CGV – CGU

Partie II – Les modes de détention immobilière à l’international
Titre unique – Le choix du mode de détention immobilière à l’international
Sous-titre 1 – La propriété immobilière directe ou indirecte dans un contexte international
Chapitre I – Les critères de choix des modalités de détention de l’immeuble

4154 Selon le profil social et professionnel des acquéreurs et leur pays d’origine, ils n’envisagent pas de la même façon leur investissement immobilier en France. Cela peut être l’acquisition d’une résidence secondaire, d’une résidence familiale impliquant un changement de vie ou un investissement dans un but lucratif personnel ou professionnel. Le notaire doit donc œuvrer avec pédagogie et présenter à ses clients les diverses options qui s’offrent à eux dans l’arsenal juridique français.

Pour cela, il existe des critères à prendre en compte pour les conseiller au mieux de leurs intérêts. Le premier d’entre eux est celui de la flexibilité de fonctionnement. Lorsque l’on mène un projet d’investissement entre plusieurs personnes résidant à l’étranger, parfois dans des pays différents, la souplesse de fonctionnement est nécessaire (Section I). Ensuite, l’aspect fiscal de l’investissement doit être analysé en France et à l’étranger, pour répondre aux attentes des acquéreurs évoluant dans un contexte international (Section II). Enfin, l’objectif de protection est parfois primordial dans les choix des modalités de la propriété : cela peut être une protection du patrimoine personnel ou de la liberté d’agir (Section III). Le droit français est reconnu comme étant très protecteur des consommateurs et des non-professionnels de façon générale. Le notaire participe à cette culture de la protection en proposant des solutions aux acquéreurs étrangers en France pour qu’ils puissent protéger leur patrimoine et leur famille, que ce soit dans le cadre de la propriété immobilière directe ou indirecte.

Section I – La recherche de la flexibilité de la détention immobilière

4155 En cas d’acquisition immobilière réalisée par un couple non marié ou un couple marié sous un régime séparatiste, par plusieurs membres d’une même famille ou encore par un groupe d’investisseurs, le notaire peut être tenté de proposer d’emblée une acquisition par l’intermédiaire d’une société afin d’éviter le régime de l’indivision, caractérisé par la prise de décisions à l’unanimité.

4156 Il faut prendre ici la mesure du contexte international dans le conseil à donner : le régime français de l’indivision est souvent méconnu des clients étrangers et pourra leur sembler complexe à mettre en œuvre. Le notaire devra les informer notamment que seuls les actes d’administration peuvent être décidés à la majorité des deux tiers des membres187et être exécutés au moyen d’un mandat général donné à l’un d’entre eux. Ils devront être avertis que pour vendre ou hypothéquer un bien indivis, l’unanimité est nécessaire et que si l’une des personnes appartenant à l’indivision refuse de signer les actes de vente, il n’y pas d’autre issue que d’agir en justice en France sur le fondement de l’article 815-5 du Code civil.

L’acquisition par le biais des sociétés est donc fortement plébiscitée lorsque plusieurs personnes achètent ensemble puisqu’un gérant est désigné afin d’administrer la société, de convoquer les assemblées générales ordinaires et extraordinaires qui permettront de décider d’emprunter au nom de la société, de vendre tout ou partie du patrimoine de la société, d’acquérir de nouveaux immeubles, et ce à la majorité des parts sociales. Cette organisation est souvent plus lisible pour un étranger, et correspond mieux à la représentation qu’il a de l’achat en commun. Si les associés résident dans des pays différents, ils peuvent donner mandat à l’un d’entre eux de voter en leur nom et donner les pouvoirs nécessaires au gérant pour signer tous actes et documents.

Si la souplesse de fonctionnement est un atout de la détention immobilière via une société, les aspects fiscaux ne doivent pas être négligés.

Section II – La recherche de l’optimisation fiscale de l’investissement immobilier

4157 Devant le succès remporté par les locations de biens meublés grâce à l’attractivité touristique de la France, nombre d’investisseurs étrangers souhaitent bénéficier de cette manne financière. Selon le pays d’origine des associés et selon la convention liant ce pays à la France, ils seront imposés en France ou à l’étranger, voire même imposables dans les deux pays. Il convient de les avertir d’une subtilité fiscale française en matière de location en meublé non professionnel.

La société civile immobilière (SCI) est en principe soumise à l’impôt sur le revenu. Une déclaration fiscale est effectuée chaque année par les associés selon leur participation dans le capital social. Cet aspect formel sera développé ci-après.

La location en meublé exercée de façon habituelle par une SCI est considérée comme une activité commerciale au sens des articles 34 et 35 du Code de commerce ; elle est donc assujettie à l’impôt sur les sociétés conformément l’article 206-2° du Code général des impôts. Si la location est de courte durée et exceptionnelle, il est possible de conserver la transparence fiscale et le régime d’imposition des particuliers. C’est également le cas lorsque les revenus issus de la location en meublé n’excèdent pas 10 % du montant total des revenus hors taxes, de façon habituelle.

En France, en 2018 par exemple, les revenus n’étaient imposés qu’à partir de 9 807 € dans le cadre du régime de l’impôt sur les revenus188. En cas de revenus inférieurs, il n’y a pas de taxation. L’option fiscale sera donc prise en fonction des revenus escomptés.

4158 Dans le cadre d’un investissement locatif en meublé et en cas d’imposition en France, l’acquisition par l’intermédiaire d’une SCI présente l’avantage de permettre de réaliser l’amortissement fiscal du bien, de diminuer l’assiette imposable et de déduire certaines charges telles que les frais payés dans le cadre de l’acquisition de l’immeuble.

Si les clients étrangers envisagent leur acquisition sous un angle lucratif, le notaire pourra leur conseiller de se faire accompagner par un conseiller fiscal pour ne pas omettre de déclarer et déduire toutes les sommes requises par loi. Celui-ci devra prendre en compte la situation globale des associés dans leur pays d’origine et en France. L’appui d’un juriste fiscaliste originaire du même pays pourra alors être utile.

En conséquence de ce qui précède, afin d’éviter toute mauvaise surprise et des complications d’organisation et d’ordre fiscal, les clients étrangers louant régulièrement leur bien immobilier auront plutôt intérêt à acquérir le bien en direct. Ceux qui ne prévoient pas de location pourront envisager une acquisition via une société civile immobilière.

Lorsqu’ils exposent leurs souhaits au moment du choix des modalités d’acquisition immobilière, les étrangers mettent souvent en avant leur volonté de protéger leur patrimoine et leur famille. Le notaire doit les y aider.

Section III – La recherche de la protection dans les modalités de la détention immobilière

4159 L’un des avantages de la détention d’un bien immobilier situé en France par le biais d’une société civile immobilière est que celle-ci permet de distinguer le patrimoine personnel des associés de celui détenu par la SCI. Cela confère une sécurité vis-à-vis des créanciers de la société. Les acquéreurs étrangers peuvent en bénéficier. En cas de dette fiscale de la SCI par exemple, les services fiscaux s’adresseront à la société et non pas aux associés eux-mêmes. S’il existe une dette vis-à-vis d’un artisan ou une poursuite judiciaire par un tiers, c’est la société qui sera responsable et poursuivie. Les associés ne seront exposés que s’ils se portent caution solidaire de la société, dans le cadre d’un prêt immobilier par exemple.

Il convient de rappeler qu’en cas d’acquisition en nom personnel financée par un prêt, la banque se garantira par une inscription hypothécaire, ce qui ne mettra pas en danger le patrimoine personnel des acquéreurs étrangers.

Les étrangers acquéreurs d’une propriété immobilière en France sont non seulement soucieux de protéger leur patrimoine et leurs proches, mais aussi désireux d’optimiser la transmission successorale. Le notaire doit les aider à atteindre cet objectif. La société civile immobilière peut être un très bon outil dans cette perspective.


187) C. civ., art. 815-3.
188) Baisse progressive de l’impôt sur les sociétés, 1er févr. 2018 – Direction de l’information légale et administrative (Premier ministre), Ministère chargé des finances. La loi de finances pour 2018 (art. 84) poursuit le programme de la baisse progressive du taux l’impôt sur les sociétés (IS) jusqu’à 25 % en 2022. Il est de 28 % pour les bénéfices inférieurs à 500 000 € et 33,3 % (ou 1/3) au-delà. Le taux sera ensuite porté à : 31 % au-delà de 500 000 € de bénéfices en 2019 ; 28 % sur l’ensemble des bénéfices en 2020 ; 26,5 % en 2021 (www.service-public.fr/professionnels-entreprises/vosdroits/F23575).
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