que le dépôt de garantie lui sera systématiquement acquis en cas de non-obtention du prêt par l’acquéreur.

De même, lorsque l’acquéreur n’a pas justifié de l’obtention ou du refus de son prêt dans le délai contractuellement prévu à l’avant-contrat, on ne peut en déduire que la condition suspensive est réputée accomplie. La fin du délai contractuel permet simplement au vendeur de mettre en demeure l’acquéreur de justifier de l’obtention de son prêt.

En revanche, l’absence de réponse de l’acquéreur dans un certain délai rend le contrat caduc, et l’acquéreur ne peut récupérer son dépôt de garantie que s’il justifie qu’il a effectué une demande de prêt conforme aux caractéristiques définies dans l’avant-contrat. Ainsi, lorsque le défaut de réalisation de la condition est imputable à l’acquéreur, la condition étant « réputée accomplie », la vente devrait être parfaite. Mais puisque l’acquéreur ne peut pas payer le prix faute de prêt, il est le plus souvent jugé que le dépôt de garantie ou l’acompte doit être versé au vendeur lorsque les parties sont engagées dans une promesse synallagmatique de vente506.

Il est à noter que le séquestre de l’indemnité d’immobilisation ne peut en restituer le montant à l’acquéreur qu’à partir du moment où il est établi que la condition suspensive n’est pas accomplie507. De même, commet une faute le séquestre qui restitue les sommes versées au vendeur sans l’accord de l’acquéreur et sans disposer d’une décision de justice tranchant le litige entre les parties508.

Le rôle du notaire dans le suivi de la condition suspensive de prêt

Dans le cadre de son devoir de conseil, il est impératif pour le notaire, au risque de voir sa responsabilité engagée, d’une part, d’avertir l’acquéreur-emprunteur des risques encourus en cas de demande de prêt non conforme aux stipulations contractuelles et, d’autre part, de le sensibiliser lors de l’avant-contrat et de le relancer ultérieurement dans le cadre du suivi du dossier, afin qu’il lui transmette dans les délais impartis l’attestation de dépôt de prêt émanant d’un établissement bancaire et la preuve de ses échanges avec ce dernier afin de prouver sa bonne foi en cas de non-obtention du prêt dans le délai.

4241 – Possibilité de renoncer à la condition suspensive de prêt. – La question se pose de l’attitude à adopter lorsque le délai contractuel est écoulé sans réponse de l’organisme financier, mais que ni l’acquéreur ni le vendeur ne souhaitent invoquer la défaillance de la condition suspensive et donc la caducité de l’avant-contrat. L’acquéreur peut-il valablement renoncer à la condition suspensive ou bien le vendeur est-il contraint d’accepter une prorogation du délai de réalisation de la condition suspensive ?

La condition suspensive d’obtention de prêt est une condition stipulée dans l’intérêt exclusif de l’acquéreur-emprunteur. La réforme du droit des contrats a consacré à l’article 1304-4 du Code civil : « Une partie est libre de renoncer à la condition stipulée dans son intérêt exclusif, tant que celle-ci n’est pas accomplie ou n’a pas défailli ». Dans notre hypothèse, l’acquéreur peut renoncer au bénéfice de cette condition. Cette renonciation devra être assortie de la mention manuscrite prévue à l’article L. 313-42 du Code de la consommation aux termes d’un avenant. Il est à noter que, depuis la réforme du droit des contrats, il n’est pas certain que l’acquéreur puisse renoncer à la condition suspensive jusqu’à la date de réitération prévue pour l’avant-contrat. Dès lors, le nouvel article 1304-4 du Code civil n’étant pas d’ordre public, il est conseillé de prévoir dans l’avant-contrat la possibilité pour l’acquéreur de renoncer à se prévaloir des effets de la défaillance de la condition après son délai de réalisation.

Afin de ne pas laisser le vendeur dans l’incertitude, il est également conseillé de préciser un délai dans lequel l’acquéreur peut efficacement renoncer. Passé ce délai, la promesse de vente sera caduque sans formalité.

Proposition de rédaction de condition suspensive d’obtention de prêt à insérer dans un avant-contrat

« Les parties déclarent que la présente condition suspensive est stipulée dans le seul intérêt de l’acquéreur, ce dernier pouvant renoncer à son bénéfice et notifier jusqu’à la date prévue de levée d’option ou jusqu’à la date de réitération ou dans le délai de huit jours suivant la mise en demeure. À défaut de réception des informations dans le délai fixé, le PROMETTANT aura la faculté de mettre le BÉNÉFICIAIRE en demeure de lui justifier sous huitaine de la réalisation ou de la défaillance de la condition, et dans ce cas s’il le souhaite de sa renonciation. Cette demande devra être faite par lettre recommandée avec avis de réception au domicile ci-après élu.

Passé ce délai de huit jours sans que le BÉNÉFICIAIRE ait apporté les justificatifs, ou manifesté sa volonté de renoncer au bénéfice de la condition, elle sera censée défaillie et les présentes seront donc caduques de plein droit, sans autre formalité, et ainsi le PROMETTANT retrouvera son entière liberté mais le BÉNÉFICIAIRE ne pourra recouvrer l’indemnité d’immobilisation qu’il aura, le cas échéant, versée jusqu’après justification qu’il a accompli les démarches nécessaires pour l’obtention du prêt, et que la condition n’est pas défaillie de son fait ; à défaut, l’indemnité d’immobilisation restera acquise au PROMETTANT »509.

4242 – Propos conclusifs. – Face au constat d’un contentieux encore d’actualité et d’une jurisprudence non tranchée en raison, d’une part, du caractère d’ordre public de la loi Scrivener et, d’autre part, du caractère subjectif de la notion d’obtention de prêt, ne pourrait-on pas, dans le but de mieux concilier la nécessaire protection de l’emprunteur et la sécurité et la célérité des transactions, envisager une réforme de la loi Scrivener ?

En effet, le retard et l’incertitude apportés à la formation du contrat par l’exigence de la condition suspensive d’obtention de prêt sont souvent perçus en pratique comme source d’inutiles lenteurs et d’insécurité.

Dès lors, si l’on suivait les propositions du 82e Congrès des notaires de France510 et de différents auteurs, notamment M. Bergel dont il est ici cité les propos, « il conviendrait d’inverser le mécanisme actuel en permettant aux banques et aux établissements financiers de délivrer a priori des offres de prêt possibles, limitées dans le temps, fixant le montant et les caractères des prêts qu’ils seraient disposés à consentir à un emprunteur potentiel déterminé, pour quelque opération que ce soit, remplissant des conditions minimales ».

Le bénéficiaire d’une telle offre pourrait alors immédiatement s’engager dans un projet immobilier, à condition de ne pas dépasser l’enveloppe prévue par l’offre de prêt. Ainsi, lors de l’avant-contrat, la condition suspensive de l’obtention des prêts serait inutile puisque les prêts nécessaires seraient déjà obtenus, et la protection équilibrée des intérêts du vendeur et de l’acquéreur serait assurée.

Un autre dispositif, également issu du développement de la volonté du législateur de protéger le consommateur, a été étendu vingt plus tard à la vente du logement ancien511.

Il s’agit de l’instauration d’un droit général de rétractation et réflexion, issus de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains no 2000-1208 du 13 décembre 2000.

Section II – Les lois SRU-ENL : l’instauration de délais de rétractation et de réflexion dans la vente du logement ancien, comme mode de protection du consentement de l’acquéreur

4243 La loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains no 2000-1208 du 13 décembre 2000, dite « loi SRU », est venue renforcer les obligations d’information et de protection de l’acquéreur immobilier. Le législateur a voulu lutter contre les engagements impulsifs des acquéreurs, source de déconvenue pour la mise en place des financements de l’acquisition, et d’insécurité juridique pour le vendeur.

Néanmoins, l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation (Loi SRU, art. 72) instaurant les délais de rétractation et de réflexion pour l’acquéreur non professionnel de locaux à usage d’habitation, modifié à plusieurs reprises et dernièrement par la loi Élan no 2018-1021 du 23 novembre 2018, suscite, depuis son entrée en vigueur, des difficultés, d’une part quant à son champ d’application, et d’autre part quant au formalisme de la notification.

Sous-section I – Le champ d’application des délais de rétractation et de réflexion

4244 – Délai de rétractation ou délai de réflexion ? – L’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation a instauré à l’origine un délai de rétractation et de réflexion de sept jours dans la vente immobilière du logement. Cet article a été modifié à plusieurs reprises. La loi no 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement, dite « loi ENL », est revenue sur la nature de la protection de l’acquéreur initialement édictée par la loi SRU. Dans sa rédaction antérieure, l’article réservait un régime différent aux actes et promesses passés sous seing privé et à ceux dressés en la forme authentique. Seuls les actes sous seing privé connaissaient un véritable droit de rétractation. La solennité de l’acte authentique avait conduit le législateur à retenir, dans ce cas, un délai de réflexion afin d’éviter la remise en cause a posteriori de ce type d’acte. Compte tenu des difficultés rencontrées dans l’application pratique de cette distinction, la loi ENL a généralisé le délai de rétractation aux actes sous seing privé et authentiques et a instauré le procédé de remise en main propre de l’avant-contrat.

La seule exception étant les ventes conclues en la forme authentique non précédées d’un avant-contrat. Cette hypothèse, rare en pratique, est restée soumise au délai de réflexion.

La loi no 2015-990 du 6 août 2015, quant à elle, a porté ledit délai de sept jours à dix jours.

4245 – Les termes de l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation. – La rédaction actuelle de l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation (modifié dernièrement par la loi no 2018-1021 du 23 novembre 2018) est la suivante :

« Pour tout acte ayant pour objet la construction ou l’acquisition d’un immeuble à usage d’habitation, la souscription de parts donnant vocation à l’attribution en jouissance ou en propriété d’immeubles d’habitation ou la vente d’immeubles à construire ou de location-accession à la propriété immobilière, l’acquéreur non professionnel peut se rétracter dans un délai de dix jours à compter du lendemain de la première présentation de la lettre lui notifiant l’acte.

Cet acte est notifié à l’acquéreur par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par tout autre moyen présentant des garanties équivalentes pour la détermination de la date de réception ou de remise. La faculté de rétractation est exercée dans ces mêmes formes.

Lorsque l’acte est conclu par l’intermédiaire d’un professionnel ayant reçu mandat pour prêter son concours à la vente, cet acte peut être remis directement au bénéficiaire du droit de rétractation. Dans ce cas, le délai de rétractation court à compter du lendemain de la remise de l’acte, qui doit être attestée selon des modalités fixées par décret.

Lorsque le contrat constatant ou réalisant la convention est précédé d’un contrat préliminaire ou d’une promesse synallagmatique ou unilatérale, les dispositions figurant aux trois alinéas précédents ne s’appliquent qu’à ce contrat ou à cette promesse.

Lorsque le contrat constatant ou réalisant la convention est dressé en la forme authentique et n’est pas précédé d’un contrat préliminaire ou d’une promesse synallagmatique ou unilatérale, l’acquéreur non professionnel dispose d’un délai de réflexion de dix jours à compter de la notification ou de la remise du projet d’acte selon les mêmes modalités que celles prévues pour le délai de rétractation mentionné aux premiers et troisièmes alinéas. En aucun cas l’acte authentique ne peut être signé pendant ce délai de dix jours.

Les actes mentionnés au présent article indiquent, de manière lisible et compréhensible, les informations relatives aux conditions et aux modalités d’exercice du droit de rétractation ou de réflexion.

Tout manquement à l’obligation d’information mentionnée à l’avant-dernier alinéa est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 3 000 euros pour unepersonne physique et 15 000 euros pour une personne morale. Cette amende est prononcée dans les conditions prévues au chapitre II du titre II du livre V du Code de la consommation ».

Il ressort de l’analyse dudit article trois éléments cumulatifs permettant de déterminer le domaine d’application du régime de protection : les actes visés, l’immeuble à acquérir, l’acquéreur protégé.

4246 – Les actes concernés. – À la lecture des dispositions de l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation, il ressort que les actes concernés par la protection sont expressément visés par le législateur. Il s’agit de :

l’acquisition d’un immeuble à usage d’habitation ;

la souscription de parts donnant vocation à l’attribution en jouissance ou en propriété ;

la vente de l’immeuble à construire ;

la location-accession à la propriété immobilière ;

la construction.

Pour l’essentiel, on retiendra qu’il s’agit de la vente d’immeuble.

Des questions se sont posées concernant les acquisitions autres que la vente, notamment les dations en paiement, les échanges, les apports en société, la contrepartie dans ces cas n’étant pas en argent. Si l’on développe l’idée de protection de l’acquéreur voulue par le législateur afin d’éviter un engagement trop précipité, une application extensive du texte semble possible à ces actes.

Néanmoins, il est entendu que lorsque l’acte a un caractère gratuit ou déclaratif (comme le partage), la protection n’est pas applicable. L’hésitation est permise en cas de partage avec soulte ou même d’acquisition de droits indivis par un coïndivisaire, que cette acquisition fasse ou non à son occasion cesser l’indivision. Si l’on s’attache à la nature juridique de l’opération, il s’agit d’un partage non prévu par le texte légal. Si l’on considère le résultat économique de l’opération, un partage avec soulte sera souvent proche d’une acquisition.

S’agissant des droits sociaux visés par le texte, il s’agit de ceux des sociétés d’attribution et des sociétés coopératives d’attribution qui ne sont pas encore partagées. La cession de parts de société civile immobilière est donc exclue de la protection.

4247 – Immeuble à usage d’habitation. – L’application de l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation est expressément limitée, d’une part, aux immeubles (ou assimilé pour certains droits sociaux) et, d’autre part, à l’usage d’habitation.

En effet, l’article ne mentionne que « l’immeuble à usage d’habitation ». Il en résulte que l’immeuble entièrement commercial ou professionnel ne relève pas de cet article. Il en est de même pour les immeubles à usage d’habitation et commercial, ou professionnel et commercial, le texte ne visant pas les immeubles mixtes. La Cour de cassation a rendu une décision en ce sens dans un arrêt du 30 janvier 2008512. Se référant à la lettre de la loi, l’arrêt retient que « l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation ne mentionnant dans son champ d’application que les immeubles à usage d’habitation, ses dispositions ne sont pas applicables aux immeubles à usage mixte ».

Il est à noter que cet attachement de la Cour de cassation à la seule lettre du texte entraîne une fragmentation de la législation. En effet, dans le secteur protégé, les dispositions s’étendent aux immeubles à usage mixte et professionnel.

S’agissant à présent de la nature du droit immobilier acquis, le texte n’apporte aucune précision, mais par interprétation il a été conclu que les dispositions de l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation s’appliquent non seulement pour les droits démembrés, usufruit-nue-propriété, mais également pour les droits accessoires, comme l’acquisition d’une servitude ou d’une mitoyenneté.

4248 – Le cas des annexes d’un immeuble d’habitation. – Le sort des biens annexes à un immeuble d’habitation ne fait pas de difficultés lorsqu’ils sont vendus avec lui. Les caves, parkings, dépendances vendus en même temps que l’immeuble d’habitation suivent évidemment le même régime. L’opération étant globale, le droit de rétractation ou de réflexion est d’application globale. En revanche, la vente d’une dépendance isolée ne peut entrer dans le champ d’application de la loi. Deux éléments s’y opposent : la lettre du texte, dans la mesure où l’objet de la vente ne porte pas sur un immeuble d’habitation, et son esprit car l’opération est totalement étrangère à l’acquisition d’un logement ou, plus largement, d’une habitation513.

Dans le même ordre d’idées, il est à retenir que l’acquisition d’un terrain supportant un bâtiment en ruine n’ouvre pas la faculté de rétractation.

4249 – Le cas particulier de l’acquisition d’un immeuble avec changement de destination. – En la matière, deux analyses s’opposent. D’un côté, une analyse objective qui fait prévaloir la lettre du texte. Seul importe l’usage actuel du bien au moment de l’avant-contrat ou de la vente. Il n’y pas lieu de prendre en considération l’éventuel changement de destination des lieux projeté par l’acquéreur pour déterminer si les dispositions de l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation sont applicables, l’application de ce texte d’ordre public ne dépendant pas de la volonté des parties mais de la destination des biens au moment de la vente. D’un autre côté, une analyse subjective, en faisant prévaloir les intentions de l’acquéreur, l’affectation qu’il veut lui donner. Peu importe la destination initiale de l’immeuble.

La doctrine majoritaire et l’analyse de la jurisprudence récente de la Cour de cassation514 soutiennent une approche subjective fondée sur la destination envisagée, contractualisée par les parties.

Dès lors, l’avant-contrat devra être précis sur la destination que l’acquéreur envisage : cette destination commande l’application ou la non-application du régime de protection. Des clauses devront être insérées dans la partie « destination » de l’acte afin de préciser le but poursuivi par l’acquéreur et les moyens mis en œuvre pour concrétiser son intention (demande d’autorisation et autres…).

Il convient de réserver le cas du changement de destination d’habitation vers un usage commercial : dans ce cas, l’opération étant soumise à l’obtention d’autorisations administratives, il convient de protéger l’acquéreur qui ne peut pas réaliser le projet prévu, et donc purger, dans ce cas, le délai de rétractation.

4250 – Le cas du terrain à bâtir. – Lors de l’entrée en vigueur de l’article 72 de la loi no 2000-1208 du 13 décembre 2000, généralisant la règle codifiée à l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation, une controverse était apparue à propos de l’inclusion des terrains à bâtir destinés à la construction d’un logement dans la définition de « l’immeuble à usage d’habitation », lequel est seul visé dans le texte.

Il résulte de la jurisprudence515 et de deux réponses ministérielles516 l’exclusion de l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation dans le cas d’une acquisition de terrain à bâtir.

La réponse ministérielle à la question no 65241 est très claire sur le sujet : « (…) dans le cas d’un terrain à bâtir, le contrat a pour objet l’acquisition de l’immeuble déterminé que constitue le terrain. L’usage direct de celui-ci n’est pas l’habitation, même si la cause du contrat ou le motif de l’acquisition est l’édification ultérieure d’un bâtiment destiné au logement »517.

Le critère déterminant est celui de l’objet de la vente, au moment de l’avant-contrat ou de la vente. La Cour de cassation privilégie une analyse littérale du texte. Il convient de se référer à la désignation du bien dans l’acte.

Dès lors, soit l’objet de l’acte désigne un immeuble à usage d’habitation, soit il ne le désigne pas. Dans le premier cas, la faculté de rétractation est applicable. Dans le second, elle ne l’est pas, peu importe que l’avant-contrat stipule une condition suspensive d’obtention d’un permis de construire.

Rappelons que dans le régime du lotissement, on retrouve le droit de rétractation avec l’article L. 442-8 du Code de l’urbanisme. En effet, le texte prévoit qu’à compter de la délivrance du permis d’aménager, le lotisseur peut consentir une promesse unilatérale de vente indiquant la consistance du lot réservé, sa délimitation, son prix et son délai de livraison, mais la promesse ne devient définitive qu’au terme d’un délai de sept jours (le délai n’a pas été porté à dix jours, contrairement à celui prévu à l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation) pendant lequel l’acquéreur a la faculté de se rétracter. Ce régime spécifique de protection en cas de vente de tels terrains à bâtir est d’évidence dérogatoire au régime général et ne se justifierait pas si ce dernier devait s’étendre à ce type de biens518.

4251 – L’acquéreur protégé. – Le troisième élément pour que le régime de protection soit applicable concerne l’acquéreur. Seul l’acquéreur non professionnel a droit à la protection. Que faut-il entendre par acquéreur non professionnel ? Le texte ne fournit pas de précisions.

Cette notion « d’acquéreur non professionnel » fait l’objet d’importantes interprétations en l’absence de précision.

L’acquéreur non professionnel peut être non seulement une personne physique, mais également une personne morale. En effet, dans un arrêt de principe rendu par la première chambre civile le 15 mars 2005, la Cour de cassation a considéré que la définition du non-professionnel n’exclut pas les personnes morales de la protection.

Ainsi un marchand de biens qui acquiert un bien à titre personnel peut-il bénéficier de la protection.

Il en est de même pour le particulier, propriétaire d’un patrimoine immobilier important, qui procède à des opérations immobilières régulières.

Pour orienter le raisonnement, il convient de se référer aux travaux préparatoires et débats lors de l’adoption de la loi SRU.

Ainsi il a été indiqué au Sénat : « C’est contre sa propre fragilité que nous voulons protéger l’acquéreur (…) notre objectif est de protéger l’acquéreur non pas contre tel professionnel mais contre lui-même, tout simplement parce qu’un certain nombre d’engagements de ce type, qui sont excessivement importants, sont quelquefois pris un peu rapidement ».

Comme le souligne M. Périnet-Marquet519, seule la fragilité psychologique présumée de l’acquéreur justifie donc le droit de rétractation. Il s’agit de le protéger contre son irréflexion, lors d’une acquisition qui représente une opération financière importante.

Mais comment tracer la frontière entre les acquéreurs fragiles et les autres ? Là encore, beaucoup de questions, peu de certitudes. Néanmoins, le critère du lien avec l’activité professionnelle semblerait objectif selon certains auteurs520, car il ne nécessiterait aucune évaluation de la compétence professionnelle ou de l’aptitude psychologique à signer le contrat.

Il est conseillé, lorsque le caractère manifestement professionnel de l’acquéreur est acquis (loueur professionnel, marchand de biens), de préciser dans l’acte la raison pour laquelle le formalisme légal n’est pas mis en œuvre. Il convient de le faire approuver à l’acquéreur afin d’éviter toute contestation ultérieure de ce dernier.

En cas d’incertitude sur l’application de la loi, il est toujours préférable que le doute profite à l’acquéreur et que la protection lui soit accordée.

4252 – Le cas de l’acquisition par une société civile immobilière. – Une société civile immobilière peut-elle être considérée comme un acquéreur non professionnel bénéficiant du droit de rétractation ? À défaut d’être exclu par le texte, la Cour de cassation reconnaît le bénéfice de la protection légale aux personnes morales521.

En matière d’acquisition par une société civile immobilière, la cour érige l’objet social en critère d’identification du caractère professionnel de l’acquéreur. Il en découle qu’elle refuse régulièrement la qualité de non-professionnel à la personne morale dont l’objet est en rapport avec l’acte d’acquisition.

Ainsi un arrêt de la Cour de cassation énonce qu’une société civile immobilière dont l’objet est l’acquisition et la gestion par location ou autrement de tous immeubles et biens immobiliers meublés et aménagés et qui procède à une acquisition en rapport direct avec son objet social n’est pas un acquéreur non professionnel et qu’elle ne peut donc bénéficier du délai de rétractation prévu par l’article L. 271-1 du Code de la consommation et de l’habitation522.

La troisième chambre civile de la Cour de cassation s’est à nouveau prononcée sur le sujet par un arrêt du 16 septembre 2014523. Dans sa décision, elle a censuré les juges du fond, en constatant que l’acquisition effectuée avait « un rapport direct avec l’objet social de la SCI ». Et elle en a déduit que celle-ci ne pouvait pas invoquer le bénéfice du droit de rétractation.

L’arrêt du 24 octobre 2012 a fait l’objet de différentes interprétations, dont l’une consiste à justifier la solution par l’intention du législateur pour lequel le droit de rétractation devait éviter des achats dits « d’impulsion » : or ce type d’achat n’est pas à craindre pour les personnes morales.

L’arrêt du 16 septembre 2014, quant à lui, pour l’appréciation du caractère « professionnel » ou non de la société acquéreur, a exclu toute référence à la nature des activités réellement exercées par elle, en ne s’attachant qu’à son objet ainsi qu’au lien entre cet objet et l’opération intervenue. Sachant que, par définition, l’acquisition présente toujours un lien avec l’objet social, faute de quoi elle serait annulable en raison du principe de spécialité des personnes morales, on voit mal dans quel cas une société civile, même à caractère « familial » et plus généralement une personne morale pourrait se voir reconnaître le caractère d’acquéreur « non professionnel ». Telle a été l’interprétation retenue lors du 111e Congrès des notaires de France de 2015524.

Il serait bon, comme l’a souhaité M. Leveneur525, que le législateur intervienne afin de préciser la portée exacte de l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation en cas d’acquisition par une personne morale, car s’interroger au cas par cas en fonction de l’objet de la société et de la nature de l’opération n’est pas propice à la sécurité juridique. Dans le doute, il est conseillé, dans le cas d’acquisition par une société civile immobilière, de relater l’objet social de ladite société dans l’acte, afin de justifier de la non-application de l’article L. 271-1.

4253 – « Modification substantielle » et nouvelle purge du délai rétractation. – Dans quels cas faut-il purger une seconde fois le droit de rétractation de l’acquéreur d’une habitation ? La difficulté résulte de l’apparition d’une donnée nouvelle par rapport à ce qui a été porté à la connaissance de l’acquéreur lors de la promesse : un alignement, une servitude, la présence d’un occupant sans titre, etc. Cette difficulté est délicate en pratique, car la purge d’un nouveau droit de rétractation peut nuire aux intérêts du vendeur dans l’hypothèse où l’acquéreur se saisit de l’occasion pour se rétracter, et est susceptible d’entraîner la responsabilité du notaire. La loi ne se prononçant pas sur le sujet, il est important de scruter la jurisprudence.

Les arrêts de cour d’appel et de cassation parlent de la notion de « modification substantielle »526.

Cette terminologie rappelle celle que l’on rencontre en matière d’erreur : l’erreur est une cause de nullité lorsqu’elle tombe sur « une qualité substantielle » de la chose, c’est-à-dire une qualité déterminante du consentement. Dès lors, quand doit-on considérer une modification comme substantielle ? Lorsqu’elle porte sur un élément déterminant du consentement de l’acquéreur.

En résumé, l’élément nouveau serait-il de nature à entraîner la nullité de la vente pour erreur sur les qualités substantielles527 ? Si la réponse est positive, il conviendra d’ouvrir un second délai de rétractation à l’acquéreur : tel peut être le cas lors de la révélation d’une servitude de passage grevant le bien, alors que l’avant-contrat avait expressément stipulé l’absence de servitude, ce qui aurait dû amener un vendeur à rouvrir le délai528. En revanche, si la réponse est négative, il faudra s’abstenir de toute nouvelle notification.

Les solutions jurisprudentielles en la matière sont très variées en raison des multiples situations rencontrées529. Cette notion de modification substantielle fait écho au mécanisme de la condition suspensive utilisé par les praticiens afin de régulariser l’avant-contrat sans avoir, par exemple, l’ensemble des diagnostics techniques. Le procédé est parfaitement valable mais un soin particulier devra être apporté à la rédaction de la condition suspensive. Une condition suspensive renvoyant à l’obtention d’un diagnostic négatif conserve à l’avant-contrat toute son efficacité. Soit le certificat est positif et la condition ayant défailli, l’avant-contrat est caduc. Soit le certificat est négatif et l’acquéreur se trouve définitivement lié à l’expiration du délai de rétractation530.

Étant donné les difficultés d’interprétation de la notion de modification substantielle, dans le cas de modifications considérées comme peu importantes pour un acquéreur, il pourra être envisagé un procédé d’informatif et déclaratif531.

Ce procédé consiste à informer clairement l’acquéreur et lui faire déclarer qu’il a bien reçu cette information, qu’il l’a comprise, et qu’elle ne constitue pas pour lui une modification substantielle.

Une fois le champ d’application des délais de rétractation et de réflexion définis, il convient de s’intéresser au formalisme de la notification desdits délais, faisant également l’objet d’une jurisprudence abondante.

Sous-section II – Le formalisme de la notification des délais de rétractation et de réflexion

4254 – Les formes de la notification. – La forme essentielle imposée par la loi SRU est une notification adressée au candidat acquéreur. Pour purger le délai de rétractation, l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation prévoit un système alternatif :

soit une remise directe de l’acte au bénéficiaire du droit de rétractation, contre signature, à condition que l’acte soit conclu par l’intermédiaire d’un professionnel ayant reçu mandat pour prêter son concours à la vente (agent immobilier ou notaire). Dans l’hypothèse (la plus courante) où l’acte est notifié par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, il appartient à l’auteur de la notification de rapporter la preuve que l’acte a bien été remis à « personne » ou à son mandataire ;

soit la notification de l’acte à l’acquéreur par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.

4255 – Remise en main propre de l’avant-contrat. – Là encore, la question de la remise en main propre de l’avant-contrat par le notaire a agité les esprits, malgré deux réponses ministérielles en ce sens, après l’arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation le 26 janvier 2011532, aux termes duquel la Haute juridiction précisait que « la remise de l’acte en main propre, non constatée par un acte ayant date certaine, ne répond pas aux exigences de l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation ».

En réponse à cette jurisprudence, le législateur, par un décret no 2008-1371 du 19 décembre 2008, a validé – moyennant le recours à une nouvelle mention manuscrite – la pratique notariale de la remise en main propre (pour ce qui concerne tant les avant-contrats que les actes de vente eux-mêmes).

Les articles D. 271-6 et D. 271-7 du Code de la construction et de l’habitation prévoient en effet expressément qu’en application de l’article L. 271-1 de ce code, la promesse de vente sous seing privé, une copie de l’avant-contrat réalisé en la forme authentique ou un projet d’acte authentique reproduisant les dispositions de l’article L. 271-2 peuvent être remis directement à l’acquéreur non professionnel.

Le décret introduit un dispositif formel à respecter lors de la remise en main propre, qui prévoit que :

l’avant-contrat doit obligatoirement reproduire les dispositions de l’article L. 271-2 du Code de la construction et de l’habitation relatives aux modalités de versement des fonds et restitution des fonds à l’acquéreur non professionnel ;

le bénéficiaire doit déclarer, par mention manuscrite apposée directement sur l’original pour l’acte sous seing privé, et sur la copie s’agissant d’un acte authentique, avoir connaissance qu’un délai de rétractation de dix jours lui est accordé et qu’il court à compter du lendemain de la date de remise de l’acte. Il est exigé la reproduction du texte figurant à l’article D. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation ;

en cas de notification de projet d’acte authentique, celui-ci doit reproduire les dispositions de l’article L. 271-2. Ces mentions doivent être inscrites de la main du bénéficiaire du droit de réflexion.

Le notaire peut se préconstituer la preuve du respect de ce formalisme en conservant une copie de la mention.

À défaut de respecter scrupuleusement le formalisme des articles D. 271-6 et D. 271-7 du Code de la construction et de l’habitation, le délai sera considéré comme n’ayant pas couru533.

Exemple de formule de remise en main propre conforme aux articles D. 271-6 et D. 271-7

« Remis par … [nom du professionnel] à … [lieu] le … [date] » : « Je déclare avoir connaissance qu’un délai de réflexion de dix jours m’est accordé par l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation, et qu’il encourt à compter du lendemain de la date de remise inscrite de ma main sur le présent objet, soit à compter du… ».

Aujourd’hui, force est de constater que les allers-retours jurisprudentiels concernant la validité de la remise en main propre de l’avant-contrat par le professionnel sont venus tarir cette pratique au profit de la lettre recommandée avec demande d’avis de réception.

4256 – Envoi par lettre recommandée avec demande d’avis de réception de l’avant-contrat et point de départ du délai. – Par application des dispositions de l’article 670, alinéa 1er du Code de procédure civile : « La notification est réputée faite à personne lorsque l’avis de réception est signé par son destinataire ».

4257 – Envoi par lettre recommandée avec demande d’avis de réception de l’avant-contrat et mandat. – Le principe d’une réception de la lettre par un mandataire est possible à condition qu’il soit démontré par le vendeur que ce mandataire dispose d’un mandat exprès pour recevoir l’acte. Ce mandat n’est pas présumé, même en cas de liens familiaux. En outre, la procuration est entendue de manière restrictive. Ainsi, lorsqu’une procuration a été donnée au mandataire aux fins de signature du compromis de vente, il a été jugé qu’elle ne s’étendait pas automatiquement à l’exercice de la faculté de rétractation. Ce principe s’applique également à une notification faite à des époux coacquéreurs, l’un des époux n’étant pas présumé pouvant recevoir l’acte pour le compte de l’autre à défaut de mandat exprès. En effet, deux arrêts rendus par la troisième chambre civile de la Cour de cassation en date du 9 juin 2010534 clarifient le régime de la notification du délai de rétractation de l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation en cas d’acquisition par deux époux : deux lettres s’imposent, sauf à ce que l’accusé de réception du courrier unique soit signé par chacun d’eux, voire par un seul mais muni d’un pouvoir à l’effet de représenter son conjoint.

Dans le même sens, s’agissant du mandat pour réceptionner la lettre de purge du délai de rétractation, un arrêt de la Cour de cassation du 12 octobre 2017535 conclut que l’absence de mandat du signataire pour recevoir la notification de l’acte affecte cette dernière d’une irrégularité, de sorte que le délai de rétractation n’avait pas couru et la clause pénale n’était pas due.

Sachant que la Cour de cassation, par un arrêt du 21 mars 2019536, a certes réaffirmé que la notification de la promesse de vente par lettre recommandée avec demande d’avis de réception n’est régulière que si la lettre est remise à son destinataire ou à un représentant muni d’un pouvoir à cet effet, mais qu’elle a également décidé, l’agent immobilier ayant été mis en cause dans l’affaire, qu’il incombait au professionnel de vérifier la sincérité, au moins apparente, de la signature figurant sur l’avis de réception de la lettre recommandée adressée aux acquéreurs.

4258 – Le cas de la notification à des époux. – Lorsqu’un époux commun en biens achète seul pour le compte de la communauté, une seule notification faite à cet époux continue de s’imposer, peu importe que le bien tombe en communauté. Le droit de rétractation présente une nature contractuelle, c’est un droit personnel à l’acquéreur. Seul cet époux acquéreur unique dans l’acte bénéficie de la qualité de contractant au sens de l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation.

S’agissant en revanche de la preuve du mandat entre époux, il n’est pas possible de faire application du mandat de l’article 218 du Code civil, ce dernier ne permettant qu’une représentation dans l’exercice des pouvoirs que le régime matrimonial attribue à chaque conjoint, ce qui semble exclusif de l’exercice du droit personnel de recevoir la notification du délai de rétractation de l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation. L’époux doit bien justifier d’un pouvoir spécial de droit commun à l’effet de représenter son conjoint pour signer l’avis de réception.

Enfin la Cour de cassation, dans un arrêt du 4 décembre 2013537, a par ailleurs confirmé que l’anéantissement du contrat est complet dès lors qu’un seul des époux coacquéreurs exerce son droit de rétractation.

4259 – La preuve d’un mandat exprès. – Il est important de prévoir une clause, lors de la rédaction de l’avant-contrat, prévoyant un mandat exprès au profit du conjoint, concubin ou partenaire de Pacs ou au profit d’une personne déterminée, notamment lorsque l’acquéreur habite chez ses parents ou est seul acquéreur en étant en couple, à l’effet de signer l’avis de réception ou de retirer la lettre recommandée avec demande d’avis de réception auprès des services de La Poste.

A posteriori, un doute subsiste sur la réelle possibilité de faire jouer l’article 1156 du Code civil relatif à la théorie du mandat apparent, car le vendeur devra néanmoins apporter la difficile preuve d’éléments de faits qui seraient susceptibles de le faire légitimement croire en la réalité des pouvoirs du signataire.

4260 – Le cas du pli non réclamé. – La purge du délai de rétractation n’implique pas que la lettre soit matériellement réceptionnée par l’acquéreur. La justification d’un simple avis de passage est donc suffisante, ce document n’ayant pas à être signé par le destinataire du courrier mais étant établi par les services postaux.

La Cour de cassation confirme qu’il résulte bien des dispositions de l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation que le délai de rétractation court non pas de la date de réception du courrier, mais du lendemain de la première présentation de la lettre notifiant l’acte.

Ainsi un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 14 février 2018538 énonce à propos du point de départ du délai de rétractation : « viole les dispositions de l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation la cour d’appel qui a considéré que le délai de rétractation prévu par cet article n’avait pas couru à l’égard de l’acquéreur au motif que celui-ci n’avait pas réceptionné la lettre recommandée, alors qu’il résultait de ses propres constatations que régulièrement avisé, l’acquéreur s’était abstenu d’aller retirer sa lettre recommandée à La Poste ».

Néanmoins, de manière générale, force est de constater que les diverses solutions jurisprudentielles illustrent l’imprécision et l’ambiguïté des textes.

En effet, il résulte de la synthèse de la jurisprudence ci-dessus visée que si personne ne réceptionne la lettre recommandée et qu’une première présentation peut être établie, on considère que le délai de rétractation court, mais que si l’avis de réception du courrier unique adressé aux coacquéreurs n’est signé que par un seul, démuni de pouvoirs, le délai ne court pas.

Sachant que, par un arrêt du 7 avril 2016539, la troisième chambre civile la Cour de cassation a décidé, à propos de la purge du délai de rétractation d’un contrat préliminaire de rétractation irrégulière sur la forme, que « la signature par les acquéreurs de l’acte authentique sans réserve vaut renonciation à se prévaloir de l’irrégularité de la notification du droit de rétractation prévue à l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation ».

Cet arrêt a une portée pratique considérable, car il rend les acquéreurs irrecevables dans la revendication d’irrégularités a posteriori. Au surplus, la solution s’applique de plein droit par la seule signature de l’acte authentique, sans mention particulière à insérer dans l’acte. Néanmoins, il convient de souligner que cet arrêt ne s’applique qu’au cas de notification irrégulière dans la forme. Dans l’hypothèse où l’avant-contrat est entaché d’une cause de nullité, le risque de nullité de l’acte reste entier540.

4261 – Renforcement de l’obligation d’information issue de la loi Élan lors de la notification. – La loi Élan no 2018-1021 du 23 novembre 2018 a ajouté deux alinéas à l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation. Le premier indique que la promesse ou le projet de l’acte notifié à l’acquéreur doit indiquer « de manière lisible et compréhensible, les informations relatives aux conditions et aux modalités d’exercice du droit de rétractation ou de réflexion ». Dorénavant, en sus de la reproduction de l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation, une clause dans l’acte devra préciser les modalités précises d’exercice du droit de rétractation ou de réflexion (lettre recommandée papier ou électronique envoyée à telle adresse donnée).

Le second alinéa prévoit qu’à défaut, l’absence de précisions sera lourdement sanctionnée, puisque tout manquement à ce qui constitue une nouvelle obligation d’information est passible d’une amende administrative s’élevant jusqu’à 3 000 € pour une personne physique et 15 000 € pour une personne morale.

Cette nouvelle disposition entraîne l’obligation pour le notaire de vérifier en aval que les avant-contrats mentionnent lesdites informations, et de les faire figurer dans les ventes en l’absence d’avant-contrat.

4262 – Notification par lettre recommandée électronique. – La lettre recommandée électronique (LRE), qui a été instituée par l’ordonnance no 2005-674 du 16 juin 2005 devait, pour être valable, répondre à des conditions fixées par les décrets no 2011-144 du 2 février 2011 et no 2011-434 du 20 avril 2011.

Par suite, la loi pour une République numérique541, elle-même prise en application du règlement (UE) dit « eIDAS »542, devait faire évoluer l’appareil normatif encadrant la lettre recommandée électronique. Un nouvel article L. 100 fut en effet institué dans le Code des postes et des communications électroniques, poursuivant un double objectif. D’une part, le texte affirmait l’équivalence des recommandés papier et électronique, dans toutes matières, « sauf disposition spéciale l’excluant ». D’autre part, elle entendait soumettre la validité du procédé électronique à de nouvelles exigences. En est découlé le décret no 2018-357 du 9 mai 2018 applicable à tout envoi électronique effectué à compter du 1er janvier 2019, qui a abrogé les précédents décrets de 2011543.

Il en résulte que la notification de l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation peut désormais parfaitement être réalisée par lettre recommandée électronique.

Les conditions à respecter pour une notification par courrier électronique recommandé

La nouvelle possibilité de notification nécessite de respecter le formalisme suivant :

vérifier que le prestataire remplit bien les conditions posées par le cadre européen et mentionner son identité dans l’acte ;

l’acquéreur non professionnel doit exprimer dans l’acte son consentement à recevoir une lettre recommandée électronique ;

l’acquéreur doit fournir une adresse courriel personnelle ;

indiquer dans l’acte si l’acquéreur peut lui-même se rétracter par lettre recommandée électronique ;

mentionner dans l’acte l’accord du vendeur sur la possibilité de se rétracter par lettre recommandée électronique ;

les codes de réception de la lettre recommandée doivent être remis en main propre à chaque acquéreur. S’ils ne sont pas remis le jour du rendez-vous de l’avant-contrat, ils devront être adressés à chacun des acquéreurs par lettre recommandée avec demande d’avis de réception (en aucun cas par courriel).

Conclusion

Parions que le développement de la pratique de la lettre recommandée électronique par les notaires viendra tarir le contentieux de la purge des délais de rétractation et de réflexion via la lettre recommandée avec demande d’avis de réception papier, la remise devant se faire sur une adresse courriel personnelle.

4263 – Propos conclusifs. – En résumé, le contentieux lié au formalisme de l’application et de la purge formelle des délais de rétractation et de réflexion ne tarit pas en raison de l’imprécision des textes de loi, source d’insécurité juridique. Il est conseillé aux praticiens de bien suivre l’évolution de la jurisprudence sur le sujet et de ne surtout pas procéder à une application extensive « par précaution » du délai de rétractation ou de réflexion, au risque de voir leur responsabilité engagée par le vendeur544.

Dans tous les cas « incertains », il convient de se prémunir de la preuve de l’accord du vendeur quant à la purge extensive du délai de rétractation ou de réflexion, et d’en analyser les conséquences sur l’ensemble du processus contractuel545.

Enfin nous invitons les praticiens, d’une part, à une grande précision dans la rédaction des clauses des avant-contrats de vente afin de se prémunir de tout litige à ce sujet et, d’autre part, à une explication précise des textes dans le cadre de leur devoir de conseil.

Au-delà de la protection de l’acquéreur-emprunteur et de la faculté pour ce dernier de rétracter son consentement à l’acquisition d’un bien immobilier, le législateur a une nouvelle fois renforcé la protection de l’acquéreur en adoptant la loi Alur, loi consumériste, dont l’un des volets tend à protéger, cette fois-ci, l’acquéreur-consommateur de lots de copropriété.

Section III – La loi Alur : la protection par l’information préalable renforcée de l’acquéreur d’un lot de copropriété

4264 La loi no 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite « loi Alur », publiée le 26 mars, est venue modifier en profondeur le régime de la vente de lots de copropriété. Elle se traduit par une multiplication des informations et documents à fournir à l’acquéreur d’un lot de copropriété et vise, au travers de l’acquéreur, la protection des copropriétés. Cette réforme, censée mieux informer l’acquéreur dans un but de sécurité et transparence, a bouleversé la pratique des notaires et n’a pas été sans influence sur le déroulement des ventes immobilières, et notamment un ralentissement des transactions. Dès lors, de nombreuses mesures s’imposent en cas de vente d’un lot ou d’une fraction de lot d’un immeuble soumis au statut de la copropriété. Ces mesures entraînent un renforcement du formalisme d’information (Sous-section I), ainsi qu’un renforcement des obligations de contrôle des notaires (Sous-section II).

Sous-section I – Un nouveau renforcement du formalisme d’information

4265 – Champ d’application. – L’obligation d’information de l’acquéreur d’un lot de copropriété imposée par l’article L. 721-2 du Code de la construction et de l’habitation s’applique dans le cas de « vente d’un lot ou d’une fraction de lot ou à la cession d’un droit réel immobilier relatif à un lot ou à une fraction de lot d’un immeuble bâti à usage total ou partiel d’habitation et soumis au statut de la copropriété ».

L’obligation ne s’applique qu’en cas de « vente » et ne peut s’étendre à d’autres opérations à titre onéreux (échange, dation en paiement, etc.). Elle s’applique également « en cas de cession d’un droit réel immobilier relatif à un lot », et donc, à titre d’exemple, dans le cas de cession à titre onéreux d’un usufruit, d’un droit d’usage et d’habitation, d’un droit de superficie, sur un lot ou fraction de lot, ou encore en cas de cession de droit indivis.

Les lots ou les fractions de lots doivent dépendre d’un immeuble soumis au statut de la copropriété. La loi ne s’applique donc pas au lot volume. L’immeuble doit être édifié en totalité et deux lots doivent appartenir à des copropriétaires différents, ce qui exclut la vente en l’état futur d’achèvement de l’obligation.

Concernant « l’usage total ou partiel d’habitation », la doctrine dominante considère qu’il convient de se référer à l’affectation de l’immeuble dans sa globalité et non pas à celui du seul lot vendu546.

Cette interprétation peut prendre appui sur les travaux parlementaires547.

Dans le cas d’un immeuble « à usage partiel d’habitation » (immeuble mixte à usage commercial ou d’habitation ou à usage professionnel et d’habitation), toutes les ventes de lots entrent donc dans le champ d’application de l’article L. 721-2 du Code de la construction et de l’habitation, quelle que soit la personnalité de l’acquéreur, et quelle que soit l’affectation du lot vendu (et donc même s’il s’agit d’un lot à usage professionnel).

Par contre, si le lot (ou la fraction de lot) vendu dépend d’un immeuble affecté dans sa totalité à un autre usage que l’habitation, l’article L. 721-2 ne s’applique pas548.

Ici seule la destination de l’immeuble est prise en considération, au contraire des lois SRU et Scrivener qui combinent la destination de l’immeuble et la qualité de l’acquéreur. De plus, l’immeuble à usage mixte est concerné alors que dans la loi SRU il en est exclu, ce qui entraîne une fragmentation de la législation dont découlent des difficultés d’application, source de contentieux et de responsabilité pour les praticiens.

Contenu de l’obligation d’information. L’article L. 721-2, II du Code de la construction et de l’habitation énumère les documents qui doivent être annexés à la promesse de vente en vue de l’information de l’acquéreur.

Les documents à produire sont de trois types :

les documents juridiques ;

les documents d’ordre financier ;

les documents relatifs à l’état de l’immeuble.

4266 – Les documents juridiques à produire et remettre. – Les documents relatifs à l’organisation de l’immeuble comprennent, selon l’article L. 721-2, II, 1o du Code de la construction et de l’habitation : la fiche synthétique de la copropriété, le règlement de copropriété et l’état descriptif de division ainsi que les actes les modifiant s’ils ont été publiés et les procès-verbaux des assemblées générales des trois dernières années.

4267 – Fiche synthétique. – Cette fiche regroupe les données financières et techniques essentielles relatives à la copropriété d’immeubles affectés pour partie ou en totalité à usage d’habitation et doit être mise à jour chaque année par le syndic qui doit également la mettre à disposition des copropriétaires.

Il est à noter que le défaut de réalisation de la fiche synthétique est un motif de révocation du syndic.

Les contrats de syndic doivent prévoir obligatoirement une pénalité financière forfaitaire automatique à l’encontre du syndic chaque fois que celui-ci ne met pas la fiche synthétique à disposition d’un copropriétaire dans un délai de quinze jours à compter de la demande. Cette pénalité est déduite de la rémunération du syndic lors du dernier appel de charges de l’exercice.

Les dispositions concernant la « fiche synthétique de la copropriété » ne sont pas applicables aux syndics administrant des immeubles à destination totale autre que l’habitation549.

4268 – Règlement de copropriété et état descriptif de division. – Le texte n’exige la production des actes concernés (règlement de copropriété / état descriptif de division) et de leurs actes modificatifs que s’ils ont été publiés. La raison d’être de cette disposition est probablement que les documents non publiés ne sont pas opposables à l’acquéreur. Dans la pratique, il est conseillé de solliciter un état hors formalité afin de vérifier les actes publiés, le syndic n’étant généralement pas en mesure de produire les actes uniquement publiés.

Mais l’adage « Trop d’information tue l’information » prend ici tout son sens. Une des mesures de simplification du dispositif Alur pourrait être de limiter l’information aux actes modificatifs affectant la situation des seuls lots vendus550.

En effet, suivant l’ancienneté de la copropriété, les actes modificatifs peuvent avoir été très nombreux. Le vendeur est donc amené à faire des démarches longues et coûteuses pour obtenir les documents publiés. Parmi ces documents, qui peuvent représenter un volume considérable, nombre d’entre eux ne présentent aucun intérêt pour l’acquéreur.

À ce sujet le gouvernement, au travers d’une réponse ministérielle publiée au Journal officiel le 15 septembre 2016, a refusé de modifier l’ordonnance no 2015-1075 du 27 août 2015 relative à la simplification des modalités d’information des acquéreurs au motif « que la transmission du règlement de copropriété et de l’état descriptif de division, s’agissant de documents régissant les rapports entre copropriétaires, permet une complète information du futur acquéreur afin d’éviter l’émergence de litiges ». Cette réponse, insatisfaisante pour les praticiens, mériterait à notre sens, après plusieurs années d’application du dispositif, d’être reconsidérée dans le but d’améliorer les délais de réalisation des transactions sans pour autant compromettre la sécurité juridique des ventes.

4269 – Procès-verbaux des assemblées générales des trois dernières années. – La loi Alur est venue consacrer la pratique antérieure consistant à fournir à l’acquéreur une copie des procès-verbaux des assemblées générales des trois dernières années.

Le texte précise que les procès-verbaux doivent être remis à l’acquéreur « sauf lorsque le copropriétaire vendeur n’a pas été en mesure d’obtenir ces documents auprès du syndic ».

En pratique, le copropriétaire vendeur devra se prémunir de la preuve des démarches accomplies auprès du syndic (lettre recommandée, mise en demeure) et restées sans résultat. Les simples déclarations à l’acte sont nécessaires, mais ne suffisent pas.

4270 – Les documents d’ordre financier. – Dans sa nouvelle rédaction, issue de l’ordonnance du 27 août 2015 précitée, l’article L. 721-2, II, 2o du Code de la construction et de l’habitation reprend la liste des informations financières à fournir. Elles concernent le montant des charges courantes du budget prévisionnel et des charges hors budget prévisionnel payées par le copropriétaire vendeur au titre des deux exercices comptables précédant la vente, les sommes susceptibles d’être dues au syndicat des copropriétaires par l’acquéreur, l’état global des impayés de charges au sein du syndicat et de la dette vis-à-vis des fournisseurs, ainsi que les renseignements sur le fonds de travaux.

Le texte prévoit une exception lorsque le syndicat de copropriétaires relève du deuxième alinéa de l’article 14-3 de la loi du 10 juillet 1965. Cet article vise les syndicats comportant moins de dix lots à usage de logements de bureaux ou de commerces, et dont le budget moyen sur une période de trois exercices consécutifs est inférieur à 15 000 €. Dans ce cas, il n’y a donc pas lieu de produire, lors de la promesse de vente, un document apportant à l’acquéreur les renseignements ci-dessus énoncés.

Il est à noter que l’ordonnance du 27 août 2015 a précisé que les informations financières mentionnées à l’article L. 721-2, II, a, c, et d du Code de la construction et de l’habitation doivent être « à jour des informations soumises à l’assemblée générale annuelle chargée d’approuver les comptes précédant la signature de la promesse de vente ».

Il n’y a donc pas lieu de se préoccuper du cas où une nouvelle assemblée générale se tiendrait entre la date de signature de la promesse de vente et celle de la signature de l’acte authentique, ce qui pourrait amener une modification des « informations financières » fournies à l’acquéreur551.

4271 – La pratique du « pré-état daté ». – La loi ne vise que les « documents » relatifs à la situation financière de la copropriété et du copropriétaire vendeur et non un document informatif qu’il serait de la responsabilité du syndic de remplir552.

Dans la pratique, la production d’un « pré-état daté » complété par le syndic et contenant la synthèse des informations à fournir s’est imposée.

Cette procédure, créée par les praticiens, permet une simplification du texte en respectant son esprit.

Une grande majorité de syndics ont accepté de délivrer ce document même s’il n’a pas d’existence légale ni réglementaire.

Le pré-état daté a d’ailleurs fait l’objet d’une critique par l’intermédiaire d’une question à Mme la Ministre du Logement par le député M. Michel Zumkeller553. La réponse ministérielle qui a suivie est venue préciser que « seul l’état daté, prévu par l’article 10-1 de la loi no 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, et décrit par l’article 5 du décret du 17 mars 1967 d’application de cette loi, constitue un document exigible préalablement à la vente d’un lot de copropriété », et que « le dispositif prévu, par une simplification des informations à transmettre, devrait ainsi rendre caduque la pratique d’établissement du « pré-état daté » et de son actualisation ».

À ce jour, aucune ordonnance n’a été prise en ce sens.

Dès lors, dans le cas où un syndic refuserait de délivrer ce pré-état daté, l’acte devrait être reçu sur production par le vendeur d’un ensemble de documents qui lui ont déjà été communiqués dans le cadre de la vie de la copropriété. Ces documents sont, dans la pratique, en sa possession.

Il s’agit, d’une part, des annexes de l’ordre du jour notifié à chaque copropriétaire convoqué à l’assemblée générale appelée à approuver les comptes et, d’autre part, des appels de charges reçus par le copropriétaire vendeur au cours des deux exercices précédant la vente.

Focus

Ces documents, souvent volumineux, n’étant bien souvent pas conservés par les vendeurs, il serait donc souhaitable que le gouvernement ne rende pas caduque mais au contraire officialise la pratique du pré-état daté par voie d’ordonnance, ce document étant un gage de sécurité juridique dans la transmission des informations nécessaires au consentement éclairé de l’acquéreur.

4272 – Les documents relatifs à l’état de l’immeuble. – Les documents relatifs à l’état de l’immeuble comprennent le carnet d’entretien et éventuellement le nouveau diagnostic technique global.

4273 – Le carnet d’entretien. – Il est établi, conservé et mis à jour par le syndic. Il permet à l’acquéreur d’apprécier l’état technique de l’immeuble, au travers des travaux effectués dans le passé et ceux prévus ou nécessaires à l’avenir.

Le carnet d’entretien mentionne notamment554 :

les références des contrats d’assurance de l’immeuble souscrits par le syndicat des copropriétaires, ainsi que la date d’échéance de ces contrats ;

l’année de réalisation des travaux importants, tels que le ravalement de façades, la réfection des toitures, le remplacement de l’ascenseur, de la chaudière ou des canalisations, ainsi que l’identité des entreprises ayant réalisé les travaux ;

la référence des contrats d’assurance dommages-ouvrages souscrits pour le compte du syndicat des copropriétaires, dont la garantie est en cours ;

s’ils existent, les références des contrats d’entretien et de maintenance des équipements communs, ainsi que la date d’échéance de ces contrats ;

s’il existe, l’échéancier du programme pluriannuel de travaux décidé par l’assemblée générale des copropriétaires ;

sur décision de l’assemblée générale des copropriétaires, des informations complémentaires sur l’immeuble, telle que celles relatives à sa construction ou celles relatives aux études techniques réalisées.

4274 – Diagnostic technique global. – L’article L. 731-1 du Code de la construction et de l’habitation énonce qu’afin d’assurer l’information des copropriétaires sur la situation générale de l’immeuble et, le cas échéant, aux fins d’élaboration d’un plan pluriannuel de travaux, l’assemblée générale des copropriétaires se prononce, à la majorité de l’article 24 de la loi no 65-557 du 10 juillet 1965, sur la question de faire réaliser par un tiers, disposant de compétences précisées par décret, un diagnostic technique global.

Ce diagnostic ne concerne que les immeubles à destination partielle ou totale d’habitation relevant du statut de la copropriété555.

Ce diagnostic technique global comporte556 :

1o une analyse de l’état apparent des parties communes et des équipements communs de l’immeuble ;

2o un état de la situation du syndicat des copropriétaires au regard des obligations légales et réglementaires au titre de la construction et de l’habitation ;

3o une analyse des améliorations possibles de la gestion technique et patrimoniale de l’immeuble ;

4o un diagnostic de performance énergétique de l’immeuble tel que prévu aux articles L. 134-3 ou L. 134-4-1 du Code de la construction et de l’habitation.

L’article L. 721-2, II, 5o du Code de la construction et de l’habitation demande que soient remises à l’acquéreur « les conclusions du diagnostic global mentionnées au dernier alinéa de l’article L. 631-1 » du même code. Cet article indique que le diagnostic global « fait apparaître une évaluation sommaire du coût et une liste de travaux nécessaires à la conservation de l’immeuble, en précisant notamment ceux qui devraient être menés dans les dix prochaines années ». C’est donc cette « liste des travaux nécessaires à la conservation de l’immeuble » accompagnée d’une évaluation sommaire et de leur programmation qui doit être communiquée à l’acquéreur.

4275 – Notice d’information. – Une notice d’information « relative aux droits et obligations des copropriétaires ainsi qu’au fonctionnement des instances du syndicat de copropriété »557 doit également être remise à l’acquéreur.

L’arrêté qui doit en fixer le contenu n’est toujours pas paru à ce jour.

Il est à noter que la non-production de ces trois documents lors de la signature de la promesse de vente n’entraîne pas la suspension du délai de rétractation édictée par l’article L. 721-3 du Code de la construction et de l’habitation ci-après visé.

4276 – Les cas d’exception à la remise des documents à remettre à l’acquéreur. – Trois exceptions sont prévues par l’article L. 721-2, II du Code de la construction et de l’habitation en ce qui concerne les documents à produire à l’acquéreur. Elles concernent les « petites copropriétés » (moins de dix lots à usage de logements de bureaux ou de commerces et dont le budget prévisionnel moyen sur une période de trois exercices consécutifs est inférieur à 15 000 €), le cas où l’acquéreur est déjà copropriétaire d’un lot dans la même copropriété, et enfin le cas de l’acquisition d’un lot annexe.

Pour les petites copropriétés : les informations financières de l’article L. 721-2, II, 2o b du Code de la construction et de l’habitation ne sont pas exigées, savoir :

l’indication des sommes susceptibles d’être dues au syndicat des copropriétaires par l’acquéreur ;

l’état global des impayés de charges au sein du syndicat et de la dette vis-à-vis des fournisseurs.

Pour l’acquéreur déjà copropriétaire d’un lot dans la même copropriété, seules les informations financières prévues à l’article L. 721-2, II, 2o précité doivent être remises à l’acquéreur.

Enfin, lors de l’acquisition d’un lot annexe doivent seulement être remis à l’acquéreur le règlement de copropriété et l’état descriptif de division, ainsi que les actes les modifiant, s’ils ont été publiés ; les informations financières prévues par l’article L. 721-2, II, 2o et la fiche synthétique.

L’article L. 721-2, II, 5o, alinéa 4 a précisé qu’est « notamment considéré comme un lot annexe (…) un emplacement de stationnement ou un local tel qu’une cave, un grenier, un débarras, un placard, une remise, un garage ou un cellier ».

4277 – De l’annexion à la remise des documents. – L’article L. 721-2 du Code de la construction et de l’habitation a imposé, dans sa rédaction initiale, d’annexer onze documents à la promesse de vente ou à défaut à l’acte authentique de vente.

Confrontés à des textes mal rédigés, les praticiens ont alerté les pouvoirs publics qui ont finalement envisagé une nouvelle réforme. L’article 15, I de la loi du 20 décembre 2014 a autorisé le gouvernement à « prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi pour simplifier les modalités d’information des acquéreurs prévues aux articles L. 721-2 et L. 721-3 du Code de la construction et de l’habitation et en préciser le champ d’application ».

C’est en vertu de ce texte qu’est intervenue l’ordonnance no 2015-1075 du 27 août 2015558, qui a modifié les articles L. 721-2 et L. 721-3 du Code de la construction et de l’habitation, en supprimant l’obligation d’annexer les documents « à la promesse de vente ou, à défaut de promesse, à l’acte authentique de vente » pour être remplacée par « une remise à l’acquéreur, au plus tard à la date de signature de la promesse ». En outre, la remise des informations sur support papier n’est plus la seule modalité autorisée.

4278 – Modalités de communication des documents. – La remise des documents exigés par la loi doit « intervenir » au plus tard à la date de signature de la promesse559. Il est donc indispensable que le rédacteur de l’acte soit en possession de l’ensemble des documents énumérés par l’article L. 721-2, II du Code de la construction et de l’habitation avant la signature de l’avant-contrat.

Selon l’article L. 721-2, II, dernier alinéa, dans sa rédaction issue de l’ordonnance précitée du 27 août 2015, la remise des documents « peut être effectuée sur tout support et par tout moyen, y compris par un procédé dématérialisé, sous réserve de l’acceptation expresse par l’acquéreur ».

La remise sur support dématérialisé de type CD-Rom ou clé USB doit faire l’objet d’une vérification du contenu du support avec l’acquéreur avant remise, afin de se prémunir de sa mauvaise foi sur la qualité du support. L’envoi par courrier électronique simple est à proscrire, la preuve de la remise effective n’étant pas possible560.

En cas de contestation, la charge de la preuve de la remise des documents exigés par la loi pèse sur le vendeur, tenu d’une obligation de délivrance.

L’article L. 721-2, II, dernier alinéa du Code de la construction et de l’habitation distingue deux cas :

si la promesse de vente est établie en la forme authentique, l’acquéreur attestera de la remise « par sa simple signature ». Il reconnaîtra donc expressément dans cette promesse que les documents (dont l’énumération détaillée sera faite) lui ont été remis le jour même de la promesse, soit à une date antérieure, en indiquant sous quelle forme ;

si la promesse de vente est établie sous seing privé, l’acquéreur doit alors attester de cette remise « dans un document qu’il signe et qu’il date de sa main »561. La remise s’opérera alors en main propre et contre émargement. L’énumération détaillée des documents devra figurer dans l’attestation. Les mentions ci-dessus visées concernant le support dématérialisé devront y figurer.

Conseil pratique

Il résulte de l’analyse des textes que la pratique de la lecture en rendez-vous des documents obligatoires, en dehors de toute remise, qui sont ensuite joints au courrier de purge du délai de rétractation est à proscrire. En effet, le texte de loi précise qu’il s’agit d’une remise devant intervenir au plus tard à la date de signature de la promesse. La lettre recommandée électronique pourra bien entendu être utilisée et devra être adressée à l’acquéreur avant la signature de la promesse de vente, mais le problème de la remise en main propre de la carte à codes aux clients se posera.

Dans l’hypothèse d’un envoi des pièces après la signature de l’avant-contrat par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, cet envoi étant assimilé à une remise tardive, le notaire devra se prémunir de la preuve de l’envoi des pièces conformément à la procédure de l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation.

Il est conseillé de faire figurer le détail des pièces envoyées dans le courrier de notification du délai de rétractation.

4279 – Sanction d’une remise tardive dans le cas d’un avant-contrat soumis au délai de rétractation de l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation. – La sanction ne s’applique qu’en cas de communication tardive des documents suivants : les documents relatifs à l’organisation de l’immeuble et les documents d’ordre financier, savoir : la fiche synthétique, le règlement de copropriété et l’état descriptif de division et les actes les modifiant, les procès-verbaux des trois dernières années, et le pré-état daté.

La sanction d’une remise des documents postérieure à la date de la signature de la promesse est la suspension du délai de rétractation prévu par l’article L. 271-1 du même code. Ce délai ne court alors qu’à compter du lendemain de la communication à l’acquéreur des documents et informations visés par ce texte. Dans ce cas, cette « communication » doit être réalisée selon les modalités de notification ou de remise de la promesse ou de l’acte authentique de vente prévue à l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation (V. supra, nos a4243 et s., les développements sur la loi SRU).

4280 – Le cas d’un avant-contrat non soumis au délai de rétractation de l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation ou d’omission de documents non visés par le texte de l’article L. 721-3. – La sanction prévue par l’article L. 721-3 ne concerne pas les ventes ne donnant pas ouverture au droit de rétractation édicté par l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation, à savoir : les ventes de lots à usage d’habitation consenties à un acquéreur considéré comme professionnel, les ventes de lots affectés pour partie à usage d’habitation et pour partie à un autre usage (lots à usage mixte), les ventes de lots affectés à un autre usage que l’habitation (commercial, professionnel, etc.).

Cette sanction ne joue pas non plus dans les cas d’omission de documents non visés expressément par le texte, ni dans les cas de dispense prévus par la loi (petites copropriétés, acquéreur déjà copropriétaire dans l’ensemble immobilier, lot annexe).

Qu’en est-il si, dans ce cas, les documents sont remis tardivement ou omis ? Aucune sanction n’est prévue par les textes. Il appartiendra à l’acquéreur qui voudra mettre en cause la validité de la vente immobilière d’invoquer un vice du consentement ou un manquement aux obligations du vendeur (obligation de délivrance ou d’information). La responsabilité du notaire pourra également être engagée.

4281 – Absence des documents et non remise. – Il n’est pas rare dans la pratique de se trouver face à des copropriétés où les assemblées générales ne sont pas tenues et les obligations comptables non respectées par le syndic bénévole.

Dans ce cas, le vendeur devra soit œuvrer pour la reconstitution des documents manquants, soit mettre en demeure le syndic de les lui fournir. Il lui appartiendra de se prémunir de la preuve qu’il a effectué ces recherches sans succès.

L’article L. 721-2 du Code de la construction et de l’habitation prévoit une dispense à propos des procès-verbaux d’assemblée générale « lorsque le copropriétaire vendeur n’a pas été en mesure d’obtenir ces documents auprès du syndic ». Là encore, le vendeur doit apporter la preuve qu’il lui a été impossible d’obtenir ces documents. En pratique, une mise en demeure par lettre recommandée avec demande d’avis de réception restée sans réponse pourra être annexée à l’avant-contrat afin de permettre la purge du délai de rétractation. À noter qu’une simple déclaration dans l’acte ne sera pas suffisante.

Qu’en est-il si les documents ne sont jamais fournis ? Un arrêt de la Cour de cassation du 8 juillet 2014 apporte une réponse à cette question. Selon cette décision, si l’acquéreur signe l’acte authentique de vente sans émettre de réserves, on doit considérer qu’il a renoncé à se prévaloir de l’irrégularité de la purge du droit de rétractation562.

Conseil pratique

Il est conseillé d’établir une clause dans l’acte authentique relatant les diligences effectuées par le vendeur ou le notaire pour obtenir les documents et de faire renoncer l’acquéreur à l’obtention desdits documents et signature sans réserve de l’acte.

4282 – Absence de syndic. – Dans l’hypothèse où les documents existent mais que la copropriété n’est pas dotée d’un syndic, il conviendra de provoquer la nomination d’un syndic. Notons à ce sujet que la loi Macron du 6 août 2015 a créé un article 17 de la loi du 10 juillet 1965 qui permet à tout copropriétaire de convoquer une assemblée générale aux fins de nomination d’un syndic.

Au-delà de ce renforcement de l’information à délivrer à l’acquéreur au stade de l’avant-contrat, la loi dite « Alur » est venue accroître les obligations de contrôle des notaires dans un but de protection, au-delà de l’acquéreur, des copropriétés.

Sous-section II – Le renforcement des obligations de contrôle des notaires
§ I – L’obligation d’immatriculation des copropriétés

4283 – Une obligation à vertu informative. – L’article 52 de la loi Alur crée un registre d’immatriculation des copropriétés, lequel est destiné, selon les termes du nouvel article L. 711-1 du Code de la construction et de l’habitation, à « faciliter la connaissance des citoyens et des pouvoirs publics sur l’état des copropriétés et la mise en œuvre des actions destinées à prévenir la survenance des dysfonctionnements ». Cette immatriculation doit être réalisée soit au moment de la mise en copropriété par le notaire563, soit, dans les autres cas, par le syndic564.

Le registre d’immatriculation des copropriétés est tenu par l’Agence nationale de l’habitat (Anah) et est accessible via un nouveau site internet : www.registre-coproprietes.gouv.fr.

Cette obligation d’immatriculation ne s’applique qu’aux immeubles à destination partielle ou totale d’habitation. Il convient de se référer à la destination figurant dans le règlement de copropriété.

Cette obligation d’immatriculation ajoute une formalité supplémentaire au moment de la vente.

En effet, le nouvel article L. 711-5 du Code de la construction et de l’habitation impose que : « Tout acte authentique de vente devant notaire relatif à un lot de copropriété comporte la mention du numéro d’immatriculation de la copropriété ». Le notaire doit donc s’assurer que cette immatriculation a bien eu lieu. L’alinéa 2 précise qu’« en l’absence de syndic désigné ou lorsque la mise en demeure mentionnée à l’article L. 711-6 est restée sans effet au terme d’un délai d’un mois, le notaire chargé de l’établissement de l’acte de vente procède d’office à l’immatriculation du syndicat de copropriétaires », l’alinéa 3 ajoutant que « les frais ainsi engagés par le notaire sont supportés par le syndic, ou, si le syndic n’est pas rémunéré pour l’exercice de son mandat, par le syndicat ». Enfin, le notaire doit aussi informer l’établissement public chargé de la tenue du registre de toute erreur qu’il pourrait constater.

4284 – Absence d’immatriculation de la copropriété. – Dans le cas d’une copropriété non immatriculée au stade de l’avant-contrat, la fiche synthétique ne sera pas fournie par le syndic, car elle doit contenir le numéro d’immatriculation.

Dans ce cas, l’avant-contrat pourra être signé mais la purge du délai de rétractation ne pourra être effectuée.

Le notaire ou le vendeur doit adresser une mise en demeure au syndic de s’exécuter dans le mois par lettre recommandée avec demande d’avis de réception565.

Modèle de courrier de mise en demeure566

« Madame, Monsieur,

Ayant été chargé de la vente d’un lot dans l’immeuble en copropriété que vous administrez, situé à…, rue… no …, j’ai pu constater que le syndicat des copropriétaires n’était pas immatriculé.

Conformément aux dispositions des articles L. 711-5 et L. 711-6 du Code de la construction et de l’habitation, je vous mets en demeure de bien vouloir procéder à cette immatriculation.

Vous voudrez bien m’indiquer par retour les suites que vous entendez réserver à ma demande et le délai que vous pensez être nécessaire pour obtenir l’immatriculation, étant précisé que le processus de vente est actuellement suspendu, dans l’attente de cette immatriculation, dont la mention doit figurer dans l’acte authentique de vente (CCH, art. L. 711-5, al. 1er).

Je vous rappelle que si la présente mise en demeure reste sans effet après expiration d’un délai d’un mois, je procéderai moi-même à l’immatriculation du syndicat, comme la loi me l’impose (CCH, art. L. 711-5, al. 2). Les frais engagés seront alors supportés par vous personnellement [si le syndic n’est pas rémunéré, indiquer : les frais engagés seront alors supportés par le syndicat que vous administrez].

Il me paraît préférable que cette immatriculation soit opérée par vos soins, car vous disposez de tous les éléments permettant d’y procéder.

Je suis à votre disposition pour que nous examinions ensemble, si vous le souhaitez, les suites à donner à cette obligation légale.

Veuillez recevoir… »

À défaut de réponse du syndic dans le mois suivant l’avis de réception, le notaire procède à l’immatriculation d’office de la copropriété en se connectant au site internet www.registre-coproprietes.gouv.fr. Lors de sa première connexion, il devra créer un compte pour son office.

Pour les modalités d’immatriculation d’office et les informations à transmettre au teneur du registre, le notaire devra se reporter à l’article R. 711-11, II du Code de la construction et de l’habitation.

Les frais de cette immatriculation d’office avancés par le notaire pourront être récupérés à l’encontre du syndic ou, si le syndic est bénévole, à l’encontre du syndicat concerné.

L’astreinte à l’encontre du syndic visée par les textes ne peut s’appliquer qu’en cas de mise en demeure prévue par l’article L. 711-6, II du Code de la construction et de l’habitation, savoir celle délivrée par le teneur du registre des immatriculations567.

Dès réception du numéro d’immatriculation, le notaire devra le communiquer au syndic et le mettre en demeure de lui fournir la fiche synthétique de la copropriété complétée.

En l’absence de syndic désigné, le notaire est tenu de procéder à l’immatriculation d’office du syndicat des copropriétaires. En pratique, dans ce cas, il est conseillé de provoquer la désignation d’un syndic qui se chargera de l’immatriculation.

Le notaire qui omet d’accomplir les diverses obligations en matière d’immatriculation des syndicats n’encourt aucune sanction spécifique. Néanmoins, sa responsabilité pourra être recherchée en cas de faute démontrée et de préjudice en relation avec la faute commise.

Conseil pratique

Dans la pratique, il est constaté que cette obligation ralentit les transactions car il est nécessaire d’attendre l’expiration de la mise en demeure faite au syndic pour procéder d’office à l’immatriculation. De plus, il convient de récolter toutes les informations devant figurer au registre et énumérées à l’article L. 711-2, II et III du Code de la construction et de l’habitation, lesdites informations étant généralement en possession du syndic, et non du notaire.

§ II – Les informations relatives au candidat acquéreur

4285 – Empêcher l’acquéreur, déjà copropriétaire et non à jour de ses charges, d’acquérir. – La loi Alur a ajouté un II à l’article 20 de la loi no 65-557 du 10 juillet 1965, dans le but d’empêcher l’entrée dans la copropriété de candidats acquéreurs déjà copropriétaires dans l’immeuble, et qui ne sont pas à jour de leurs charges.

Là encore, ce contrôle s’opère par l’intermédiaire du notaire chargé de la vente.

Selon l’article 20, II précité, la notification doit être faite par le notaire (en présence de deux notaires, il doit s’agir de celui de l’acquéreur). Cette notification, adressée au syndic de la copropriété, doit mentionner le nom du candidat acquéreur ou le nom des mandataires sociaux et des associés si le candidat acquéreur est une société civile immobilière ou une société en nom collectif, ainsi que le nom de leurs conjoints ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité.

La notification est faite au syndic de copropriété après que, le cas échéant, le titulaire du droit de préemption urbain prévu par l’article L. 211-4, dernier alinéa du Code de l’urbanisme a renoncé à l’exercice de son droit, et préalablement à l’établissement de l’acte authentique de vente.

Il n’est donc pas envisageable de procéder à cette notification de manière anticipée au stade de l’avant-contrat au syndic en raison de la durée de validité d’un mois de l’état daté.

La notification fait courir le délai d’un mois imparti au syndic pour répondre. Dans ce délai d’un mois, le syndic doit délivrer au notaire un certificat datant de moins d’un mois attestant que soit les personnes dénommées dans la notification ne sont pas copropriétaires de l’immeuble concerné par la mutation, soit, si l’une de ces personnes est copropriétaire, qu’elle n’a pas fait l’objet d’une mise en demeure de payer du syndic restée infructueuse depuis plus de quarante-cinq jours.

Si l’une des personnes dénommées dans la notification a fait l’objet d’une mise en demeure restée infructueuse depuis plus de quarante-cinq jours, le notaire « notifie aux parties l’impossibilité de conclure la vente ». L’acquéreur a alors la possibilité de s’acquitter de sa dette dans un délai de trente jours à compter de la notification qui lui est adressée par le notaire.

Si aucun certificat attestant du règlement des charges n’est produit à l’issue de ce délai, l’avant-contrat est réputé nul et non avenu aux torts de l’acquéreur. Il en résulte une interrogation sur le sort de l’indemnité d’immobilisation : peut-elle être conservée par le vendeur ? Le texte de loi ne l’envisage pas expressément. Selon certains auteurs, la nullité envisagée de l’avant-contrat par la loi touche l’ensemble de la convention, en ce compris l’indemnité d’immobilisation568.

Au regard des difficultés engendrées par ce texte, l’Institut d’études juridiques du Conseil supérieur du notariat a conseillé aux notaires d’avertir les parties des conséquences de ces nouvelles dispositions tant sur le plan juridique (nullité éventuelle de l’avant-contrat) que d’un point de vue pratique (allongement des délais de constitution du dossier de vente). Il est également conseillé de faire figurer à l’avant-contrat une clause envisageant le sort de l’indemnité d’immobilisation dans ce cas de nullité spécifique. Il s’agit de prévoir, selon Pierre Dauptain et Alain Robert, « un nouveau séquestre de la somme considérée dans le cas où la promesse viendrait à être annulée, et cela dans le cadre d’une convention insérée dans l’acte mais distincte de la promesse proprement dite à laquelle elle survivra ».

Conclusion

Là encore, force est de constater que ce contrôle supplémentaire ne fait qu’alourdir le processus de vente de lot de copropriété, et l’on peut d’interroger sur sa réelle utilité. En outre, la sanction peut être aisément contournée puisque les formes sociales autres que la société civile immobilière ou la société en nom collectif (SARL, EURL, SAS, etc.) ne sont pas visées par le texte.

§ III – La consultation du casier judiciaire

4286 – La lutte contre l’habitat indigne. – La loi Alur a prévu une peine complémentaire, frappant les personnes physiques, consistant en l’interdiction d’acheter pour une durée de cinq ans au plus (délai de dix ans prévu par la loi Élan) un bien immobilier à usage d’habitation à d’autres fins que pour l’occuper à titre personnel (c’est-à-dire pour en faire son logement). Cette peine complémentaire est susceptible d’être prononcée pour sanctionner divers délits concernant l’habitat indigne. L’interdiction d’acheter, qui ne peut frapper que des personnes physiques, s’applique non seulement aux acquisitions faites par l’auteur de l’infraction à titre personnel, mais également à celles qu’il effectuerait en tant qu’associé ou en tant que mandataire social d’une société civile immobilière ou en nom collectif qui se porterait acquéreur, ou encore aux acquisitions faites « sous forme de parts immobilières ».

4287 – Une vérification préalable à la vente pesant sur le notaire. – L’article L. 551-1 du Code de la construction et de l’habitation fait obligation au notaire chargé d’établir l’acte authentique de vente d’un bien immobilier à usage d’habitation de vérifier si l’acquéreur a fait l’objet d’une condamnation sur le fondement des textes précités.

Il doit interroger le Casier judiciaire national par l’intermédiaire de l’Association pour le développement du service notarial, placée sous le contrôle du Conseil supérieur du notariat, qui lui indiquera si l’acquéreur personne physique ou l’un des associés ou mandataires sociaux de la société civile immobilière ou en nom collectif se portant acquéreur est dans la situation visée au texte. Cette interrogation doit être effectuée, en toute hypothèse, avant l’établissement de l’acte authentique de vente. En effet, s’il apparaissait, une fois la vente intervenue, que l’acquéreur était frappé d’une interdiction d’acheter, la vente intervenue serait nulle, d’une nullité absolue, comme ayant un objet illicite et contraire à un texte d’ordre public. En outre, l’acquéreur encourrait la peine prévue à l’article 225-14 du Code pénal (jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et 150 000 € d’amende).

Dans l’hypothèse où la demande de renseignements est formulée après la signature de l’avant-contrat, il convient de faire déclarer l’acquéreur, dans l’avant-contrat, qu’il n’a fait l’objet d’aucune condamnation et d’insérer l’interrogation du casier judiciaire en condition suspensive.

Si le résultat de la consultation du fichier ne révèle aucune condamnation, il convient de l’annexer à l’acte authentique. Dans l’hypothèse d’une condamnation définitive à la peine d’interdiction d’acheter un bien immobilier à usage d’habitation, l’acte authentique ne sera pas signé et l’avant-contrat signé antérieurement sera réputé nul et non avenu aux torts de l’acquéreur, sauf à ce que ce dernier atteste dans l’acte de vente que le bien est destiné à son occupation personnelle. Dans ce cas, l’acte de vente et l’attestation doivent être notifiés à l’administration fiscale par le notaire569.

Conclusion

Là encore, l’obligation de consultation du casier judiciaire alourdit les formalités préalables à la vente pour un nombre restreint de personnes condamnées à une peine au titre de l’habitat indigne. En outre, l’interdiction peut, également dans ce cas, être aisément contournée puisque les formes sociales autres que la société civile immobilière ou la société en nom collectif (SARL, EURL, SAS, etc.) ne sont pas visées par le texte. De manière générale, ces nouvelles mesures de contrôle font peser sur les notaires un rôle de police de la copropriété aux fins de protection et plus largement de police de l’habitat qui ne leur incombe pas en leur qualité d’officier public et elles ne font que ralentir les transactions, sans en améliorer la sécurité juridique.

Après avoir réalisé un état et une analyse des dispositifs de protection de l’acquéreur dans la vente immobilière, il convient d’aborder l’évolution de l’obligation d’information pesant sur le vendeur et le rôle du notaire en la matière, en analysant deux des principales dispositions issues de la récente réforme du droit des contrats.


475) D. Montoux : JCl. Construction-Urbanisme, Vo Protection de l’acquéreur-emprunteur.
476) V. J.-L. Bergel, Les ventes d’immeubles existants, Litec, 1983 ; JCP N 8 juill. 1988, no 27.
477) Cass. 3e civ., 10 déc. 1986, no 85-16.144 : JurisData no 1986-002685. – Cass. 3e civ., 12 févr. 2014, no 12-27.182, FS-P+B+I : JurisDatano 2014-002123.
478) CA Paris, 2e ch. B, 27 mai 1987, Tran sy Don c/ SA Gebat Construction.
479) Cass. 1re civ., 10 mars 1987 : JCP N 1987, II, p. 191, obs H. Thuillier ; Defrénois 1987, art. 34078, note G. Morin ; D. 1987, 577, note G. Morin.
480) J.-L. Breger : JCP N 8 juill. 1988, no 27, 100706.
481) V. Zalewski-Sicard, Vente d’immeuble et condition suspensive d’obtention de prêt, Université de Corse, 7 avr. 2014.
482) Cass. 1re civ., 28 janv. 1992 ; Bull. civ. 1992, I, no 35.
483) Cass. 3e civ., 6 juill. 2005 : JurisData no 2005-029355.
484) Cass. 3e civ., 15 janv. 2014, no 12-28.362.
485) 107e Congrès des notaires de France, Cannes, 2011, Le financement.
486) Cass. 1re civ., 22 mai 2008 : Contrats, conc. consom. 2008, no 11, obs. Raymond.
487) CA Paris, 2e ch. B, 13 mai 1992 : JurisData no 1992-021196 ; JCP N 1993, II, p. 333, note Cl. Destame ; D. 1992, inf. rap. p. 200.
488) CA Rennes, 3 nov. 2005 : JurisData no 2005-291847.
489) Cass. 1re civ., 16 févr. 1994 : JurisData no 1994-000409 ; JCP G 1994, IV, 1043.
490) Cass. 1re civ., 22 mars 2012, no 10-25.891.
491) C. Destame : JCP N 19 nov. 1993, no 46, 101429.
492) Vente d’immeuble et protection de l’acquéreur-emprunteur (Loi du 13 juillet 1979) : JCP 1980, I, p. 1, spéc. p. 17.
493) CA Douai, 1re ch., sect. 1, 10 oct. 2011, no 10/04914.
494) Libres propos in JCP N 25 juill. 2014, no 30.
495) D. Montoux : JCl. Construction-Urbanisme, Vo Protection de l’acquéreur-emprunteur.
496) C. Coutant-Lapalus et F. Collard : JCP N 3 mai 2013, no 18, 1120.
497) Cass. 1re civ., 9 déc. 1992 : JurisData no 1992-002706. – Cass. 1re civ., 2 juin 1993 : Defrénois 1994, art. 35746, no 24, note D. Mazeaud. – Cass. 3e civ., 7 nov. 2007, no 06-17.413 : JurisData no 2007-041253.
498) Cass. 3e civ., 27 janv. 2009, no 06-15.964 : JurisData no 2009-046781.
499) Cass. 3e civ., 23 juin 2010, no 09-15.963 : JurisData no 2010-010084.
500) Cass. 3e civ., 7 nov. 2007, no 06-17.413 : JurisData no 2007-041253.
501) Cass. 1re civ., 13 nov. 1997, no 95-18.276 : JurisData no 1997-004412. – Cass. 1re civ., 19 juin 1990, no 88-16.196 : JurisData 1990-701765 ; JCP N 1991, II, p. 80. – Cass. 1re civ., 7 avr. 2009, no 08-15-896 : AJDI 2009, p. 477.
502) Cass. 3e civ., 26 mai 2010, no 09-15.317 : JurisData no 2010-007177 ; Constr.-urb. 2010, comm 107, note P. Cornille. – Cass. 3e civ., 7 nov. 2007, no 06-14.227 : JurisData no 2007-041447 ; RD imm. 2008, p. 262, obs. H. Heugas-Darraspen. – Cass. 3e civ., 12 sept. 2007, no 06-15.640 : JurisData no 2007-040336 ; Bull. civ. 2007, III, no 143 ; D. 2008, note Martin.
503) Cass. 3e civ., 16 janv. 2013, no 11-26.557 : RD imm. 2013, p. 149, obs. H. Heugas-Darraspen.
504) Cass. 1re civ., 22 juin 2017, no 16-16.672.
505) Cass. 3e civ., 19 mai 1999 : RD imm. 1999, p. 420, obs J.-Cl. Groslière.
506) Cass. 3e civ., 15 juin 2017, no 16-13.530. – Cass. 1re civ., 22 juin 2017, no 16-16.672. – Cass. 3e civ., 19 janv. 2017, no 15-17.145 : Bull. Cridon Paris 1er mai 2019, propos B. Nitot-Dorlencourt.
507) Cass. 1re civ., 13 nov. 1998 : Defrénois 1998, art. 36753-30, note J.-L. Aubert.
508) CA Orléans, 16 mai 2011 : JurisData no 2011-010164.
509) Formule proposée par B. Nitot-Dorlencourt : Bull. Cridon Paris 1er mai 2019.
510) Nice, 1986, Les garanties du financement.
511) Il existait déjà en matière de vente en l’état futur d’achèvement suite à la loi no 89-1010 du 31 décembre 1989, dite « loi Neiertz ».
512) Cass. 3e civ., 30 janv. 2008 : JCP N 2008, 11197, obs. P. Piédelièvre.
513) V. H. Périnet-Marquet : JCP N 28 juin 2002, no 26, 1390.
514) Cass. 3e civ., 12 oct. 2017, no 16-22.416, FS+P+B+I : JurisData no 2017-020083.
515) Cass. 3e civ., 4 févr. 2016, no 15-11.140, FS+P+B : JurisData no 2016-001567 ; JCP N 2016, nos 7-8, act. 303. – Cass. 3e civ., 30 janv. 2008 : Bull. civ. 2008, III, no 15 ; JCP N 2008, no 27, 1131, note H. Périnet-Marquet. – Cass. 3e civ., 12 mars 2014, no 12-16.644 : JurisData no 2014-005476.
516) Rép. min. no 63604 à M. Mey et Rép. min. no 65241 à M. Valle.
517) JOAN CR 15 oct. 2001, p. 5967.
518) D. Boulanger : JCP N 24 juin 2016, no 25, 1205.
519) JCP N 28 juin 2002, no 26, 1390.
520) Cf. H. Périnet-Marquet : JCP N 28 juin 2002, no 26, 1390.
521) Cass. 1re civ., 15 mars 2005, no 02-13.285, FS-P+B+R+I : Bull. civ. 2005, I, no 135 ; JurisData no 2005-027573.
522) Cass. 3e civ., 24 oct. 2012, no 11-18.774 : JurisData no 2012-024056.
523) Cass. 3e civ., 16 sept. 2014, no 13-20.002 : JurisData no 2014-021431 ; JCP N 2015, no 15, 1119, note J.-P. Garçon.
524) Strasbourg, mai 2015, La sécurité juridique : un défi authentique : V. 4e commission, Sécurité juridique et vente d’immeuble, no 4306, p. 895-896, par Me Cevaer et Me Daveze.
525) JCP N 2013, 1022.
526) Cass. 3e civ., 26 sept. 2007, no 06-16.187.
527) L. Leveneur : Contrats, conc. consom. janv. 2008, no 1, comm. 3.
528) CA Amiens, 19 nov. 2013, no 12/01581 : JurisData no 2013-027412.
529) CA Paris, pôle 4, ch. 1, 15 mars 2012, no 10/16659 : JurisData no 2012-005246. – CA Montpellier, 29 juin 2017, no 14/09495. – CA Orléans, 19 juin 2017, no 15/0496. – CA Douai, 14 sept. 2017, no 16/04872. – Cass. 3e civ., 8 juill. 2014, no 13-19.330 : JurisData no 2014-016479 ; JCP N 2014, no 30, act. 851. – Cass. 3e civ., 24 nov. 2016, no 15-19.073. – Cass. 3e civ., 30 janv. 2019, no 17-25.952 : JurisData no 2019-001112 ; JCP A 2019, 1111.
530) CA Lyon, 29 mars 2007 : JurisData no 2007-332349. – G. Durand-Pasquier : JCl. Construction-Urbanisme juin 2008, no 6, alerte 30.
531) G. Durand-Pasquier : Contr.-Urb. avr. 2019, no 4.
532) Cass. 3e civ., 26 janv. 2011, no 09-69.899 : JurisData no 2011-000720 ; JCP N 2011, no 11, 1102.
533) CA Douai, 13 janv. 2014, no 13/03392 : JurisData no 2014-000157. – CA Dijon, 3 sept. 2013, no 12/00962 : JurisData no 2013-023439.
534) Cass. 3e civ., 9 juin 2010, no 09-15.361 : Constr.-Urb. 2010, comm. 123, C. Sizaire ; JCP N 2010, no 29, 1248. – Cass. 3e civ., 9 juin 2010, no 09-14.503 : JurisData no 2010-009415 ; Constr.-Urb. 2010, comm. 123 ; JCP N 2010, 1248, D. Boulanger.
535) Cass. 3e civ., 12 oct. 2017, no 16-22.416, PBI : Defrénois 26 oct. 2017, no 130k4, p. 6.
536) Cass. 3e civ., 21 mars 2019, no 18-10.772, FS-PBI.
537) Cass. 3e civ., 4 déc. 2013, no 12-27.293 : JurisData no 2013-027973 ; Constr.-Urb. 2014, comm. 37, C. Sizaire. – Cass. 3e civ., 14 sept. 2017, no 16-17.856 : JurisData no 2017-021152.
538) Cass. 3e civ., 14 févr. 2018, no 17-10.514 : JurisData no 2018-001974 ; Constr.-Urb. 2018, comm. 61, C. Sizaire.
539) Cass. 3e civ., 7 avr. 2016, no 15-13.064 : JurisData no 2016-006490 ; Constr.-Urb. 2016, comm. 94.
540) Cass. 3e civ., 12 avr. 2018, no 17-13.118 : JurisData no 2018-005747.
541) L. no 2016-1321, 7 oct. 2016.
542) Règl. no 910/2014, 23 juill. 2014.
543) G. Durand-Pasquier : Constr.-Urb. avr. 2019, no 4.
544) CA Aix-en-Provence, 7 mars 2013 : JurisData no 2013-004215.
545) CA Aix-en-Provence, 13 févr. 2018, no 16/04997 : JurisData no 2018-002519.
546) H. Périnet Marquet, chron. in JCP G 2014, doctr. 441. – S. Becqué-Ickowicq, Les ventes immobilières après la loi Alur : Defrénois 2014, p. 543 et s., no 12.
547) V. JO Sénat CR 24 oct. 2013, p. 10202 et les observations du rapporteur sur l’amendement no 396 rectifié, finalement rejeté.
548) JCl. Copropriété, Fasc. 107-39, propos J. Lafond.
549) L. no 65-557, 10 juill. 1965, art. 8-2, al. 4.
550) P. Dauptain et A. Robert, Vente de lots de copropriété : une tempête baptisée Alur : JCP N 2014, 1270.
551) JCl. Copropriété, Fasc. 107-39, propos J. Lafond.
552) Ibid..
553) Question no 79469 : JOAN Q 12 mai 2015, p. 3551.
554) D. no 2001-477, 30 mai 2001, art. 3 à 5.
555) CCH, art. L. 731-1, al. 1.
556) CCH, art. L. 631-1, al. 3.
557) CCH, art. L. 721-2, II, 4o.
558) JO 28 août 2015.
559) CCH, art. L. 721-2, II, al. 1er.
560) JCl. Copropriété, Fasc. 107-39, propos J. Lafond.
561) CCH, art. L. 721-2, II, dernier al.
562) Cass. 3e civ., 8 juill. 2014, no 13-19.330 : JurisData no 2014-016479 ; JCP N 2014, no 30, act. 851.
563) CCH, art. L. 711-4, I.
564) CCH, art. L. 711-4, II.
565) CCH, art. L. 711-5, al. 2, et L. 711-6, I.
566) Modèle de J. Lafond : JCP N 23 sept. 2016, no 38, 1729 : Immatriculation des syndicats de copropriétaires : le rôle du notaire.
567) L’application de l’astreinte est laissée à l’appréciation de l’établissement teneur du registre. Elle court à compter de la fin de la mise en demeure et jusqu’à complète transmission ou actualisation des données. Elle est recouvrée comme en matière de contribution directe, au profit de l’établissement public chargé de la tenue du registre. Le montant de l’astreinte ne peut être supérieur à 20 € par lot et par semaine. Son montant ne peut être facturé par le syndic aux copropriétaires, sauf si le syndic n’est pas rémunéré pour l’exercice de son mandat (CCH, art. L. 711-6, II).
568) JCl. Copropriété, Fasc. 107-39, propos J. Lafond, préc.
569) CCH, art. L. 551-1, II.


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