Les mesures préventives : le plan de sauvegarde

Les mesures préventives : le plan de sauvegarde

Créé par la loi Alur et figurant actuellement aux articles L. 651-1 du Code de la construction et de l'habitation et 29-10 de la loi du 10 juillet 1965, il s'agit d'une démarche d'inspiration publique et administrative qui peut intégrer la mise en place d'un mandataire ad hoc ou d'un administrateur provisoire.
Il s'agit d'aider les copropriétés en difficulté sans qu'un seuil de déclenchement soit expressément prévu. Tous les facteurs de difficulté des copropriétés susvisés (sociaux, techniques ou financiers) sont pris en compte.
L'acteur principal de ce plan est le représentant de l'État dans le département, qui peut être à l'origine de la procédure mais surtout qui approuve le plan de sauvegarde établi par une commission chargée d'élaborer un diagnostic de la situation de la copropriété.
Le préfet constitue la commission qui sera composée :
  • du maire de la commune de l'immeuble ;
  • du président de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) compétent en matière d'habitat ;
  • du président du conseil départemental ;
  • du président de conseil syndical ou de l'administrateur provisoire ;
  • des représentants des propriétaires et des locataires de l'immeuble concernés.
Cette commission établit un plan de sauvegarde qui doit permettre, dans un délai de cinq ans, de :
  • redresser la situation financière de la copropriété ;
  • clarifier et simplifier les règles de structure et d'administration ;
  • clarifier et adapter le statut des biens et équipements collectifs à usage public ;
  • réaliser des travaux de conservation de l'immeuble (réfection de gros œuvre, traitement de l'insalubrité…) ou permettant de réduire les charges de fonctionnement trop importantes ;
  • restaurer les relations sociales dans l'immeuble ;
  • instaurer la mise en place des mesures d'accompagnement.
Le syndic est tenu d'organiser le vote des mesures préconisées par ce plan en les inscrivant à l'ordre du jour de la prochaine assemblée.
En cas d'échec des mesures de sauvegarde, si la copropriété reste confrontée à de graves difficultés, les personnes publiques composant la commission peuvent saisir le juge aux fins de nommer un administrateur provisoire ou pour lui demander de déclarer l'état de carence .

Les copropriétés concernées

Un seuil de déclenchement est prévu à l'article 29-1-A de la loi du 10 juillet 1965 : « Lorsqu'à la clôture des comptes les impayés atteignent 25 % des sommes exigibles, etc., le syndic en informe le conseil syndical et saisit sur requête le juge d'une demande de désignation d'un mandataire ad hoc. Pour les copropriétés de plus de deux cents lots, le pourcentage des impayés déclenchant la saisine est fixé à 15 % ».
Précisions importantes :
  • le nombre de lots est celui de la copropriété et non celui des lots principaux. Ainsi une copropriété de 210 lots peut comprendre : 70 logements, 70 caves et 70 emplacements de stationnement ;
  • le pourcentage d'impayés est calculé en fonction du montant total des impayés des copropriétaires, à la clôture de l'exercice, divisé par le total des sommes exigibles, relatives à la fois aux charges courantes et à la fois aux appels de fonds travaux :
Aussi l'Association des responsables de copropriété préconise de ne pas engager la procédure d'une manière automatique si le seuil de 15 % des impayés est dépassé, mais uniquement si d'autres signes de dysfonctionnement importants concomitants ont été relevés. À ce titre l'augmentation constante des charges, le paiement des fournisseurs avec retard ou la dégradation des parties communes sont des symptômes à ne pas négliger.
Les personnes habilitées à introduire une demande de désignation d'un mandataire ad hoc sont en premier lieu le syndic, qui doit en informer chacun des membres du conseil syndical et, en l'absence d'action du syndic dans le délai d'un mois à compter de la clôture des comptes, le texte énonce :
  • des copropriétaires représentant ensemble au moins 15 % des voix du syndicat ;
  • un créancier si ses factures d'abonnement, de fourniture d'eau, d'énergie ou de travaux sont impayées depuis plus de six mois et après un commandement resté infructueux ;
  • et depuis la loi Alur : le préfet, le procureur de la République, le maire et le président de l'établissement public de coopération intercommunale.
On s'interrogera sur les modalités d'information de ces dernières personnes. Il faut envisager qu'un copropriétaire (qui se trouve dans l'impossibilité de regrouper autour de lui un pourcentage de 15 % des voix) adresse un courrier au syndic, avec une copie au maire de sa commune ou au procureur de la République, pour attirer son attention sur le taux d'impayés dans la copropriété.
La procédure a lieu devant le président du tribunal de grande instance, donc par l'intermédiaire d'un avocat, qui statue « par ordonnance sur requête ou comme en matière de référé ». Le juge peut alors désigner un mandataire ad hoc dont il détermine la mission et la rémunération. Sur ce dernier point, un arrêté du 8 octobre 2015 prévoit une grille de salaire allant de 1 500 € (HT) pour les copropriétés de 2 à 15 lots à 6 000 € (HT) pour les copropriétés de 351 à 499 lots. L'article 29-1-A de la loi du 10 juillet 1965 prévoit que, lorsqu'ils ne sont pas à l'origine de la procédure, le représentant de l'État dans le département, le maire de la commune où est implanté l'immeuble et le président de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'habitat sont informés de l'engagement de la procédure par le ou les demandeurs .

Le mandataire ad hoc

Il s'agit d'un dispositif léger qui ne dessaisit pas le syndic et qui vise à faire prendre conscience aux copropriétaires des difficultés présentes et à venir. Nous distinguerons les copropriétés concernées de l'administrateur ad hoc lui-même.
En principe le mandataire ad hoc est choisi par le juge sur la liste des administrateurs judiciaires mentionnée à l'article L. 881-2 du Code de commerce. Toutefois, l'article 29-1-C ajoute qu'à titre exceptionnel le juge peut également désigner, par décision spécialement motivée, une personne physique ou morale justifiant d'une expérience ou d'une qualification particulière au regard de la nature de l'affaire et remplissant des conditions définies par décret . Il est vrai que les administrateurs judiciaires ne sont pas toujours spécialisés en copropriété et qu'un opérateur associatif ou un bureau d'étude spécialisé peuvent remplir cette mission.
Dans les trois mois de sa désignation, renouvelable une fois, le mandataire ad hoc doit adresser au président du tribunal de grande instance un rapport présentant l'analyse de la situation financière du syndicat . Le greffe du tribunal de grande instance adresse ce rapport au syndic, au conseil syndical, au représentant de l'État dans le département, au maire de la commune où est implanté l'immeuble et au président de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'habitat.
Le syndic inscrit à l'ordre du jour de la prochaine assemblée générale les projets de résolutions nécessaires à la mise en œuvre de ce rapport. Pour éviter tout atermoiement, l'article 29-1-B prévoit que si la prochaine assemblée générale n'a pas lieu dans les six mois (trois mois en cas d'urgence) suivant la remise du rapport, le syndic convoque une assemblée générale extraordinaire afin de voter les résolutions nécessaires. Si aucune notification n'intervient dans le délai de six mois, le juge peut être saisi afin d'obtenir une ordonnance enjoignant au syndic de convoquer une assemblée générale sans délai ou désignant un administrateur provisoire.
Il semble que cette procédure ait été bien accueillie compte tenu de sa simplicité, de l'absence de frais pour la collectivité et du suivi qu'elle instaure. Néanmoins, il faut prendre garde de ne pas déclencher cette procédure sur la seule base des impayés.