CGV – CGU

Chapitre II – Un acte formaliste garant d’un consentement éclairé

Partie I – Le formalisme lié à la nature de l’acte juridique
Titre 1 – L’exigence d’un acte authentique comme mode de protection du consentement
Chapitre II – Un acte formaliste garant d’un consentement éclairé

4065 – Le formalisme comme mode d’accompagnement de la volonté. – Si, conformément au principe du consensualisme, le simple échange de consentements suffit à la formation du contrat, et ce quel que soit son mode d’expression, la loi peut dans certaines situations imposer des formalités à défaut desquelles le contrat serait nul. On est alors en présence d’un formalisme proprement dit ou direct. Souvent présenté comme un modèle concurrent du consensualisme194, le formalisme doit en réalité s’entendre comme l’accomplissement de règles de forme qui ne remplace pas la volonté, mais au contraire s’ajoute à elle afin de répondre et obéir à des préoccupations souvent plurielles : attirer l’attention d’un contractant sur la liberté de son acte, assurer la sécurité et la protection de la transaction, préconstituer la preuve du contrat, prévenir la fraude contre les tiers, favoriser la perception de l’impôt, etc. Dès lors, que le formalisme conditionne la validité, la preuve ou l’opposabilité de l’acte, les objectifs poursuivis peuvent être aisément regroupés sous la bannière de la protection : protection de la partie dite « vulnérable », en position de faiblesse ou profane par rapport à une partie contractante pouvant être qualifiée de « sachante », mais également protection des parties contre elles-mêmes, c’est-à-dire contre un engagement irréfléchi. Ainsi, à la souplesse contractuelle érigée comme clé de la fluidité des échanges commerciaux, répond une autre préoccupation tout aussi essentielle : la protection de l’équilibre contractuel.

4066 – L’acte authentique au cœur des solennités. – Pour assurer cet objectif, la loi a développé une pluralité de règles de forme en fonction du degré de protection à atteindre : ainsi, dans certains contrats, des mentions obligatoires, parfois manuscrites, seront imposées à peine de nullité de l’acte afin de renforcer la vocation d’information et d’explication des parties contractantes. Dans d’autres cas, la rédaction d’un acte écrit quelconque sera suffisante comme condition de validité de l’acte. Enfin, dans certaines situations, le législateur pourra imposer la solennité de l’authenticité comme condition de validité de l’acte. En recourant à l’acte authentique, le législateur entend ainsi que l’auteur de l’acte, ou les contractants, prennent la pleine mesure de leur engagement, qu’ils en mesurent la portée, la gravité ou encore l’étendue. C’est donc ce souhait de protection de l’intégrité du consentement et de promotion de la volonté éclairée des parties qui conduit à placer l’acte authentique – et à travers lui l’intervention de l’officier public – au cœur des solennités. Aussi le notaire – tenu au rigoureux devoir de conseil que nous venons d’étudier – sera tenu d’appeler l’attention des parties sur la portée et le sens des clauses des actes dont il s’agit, afin que chacune d’elles puisse contracter à l’aune d’un consentement éclairé. Ainsi, et comme l’a très justement développé la doctrine195, dans l’intérêt général, le recours à l’acte authentique assure une constatation officielle de l’acte et permet à l’autorité publique d’en contrôler la régularité ; dans l’intérêt des parties cette fois-ci, le recours à l’acte authentique est la meilleure garantie de la liberté du consentement. Dès lors, on comprend aisément que la loi soumette à l’exigence de l’authenticité, à titre de condition de validité de la convention, la plupart des actes les plus importants de la vie civile. On parle ainsi pour ces actes de contrats solennels : tel est notamment le cas de tous les actes du droit des personnes et de la famille (Section II), mais également des actes assurant la protection de l’acquéreur d’immeubles à construire lorsqu’ils relèvent du secteur protégé du logement et du constituant d’hypothèque conventionnelle (Section I).

Section I – La protection de l’acquéreur d’immeubles à construire et du constituant d’hypothèque conventionnelle

4067 On le sait, tout contrat de vente d’immeubles soumis aux formalités de publicité foncière doit, conformément aux dispositions de l’article 4 du décret du 4 janvier 1955, être préalablement passé en la forme authentique. Toutefois, l’inobservation de cette forme ne se traduit alors que par l’impossibilité de publier et, en conséquence, par l’inopposabilité du contrat aux tiers. Dès lors, le contrat de vente d’immeuble ne prend pas, à proprement parler, le caractère de contrat solennel, à la différence du contrat de vente d’immeubles à construire portant sur un immeuble à usage d’habitation ou à usage professionnel et d’habitation lequel, à peine de nullité, doit être établi en la forme authentique. Il conviendra dès lors d’étudier les raisons qui ont motivé le législateur à ériger en contrat solennel le contrat de vente d’immeubles à construire (Sous-section I), tout comme la constitution d’hypothèque conventionnelle (Sous-section II).

Sous-section I – L’acte authentique et la vente d’immeubles à construire

4068 – La loi du 3 janvier 1967, un modèle d’équilibre contractuel. – Faisant écho à une proposition formulée par le 63e Congrès des notaires de France en 1965196, la loi du 3 janvier 1967 instaurant la vente d’immeubles à construire – dont on a fêté il y a très peu de temps le cinquantième anniversaire197 – apparaît aujourd’hui comme un modèle de qualité législative, tant dans sa conception – articles peu nombreux, clairs et courts – que dans son application, puisqu’elle a su séduire son public par les qualités et les opportunités qu’elle offre, au point d’être qualifiée par la doctrine « d’immense succès »198. Mais la loi du 3 janvier 1967 est également vantée pour le modèle d’équilibre contractuel qu’elle constitue : elle a notamment su répondre aux besoins et attentes des opérateurs du secteur en permettant un financement de la construction en cours d’opération par les fonds de l’acquéreur tout en sécurisant leur situation financière. Ce modèle d’équilibre a ainsi inspiré les différents contrats de la promotion immobilière créés : du contrat de construction de maison individuelle (CCMI) à la vente d’immeuble à rénover (VIR), les outils mis au service des acteurs de la construction se sont alors développés en se fondant sur le modèle initial posé par le législateur de 1967. Aussi, depuis la loi du 3 janvier 1967, la recherche de l’équilibre contractuel est constante dans les contrats de construction du secteur protégé, au point que certains n’ont pas hésité à parler « d’ADN du secteur protégé du logement »199 avec des régimes communs à tous ces contrats, qu’il s’agisse notamment d’un formalisme contractuel d’ordre public, d’un strict encadrement des paiements ou de l’obligation de produire des garanties financières de bonne fin de l’opération.

4069 – Protection par un encadrement impératif de l’acte authentique de Vefa. – Pour assurer la réussite de ce modèle contractuel, le législateur a imposé un encadrement strict du contrat au profit des accédants à la propriété d’un logement, notamment avec la distinction du secteur libre et du secteur protégé. À une époque où le droit de la consommation moderne n’existait pas encore, on comprend que cela ait pu faire dire à M. Bergel que la loi du 3 janvier 1967 était peut-être la première grande loi de la consommation200. On rappellera que les différents outils et leviers de protection mis en place par cette loi visent à assurer l’équilibre en une protection efficace de l’acquéreur, en l’informant avec précision sur l’objet et le contenu du contrat, tout en lui accordant une certaine maîtrise de son consentement – en lui permettant notamment de se rétracter après l’avoir exprimé – tout en sécurisant sa situation financière. Le logement étant une aspiration fondamentale et légitime de chaque individu, certains pourraient, pour la satisfaire, s’engager trop rapidement dans des liens d’un contrat beaucoup trop lourd pour eux. Dès lors, et comme le souligne la doctrine201, « une information aussi complète que possible des obligations de chacun apparaît donc nécessaire ».

Le notaire garant du modèle contractuel de la vente en l’état futur d’achèvement

Au cœur de ce dispositif, le notaire apparaît, à raison de son statut d’officier public, comme le garant de ce modèle contractuel et de l’équilibre entre vendeur et acquéreur, au point qu’en secteur protégé le législateur a fait de la vente en l’état futur d’achèvement, tout comme de la vente en l’état futur de rénovation, un contrat solennel obligatoirement authentique. Aussi le notaire instrumentaire aura à vérifier, sous sa responsabilité, que le contrat contient bien l’ensemble des informations et mentions obligatoires prévues par la loi nécessaires à sa validité, afin d’assurer la protection de l’acquéreur qui contracte bien souvent dans un environnement qui lui est peu familier. Il assurera alors un contrôle strict du respect de la bonne application des dispositions d’ordre public aux termes de l’acte de vente en l’état futur d’achèvement, ainsi que la justification et l’efficacité des garanties correspondantes relatées et annexées à celui-ci.

4070 – Protection par l’intervention du notaire tout au long de l’opération de construction. – Il serait toutefois réducteur de circonscrire la protection apportée par le notaire au seul acquéreur d’un immeuble à construire, alors même que la vente en l’état futur d’achèvement apparaît comme l’aboutissement d’un processus bien plus large, l’opération de construction, au cours de laquelle la protection et la sécurité juridiques détermineront l’intervention du notaire à l’égard cette fois-ci des acteurs économiques de l’opération de construction : collectivités locales, aménageur, promoteur immobilier. Tout au long de cette opération de construction lato sensu, le notaire veillera à concilier et protéger les intérêts de chacun au regard des risques encourus, par une approche attentive et mesurée des contraintes légales et économiques, mais également par une pédagogie adaptée à l’ensemble des intervenants imposant par-là la rédaction d’un acte authentique équilibrée202. Ainsi, lors de l’acquisition de l’assiette foncière – support de l’opération de promotion immobilière -, le notaire prendra notamment soin d’appréhender les risques attachés aux propriétés voisines (en cas d’imbrications d’ouvrages à démolir avec le voisinage), il s’assurera que le terrain n’est pas compris dans le périmètre d’un lotissement soumis à un cahier des charges, et que si le terrain appartient à une collectivité publique les formalités de déclassement et de désaffection ont bien été respectées. De même, il prendra soin de contrôler que le terrain ne consiste pas en un ancien site d’activités potentiellement polluantes, ou occupé par une faune et/ou une flore protégées, et qu’il n’est pas concerné par la carte d’archéologie préventive nationale ou par des risques issus d’un état des risques et pollutions avec prescriptions de travaux. Enfin, lors du montage de l’opération de construction, il conseillera au mieux le constructeur sur l’analyse et le choix de l’autorisation administrative de construire à retenir, de même que sur le mode de division de l’immeuble à édifier. Dès lors, on comprend que le notaire s’impose comme un acteur majeur du droit de la construction, dont la mission est entièrement tournée vers la protection de l’ensemble des parties prenantes à l’opération de promotion. Toutefois, nous cantonnerons les développements qui vont suivre aux divers mécanismes de protection du consentement dont bénéficie l’acquéreur d’un immeuble « sur plan », tant par les informations qui lui sont délivrées (§ I), que par les contrôles et vérifications opérés par le notaire quant au contenu du contrat (§ II), en s’attachant exclusivement aux cas du secteur protégé et de la vente en l’état futur d’achèvement.

§ I – La protection du consentement de l’acquéreur par l’information

4071 – Maîtriser le consentement. – Pour permettre à l’acquéreur d’avoir une parfaite maîtrise de son consentement, le législateur a fait de l’acte authentique une condition de validité de la vente en l’état futur d’achèvement. En effet, conformément aux dispositions de l’article L. 261-11 du Code de la construction et de l’habitation, le contrat de vente d’immeuble à construire en secteur protégé doit être conclu en la forme authentique, érigeant ainsi ce dernier en contrat solennel. Comme le souligne la doctrine203, « l’intervention du notaire (…) assure à l’acquéreur une sécurité évidente, liée au devoir de conseil dû par ce professionnel ». Par ailleurs, l’acquéreur bénéficiera du délai de réflexion de l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation, lequel devra être purgé avec toutes les exigences y attachées : tel sera notamment le cas si le contrat définitif n’est pas précédé d’un contrat préliminaire ou si le délai doit être de nouveau purgé par suite de différences substantielles entre le contenu du contrat de réservation et celui du contrat définitif, offrant ainsi à l’acquéreur la possibilité de revenir sur son consentement après l’avoir exprimé. Enfin, dernier gage offert par la loi pour assurer à l’acquéreur la maîtrise de son consentement, ce dernier bénéficiera de la protection de l’acquéreur-emprunteur posée par les articles L. 313-40 et suivants du Code de la consommation s’il n’en a pas déjà bénéficié au stade du contrat préliminaire.

4072 – Éclairer le consentement. – Par-delà cette première salve de mesures protectrices, le législateur a tenu à s’assurer que l’acquéreur soit parfaitement informé et éclairé sur l’immeuble qu’il se propose d’acquérir « sur plan » lequel, à la date de la régularisation de l’acte définitif, n’est par définition pas encore achevé et parfois même n’existe qu’à un stade embryonnaire, les travaux n’ayant pas débuté. Aussi les contrats de vente d’immeubles à construire doivent comporter un certain nombre de mentions obligatoires, expressément visées à l’article L. 261-11 du Code de la construction et de l’habitation. Il en va notamment ainsi de la description de l’immeuble ou de la partie d’immeuble vendu, de son prix et des modalités de paiement de celui-ci, tout comme du délai de livraison et de la garantie d’achèvement ou de remboursement. De même, le contrat définitif devra mentionner si le prix est ou non révisable et, dans l’affirmative, les modalités de sa révision. Le règlement de copropriété devra quant à lui être remis à chaque acquéreur lors de la signature de l’acte définitif, et être même communiqué préalablement à la régularisation de l’acte authentique. Enfin, le contrat devra encore comporter en annexes, ou par référence à ces documents déposés chez un notaire, les indications utiles relatives à la consistance et aux caractéristiques techniques de l’immeuble. Le notaire assurera ainsi un véritable contrôle de légalité, en veillant à l’existence de ces mentions et annexes obligatoires, à peine de nullité de l’acte204.

4073 – Informer sur la représentation de l’immeuble. – Par ailleurs, la loi impose que l’acquéreur puisse recevoir une parfaite information sur l’immeuble à édifier. Aussi, en vertu de l’article R. 261-13 du Code de la construction et de l’habitation : « Pour l’application de l’article L. 261-11, la consistance de l’immeuble vendu résulte des plans, coupes et élévations avec les cotes utiles et l’indication des surfaces de chacune des pièces et des dégagements. (…) Les caractéristiques techniques résultent du devis descriptif servant de base aux marchés ou d’une notice descriptive conforme à un modèle type agréé par arrêté ministériel ». Enfin, « Un plan coté du local vendu et une notice indiquant les éléments d’équipement propres à ce local doivent [également] être annexés au contrat de vente ».

§ II – La protection de fond de l’acquéreur et le contrôle du contenu du contrat

4074 – Contrôle et appréciation du périmètre du secteur protégé. – Comme nous l’avons rappelé au préalable, les règles du secteur protégé du logement encadrent non seulement la formation, mais également le contenu du contrat. Dès lors, la première vérification à opérer par le notaire consistera à s’assurer que la vente en l’état futur d’achèvement à recevoir relève ou non du domaine impératif du secteur protégé. De prime abord, cela peut paraître relativement évident, puisqu’à la lecture de l’article L. 261-10 du Code de la construction et de l’habitation, pour relever du secteur protégé, l’immeuble doit être à usage d’habitation ou à usage mixte d’habitation et professionnel, et l’accédant doit avoir l’obligation d’effectuer des versements de fonds avant son achèvement. À cet égard, la Cour de cassation a rappelé dernièrement que le non-respect du champ d’application du contrat de vente d’immeuble à construire relevant du secteur protégé encourt la nullité, laquelle est relative, l’objet du contrat étant d’assurer la seule protection de l’acquéreur205.

Qualifier, c’est protéger : le cas singulier des Vefa d’appartements compris dans des résidences de services et de tourisme

Il est des situations où la ligne de démarcation entre le secteur protégé et le secteur hors protégé est loin d’être évidente à apprécier. Tel est notamment le cas des résidences de services et de tourisme où les rapports entre le propriétaire de l’immeuble et l’exploitant de la résidence sont régis par un bail commercial. En effet, on le sait, l’exploitation de telles résidences avec fournitures de prestations hôtelières constitue une activité commerciale, et ce même si le bien immobilier concerné présente les caractéristiques d’un local d’habitation. Dès lors, il est permis de s’interroger sur le fait de savoir si la vente de lots dépendant de ces résidences de services ou de tourisme doit relever des règles protectrices du secteur protégé.

La Cour de cassation s’est prononcée à ce sujet en 2016 dans deux arrêts importants : dans un arrêt du 7 avril 2016206, la cour avait tout d’abord retenu qu’un appartement situé dans une résidence hôtelière était à usage commercial dès lors que l’acquéreur le louait via un bail commercial, alors même que le 7 janvier 2016 elle ne s’était attachée qu’à la consistance des locaux, faisant abstraction de la gestion de ceux-ci, pour retenir l’usage d’habitation de locaux situés dans une résidence « seniors »207. Dans un dernier arrêt rendu le 23 mai 2019, la Cour de cassation a jugé que la cour d’appel a « retenu exactement que peu importaient les modalités de gestion en résidence hôtelière de ce bien dont il dépendait, dès lors que le contrat préliminaire de réservation mentionnait la vente d’un deux-pièces en duplex avec mise en place d’une copropriété, tandis que l’acte authentique stipulait que les locaux achetés étaient à usage d’habitation »208.

On relèvera que, dans ce dernier arrêt, il n’est pas fait de distinction suivant que les appartements sont ou non destinés à un usage de résidence principale. Dès lors, cet arrêt doit conduire, selon la doctrine209, à faire abstraction du mode de gestion de la résidence pour déterminer l’usage des appartements se trouvant dans celle-ci, et ce quel que soit le régime de cette résidence. Aussi, si les locaux présentent les caractéristiques objectives d’un local à usage d’habitation et sont vendus comme tels, alors les dispositions du secteur protégé doivent être respectées. Faisant écho à cette dernière jurisprudence, certains auteurs210 préconisent dès lors, pour sécuriser les actes de vente, de soumettre au régime du secteur protégé toutes les opérations aboutissant à la production d’un local présentant les caractéristiques d’un bien permettant l’habitation, au sens de l’article R. 111-1-1, alinéa 4 du Code de la construction et de l’habitation211.

4075 – Contrôle des clauses de mandat. – Toujours dans un souci de protection de l’acquéreur, le notaire devra veiller à la rédaction des clauses par lesquelles les acquéreurs donnent mandat au vendeur pour accomplir des actes de disposition nécessaires à la réalisation de l’opération conformément aux dispositions de l’article R. 261-5 du Code de la construction et de l’habitation. Le texte précise par ailleurs que le mandat doit être donné avec suffisamment de précision et indiquer notamment la nature, l’objet et les conditions des actes en vertu desquels il est donné. Un mandat plus large peut également être consenti au vendeur s’agissant des actes qui porteraient sur des parties communes et qui se révéleraient nécessaires notamment pour satisfaire aux prescriptions d’urbanisme ou aux obligations imposées par le permis de construire, ou pour assurer la desserte ou le raccordement aux réseaux publics d’un immeuble ayant des parties en commun avec celui formant l’objet de la vente. La Cour de cassation veille sur ce dernier point à ce que la rédaction de ces clauses permette à l’acquéreur d’être parfaitement informé sur la nature et l’étendue des actes pour lesquels il donne pouvoir au vendeur212. Or, et comme l’ont très justement relevé certains auteurs213, en pratique l’étendue des pouvoirs conférés au vendeur sur le fondement de l’article R. 261-5 précité est apparue insuffisante au regard des besoins invoqués par les promoteurs immobiliers, au point que se sont développés et multipliés dans les actes de vente des mandats spéciaux bien souvent rédigés en des termes généraux. Or, on rappellera que l’article 1988 du Code civil – qui fonde le droit commun des mandats – précise que le mandat conçu en termes généraux n’embrasse que les actes d’administration, et que s’il y a lieu d’aliéner ou d’hypothéquer, alors le mandat doit être rédigé en des termes exprès. Dès lors, et pour éviter de tomber sous le coup de la nullité d’un acte qui aurait été régularisé à l’appui d’une clause de mandat rédigée en des termes trop généraux, voire imprécis, le notaire devra veiller à rédiger dans son acte des clauses de mandat équilibrées, conformes tant aux dispositions de l’article R. 261-5 du Code de la construction et de l’habitation qu’aux dispositions du Code civil.

4076 – Contrôle du respect de l’échelonnement du prix. – La protection la plus efficace de l’acquéreur en matière de vente en l’état futur d’achèvement passe par le strict encadrement du montant des paiements que peut exiger le vendeur en cours d’exécution des travaux. La grille réglementaire d’échelonnement des paiements est ainsi posée à l’article R. 261-14 du Code de la construction et de l’habitation, laquelle détermine les seuils des paiements et dépôts qui ne peuvent excéder certains pourcentages cumulatifs : 35 % du prix à l’achèvement des fondations, 70 % du prix à la mise hors d’eau et 95 % à l’achèvement de l’immeuble. Ce texte prévoit des paliers fixant des maximums de versement que le vendeur ne pourra outrepasser, de manière à s’assurer que la valeur des paiements effectués ne dépasse jamais celle des constructions réalisées. Sous la réserve de ces plafonds, des stades intermédiaires peuvent être prévus. Ainsi la situation de l’acquéreur paraît préservée puisqu’il ne paie qu’en fonction de ce qu’il reçoit dans son patrimoine et le notaire devra veiller au strict respect de cette grille d’échelonnement des paiements. Le seul écueil peut, le cas échéant, consister dans la production de fausses attestations relatives à l’avancement des travaux que pourrait être tenté de produire le vendeur pour solliciter le paiement d’une somme supérieure à celle correspondant au véritable stade d’avancement de la construction. Dans ce cas, le vendeur et les différents acteurs de l’opération courent le risque de s’exposer à des sanctions sévères214, et notamment pénales prévues par les dispositions de l’article L. 263-1 du Code de la construction et de l’habitation. Enfin, nous ne reviendrons pas sur la question consistant à savoir si un promoteur peut appeler et percevoir une fraction du prix dès la conclusion du contrat de vente, alors même que les travaux n’ont pas commencé, ce point ayant été remarquablement traité dans le rapport du 111e Congrès des notaires215 et n’ayant pas fait l’objet d’évolution depuis.

4077 – Contrôle des modifications opérées par le promoteur entre le contrat préliminaire et l’acte de vente. – Bien souvent, lorsque le promoteur régularise ces premiers contrats préliminaires, au titre de la commercialisation de son programme, les conditions de l’opération de construction – qu’elles soient financières ou techniques – ne sont pas arrêtées de manière définitive. Aussi, en imposant le recours au contrat préliminaire comme le seul contrat possible en secteur protégé du logement, le législateur a permis au promoteur de disposer d’un contrat « essentiellement prospectif »216. En effet, dans le contrat préliminaire, contrat traditionnellement qualifié de sui generis217, le promoteur ne s’engage pas à vendre mais seulement à réserver, conformément aux dispositions de l’article L. 261-15 du Code de la construction et de l’habitation, un bien à un acquéreur, de sorte qu’il n’y ait pas d’exécution forcée possible218. Par suite, il est de la nature même d’un tel contrat que le promoteur ait la faculté de modifier les conditions de la vente entre la signature du contrat préliminaire et l’acte de vente définitif. L’article R. 261-30 du Code de la construction et de l’habitation pose toutefois un garde-fou, dans un souci de protection à l’acquéreur, en prévoyant que le projet d’acte de vente doit être adressé par le réservant au réservataire au moins un moins à l’avance avant la date de signature du contrat définitif. Ce délai offert au réservataire va notamment lui permettre de comparer le contenu de l’acte qui lui est soumis à celui du contrat préliminaire qu’il a conclu. Ainsi, en cas de modification constatée par le réservataire, ce dernier ne pourra pas contraindre le promoteur à régulariser un acte de vente définitif conforme au contrat préliminaire déjà signé219, et ne pourra alors solliciter du vendeur que la restitution de son dépôt de garantie et le cas échéant des dommages et intérêts220. En revanche, en cas de signature de l’acte de vente en l’état futur d’achèvement, l’acquéreur sera censé avoir accepté les modifications apportées et ne pourra dès lors plus former de contestation. Une dernière question se pose cependant : en cas de différence importante ou substantielle entre le contenu du contrat préliminaire et celui de l’acte définitif, le délai de dix jours de l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation doit-il être rouvert à l’acquéreur ? Lorsque l’on sait que la jurisprudence de la Cour de cassation rappelle qu’en cas de modification déterminante du consentement l’acquéreur doit pouvoir disposer d’une nouvelle faculté de rétractation221, la prudence s’impose. La pratique notariale se trouve alors dans une situation bien inconfortable, et ce d’autant plus qu’il n’existe pas de critère précis permettant d’indiquer à partir de quel seuil le délai doit être « repurgé » et la sécurité juridique de tous les acteurs du secteur s’en trouve nécessairement affectée222.

4078 – Contrôle de la souscription des assurances construction. – L’article L. 243-2 du Code des assurances impose au notaire d’exercer un contrôle quant à la souscription des assurances construction. Si, aussi curieux que cela puisse paraître, cette vérification ne résulte pas des dispositions du Code de la construction et de l’habitation, il convient ici de rappeler que la lettre de l’article L. 243-2 du Code des assurances impose simplement au notaire de mentionner « l’existence ou l’absence d’assurance » dans l’acte de vente définitif. Il faut donc en conclure que le seul fait d’indiquer dans l’acte l’absence de souscription d’une telle assurance ne l’affecte pas d’une quelconque nullité. Toutefois, un tel contrôle étant intrinsèquement lié au devoir de conseil qui pèse sur le notaire, ce dernier – en cas de souscription d’une police d’assurance dommages ouvrage – ne pourra se contenter d’en relater l’existence, mais devra « vérifier personnellement l’efficacité »223 d’une telle police d’assurance responsabilité. De même, il ne devra pas se satisfaire d’une attestation délivrée par un courtier – ce dernier n’étant pas le mandataire de l’assureur, mais de son client pour placer le risque sur le marché de l’assurance – sauf dans l’hypothèse où il a été dûment habilité pour le faire et qu’il utilise un papier à en-tête de l’assureur224. L’étude de la jurisprudence révèle que le notaire devra, au titre du contrôle qu’il aura à opérer sur le document d’assurance qui lui sera transmis, vérifier que ce dernier vise l’article L. 242-1 du Code des assurances, comporte la mention d’un numéro de police, indique sans restriction la date de prise d’effet, mentionne le nom du souscripteur et l’adresse exacte du programme, précise que la prime prévisionnelle a été intégralement payée et enfin mentionne en secteur protégé l’absence de plafond.

4079 – Contrôle de la souscription de la garantie financière d’achèvement. – Enfin, dans le secteur protégé du logement, la protection de l’acquéreur est également complétée par l’exigence de la fourniture d’une garantie financière, obligation posée par l’article L. 261-10 du Code de la construction et de l’habitation. Si la garantie intrinsèque d’achèvement a été supprimée pour toutes les opérations dont le dossier de demande de permis de construire a été déposé postérieurement au 1er janvier 2015, le vendeur demeure tenu de produire une garantie financière d’achèvement de l’immeuble ou une garantie financière de remboursement des versements effectués en cas de résolution du contrat à défaut d’achèvement. Dès lors, les dispositions de l’article L. 261-11, d) du Code de la construction et de l’habitation prévoient que le contrat de vente de vente conclu en la forme authentique doit impérativement mentionner « la justification de la garantie financière prescrite à l’article L. 261-10-1, l’attestation de la garantie étant établie par le garant et annexée au contrat ». La mention de l’existence de cette garantie doit donc impérativement figurer dans l’acte authentique, la jurisprudence faisant peser sur le notaire l’obligation de s’assurer de l’efficacité de la garantie extrinsèque d’achèvement au moment de la conclusion de la vente225. De même, une circulaire no 2012-2 du Conseil supérieur du notariat du 25 janvier 2012 renforce les vérifications devant être faites par les notaires lors d’une vente en l’état futur d’achèvement. Cette circulaire prévoit notamment que le notaire doit, pour toute opération de promotion immobilière, à l’occasion du dépôt des pièces au rang de ses minutes, adresser à la chambre des notaires dont il dépend une déclaration conforme au modèle joint à cette circulaire attestant qu’il a bien effectué les vérifications prévues dans la liste annexée. Dès lors, on comprend l’importance de la tâche qui pèse sur le notaire de vérifier la souscription d’une garantie extrinsèque d’achèvement et de s’assurer de son efficacité pour le jour de la conclusion du contrat.

Sous-section II – L’acte authentique et la constitution d’hypothèque conventionnelle

4080 – Un formalisme historique. – De tout temps, la constitution d’une sûreté, qu’elle soit réelle ou personnelle, a représenté un acte grave pour le constituant ou le garant nécessitant des mesures de protection importantes et justifiant la solennité en droit des sûretés. Ainsi, si à Rome l’hypothèque n’obéissait à aucune forme particulière, il n’en sera plus de même après une loi de 469 de l’empereur Léon. À partir de cette date, seules les hypothèques constatées par un tabellion ou par acte contresigné par trois témoins primaient toutes les autres, et ce malgré leur date de constitution226. De même, Domat constatait dans Les lois civiles dans leur ordre naturel que « par notre usage, les conventions donnent point d’hypothèque quand même elle serait exprimée, si elles ne passent pas devant notaire »227. Cette solution avait été reprise par les rédacteurs du Code civil en 1804, l’ancien article 2127 disposant que l’hypothèque conventionnelle ne peut être consentie que par écrit, et qui plus est par acte notarié. Cette exigence a finalement survécu à la réforme de 2006, laquelle, dans un souci de simplification, décida cependant de supprimer le formalisme rituel exigeant la présence de deux notaires.

4081 – Acte authentique et privilèges spéciaux immobiliers. – Aujourd’hui, notre droit positif connaît, en matière de sûretés réelles, les hypothèques et les privilèges spéciaux immobiliers228. Ces derniers permettent à un créancier de bénéficier d’un droit de suite et d’un droit de préférence, et doivent être inscrits dans un certain délai. Le rang du privilège n’est ici pas déterminé par la date d’inscription, mais par la date de naissance de la créance puisque, rappelons-le, il s’agit de sûretés légales : par conséquent, si le créancier a respecté le délai légal d’inscription, cette formalité rétroagit au jour de la créance. Le privilège naît donc automatiquement avec la créance et résulte de la volonté expresse du législateur. En ce sens, les privilèges spéciaux immobiliers présentent une identité de régime avec les hypothèques légales en ce qui concerne leur constitution, leur transmission, leur extinction et les droits qu’ils font naître au profit du créancier. Prenons le cas du privilège de vendeur d’immeuble pour le paiement du prix prévu à l’article 2374, 1obis du Code civil : ce dernier apparaît comme étant de la nature même de la vente d’immeuble, en ce sens qu’il naît de plein droit sans qu’il soit besoin, comme dans l’Ancien droit, de le stipuler dans une clause particulière. Théoriquement, la vente pourra résulter d’un acte authentique ou d’un acte sous seing privé, mais l’acte authentique sera indispensable puisque le privilège, pour être efficace, devra être inscrit, ce qui suppose la publication de la vente elle-même, laquelle implique que l’acte de vente soit dressé en la forme authentique. Dès lors, l’acte authentique apparaît comme un instrumentum constatant une sûreté légale : il permet, pour en assurer la pleine efficacité, la publication d’une telle sûreté légale auprès des services de la publicité foncière, tout en lui conférant la force exécutoire, attribut essentiel de l’acte authentique.

4082 – Acte solennel et constitution de sûretés réelles. – En revanche, la loi imposera, pour la constitution de certaines sûretés réelles, un formalisme qualifié de direct, à savoir l’établissement d’un acte authentique à titre de condition de validité de l’acte constitutif. Tel sera notamment le cas pour la constitution d’hypothèque conventionnelle. En effet, à la différence des privilèges spéciaux immobiliers, constatant une créance légale, la loi a ici imposé l’acte authentique public comme mesure de protection à l’égard du constituant, la créance trouvant cette fois-ci son origine non pas dans la volonté du législateur, mais dans la volonté des parties. Dès lors, l’intervention du notaire éclairera le constituant sur l’étendue de son engagement et veillera à ce que ce dernier ait parfaitement conscience de la teneur et des conséquences de l’accord conclu avec son créancier. L’article 1346-2 du Code civil impose également l’acte authentique, comme condition de validité de la convention, pour la subrogation conventionnelle consentie par le débiteur : toutefois, ce recours étant davantage justifié par un souci de protection des tiers que du débiteur229, nos développements se cantonneront à l’étude de la protection du consentement du constituant d’hypothèque. Aussi, après avoir rappelé les principes et sanctions du recours à l’acte authentique pour toute constitution d’hypothèque (§ I), nous nous attacherons à en comprendre et en saisir les raisons (§ II).

§ I – Les principes et sanctions du recours à l’acte authentique

4083 – Une exigence textuelle : l’article 2416 du Code civil. – Rappelé par l’ordonnance no 2006-346 du 23 mars 2006, l’article 2416 du Code civil pose comme principe que : « L’hypothèque conventionnelle ne peut être consentie que par acte notarié ». La forme notariée s’applique également à l’hypothèque rechargeable ainsi qu’au prêt viager hypothécaire, tous deux issus de l’ordonnance précitée. Elle concerne également ce que la pratique nomme le « cautionnement hypothécaire », c’est-à-dire l’hypothèque consentie en garantie de la dette d’un tiers230. L’hypothèque demeure ainsi l’une des rares conventions solennelles du droit français. L’acte authentique assurera ici la preuve de l’existence de la garantie, en permettra la publication au service de la publicité foncière afin d’en assurer son opposabilité aux tiers, et constituera surtout une condition de validité de la convention, dont l’inobservation sera sanctionnée par une nullité absolue231. Rappelons par ailleurs que la convention d’hypothèque qui ne satisferait pas à cette exigence n’est pas susceptible de confirmation ; un nouvel acte sera alors nécessaire qui devra être passé en la forme authentique. Enfin, l’hypothèque portant sur un immeuble situé en France doit, conformément aux dispositions de l’article 2417 du Code civil, être établie par un notaire français puisque : « Les contrats passés en pays étranger ne peuvent donner d’hypothèque sur les biens de France, s’il n’y a des dispositions contraires à ce principe dans les lois politiques ou dans les traités ». Il faut donc retenir que l’État d’accueil peut instaurer un domaine de compétence réservé, pour certains actes, à des juristes locaux, sauf convention internationale contraire. Cette solution, bien que critiquée par certains auteurs232 en doctrine, a persisté en droit positif et paraît compatible avec la Convention de Rome sur la loi applicable aux obligations contractuelles. La Cour de cassation a même précisé, à cet égard, que l’hypothèque devant grever un immeuble situé en France mais qui a été constituée à l’étranger (Côte d’Ivoire) est pleinement efficace dans la mesure où celle-ci a été valablement réitérée devant un notaire établi en France qui a procédé à son inscription233.

4084

La promesse d’hypothèque ou les limites de l’exigence d’un acte authentique

La promesse d’affectation a depuis longtemps été reconnue comme valable par la jurisprudence234. Jusqu’à l’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, il s’agissait d’un simple engagement de faire qui pouvait être consenti soit sous seing privé, soit par acte authentique. La constitution de l’hypothèque était renvoyée à un acte ultérieur qui devait, quant à lui, être obligatoirement authentique. La sanction de l’inexécution de cette obligation consistait alors uniquement en la condamnation du promettant au paiement de dommages et intérêts. Désormais, la rédaction du nouvel article 1124, issue de l’ordonnance du 10 février 2016, dispose dans son alinéa 2 que : « La révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n’empêche pas la formation du contrat promis ». Est-ce à dire pour autant que la promesse d’hypothèque se trouve renforcée, puisque dorénavant la rétractation du consentement du promettant avant la levée de l’option n’est plus à craindre et ne fait plus obstacle à la formation du contrat ? Rien n’est moins certain. En effet, si – depuis l’ordonnance du 10 février 2016 – la promesse d’affectation hypothécaire procure davantage de sécurité juridique au stade de la formation du contrat, il n’en reste pas moins que lors de la formalisation de l’hypothèque auprès des services de la publicité foncière, le prêteur encourt toujours le risque d’être primé par tout autre tiers qui viendrait à faire inscrire une sûreté sur l’immeuble offert en garantie. De même, il ne faut pas perdre de vue que si, à l’occasion de la levée de l’option par le bénéficiaire, l’emprunteur venait à être en cessation des paiements, les dispositions de l’article 632-1, I du Code de commerce, frappant de nullité la constitution d’une hypothèque destinée à garantir une dette antérieurement contractée, trouveraient alors à s’appliquer.

§ II – Les fondements du recours à l’acte authentique

4085 – Protection du constituant de l’hypothèque. – Si l’exigence de l’authenticité n’est pas ici indirecte, en ce sens qu’elle n’est pas imposée pour de simples raisons de publicité foncière, c’est incontestablement dans le souci de protéger le seul débiteur constituant. En effet, l’hypothèque agissant comme une sûreté sans dépossession, « inodore et indolore »235 lors de sa constitution, il était essentiel de veiller à mettre en place un dispositif permettant de s’assurer de la parfaite prise de conscience du constituant quant aux conséquences de son acte. Fort de son statut d’officier public, garant de l’équilibre contractuel, le législateur a estimé que l’intervention du notaire répondait à ce besoin. Ainsi ce dernier saura attirer l’attention du constituant sur la portée et les risques inhérents à son engagement pour s’assurer de son consentement éclairé, justifiant ainsi le recours à l’acte authentique comme condition de validité de l’acte. Par ailleurs, cette volonté de protection du constituant se trouve renforcée par l’exigence du principe de spécialité, lequel implique l’identification de la créance garantie. En effet, selon l’article 2418 du Code civil, l’hypothèque ne sera valable que si le titre authentique constitutif de la créance déclare spécialement la nature et la situation de chacun des immeubles sur lesquels l’hypothèque est consentie. De même, la cause de l’hypothèque, c’est-à-dire la créance, doit être déterminée dans l’acte constitutif d’hypothèque. Cette exigence, jadis imposée par la jurisprudence236, est aujourd’hui prévue à l’article 2421 du Code civil. Enfin, il sera rappelé qu’aux termes de l’article 2423 du Code civil, l’hypothèque doit être également consentie, « pour le capital, à hauteur d’une somme déterminée que l’acte notarié mentionne à peine de nullité ». Le principe de spécialité fait donc obstacle à la conclusion d’hypothèque volante ou flottante, garantissant n’importe quelle créance dont peut être titulaire un créancier envers son débiteur et évite ainsi qu’une même sûreté ne puisse ruiner définitivement le crédit du constituant de l’hypothèque. Issue de la volonté des parties, la constitution d’hypothèque a donc été étroitement encadrée par le législateur au moyen d’exigences de forme auxquelles le notaire, dans son rôle d’agent de la légalité, devra scrupuleusement veiller.

4086 – Protection du mandant d’hypothéquer. – En application du principe de parallélisme des formes, le mandat d’hypothéquer devra également satisfaire aux mêmes exigences formelles que l’acte d’hypothèque, dont il permet l’accomplissement. Ainsi la procuration donnée en vue d’hypothéquer doit également être établie par acte notarié. Le constituantrecevra alors les conseils du notaire chargé d’authentifier le pouvoir et sera dès lors protégé au moment de l’établissement du mandat237, comme il l’aurait été s’il avait signé l’acte constitutif d’hypothèque. De ce fait, il faut retenir que le contrat hypothécaire établi en vertu d’un mandat sous seing privé donné par le débiteur ne constate pas en la forme authentique le consentement de ce dernier et conduira à la nullité absolue de l’hypothèque. Une telle exigence formelle pour le mandat d’hypothéquer témoigne, s’il en était encore besoin, de la volonté du législateur de protéger exclusivement le constituant de l’hypothèque, puisque l’acceptation de celle-ci par le créancier peut, quant à elle, parfaitement résulter d’une procuration sous seing privé238.

4087 – Protection du créancier. – Au demeurant, si les règles de forme relatives à la constitution d’hypothèque recherchent principalement à assurer la protection du débiteur, le créancier verra également son intérêt à l’intervention du notaire à l’occasion de la régularisation de l’acte constitutif de la sûreté. Le devoir de conseil auquel est astreint le notaire s’appliquant naturellement à l’hypothèque, ce dernier sera tenu de vérifier que l’immeuble grevé appartient effectivement au constituant, que les droits de celui-ci ne sont pas entachés de précarité, et il devra s’assurer de la capacité et des pouvoirs du constituant. L’intérêt du créancier est donc tout autant à l’origine de l’article 2416 du Code civil, puisque seul le notaire aura la possibilité de contrôler l’origine de propriété du constituant. De même, le notaire sera tenu de veiller à l’efficacité de l’acte et conférera à celui-ci la force exécutoire, laquelle pourra ouvrir la voie à l’exercice direct d’une mesure de contrainte contre le débiteur239. En arrière-plan, il en va bien sûr du désir d’assurer le bon fonctionnement du crédit. Ainsi le notaire chargé de l’établissement d’un acte constitutif d’hypothèque, fût-elle de second rang, devra s’assurer de l’efficacité de la sûreté qu’il constitue au regard de la situation juridique de l’immeuble et appeler l’attention du créancier sur les risques d’insuffisance du gage inhérent à cette situation240. De même, le notaire devra, une fois l’acte constitutif d’hypothèque régularisé, veiller à l’accomplissement des formalités nécessaires à l’inscription de la sûreté auprès des services de la publicité foncière, qui en garantit l’exécution. Enfin, et selon les circonstances, le notaire devra, au titre de son devoir de conseil, informer le créancier de la nécessité de procéder au renouvellement de l’inscription241.

Section II – La protection de la famille et du couple

4088 – Le droit de la famille : berceau du formalisme. – Comme cela a été très justement souligné, « le droit de la famille constitue le berceau du formalisme, sinon le lieu où celui-ci agit avec le plus d’intensité »242. Les exemples confortant cette thèse sont nombreux, tant en droit extrapatrimonial qu’en droit patrimonial : que l’on songe par exemple aux formes solennelles imposées pour le mariage, la reconnaissance d’enfant ou l’adoption ; que l’on pense également à la solennité de la renonciation anticipée à l’action en réduction introduite par la loi du 23 juin 2006 ou à celle de la donation entre vifs pour laquelle l’article 931 du Code civil impose la forme notariée. Là encore, ces formes solennelles poursuivent un but de protection empêchant notamment les engagements irréfléchis et ceux qui seraient le fruit d’une captation mal intentionnée.

4089 – Une protection supra partes : la protection de la cellule familiale. – Toutefois, l’une des particularités du droit de la famille par rapport au droit commun des obligations et des contrats réside notamment dans le fait que les actes qui en sont les instruments – la donation, la donation-partage, le contrat de mariage et le changement de régime matrimonial en particulier – ne peuvent être appréhendés comme des actes isolés qui épuisent leurs effets dans leur seule exécution. Comme l’a développé M. Brenner243, « ils s’inscrivent au contraire dans un ensemble de relations très fortement marquées par le caractère institutionnel de la famille ». Leurs effets et retentissements sont loin d’être simplement immédiats et limités aux seules parties à l’acte en cause ; ils ont – au contraire – tendance à développer leurs conséquences dans la durée et à affecter de manière beaucoup plus substantielle que les actes à titre onéreux ordinaires la condition des parents, des créanciers ou des ayants cause. Dès lors, il nous faut retenir que si les formes solennelles tendent à assurer, en droit des contrats, la protection des parties à l’acte, en droit de la famille le formalisme n’est pas imposé que dans l’intérêt des parties à l’acte, mais aussi et surtout dans l’intérêt de la famille et des tiers intéressés et, par-delà, de la société qui a intérêt à ce que l’opportunité et l’efficacité de tels actes soient garanties dans toute la mesure du possible par l’intervention d’une autorité spécialement qualifiée. En effet, comme le souligne la doctrine244, « l’organisation du droit de la famille repose sur la considération que des intérêts supérieurs interdisent de laisser libre cours à la recherche par chacun de son seul intérêt avec en ligne de mire la maximisation de son profit individuel ». Pour cette raison, le droit des régimes matrimoniaux et celui des successions et libéralités consistent en un corps de règles distinct du droit commun des obligations et des contrats. C’est pourquoi également la révolution consumériste n’y a jamais percé. Ici c’est la cellule familiale qui doit être protégée dans ses moyens d’existence et de perpétuation contre l’autonomie de la volonté individuelle, parce qu’elle constitue la base et le pôle de stabilité de l’organisation sociale.

4090 – Une protection imposant un contrôle de l’État sur l’organisation de la famille. – Une telle recherche de protection explique la très forte dimension politique de la matière et justifie l’existence d’un contrôle de l’État sur l’organisation, non seulement personnelle mais aussi patrimoniale de la famille dans l’intérêt de ses différents membres et des tiers. Ce contrôle se traduit classiquement par un ordre public de direction que manifestent en particulier la réserve héréditaire, la prohibition des pactes sur succession future, l’irrévocabilité spéciale des donations, l’immutabilité des régimes matrimoniaux, etc. Mais, sous la poussée de l’individualisme, les limites à l’autonomie de la volonté ont fortement reculé ces dernières années au point que l’on parle aujourd’hui de contractualisation du droit de la famille pour rendre compte de cette évolution. Est-ce à dire pour autant que l’État aurait reculé et renoncé à exercer tout contrôle sur les volontés privées dans le domaine de la famille ? Assurément non, puisqu’à travers l’authenticité, le formalisme est devenu l’instrument privilégié d’un contrôle atténué mais persistant de la puissance publique sur l’activité juridique des individus dans l’intérêt général. Il n’est donc pas étonnant que l’authenticité soit exigée pour tous les actes fondateurs de la vie des familles. Elle permet ainsi à l’autorité publique de graver dans le marbre authentique les grands tournants de la vie des hommes pour qu’il en demeure, selon la belle expression de Cornu, « une charte donnant sur l’avenir, à chaque événement, sa constitution écrite »245. Aussi la forme authentique fait de l’écrit le moment historique et solennel produisant, pour une durée que l’on veut la plus longue possible, des conséquences juridiques importantes sur la situation des intéressés. Tel sera notamment le cas en matière de donations (Sous-section I), mais également en matière de couples et de conjugalités (Sous-section II).

Sous-section I – L’acte authentique et les donations

4091 Si l’acte authentique est imposé à titre de condition de validité de la donation par le Code civil, faisant ainsi de l’authenticité une zone de compétence exclusive (§ I), il est à noter le développement de donations en dehors de tout formalisme légal, conforté en cela par la jurisprudence qui en a validé le recours et le principe (§ II), selon un formalisme qualifié de « substitution ».

§ I – Le recours au formalisme de l’authenticité : une zone de compétence exclusive

4092 – Une exigence textuelle pour les donations : l’article 931 du Code civil. – Les dispositions de l’article 931 du Code civil ne laissent aucun doute à l’interprétation : un acte portant donation entre vifs doit obligatoirement être reçu en la forme authentique. Ce formalisme direct et légal classe la donation entre vifs au rang des actes solennels, puisqu’il constitue une condition de validité de l’acte : tout manquement à ces dispositions est sanctionné par la nullité absolue.

4093 – Les raisons du recours à l’acte authentique pour les donations. – La première des raisons justifiant le recours à l’authenticité pour les actes de donation réside assurément dans le souci de protéger le consentement du donateur. Acte grave s’il en est, la donation – par nature irrévocable – appauvrit le donateur. Dès lors, l’intervention du notaire permettra de s’assurer de la portée de l’engagement du donateur et d’éviter que son acte soit consenti à la légère ou sous la pression de manœuvres frauduleuses. En régime consensuel, le donateur serait laissé sans défense contre lui-même et contre autrui, de même que contre un entraînement irréfléchi et contre les tentatives de captation de la part du donataire ; la solennité de l’authenticité lui assure ici cette double protection. Par ailleurs, l’établissement de l’acte en minute en assure la conservation, facilitant ainsi dans tous les cas le « rendez-vous » de l’acte libéral avec le jour de l’ouverture de la succession du donateur246. L’acte de donation produisant des conséquences juridiques sur plusieurs générations, il faut pouvoir en apporter la preuve après de longues années : aussi, en dressant son acte, le notaire le fait entrer dans l’histoire ; par l’obligation qui lui en est faite de le conserver, il en préserve la mémoire. Par là, la sécurité juridique est assurée tant pour le donataire qui peut ainsi faire valoir son titre que pour les héritiers qui pourront alors en tirer toutes les conséquences liquidatives au regard du rapport ou du dépassement de la réserve. En effet, la protection des réservataires et l’égalité des héritiers sont autant d’objectifs que la loi fixe et protège. Mais comment les assurer si les dons consentis par le défunt ne sont pas conservés, ou si, comme cela se rencontre bien souvent, les écritures bancaires retraçant les dons effectués par virements ne sont pas conservées plus de dix ans ? Dès lors, une juste et correcte application du droit successoral passe par la démonstration et la conservation de la volonté libérale, que le recours à l’acte authentique remplit par nature. De plus, l’acte de donation, dans sa confection, peut s’avérer complexe et recéler de nombreux pièges, notamment sur un plan fiscal, justifiant à nouveau le recours à l’authenticité : la liquidation des droits de mutation par le jeu du rappel des mutations antérieures, la détermination de la nature propre ou commune des valeurs transmises ainsi que la date de valorisation à prendre en considération sont autant de difficultés que le notaire saura appréhender et traiter sous sa responsabilité, assurant ainsi aux parties une protection dans leurs rapports avec l’administration fiscale. Enfin, et comme pour l’ensemble des actes qu’il aura à recevoir, le notaire instrumentaire veillera à la conformité de l’acte avec le droit positif, notamment à l’aune du principe d’irrévocabilité des donations interdisant de manière absolue l’insertion de clause ayant pour effet de permettre au donateur de reprendre, directement ou non, ce qu’il entend transmettre.

4094 – Recours à l’authenticité pour la représentation d’une partie à un acte de donation. – Nous avons pu constater, dans les développements qui précèdent, que la représentation à un acte solennel que constitue une vente en l’état futur d’achèvement ou une constitution d’hypothèque conventionnelle exige l’établissement d’un mandat notarié. La représentation à un acte de donation – acte solennel – au moyen d’un mandat s’inscrit dans la même veine. Ainsi un donataire qui ne pourrait être présent le jour de la signature de l’acte pourra être représenté au moyen d’une procuration reçue impérativement en la forme authentique et exclusivement par le notaire. C’est toujours la même idée qui prévaut – laquelle s’inscrit dans une logique de parallélisme des formes – selon laquelle le consentement donné doit être protégé tant dans l’acte lui-même que dans le pouvoir qui l’autorise247. Les conditions de la représentation du donataire sont clairement réglées par les dispositions de l’article 933 du Code civil, lesquelles précisent que le mandat, qui peut être général et donc ne pas intéresser une donation précise, doit être dressé en minute dont une copie authentique sera annexée à l’acte de donation. Rappelons que ces conditions valent également pour une procuration donnée en cas d’acceptation par acte séparé248. Tout manquement à ce formalisme est sanctionné par la nullité tant de la procuration elle-même que de la donation qui en est la suite249. Le seul assouplissement possible concerne l’obligation d’annexer le pouvoir, qui est éteinte dès lors qu’il y aura identité de notaire tant pour la procuration que pour la donation250. Quant à la possibilité pour le donateur d’être représenté à l’acte de donation, le Code civil demeure – aussi curieux que cela puisse paraître – muet sur cette éventualité. Pour autant, tant la jurisprudence que la doctrine imposent également le recours à l’authenticité pour l’établissement d’un mandat permettant au donateur d’être représenté à l’acte de donation. Une telle position s’explique tout d’abord par l’application d’un certain parallélisme des formes, mais également par le souci d’imposer au mandat conféré par le donateur une solennité similaire à celle dont relève la représentation du donataire251. Par ailleurs, et à la différence des mandats permettant au donataire d’être représenté – lesquels nous l’avons vu peuvent être généraux -, ici tout pouvoir général est exclu252. Dès lors, l’appauvrissement sans contrepartie du donateur suppose que cela soit très précisément circonscrit et détaillé dans le mandat, de même que les conditions qui l’accompagnent afin que la protection apportée dans l’acte au donateur le soit également dans la procuration lui permettant d’être représenté.

4095 – Recours à l’authenticité pour les partages d’ascendants. – La singularité de la donation-partage ne fait pas obstacle au recours à l’authenticité, laquelle est également soumise par principe au formalisme prévu par l’article 931 du Code civil. En réalité, et comme l’a très justement éclairé la doctrine253, le formalisme du recours à l’authenticité ne couvre que la donation elle-même, puisque le partage qui peut intervenir dans un second temps est parfaitement réalisable par acte sous seing privé. La seule et unique condition imposée pour que l’ensemble de ces opérations soient placées sous la bannière du partage d’ascendant consiste en ce que ce partage subséquent intervienne avec la participation du parent donateur254. En revanche, la Cour de cassation n’a pas manqué de rappeler le caractère exclusivement notarié du partage d’ascendant, lequel ne peut résulter que d’un seul et même instrumentum et non du regroupement de plusieurs donations successives255, bien que certains admettent qu’une collection de dons manuels puisse constituer une donation-partage pour peu qu’un pacte adjoint vienne à en établir l’indivisibilité256. Le formalisme exigé en matière de donation-partage n’a pas ici exclusivement pour vocation de protéger le consentement du donateur, mais également celui du donataire, lequel doit pouvoir appréhender de la manière la plus claire qu’il soit les conséquences pour lui de l’acte libéral qu’il accepte, et qui ne manqueront pas dans un avenir plus ou moins proche de produire à son égard des effets financiers. On pense naturellement au caractère intangible du partage – qui nécessitera auprès des attributaires une information toute particulière délivrée par l’officier public lors de la régularisation de l’acte -, lequel interdira à l’attributaire ayant vu la valeur de son lot réduire à la faveur de circonstances économiques totalement indépendantes de sa volonté de solliciter un rattrapage ou une compensation lors de la succession du donateur. Dès lors, retenons que le recours à l’authenticité en matière de donation-partage permettra d’éclairer le consentement de l’ensemble des parties sur l’accord de volontés permettant la répartition qui devra s’exprimer tant sur la donation que sur la répartition qu’elle réalise. À cet égard, il nous faut citer cette décision de la Cour de cassation du 13 février 2019257 – ayant trait à une donation et un partage résultant d’actes distincts -, laquelle précise, d’une part, que « la donation-partage, qui peut être faite en deux temps (…), ne constitue pas un partage ordinaire que les attributaires pourraient contester mais un partage fait par l’ascendant de son vivant et selon sa volonté » et, d’autre part, que « le partage d’ascendant se forme dès que l’un des enfants a accepté son lot ». Ainsi la Cour de cassation justifie la singularité de la donation-partage sur le fait qu’elle repose sur la volonté du donateur, laquelle prime sur celles des donataires qui ne sont que des copartagés. Dès lors, le donateur est libre de gratifier, comme il le souhaite, ses héritiers présomptifs en établissant cependant lui-même « une répartition matérielle de ses biens entre ses descendants »258. Par ailleurs, l’acceptation d’au moins un des donataires rend valable et opposable aux autres donataires la donation-partage, de sorte que le refus d’un donataire à signer l’acte ne remet pas en cause sa validité.

4096 – Recours à l’authenticité pour les conditions et opérations annexes aux donations et donations-partages. – Si l’authenticité demeure l’apanage des donations, tombent également dans le giron de l’authenticité les conditions qui font immanquablement corps avec elles ainsi que les opérations annexes que l’on trouve très usuellement dans les donations-partages. Tel est le cas notamment des réincorporations des donations antérieures. Si, en suivant la doctrine majoritaire, on admet qu’il s’agit en réalité de révocation conventionnelle par mutuus dissensus259 d’une donation, soit d’une donation dans l’autre sens pour permettre ensuite un réallotissement – avec ou sans changement d’attributaire -, le formalisme de l’article 931 du Code civil s’impose naturellement. Il en est de même pour les réversibilités d’usufruit au bénéfice d’un cofondateur ou d’un tiers, lesquelles consistent également en des donations qui se rajoutent à la donation principale. Il s’agit là de donations de biens présents, à terme260, et ostensibles même si l’on peut y voir une des applications de la stipulation pour autrui. Dès lors, l’intention libérale est clairement contenue dans l’acte, faisant ainsi basculer sans discussion les réversibilités d’usufruit dans le champ d’application de l’acte notarié solennel, imposant la présence effective du notaire261.

4097 – Recours à l’authenticité pour les donations-partages transgénérationnelles et libéralités graduelles et résiduelles. – Le domaine de l’authenticité trouve également à s’appliquer dans les donations-partages réalisées entre descendants de degrés différents. La génération intermédiaire venant à renoncer à tout ou partie des biens qui lui sont transmis ne pourra voir cette renonciation recueillie que par acte notarié. Ici l’ensemble de la transmission constitue, de par la fiction de la loi, une double donation-partage : en effet, la renonciation porte ici sur des biens eux-mêmes transmis à titre gratuit, en sorte qu’il existe en réalité une double libéralité, même si sur un plan fiscal il est admis de ne taxer qu’une mutation unique au profit du bénéficiaire final. De même, l’authenticité paraît également réservée pour les libéralités graduelles et résiduelles. Cependant, il y a lieu de relever qu’il a été soutenu que la confection d’une clause contenant la charge de retransmettre peut faire corps avec un pacte adjoint262. Une telle position paraît éminemment contestable, ce que certain n’a pas manqué de développer avec raison263, en soulignant notamment que la stipulation d’une clause résiduelle ou graduelle sans contrepartie et en faveur d’un second bénéficiaire constitue assurément une donation ostensible au bénéfice de ce dernier qui ne peut se réclamer d’aucun formalisme de substitution. Dès lors, en suivant un tel raisonnement, il apparaît bien que ce n’est pas la tradition qui est le vecteur de la libéralité seconde, mais bien l’acte qui impose la charge de retransmettre justifiant le recours à l’authenticité.

§ II – Le recours au formalisme de substitution : la donation sans forme

4098 – Mouvement de désolennisation des donations. – Des développements qui précèdent, il ressort que l’article 931 du Code civil réserve à l’authenticité une zone d’activité exclusive pour les donations. Cela étant, nous ne pouvons que constater – et déplorer – le mouvement actuel de désolennisation des donations, appuyé en cela sur des thèses doctrinales et des accommodements jurisprudentiels venant tempérer ce principe d’ordre public de recours à l’authenticité. Ce mouvement libéral tend ainsi à réduire comme une peau de chagrin le domaine de compétence réservé de la donation authentique aux seuls biens rétifs à une tradition, c’est-à-dire, d’une part – pour des fins de publicité foncière -, les biens immobiliers et, d’autre part – pour des raisons de publicité de transfert -, les parts sociales. En effet, l’obligation de publier l’acte constatant le transfert pour le rendre effectif à l’égard des tiers ne permet pas d’imaginer que celui-ci ne révélerait pas l’intention libérale et ainsi contreviendrait directement à l’article 931 du Code civil, sans compter les formalités relatives à l’agrément des associés et la signification à la société264. Cependant, pour les autres donations, principalement celles qui reposent sur la tradition, il apparaîtrait que le recours à cette même tradition peut satisfaire certains caractères justifiant des entorses au principe de l’authenticité. Pour autant, et comme le souligne une partie de la doctrine265, le notaire est sans aucun doute l’une des personnes qui, dans l’exercice de son ministère, rencontre le plus souvent des donations « désolennisées » : au moment d’un divorce, lorsqu’un des époux se souvient que la résidence principale a été financée par un don manuel des parents ; lors d’un décès, quand certains héritiers entendent soumettre aux règles du rapport une donation de sommes d’argent non révélée ; ou lors d’une transmission à titre gratuit, lorsqu’il faut rappeler fiscalement les donations antérieures. Mais ce courant de désolennisation des donations s’inscrit dans un tout autre registre, justifiant l’impasse sur l’acte authentique par le recours à un formalisme autre, dit « formalisme de substitution » aux vertus – prétendues – égalées à celles de l’authenticité.

4099 – La thèse du « formalisme de substitution ». – Le courant de désolennisation des donations prend corps à l’appui de la thèse du formalisme de substitution développée par le doyen Ripert266. Celle-ci suppose que si le formalisme authentique a pour vocation de protéger le consentement des parties et plus particulièrement celui du donateur en attirant son attention sur l’acte, par nature irrévocable, alors tout formalisme qui viendrait en remplacement de celui prévu par la loi pourrait remplir cette fonction : tel serait ainsi le cas de l’acte d’emprunt pour la donation indirecte, la simulation sur la cause catégorique pour la donation déguisée267 et la tradition pour le don manuel, lequel ressort d’une variété de donations indirectes. Forte de cette position doctrinale, et loin d’abandonner l’exigence de formalisme, la jurisprudence accepte de sauver la libéralité, sur l’autel de l’authenticité, dans la mesure où, bien que contrevenant aux dispositions de l’article 931 du Code civil, un formalisme est porté par un autre acte susceptible de l’accueillir qui n’altère pas la fonction protectrice du consentement.

4100 – Critiques du formalisme de substitution. – Les raisons apportées à cette construction jurisprudentielle ne sont pas exemptes de critiques – à l’aune de la protection du consentement -, lesquelles n’ont pas manqué d’être développées par une partie de la doctrine éminente en la matière268.

4101 Sur un plan historique tout d’abord, l’étude de l’Ancien droit démontre qu’il n’a jamais été dans l’intention des législateurs successifs de rassembler sous la bannière de l’authenticité l’ensemble des donations. Ainsi le professeur Nicod269 a rappelé que l’article 931 du Code civil est directement issu de l’ordonnance de 1731 émanant du chancelier d’Aguesseau. Or, si aux termes de cette ordonnance tout acte « portant » donation devait être reçu devant notaire, c’est parce que l’Ancien droit admettait déjà le fait que certains biens puissent être remis de la main à la main et à titre gratuit, sans instrumentum autre que cette remise, laquelle suffisait alors à assurer la protection du donataire contre un éventuel changement d’attitude de son bienfaiteur. Le détenteur d’un bien remis par voie de tradition peut alors toujours déjouer toute revendication sur le fondement de la possession conformément aux dispositions de l’article 2276 du Code civil. Cette fonction protectrice de la tradition a donc toujours joué un rôle formel équivalent à celui de la solennité, ce qui en fait un redoutable concurrent de l’acte authentique puisqu’il coexiste toujours avec lui. Cela étant, il est à noter que la volonté de protection s’est probablement déplacée au fil du temps pour se recentrer davantage aujourd’hui vers celui qui subit irrévocablement l’appauvrissement. Mais, en tout état de cause, l’évasion du don manuel du champ d’application du formalisme légal des donations s’enracine plus vraisemblablement dans l’Histoire que dans une improbable quête d’un formalisme de substitution.

4102 Par ailleurs, les tempéraments de la jurisprudence à l’égard de ces donations sans forme peuvent également s’expliquer – toujours sur un plan historique – par la faiblesse des enjeux économiques que véhiculaient alors les dons manuels. Pourquoi en effet légiférer sur des transferts représentatifs de peu de valeur mobilière faisant ainsi écho à l’adage res mobilis, res vilis ? Or cette analyse est aujourd’hui largement prise à défaut, et nous ne pouvons que constater que le mouvement de désolennisation des libéralités s’est irrémédiablement amplifié à une période où le transfert de richesses mobilières prenait de l’essor. Aussi, avec le développement des techniques cambiaires, sont aujourd’hui validés de multiples transferts de richesses, sur le fondement d’une conception extensible et plastique – voire dématérialisée – de la tradition : ainsi, en matière de somme d’argent, a-t-il été décidé, dans le cas d’un virement, que la tradition résultait de l’inscription de cette somme au crédit du compte du bénéficiaire, le silence de celui-ci valant alors acceptation implicite de cette réception270. De même, en matière de chèque bancaire, il a été jugé que c’est la remise de cet effet qui constitue la tradition, dès lors que la provision existe au moment de cette remise271.

4103 – Propos conclusifs sur le formalisme de substitution. – En définitive, l’analyse suivant laquelle ce formalisme de remplacement remplirait une fonction protectrice du consentement est pour le moins discutable ; il faut davantage voir, dans ce phénomène d’amplification des dons réalisés hors de la forme solennelle, une volonté des juges de vouloir sauver un acte libéral frappé d’un vice de forme et une notion de tradition juridique à géométrie variable qui admet depuis l’Ancien droit une équivalence des formes. Toutefois, si dans un premier temps le sauvetage prétorien et in extremis de ces libéralités sans forme permettra de conforter la sécurité de ceux qui les ont initiés, il lui succédera dans un second temps une phase d’insécurité juridique pour les récipiendaires de ces dons au moment du règlement de la succession du donateur, afin qu’il en soit tenu compte dans les opérations liquidatives.

4104 – Développement croissant du recours au don manuel. – S’il paraît illusoire de vouloir prôner une authenticité obligatoire pour toute forme de don272, la réalité nous rappelle le succès d’un développement croissant du recours au don manuel. Dénué de tout formalisme, il porte en lui les germes – somme toute relatifs – de la simplicité et de la rapidité, vertus ô combien appréciées par nos sociétés modernes. Non défini par le Code civil, qui n’en utilise même pas les termes, le don manuel s’apparente selon la doctrine à la « donation faite de la main à la main, par simple tradition, d’une chose mobilière »273. Dès lors, si le don manuel ne satisfait pas par définition au formalisme légal des donations entre vifs, il se réalise en réalité par la simple tradition de l’objet donné. « La tradition n’intervient pas ici, comme dans la plupart des contrats, pour exécuter la convention ; elle forme, en outre et surtout, un élément constitutif, une cause efficiente de la libéralité même »274. La validité du don manuel suppose donc que la propriété d’une chose puisse être valablement transférée par sa seule tradition. Cela ne pose pas de difficulté particulière concernant la remise de la main à la main de biens corporels. En revanche, la dématérialisation des valeurs mobilières a ouvert le champ des possibles au don manuel, sans pour autant que la technique de réalisation en soit modifiée. Ainsi un ordre de virement, soit bancaire, soit sur les registres de la société servira de support à la dépossession des droits sociaux. Une réserve est toutefois à relever concernant les parts sociales pour lesquelles certaines formalités préalables vont s’opposer à la simplicité inhérente à un ordre de mouvement : la nécessité d’obtenir l’agrément du nouvel associé, l’intervention de la société aux fins de signification et surtout l’obligation de publier la mutation au greffe imposeront la rédaction d’un acte écrit à titre de preuve qui ne pourra que révéler et contenir sa dimension gratuite ne permettant pas alors d’échapper au formalisme édicté par l’article 931 du Code civil. En revanche, le transfert par don manuel d’actions ne souffre pas des mêmes contraintes, puisque sa négociabilité le soustrait aux objections que nous venons d’énoncer.

4105 – Faiblesses et insécurité juridique des dons manuels. – Si les dons manuels n’obéissent pas aux règles de forme des donations, il n’en demeure pas moins qu’ils sont soumis à leurs règles de fond. Où la simplicité séduisante et apparente du recours au don manuel – principalement inspirée par des motivations fiscales – peut très vite faire déchanter le profane…

4106 Ainsi, sur un plan civil, rappelons avec insistance que ce don supposera une dépossession irrévocable, sous peine de frapper de nullité le transfert d’argent qui ne respecterait pas cet impératif275. Par ailleurs, l’existence de la provision au moment de la remise du chèque demeure une exigence absolue. De même, devant obéir aux dispositions du droit des régimes matrimoniaux, un époux commun en bien ne pourra disposer des fonds communs sans l’accord de son conjoint, sous peine de nullité de l’opération pour violation des règles de cogestion276. Enfin, le don manuel consenti à un héritier réservataire sera présumé rapportable, la jurisprudence de la Cour de cassation n’ayant jamais admis qu’une présomption de préciput fut attachée au seul fait que le formalisme légal ait été écarté ; dès lors, pour pouvoir y déroger277, l’écrit sera nécessaire.

4107 Sur un plan fiscal à présent, le régime singulier du don manuel peut également réserver quelques surprises pour son initiateur. En effet, il faut également ici rappeler que le fait générateur des droits de donation sera constitué au choix par la date de déclaration, de la révélation, de la reconnaissance judiciaire ou du rappel fiscal du don manuel. Toutefois, le donataire qui choisira le cas de la révélation spontanée d’un don d’un montant supérieur à 15 000 € se verra offrir une option lui permettant de souscrire une déclaration de don manuel et d’acquitter les droits ultérieurement, soit dans le délai d’un mois suivant la révélation, soit dans le délai d’un mois suivant le décès du donateur, conformément aux dispositions de l’article 635 A du Code général des impôts. Les droits seront alors dus sur la valeur des biens au jour de la déclaration, ou la valeur au jour du don manuel si elle est supérieure ; en revanche, les tarifs applicables seront ceux en vigueur au jour de la déclaration, c’est-à-dire du paiement.

4108 Mais c’est certainement sur le plan probatoire que se concentre l’essentiel du contentieux. Tant que le don manuel porte sur des biens meubles corporels, l’article 2276 du Code civil trouvera à s’appliquer, établissant notamment une présomption de don manuel de par la possession réelle du bien. En revanche, sortie des dons manuels portant sur des biens meubles corporels, les règles du droit commun de la preuve trouveront alors à s’appliquer, de sorte que la preuve du don incombera à celui qui l’invoque : une tâche qui s’avérera bien compliquée pour le bénéficiaire du don, et ce d’autant plus qu’il faudra par ailleurs qu’il établisse l’existence d’une intention libérale. Enfin, et si tant est qu’une telle preuve soit rapportée, sa date, elle, ne le sera pas pour autant, engendrant un certain nombre de conséquences civiles et fiscales dans la liquidation successorale.

4109 – Le paradoxe du don manuel. – Étrange paradoxe en définitive que ce don manuel qui, par nature, repose et n’existe que par l’absence d’écrit, mais dont l’exigence devient nécessaire pour en assurer l’efficacité. On touche ici aux limites de ces donations sans forme, lesquelles, aussi séduisantes et simples soient-elles, apparaissent bien faibles au regard de la protection apportée par la solennité de la donation authentique en matière civile, fiscale et probatoire.

4110 – Le pacte adjoint. – Pour pallier l’absence d’écrit permettant de justifier l’existence d’un don manuel, une convention accompagnant la remise matérielle et désignant les clauses accessoires par lesquelles les conditions de la libéralité sont fixées peut être dressée : on parle alors de pacte adjoint. Reconnu en jurisprudence dès la fin du xixe siècle278, il est permis de s’interroger sur la forme que doit revêtir un tel acte et s’il doit notamment répondre aux solennités de l’article 931 du Code civil. La doctrine et la jurisprudence paraissent ne pas le comprendre dans le champ d’application de la solennité authentique puisque la forme notariée n’est imposée que pour l’acte qui réalise la donation, et non pour celui qui consisterait à constater une donation antérieure réalisée. Dès lors, il est analysé comme un acte récognitif au sens instrumentaire du terme279 : établi à des fins probatoires, il ne fait que constater la réalité d’un don manuel déjà consenti et relater les conditions qui ont entouré la transmission déjà effective. Sur un plan chronologique, il intervient donc dans un second temps, une fois le don consommé, raison pour laquelle il sera rédigé au passé composé280. Il confère une force probatoire qui fait ici défaut au don manuel, laquelle portera non seulement sur l’existence même de l’intention libérale, mais également sur la date du don. Par ailleurs, le pacte adjoint ne doit être que l’expression d’une volonté existant concomitamment à la tradition, par laquelle seule est réalisée la libéralité. Il ne peut donc pas porter sur le don manuel, ni y rajouter puisqu’il en est seulement un accessoire. Il est toutefois admis que le pacte puisse préciser les contours du don, en limitant notamment celui-ci à l’usufruit du bien transmis puisque la tradition permet à l’usufruitier de jouir du bien. Inversement, il est également envisageable de ne faire porter le don que sur la nue-propriété du bien281. Une réserve cependant sur cette dernière éventualité : dans le cas de valeurs mobilières ou sommes d’argent, et pour respecter la tradition, il est impératif que le donataire rentre en possession des biens donnés par démembrement du compte dit « d’accueil » et accepte d’en verser les revenus au donateur.

4111 Pour conclure, il faut ici retenir que l’état actuel du droit positif ne brille pas par sa cohérence. Le développement constant des dons consentis en dehors de toutes formes solennelles tend, comme nous l’avons déjà rappelé, à réduire le domaine de la donation authentique aux seuls biens rétifs à une tradition. En somme, tel le Dieu Janus aux deux visages, cohabitent donc aujourd’hui en droit positif deux régimes : d’un côté une infinie liberté laissée pour l’élaboration d’un don manuel par voie bancaire ou dématérialisée, sans considération de montant et quelles qu’en soient les conséquences pour les héritiers ; de l’autre de rares décisions venant sanctionner ceux qui, par maladresse, ont qualifié l’opération concernée de donation sans respecter le formalisme légal. Face à cette situation, le 108e Congrès des notaires de France avait déjà suggéré que soient soumis à l’authenticité tous les pactes adjoints rédigés en suite de dons manuels282. D’autres ont proposé de retenir un critère quantitatif ou qualitatif, permettant ainsi de fixer une limite assurant la protection des héritiers du donateur et du consentement de ce dernier283. Aussi, et comme le souligne très clairement M. Dagot, « le droit français des donations non solennelles est, en quelque sorte, à la croisée des chemins. Ou bien il admet libéralement, s’il ne le développe pas, les donations non solennelles. Force est alors de reconnaître que, dans les relations familiales, vis-à-vis des héritiers, sinon du conjoint, à l’égard des créanciers, il existera une somme d’incertitude accrue (…). La solution sera souvent le recours à la justice. Ou bien le droit français se ressaisit, et renoue avec sa tradition juridique la plus sûre, celle qu’en son temps le chancelier d’Aguesseau a inscrite dans les textes. (…) Pour ce faire, il convient non pas de développer les donations non solennelles comme on a trop tendance à le faire, mais à l’inverse de limiter leur champ d’application »284.

Sous-section II – L’acte authentique et les couples

4112 – Équilibre entre libertés individuelles et conventions conjugales. – Comme nous avons déjà eu l’occasion de le souligner au préalable, en raison de l’enjeu que représente la famille pour la société et de l’étroite dépendance entre organisation sociale et organisation familiale, il est compréhensible que l’État enserre les institutions familiales dans le respect de formes exigées tantôt à de simples fins de publicité, tantôt comme véritables conditions de validité. Dès lors, les volontés doivent pouvoir s’exprimer de façon solennelle devant une autorité publique, officier de l’état civil, notaire ou juge, qui en contrôle la réalité et parfois la sincérité et les motifs. Pour autant, les exigences formelles ont toujours eu du mal à s’imposer dans le domaine des relations conjugales où elles peuvent souvent être perçues comme un frein aux libertés individuelles. Délicat et savant équilibre à trouver pour les pouvoirs publics qui entendent encourager les aspirations matrimoniales tout en soumettant les conventions conjugales à un régime dérogatoire au droit commun des contrats et à un formalisme renforcé285. Toujours est-il qu’aujourd’hui, c’est sur la formation du couple que se fait le plus ressentir l’emprise de l’authenticité (§ I), alors même qu’un vent de consensualisme et de liberté souffle sur la séparation des couples (§ II).

§ I – L’emprise de l’authenticité sur la formation du couple
A/Le recours traditionnel à l’authenticité pour les couples mariés

4113 – Un formalisme ancré dans la tradition. – Le mariage fournit une des plus belles illustrations des contrats solennels en droit français. Le mariage est un acte solennel et le contrat de mariage, si les époux souhaitent en conclure un, l’est tout autant. Aussi le mariage doit-il être célébré publiquement lors d’une cérémonie républicaine par un officier d’état civil. Le contrat de mariage et les conventions matrimoniales doivent quant à eux être rédigés par acte passé devant notaire286. Le mariage est donc ancré dans la tradition et constitue le fruit d’une évolution historique qui reflète le souci croissant des autorités, religieuses ou laïques, de contrôler la formation du mariage287. Aujourd’hui le souci de contrôle et de protection se concentre principalement sur la lutte contre les mariages de complaisance et les mariages forcés. À cet égard, ce sont sans doute les multiples aménagements successifs de la procédure d’opposition à mariage ainsi que les conditions posées pour le mariage des Français à l’étranger qui en fournissent les meilleures illustrations288.

4114 – Authenticité administrative et formation du mariage. – Pour assurer le contrôle de la formation des mariages, l’État a délégué son autorité aux officiers d’état civil, lesquels vérifient et attestent que les conditions de formation du mariage que la loi a posées sont bien respectées. L’officier d’état civil est un tiers à l’événement considéré, aux déclarations et constatations desquelles la loi veut faire produire des effets juridiques supérieurs à celles d’un simple quidam. Pour ce faire, il est ainsi chargé d’obligations et doté de pouvoirs spécifiques. Ainsi les officiers publics que sont les officiers d’état civil, mais également les notaires, sont chargés, au nom de l’État, du pouvoir d’authentifier l’intention matrimoniale des futurs époux. Ce monopole du recueillement du consentement au mariage et au régime matrimonial s’explique par une seule et unique motivation : la sécurité juridique que l’État estime devoir tant à chacun des futurs époux qu’aux tiers qui seront amenés à contracter avec eux. De même, le caractère nécessaire du régime matrimonial implique que la loi se préoccupe de son contenu. Aussi celle-ci propose ainsi un régime matrimonial – dit « légal » – à tous les candidats au mariage qui n’ont pas jugé bon qu’un autre régime matrimonial – dit régime conventionnel – leur convienne davantage, lequel entrera alors en vigueur immédiatement, dès la célébration du mariage.

Authenticité notariale et conventions matrimoniales. Pour les époux ayant choisi de ne pas recourir au régime légal, la loi leur offre la possibilité de passer « comme ils le jugent à propos »289 des conventions ayant pour objet de régir leurs rapports patrimoniaux. Si le formalisme de l’authenticité des conventions matrimoniales n’est guère plus léger que celui relatif à la formation du mariage, la doctrine relève qu’il a toujours été mieux supporté290 : sans doute parce que l’on s’éloigne ici des considérations purement personnelles pour se rapprocher de questions patrimoniales. Pour autant, là encore, se cache un formalisme lourd, conditionnant la validité de ces conventions et permettant d’en assurer la publicité. Ainsi « toutes les conventions matrimoniales doivent être rédigées par acte devant notaire »291 et la sanction de l’inobservation de cette exigence est la nullité absolue292. Il en est de même des changements qui seraient apportés ultérieurement à ces conventions, conformément aux dispositions de l’article 1396, alinéa 1er du Code civil.

Retenons donc que si l’acte authentique n’est pas obligatoirement présent dans la formation du mariage, le recours à l’authenticité administrative, en la personne de l’officier d’état civil qui célèbre l’union des futurs époux, est une condition de validité du mariage. Il existe donc une chaîne entre les authenticités notariales et administratives destinée à assurer la protection des époux, quant au recueillement de leurs consentements (preuve du mariage), mais également quant à la certitude du choix du régime matrimonial adopté par ces derniers au moment de son entrée en vigueur (preuve du régime matrimonial).

B/L’authenticité renforcée pour les couples non mariés

4115 – Absence de tout formalisme en matière de concubinage. – Réfractaire par nature à tout formalisme, la définition qui a été donnée du concubinage par la loi du 15 novembre 1999 n’y change rien293. Le concubinage demeure avant tout une union de fait dont la formation n’est soumise à aucune condition. Dès lors, si la liberté à laquelle les concubins sont si attachés constitue « l’alpha et l’oméga » de leur conception du couple, la situation incertaine qui peut en résulter pour chacun d’eux en est le prix à payer. La séparation pourra ainsi intervenir de façon consensuelle ou par décision unilatérale sans avoir quelque forme que ce soit à respecter. De même, les concubins feront leur affaire des conséquences de la rupture qu’ils géreront alors comme ils l’entendent, alimentant ainsi un contentieux important devant le juge qui sera tenu de faire application du droit commun des contrats, des quasi-contrats, de la responsabilité, de l’indivision, etc.

4116 – De l’évolution de la formation du Pacs vers une authenticité administrative. – Face à la revendication des couples homosexuels, soucieux d’accéder pour leur couple à une véritable reconnaissance sociale, la loi du 15 novembre 1999 a créé un nouveau statut dans le Code civil : le pacte civil de solidarité. Comme le souligne la doctrine294, l’occasion était alors trop belle pour l’État de reprendre ainsi le contrôle sur des couples dont la formation, la vie et la dissolution lui échappaient. Dès lors, et en échange de cette reconnaissance tant attendue, l’État a exigé quelques conditions formelles pour bien distinguer ce nouveau statut du mariage. Ainsi l’ancien article 515-3 du Code civil assujettissait les partenaires à l’accomplissement d’une formalité consistant en une déclaration conjointe au greffe du tribunal d’instance de leur résidence aux fins d’enregistrement. L’objet de cet enregistrement consistait alors à donner au pacte date certaine et de le rendre opposable aux tiers au moyen d’une publicité restreinte. Les choses évoluèrent avec la loi du 23 juin 2006 et les dispositions complémentaires du décret du 23 décembre 2006295. En disposant que « le pacte civil de solidarité ne prend effet entre les parties qu’à compter de son enregistrement », l’article 515-3-1, alinéa 2 du Code civil conféra au Pacs le caractère de contrat solennel. Le rôle du greffier ne fut alors plus limité à un simple rôle d’enregistrement puisqu’il lui appartenait de vérifier au travers des pièces qui lui étaient remises que les conditions de validité du Pacs prévues par la loi étaient bien respectées : absence de lien de parenté prohibé, absence de mariage non dissous, absence de conclusion d’un autre Pacs. De même, la publicité du Pacs se trouvait assurée par une mention en marge de l’acte de naissance de chaque partenaire : c’est donc non seulement l’information des tiers qui s’en trouvait facilitée, mais également le formalisme de l’enregistrement qui en était simplifié. Ainsi, en adossant la publicité du Pacs à l’état civil, la loi du 23 juin 2006 fit entrer pleinement le Pacs dans l’état des personnes. L’estocade finale fut portée par la loi du 18 novembre 2016296 de modernisation de la justice du xxie siècle, en conférant aux officiers d’état civil – sans pour autant évincer les notaires – la compétence pour recevoir les déclarations de Pacs. Désormais, la loi soumet à l’authenticité administrative toute constitution de Pacs et les textes qui faisaient référence au greffier sont modifiés en conséquence. Si le formalisme de la déclaration de Pacs devant l’officier de l’état civil n’est pas totalement identique à celui de la célébration du mariage, le changement n’en est pas moins important dans l’ordre du symbole, et traduit la volonté de l’État de soumettre la formation d’un couple à un statut légal – mariage ou Pacs – à la formalité de l’authenticité.

4117 – Authenticité notariale et formation du Pacs. – Si, dans sa version issue de la loi du 15 novembre 1999, la convention de Pacs ne pouvait être établie que sous la forme sous seing privé, les évolutions législatives de 2006 et 2011 ont ouvert à l’authenticité notariale une place importante, en autorisant le notaire à rédiger des conventions de Pacs. L’article 515-3, alinéa 5 du Code civil dispose en effet que : « Lorsque la convention de pacte civil de solidarité est passée par acte notarié, le notaire instrumentaire recueille la déclaration conjointe, procède à l’enregistrement du pacte et fait procéder aux formalités de publicité prévues à l’alinéa précédent ». Ainsi l’authenticité notariale en matière de Pacs devient identique à celle connue pour toutes les conventions reçues par acte notarié, notamment le contrat de mariage. Toutefois, si l’authenticité administrative et l’authenticité notariale paraissent de même nature dans le rôle qui leur est assigné, elles n’en demeurent pas moins de degré différent. Ainsi le rôle de l’officier d’état civil se cantonne à recueillir la déclaration conjointe des partenaires et à en assurer un contrôle de légalité, là où le notaire – astreint à la même mission – devra par ailleurs recueillir le consentement des partenaires. De plus, l’officier d’état civil, après avoir enregistré la déclaration conjointe, remettra aux partenaires un récépissé d’enregistrement. Le notaire quant à lui assurera, comme pour tout acte authentique, la conservation de la convention de Pacs pendant une période de soixante-quinze ans et en délivrera une copie authentique aux partenaires. Enfin, rappelons que l’officier d’état civil n’est tenu à aucun devoir à l’égard des partenaires quant au choix de leur régime pacsimonial – indivision ou séparation de biens -, la loi ne précisant nullement qu’il doit user de sa délégation conférée par l’État pour délivrer une information à ce sujet aux partenaires. Son rôle se borne ici à enregistrer une convention établie directement par les parties pour répondre à une exigence formelle conditionnant la validité du Pacs. À l’inverse, le notaire, tenu à sa mission de service public de conseil, devra éclairer les futurs partenaires sur le choix du régime pacsimonial le plus à même à répondre à leurs attentes, au regard de leur situation. Dès lors, la sécurité juridique apportée par l’authenticité notariale, à l’aune de la protection du consentement des partenaires, du choix de leur régime pacsimonial et de la conservation de leur convention apparaît en tout point supérieure à celle de l’authenticité administrative.

§ II – L’essor du consensualisme lors de la séparation du couple
A/L’authenticité insuffisante lors de la dissolution du Pacs

4118 – Authenticité administrative et liberté de rupture du Pacs. – S’inspirant de la séparation des couples soumis au statut du concubinage, le même esprit de liberté a inspiré les créateurs du Pacs. Ainsi, si le Code civil prévoit expressément les causes de dissolution du Pacs, en revanche les formes de sa dissolution sont réduites à une portion congrue. Elles ont ici seulement pour objet d’assurer l’enregistrement de la dissolution et d’en assurer la publicité, au travers de l’intervention de l’officier d’état civil qui avait procédé à l’enregistrement lors de la formation. La seule formalité originale est certainement celle prévue dans le cas de rupture unilatérale, puisque dans ce cas précis l’auteur de la rupture doit la faire signifier à son partenaire et adresser la copie de cette signification au greffier ou à l’officier de l’état civil qui avait procédé à l’enregistrement297. Certains298 y ont vu une authenticité « nouvelle » dans les relations du couple avec l’apparition de l’acte authentique d’huissier ; pour autant, il faut bien admettre que cette authenticité est loin d’être satisfaisante. Cela est encore plus symptomatique mesuré à l’aune des conséquences de la rupture du Pacs, la loi ne prévoyant aucun cadre à cet effet : ainsi le principe retenu consiste à ce que les partenaires procèdent eux-mêmes à la liquidation de leurs droits et de leurs obligations, le juge n’intervenant qu’à défaut d’accord299 pour apurer les difficultés relatives à la liquidation et au partage des biens. La sécurité juridique des ex-partenaires s’en trouve donc considérablement affectée puisque ceux-ci ne disposent – lors de la formalité de dissolution auprès de l’officier d’état civil – d’aucune information sur les conséquences juridiques et fiscales de cette dissolution.

4119 – Dissolution d’un Pacs authentique. – On aurait pu légitimement penser que le législateur offre davantage d’égards aux partenaires ayant recouru à un Pacs authentique afin qu’ils puissent bénéficier – tout comme au moment de la conclusion de leur convention – d’un conseil éclairé pour la dissolution de leur Pacs. Mais, ici aussi, le notaire n’a pas à intervenir dans le processus de dissolution. Son rôle se cantonne – tout comme l’officier d’état civil – à demeurer le destinataire de la « déclaration conjointe » des partenaires ou de la signification de la « décision unilatérale » afin simplement d’enregistrer cette dissolution. Dès lors, il appartient au notaire, informé par les ex-partenaires de la dissolution de leur Pacs, de prendre attache auprès d’eux pour leur délivrer un conseil sur les conséquences juridiques et fiscales liées à cette dissolution et les interpeller sur la nécessité de procéder à une liquidation de leurs intérêts pacsimoniaux. Comme cela a déjà été souligné à l’occasion du 111e Congrès des notaires, « cette absence de conseil authentique systématique à l’initiative de la loi lors de la dissolution d’un Pacs – pourtant volontairement conclu par acte authentique – ne permet pas de maintenir le niveau de sécurité juridique que les partenaires sont en droit d’attendre quand ils ont fait le choix d’un Pacs authentique »300.

B/La liberté surveillée des époux

4120 – Une authenticité présente en début comme en fin de vie du couple marié. – Considérée comme un fait social majeur, la séparation des couples mariés commande une protection singulière qui doit se manifester dans la séparation en elle-même, dans ses modalités techniques, mais également dans ses conséquences. Aussi l’authenticité, qui est apparue comme essentielle dans la formation des couples mariés, rejaillit également en fin de vie du couple. L’authenticité qui était ainsi présente à la naissance du couple pour le porter sur les fonts baptismaux de l’état civil – incarnée alors par l’officier d’état civil lors de la célébration du mariage et le cas échéant par le notaire instrumentaire de la convention matrimoniale – le sera tout autant à son terme, au travers de l’intervention du juge pour prononcer le jugement de divorce et du notaire si besoin est. Autrement dit, et concernant les couples mariés, ce que l’authenticité a lié seule l’authenticité peut être amenée à le délier.

4121 – Lien entre l’authenticité judiciaire et l’authenticité notariale. – Toutefois, à la comparer à la liberté offerte aux partenaires d’un Pacs, celle des époux apparaît assurément plus réduite et la rupture de leur union, bien que désormais érigée au rang de liberté fondamentale301, est encadrée par un formalisme beaucoup plus strict résultant de la législation sur le divorce. Toutefois, et bien qu’il soit sensiblement atténué au fil des lois en développant des passerelles avec le divorce par consentement mutuel, le formalisme est resté très présent en raison notamment du prononcé judiciaire du divorce. Ainsi, dans les formes de divorce autres que par consentement mutuel, les époux sont tenus à une procédure soigneusement détaillée302. L’invitation qui leur est adressée par le législateur de régler aussi souvent que possible par voie de convention les conséquences de leurrupture303, et spécialement les conséquences patrimoniales304, ne suffit pas à faire disparaître l’omniprésence du juge pour en assurer le contrôle et leur donner force obligatoire. Ici encore, c’est le jugement de divorce prononcé par le juge aux affaires familiales qui cristallise le divorce. Cela étant, ce jugement peut être précédé d’un acte de liquidation et partage, établi en la forme authentique, lorsque les époux se trouvent dans l’hypothèse de l’article 1091 du Code de procédure civile305. Il y aura alors homologation judiciaire de l’acte notarié de partage, lequel deviendra exécutoire concomitamment au prononcé du divorce, et fera corps avec le jugement. Quant au partage intervenant postérieurement au jugement, dans le cadre d’un divorce contentieux, nous nous reporterons ici aux précédents travaux développés dans le rapport du 111e Congrès des notaires de Strasbourg en 2015306.

4122 – Le nouveau divorce par consentement mutuel : « divorce sans juge ». – La loi du 18 novembre 2016, dite de « modernisation de la justice du xxie siècle », apporte un changement d’ordre « révolutionnaire »307 en introduisant un divorce par consentement mutuel par acte sous signature privée308, communément désigné « divorce sans juge ». Officiellement, ce principe de déjudiciarisation du divorce a pour mission de « recentrer les juridictions sur leurs missions essentielles »309, mais cache officieusement un objectif d’optimisation « dans le traitement de la masse des dossiers avec des moyens limités »310, dans des délais de plus en plus contrôlés, sous couvert d’une politique de disette budgétaire. Le formalisme retenu consiste désormais, dans un premier temps, en une convention prenant la forme d’un acte sous signature privée contresigné par les avocats de chaque époux311, laquelle doit, dans un second temps, être déposée au rang des minutes d’un notaire312 qui contrôle le respect d’un certain nombre d’exigences formelles et de mentions devant figurer dans la convention à peine de nullité. Nous ne reviendrons pas ici sur l’analyse minutieuse et détaillée de cette nouvelle procédure de divorce313, pour mieux nous attacher aux atteintes portées à l’authenticité.

4123 – Vers une dépossession du notaire de ses fonctions d’authentification. – « Pris par l’action d’un étau politique »314, le notaire voit sa mission d’officier public se borner à une fonction de simple enregistrement, conduisant en réalité à une dépossession de ses fonctions d’authentification. En effet, le rôle du notaire dans cette nouvelle procédure se résume à vérifier le respect du délai de réflexion de quinze jours laissé aux époux ainsi que la régularisation formelle de la convention qu’il lui est demandé de déposer au rang de ses minutes. De même, il lui incombe de s’assurer que les époux sont toujours en vie et qu’ils n’ont pas renoncé au divorce conventionnel entre-temps, au même titre qu’il doit s’assurer que la convention ne heurte aucune règle d’ordre public, conformément aux principes qui veulent que l’authenticité repose sur un contrôle systématique de légalité. Toutefois, le législateur n’a pas voulu faire du notaire une autorité d’homologation de la convention de divorce par consentement mutuel par remplacement du juge, de sorte qu’il lui est interdit d’exercer le moindre contrôle sur le fond du divorce. Il en résulte qu’il n’est pas habilité à vérifier l’équilibre de la convention, la liberté et le caractère éclairé du consentement des époux, non plus qu’à procéder à une vérification d’écriture et de signature. En somme, et outre quelques obligations supplémentaires fondées essentiellement sur un contrôle des aspects formels de la convention, le rôle du notaire se résume à enregistrer une convention – librement négociée sous les auspices de deux avocats – comme le fait un greffier des actes de procédure qui lui sont remis dans les cas et conditions matérielles prévus par la loi.

4124 – Démembrement du processus d’authentification. – Si le notaire semble cantonné à un maigre rôle de vérificateur de forme, il n’en demeure pas moins que cette intervention est essentielle : cette formalité consiste en un élément constitutif de cette procédure puisque le nouveau divorce par consentement mutuel ne prend effet que par le dépôt de la convention contresignée par avocats au rang des minutes d’un notaire315 et n’emporte dissolution du mariage qu’à la date de celui-ci316. L’acte de dépôt devient dès lors la pierre angulaire de cette nouvelle procédure de divorce. Pour autant, il cristallise l’incompréhension puisque la circulaire explicative précise que ce dépôt « ne confère pas à la convention de divorce la qualité d’acte authentique »317, alors même que l’article 229-1, alinéa 3 du Code civil dispose que : « Ce dépôt donne ses effets à la convention en lui conférant date certaine et force exécutoire ». En somme, on refuse au notaire de procéder à la vérification au fond de la convention de divorce et d’éprouver le consentement des époux, mais on entend néanmoins octroyer certains attributs de l’authenticité à l’acte de dépôt. Lorsque l’on sait que seul l’acte de dépôt avec reconnaissance d’écriture et de signature permet de conférer l’authenticité à la convention déposée318, on ne peut qu’être saisi d’effroi face à cet état de confusion qui porte atteinte à l’authenticité, en déniant reconnaître que la force exécutoire ne peut se concevoir aux seuls actes dont le rédacteur est délégué d’une parcelle de l’autorité publique. La loi procède en réalité à une sorte de « démembrement inédit du processus de l’authentification »319 en partageant entre les avocats, chargés d’assister les époux dans la négociation et la conclusion de la convention, et le notaire, chargé de l’accueillir au rang de ses minutes, ce qui participe à l’essence même de son ministère ordinaire : à savoir le contrôle de l’équilibre, de l’efficacité et de la légalité de l’opération à laquelle il s’agit de donner la force d’un acte public. Le nouveau rôle assigné au notaire dans le divorce par consentement mutuel consiste donc en un rôle d’enregistrement et de conservation de la convention de divorce ; mais, orpheline de toute authenticité, celle-ci devrait tout naturellement être privée de toute force exécutoire. Dès lors, il en résulte une dangereuse « autonomisation de la force exécutoire »320 portant en elle les germes d’une inquiétante compréhension du statut d’officier public par le législateur.

4125 – Propos conclusifs. – À la lumière de ces premiers développements, on comprend que l’authenticité notariale, où la rencontre d’un homme – l’officier public, agent de la légalité et ayant pour mission d’intérêt général le conseil des parties – et d’un acte – fruit d’un formalisme juridique aux solennités les plus abouties – apparaît comme un viatique protecteur dans l’accompagnement et le développement des relations sociales privées. L’authenticité traduit également la fonction étatique exercée dans les rapports contractuels, en formant une passerelle entre l’État et la société civile, qui tend à se développer au vu de la politique actuelle de déjudiciarisation. Dès lors, et si pour assurer l’équilibre contractuel le législateur peut avoir recours à des règles de forme diverses pour renforcer l’information de la partie jugée « la plus faible » au contrat ou lutter contre un engagement irréfléchi d’une partie à l’acte, rien ne saurait remplacer l’interposition d’un notaire qui offre un éclairage à nul autre pareil sur la portée et les conséquences des engagements pris par les parties contractantes, tout en permettant à celles-ci, en cas de manquement à son devoir de conseil, de pouvoir engager sa responsabilité. Ainsi, en éprouvant, pour chaque acte qu’il reçoit, le consentement des parties à l’aune de conseils accessibles et adaptés à chaque cas d’espèce, tout en s’assurant de la conformité de la convention à régulariser aux prescriptions de l’ordre juridique dans lequel il est censé s’intégrer, le notaire contribue au quotidien à protéger l’équilibre contractuel en se mettant au service de l’ensemble des parties contractantes. Mais la mission protectrice du service public de l’authenticité ne se borne pas à éclairer la décision de chaque partie contractante et se poursuit en assurant la préconstitution incontestable de la convention qui constate les accords de volonté.


194) Y. Jeanclos, Formalisme et consensualisme : la sempiternelle querelle du droit des contrats, in Hommages à G. Boulvert, Nice, éd. de l’Université de Nice, 1987, p. 333 et s.
195) J. Flour, J.-L. Aubert et E. Savaux, Droit civil, les obligations, t. 1 : L’acte juridique, Sirey, 17e éd., no 304.
196) 63e Congrès des notaires de France, Clermont-Ferrand, 1965, L’accession à la propriété dans la construction moderne. Le vœu avait été alors le suivant : « Qu’une loi sur la construction, réglementant les rapports de droit privé entre les parties, est entièrement souhaitable ».
197) V. not. les travaux du colloque sur le 50e anniversaire de la vente d’immeubles à construire, tenu à Paris le 15 mars 2017 au Conseil supérieur du notariat, Célébrer ensemble le cinquantième anniversaire de la vente d’immeubles à construire et donc en l’état futur d’achèvement : JCP N 2017, nos 30-34.
198) H. Périnet-Marquet, Propos conclusifs : la loi du 3 janv. 1967, modèle ou top modèle ? : JCP N 2017, nos 30-34, p. 81.
199) J.-Ph. Tricoire et P.-J. Meyssan, La Vefa et la protection du consommateur immobilier : JCP N 2017, nos 30-34, p. 45.
200) J.-L. Bergel, Bilan et perspectives des livres I et II du Code de la construction et de l’habitation : RD imm. 2004, p. 501.
201) J.-B. Auby, H. Périnet-Marquet et R. Noguellou, Droit de l’urbanisme et de la construction, LGDJ-Lextenso, 10e éd. 2015, p. 931.
202) V., en ce sens, l’étude de H. Bizot, Le notaire face au risque en droit de la construction : JCP N 2018, no 35, p. 323.
203) J.-B. Auby, H. Périnet-Marquet et R. Noguellou, Droit de l’urbanisme et de la construction, LGDJ-Lextenso, 10e éd. 2015, p. 931.
204) On précisera que s’agissant des mentions et annexes obligatoires prévues à l’art. L. 261-11 du Code de la construction et de l’habitation, la nullité en question est une nullité relative ne pouvant être invoquée que par l’acquéreur, lequel ne peut s’en prévaloir qu’avant l’achèvement des travaux (cette appréciation se fait au jour de l’introduction de la procédure d’instance : Cass. 3e civ., 30 sept. 2015, no 14-12.845, FS-B+B : Constr.-Urb. 2015, comm. 160).
205) Cass. 3e civ., 4 oct. 2018, no 16-22.095, FS-P+B : JurisData no 2018-016969.
206) Cass. 3e civ., 7 avr. 2016, no 15-11.342.
207) Cass. 3e civ., 7 janv. 2016, no 14-29.665 : JurisData no 2016-00060 ; JCP N 2016, no 3, act. 172.
208) Cass. 3e civ., 23 mai 2019, no 17-17.908, P+B+I : JurisData no 2019-008442.
209) V. Zalewski-Sicard, Résidence « hôtelière » et secteur protégé des ventes d’immeubles à construire : JCP N 2019, nos 22-23, no 518.
210) C. Davèze et J.-P. Prohaszka, Bilan général de santé de la Vefa : JCP N 2017, nos 30-34, p. 74.
211) CCH, art. R. 111-1-1, al. 4 : « Un logement ou habitation comprend, d’une part, des pièces principales destinées au séjour ou au sommeil, éventuellement des chambres isolées et, d’autre part, des pièces de service, telles que cuisines, salles d’eau, cabinets d’aisance, buanderies, débarras, séchoirs, ainsi que, le cas échéant, des dégagements et des dépendances ».
212) Cass. 3e civ., 13 avr. 2010, nos 09-10.459 et 09-10.799 : JurisData no 2010-004171.
213) C. Davèze et J.-P. Prohaszka, Bilan général de santé de la Vefa, préc.
214) Cass. 3e civ., 19 mai 2016, nos 14-28.278 et 14-28.708 en matière d’attestations de complaisance et responsabilité diverses (vendeur, architecte et notaire pour défaut de vérification élémentaire). – Cass. 3e civ., 26 févr. 2013, no 11-22.183, en matière d’attestation de complaisance sur l’état d’avancement des travaux, perception indue du prix et responsabilité de l’architecte.
215) 111e Congrès des notaires de France, Strasbourg, 2015, La sécurité juridique : un défi authentique, 4e commission, Sécurité juridique et vente d’immeubles, spéc. nos 4169 et 4170. – V. égal. sur ce point : J.-Ph. Tricoire et P.-J. Meyssan, La Vefa et la protection du consommateur immobilier : JCP N 2017, nos 30-34, spéc. nos 31 et s. – C. Davèze et J.-P. Prohaszka, Bilan général de santé de la Vefa : JCP N 2017, nos 30-34, spéc. nos 18 et s.
216) V. concl. av. gén. ss Cass. 3e civ., 21 juin 1977, no 75-15.281 : JurisData no 1977-797270.
217) Cass. 3e civ., 27 oct. 1975, no 74-11.080 : D. 1976, jurispr. p. 97, note E. Franck.
218) Cass. 3e civ., 18 déc. 1984, no 83-14.793.
219) Cass. 3e civ., 27 avr. 2011, no 09-12.976.
220) Cass. 3e civ., 20 oct. 2004, no 03-10.406 : JurisData no 2004-025359 ; JCP N 2005, no 5, 1076, note P. Cornille.
221) Cass. 3e civ., 26 sept. 2007, no 06-17.187 : JurisData no 2007-040556 ; Constr.-Urb. 2017, comm. 206, note P. Cornille.
222) Pour une proposition de solution à envisager, V. not. C. Davèze et J.-P. Prohaszka, Bilan général de santé de la Vefa : JCP N 2017, nos 30-34, spéc. nos 37 et s.
223) Cass. 1re civ., 18 févr. 1997, no 95-11.942.
224) Cass. com., 12 oct. 2004, no 00-13.348.
225) Cass. ass. plén., 5 déc. 2014, no 13-19.674 : JCP N 2014, no 1268.
226) J.-P. Lévy et A. Castaldo, Histoire du droit civil, Paris, Dalloz, coll. « Précis », 2e éd. 2010, no 763.
227) J. Domat, Les lois civiles dans leur ordre naturel, Livre III, Titre I, Section I, art. 33, Paris, 1771, t. 1, p. 167.
228) L’art. 2374 du Code civil dénombre neuf privilèges spéciaux immobiliers.
229) En effet, dans un tel cas de figure, le débiteur ne voit pas sa situation aggravée puisqu’il se borne à transporter à un nouveau créancier les sûretés qui existaient déjà contre lui au profit d’un nouveau créancier. En revanche, l’acte authentique servira à déjouer des montages empreints de fraude. Tel sera notamment le cas d’un débiteur ayant acquitté une dette garantie par une hypothèque sur un immeuble, et qui souhaite quelques années plus tard souscrire un nouveau prêt. Il fait alors revivre la créance originaire éteinte au moyen d’une quittance subrogative antidatée, de manière à pouvoir offrir au nouveau créancier une subrogation dans les droits du créancier initial qui venait à un rang prioritaire. L’acte authentique faisant foi de sa date, à raison de l’intervention de l’officier public, fera dès lors obstacle à ce type de montage.
230) Cass. 3e civ., 15 févr. 2006, no 04-19.847 : Bull. civ. 2006, III, no 35.
231) Cass. req., 3 nov. 1903 : S. 1906, 1, p. 529.
232) G. Khairallah : Rép. dr. int. Dalloz, Vo Hypothèque, no 12. – M.-E. Ancel, Lamy Droit des sûretés, Vo Sûretés réelles en droit international privé, no 290-47. – C. Albiges, L’hypothèque conventionnelle transfrontalière européenne : Dr. et patrimoine juill.-août 2006, p. 74.
233) Cass. 1re civ., 12 juin 2013, no 12-15.467. – Adde, N. Randoux, La forme de l’hypothèque à l’heure des rapports juridiques transfrontaliers : JCP N 2013, 1253.
234) Cass. req., 5 nov. 1860 : DP 1861, jurispr. p. 300.
235) J.-F. Riffard, Regards croisés sur le formalisme en droits des sûretés : quand le mieux est – parfois – l’ennemi du bien…, in Le formalisme, LGDJ, 2017, p. 120.
236) Cass. civ., 6 févr. 1939 : D. 1939, I, p. 53, note J.-S. Plassard ; S. 1941, I, p. 145, note R. Rodière.
237) Cass. civ., 7 févr. 1854 : DP 1854, jurispr. p. 49. – Cass. req., 24 mai 1886 : DP 1887, jurispr. p. 222 ; S. 1886, 1, p. 247.
238) On rappellera que par application de l’article 1844-2 du Code civil, il n’est pas nécessaire que la délibération spéciale de la société autorisant l’hypothèque soit notariée. Conçue comme une exception au principe du parallélisme des formes, la règle n’évite pas pour autant l’acte notarié pour la constitution de l’hypothèque. De même, l’application de cet art. ne devrait pas être étendue aux associations, dans la mesure où il constitue un texte dérogatoire au droit commun, expressément prévu pour les sociétés (V., en ce sens, Rép. min. no 56969 : JOAN Q 10 déc. 1984, p. 5445).
239) V. not. les développements qui vont suivre en 2e partie sur la force exécutoire.
240) Cass. 1re civ., 3 oct. 1973 : Bull. civ. 1973, I, no 263. – Cass. 1re civ., 5 oct. 1999, no 97-14.545 : Bull. civ. 1999, I, no 258.
241) Cass. 1re civ., 23 nov. 1999, no 97-12.598 : Bull. civ. 1999, I, no 319.
242) N. Laurent-Bonne, La dictée du testament authentique, un succédané de formalisme rituel, in Le formalisme, LGDJ, 2017, p. 11.
243) C. Brenner, Authenticité, droit de la famille : libres propos sur la déréglementation : JCP N 2014, no 41, 1297.
244) C. Brenner, Authenticité, droit de la famille : libres propos sur la déréglementation, préc.
245) Cornu, L’écrit dans la perspective du droit, in L’art du droit en quête de sagesse, PUF, 1998, p. 247 et s.
246) Pour une synthèse de ces arguments que la doctrine relève unanimement : M. Grimaldi, Libéralités, partages d’ascendants, Litec, 2000, no 1278, 2o. – V. égal. M. Nicod, Le formalisme en droit des libéralités, thèse, éd. La Mouette, 2000-2001, no 88.
247) M. Nicod, note ss Cass. 1re civ., 11 sept. 2013 : Defrénois 15 nov. 2013, no 21, p. 1090.
248) C. civ., art. 933.
249) Cass. 1re civ., 11 sept. 2013, note préc., il s’agit d’une nullité absolue pour défaut de respect du formalisme requis ad validitatem.
250) M. Nicod, note préc. ; adde : CA Caen, 9 juill. 1962 : JCP 1962, II, 12840 ; RTD civ. 1963, p. 127, obs. R. Savatier.
251) JCl. Civil Code, Art. 931, Fasc. 10, nos 59 et 60, par J.-F. Monterdon. – Cass. req., 1er déc. 1846 : DP 1847, I, p. 15 ; S. 1847, I, p. 289.
252) Cass. 1re civ., 29 juin 1983 : Defrénois 1984, art. 33267, obs. G. Champenois.
253) M. Grimaldi, Droit civil, libéralités, partages d’ascendant, Litec, 2000, no 1791.
254) M. Grimaldi, Droit civil, libéralités, partages d’ascendant, op. cit.
255) Cass. 1re civ., 1er déc. 1999 : Bull. civ. 1999, I, no 327 ; JCP N 2000, p. 1844, note M. Dagot ; RTD civ. 2000, p. 884, obs. J. Patarin. – Cass. 1re civ., 3 janv. 2006 : Bull. civ. 2006, I, no 3 ; D. 2006, pan. 2073, obs. M. Nicod ; RTD civ. 2007, p. 610, obs. Grimaldi.
256) M. Iwanescko et C. Brenner, Le traitement civil du don manuel : les conséquences liquidatives : Actes prat. strat. patrimoniale déc. 2012, no 4, p. 36, no 25.
257) Cass. 1re civ., 13 févr. 2019, no 18-11.642, F-P+B : JurisData no 2018-001941.
258) Cass. 1re civ., 6 mars 2013, no 11-21.892. – Cass. 1re civ., 20 nov. 2013, no 12-25.681.
259) J. Flour et H. Souleau, Les successions, Paris, Armand Colin, 1982, no 557. – M. Grimaldi, Droit civil, libéralités, partages d’ascendant, Paris, Litec, 2000, no 1776, p. 556.
260) Cass. 1re civ., 21 oct. 1997, Bull. civ. 1997, I, no 291 ; JCP 1997, II, note Harel-Dutirou ; RTD civ. 1998, p. 721, obs. J. Patarin, et obs. F. Zenati. – Cass. ch. mixte, 8 juin 2007, no 05-10.727 : D. 2007, p. 1731, obs. C. Delaporte-Carré ; RTD civ. 2007, p. 605, obs. M. Grimaldi.
261) S. Durand, La constitution de la réversion d’usufruit : JCP N 16 mars 2001, no 11, p. 592.
262) P. Murat, Le choix du support d’une clause graduelle ou résiduelle : JCP N 2012, no 17, spéc. no 31.
263) G. Bonnet, Pour un formalisme raisonné des donations, in Le formalisme, LGDJ, 2017, p. 61.
264) Contra cependant pour les parts sociales : N. Peterka, La diversité objet du don manuel : Actes prat. strat. patrimoniale déc. 2012, no 4, art. 32, nos 7 et s.
265) G. Bonnet, Pour un formalisme raisonné des donations, préc., p. 55.
266) G. Ripert et J. Boulanger, Traité élémentaire de droit civil, t. IV, no 3351.
267) Sur la notion de cause catégorique, V. H. Méau-Lautour, La donation déguisée en droit civil français – Contribution à la théorie générale des donations, LGDJ, 1985.
268) G. Bonnet, Pour un formalisme raisonné des donations, préc., p. 56 et 57.
269) M. Nicod, Le formalisme en droit des libéralités, thèse préc., no 398.
270) N. Peterka, La diversité objet du don manuel : Actes prat. strat. patrimoniale déc. 2012, no 4, art. 32, no 10.
271) N. Peterka, La diversité objet du don manuel, préc., no 10.
272) X. Lagarde, Réflexions sur le fondement de l’art. 931 du Code civil : RTD civ. 1997, p. 36, no 8, « Il y aurait beaucoup d’histoires à défaire pour remettre en cause le don manuel ».
273) G. Cornu, Vocabulaire juridique, Assoc. H. Capitant.
274) P. Bressolles, Théorie et pratique des dons manuels, thèse, Paris, 1885, p. 105.
275) Soit pour le cas où le transfert a lieu sur un compte où le donateur avait procuration : Cass. 1re civ., 3 mars 1987 : Bull. civ. 1987, I, 1987, no 82. – CA Paris, 19 mars 1991 : D. 1991, inf. rap. p. 126. – Cass. 1re civ., 3 mai 2006 : Bull. civ. 2006, I, 210. – Cass. 1re civ., 7 juin 2006 : Bull. civ. 2006, I, no 294 ; soit pour le cas où le transfert a lieu sur un compte joint avec le donataire : Cass. 1re civ., 17 avr. 1985 : JCP G 1985, IV, p. 227 ; D. 1986, I, p. 21, note M. Muller.
276) M. Iwanesko et C. Brenner, Le traitement civil du don manuel, les conséquences liquidatives : Actes prat. strat. patrimoniale déc. 2012, no 4, 34, no 18.
277) M. Grimaldi, Les successions, Litec, 5e éd. 1998, 670.
278) Cass. req., 23 mai 1822, 1, p. 518. – Cass. req., 6 févr. 1844 : DP 1844, 1, p. 152.
279) Pour une analyse complète : J.-F. Desbuquois et C. Brenner, L’adaptation du don manuel aux objectifs poursuivis : le pacte adjoint : Actes prat. strat. patrimoniale déc. 2012, no 4, 35, nos 6 et s. – V. égal. 108e Congrès des notaires de France, Montpellier, 2012, La transmission, nos 3184 et s.
280) J.-F. Desbuquois et C. Brenner, L’adaptation du don manuel aux objectifs poursuivis : le pacte adjoint : Actes prat. strat. patrimoniale déc. 2012, no 4, art. 32, no 7.
281) M. Grimaldi, Droit civil, libéralités, partages d’ascendant, Litec, 2000, no 1293. – J.-F. Desbuquois et C. Brenner, art. préc., nos 23 et s.
282) « Que le don manuel ne soit possible que lorsque le transfert de propriété, réalisé par tradition dématérialisé ou non, ne suppose l’établissement d’un acte, Que si un acte est établi pour réaliser ce transfert de propriété, celui-ci, s’il est neutre, c’est-à-dire ne qualifie pas la libéralité qu’il porte, en cas d’intention libérale, soit qualifié de donation indirecte, Que si un acte est nécessaire pour qualifier la libéralité ou l’assortir de charges ou de conditions, formant un tout indissociable dans l’esprit des parties, l’ensemble doit être soumis au formalisme de l’article 931 du Code civil, qui est l’acte authentique » (108e Congrès des notaires de France, Montpellier, 2012, La transmission, 3e commission, Des moyens, par S. Arnaud, S. Ginon et F. Petit).
283) G. Bonnet, Pour un formalisme raisonné des donations, préc., p. 62.
284) M. Dagot, Des donations non solennelles : JCP G 26 juill. 2000, no 30-34, I, 248.
285) F. Dreiffus-Netter, Les manifestations de volonté tendant à la création ou à l’extinction des liens familiaux, in Le rôle de la volonté dans les actes juridiques, Études à la mémoire du Professeur A. Rieg, Bruxelles, Bruylant, 2000, p. 263. – S. Fulli-Lemaire, La privatisation du droit de la famille en France – Perspectives comparatives : RID comp. 2016-2, p. 405.
286) C. civ., art. 1394, al. 1.
287) Pour une étude historique du formalisme attaché à la formation du mariage, V. J.-J. Lemouland, Formalisme et conjugalité : de quelques paradoxes, in Le formalisme, LGDJ, 2017, p. 85.
288) V. not. J.-J. Lemouland, Formalisme et conjugalité : de quelques paradoxes, préc., p. 86.
289) C. civ., art. 1387.
290) J.-J. Lemouland, Formalisme et conjugalité : de quelques paradoxes, préc., p. 86.
291) C. civ., art. 1394-1, al. 1.
292) A.-S. Brun-Wauthier, Régimes matrimoniaux et régimes patrimoniaux des couples non mariés, Bruxelles, Larcier, 6e éd. 2016, no 606.
293) C. civ., art. 515-8 : « Le concubinage est une union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple ».
294) J.-J. Lemouland, Formalisme et conjugalité : de quelques paradoxes, préc., p. 88.
295) H. Fulchiron, Le nouveau Pacs est arrivé : Defrénois 2006, p. 1621.
296) Art. 48. L’entrée en vigueur de cette disposition a été fixée au 1er décembre 2017 (art. 114, IV).
297) C. civ., art. 515-7, al. 5.
298) 111e Congrès des notaires de France, Strasbourg, 2015, La sécurité juridique : un défi authentique, 2e commission, Sécurité juridique et conjugalité, spéc. no 2054, par X. Guédé et F. Letellier.
299) C. civ., art. 515-7, al. 10.
300) 111e Congrès des notaires de France, Strasbourg, 2015, La sécurité juridique : un défi authentique, 2e commission, Sécurité juridique et conjugalité, spéc. no 2055, par X. Guédé et F. Letellier.
301) Cons. const., 29 juill. 2016, no 2016-577 QPC : Dr. famille 2016, comm. 194, note J.-R. Binet ; RJPF 2016, no 10, note T. Garé.
302) CPC, art. 1106 et s.
303) C. civ., art. 268.
304) C. civ., art. 265, 2 et art. 267.
305) Divorce par consentement mutuel contenant la liquidation des intérêts pécuniaires des époux propriétaires de biens immobiliers soumis à publicité foncière.
306) 111e Congrès des notaires de France, Strasbourg, 2015, La sécurité juridique : un défi authentique, 2e commission, Sécurité juridique et conjugalité, spéc. nos 2110 et s., « La sécurité juridique apportée par l’expertise notariale », par X. Guédé et F. Letellier.
307) H. Fulchiron, Divorcer sans juge – À propos de la loi no 2016-1547 du 18 nov. 2016 de modernisation de la justice du xxie siècle : JCP G 2016, 1267.
308) V. C. civ., art. 229-1 à 229-4.
309) Propos tenus par le garde des Sceaux lors d’une conférence de presse du 10 mai 2016.
310) Le Collectif Onze, Au tribunal des couples – Enquête sur des affaires familiales, Odile Jacob, 2013, p. 17.
311) C. civ., art. 229-1, al. 1.
312) C. civ., art. 229-1, al. 2.
313) V., en ce sens, 113e Congrès des notaires de France, Lille, 2016, Familles, Solidarités, Numérique, Le notaire au cœur des mutations de la société, 1re commission, Familles, nos 1050 et s., par B. Delesalle, J. Lotz et N. Gessey.
314) G. Bonnet, Divorce sans juge, le point de vue du notaire : Dr. famille juill.-août 2016, p. 1.
315) C. civ., art. 229-1, al. 3.
316) C. civ., art. 260.
317) Circ. no JUSC 1638274C, 26 janv. 2017, p. 20, fiche 6, § 3, p. 3.
318) M. Dagot, Dépôt au rang des minutes d’un notaire : JCP N 1994, no 15, 2948.
319) C. Brenner, Le nouveau divorce par consentement mutuel : retour à l’an II ? JCP G 2017, no 9, 195 et s.
320) S. Torricelli-Chrifi, Divorce contractuel : le notaire doit-il fermer les yeux ? : Dr. famille 2017, étude 12.


Aller au contenu principal