CGV – CGU

Partie I – La vente dans un contexte international
Titre 1 – La vente en France par les non-résidents
Sous-titre 3 – Le prix de vente à l’international
Chapitre II – Le paiement du prix de vente à l’international

4118 Selon le type de contrat de vente, le prix peut être payé comptant (Section I) ou suivant des échéances, que ce soit dans le cadre d’un contrat de vente d’immeuble classique ou d’une vente d’immeuble en l’état futur d’achèvement (Section II). Dans un contexte international, le notaire devra redoubler de vigilance pour assurer la sécurité de la transaction financière.

Section I – Le paiement comptant du prix de vente dans un contexte international

4119 Le notaire reçoit les fonds de l’acquéreur immobilier pour le paiement du prix de vente et des frais d’acte ou autres frais annexes. Il doit alors effectuer des contrôles pour s’assurer de la provenance des fonds (Sous-section I). Ensuite, lorsque l’acte de vente a été authentifié, le notaire doit payer le prix au vendeur sans omettre des vérifications incontournables dans un contexte international (Sous-section II).

Sous-section I – Le paiement du prix par l’acquéreur étranger

4120 Le notaire prévoit les modalités de paiement du prix de vente dès la signature de l’avant-contrat, en reprenant l’accord intervenu entre les parties. Généralement, le prix de vente est payé comptant et par sa comptabilité, y compris en présence d’éléments d’extranéité. Le notaire doit bien préciser à l’acquéreur dès la première étape du processus de vente que le prix de vente devra être acquitté préalablement à la signature de l’acte authentique de vente et à la remise des clés, par virement des fonds sur le compte de l’étude. Selon leur pays d’origine, les acquéreurs ne sont pas tous familiers avec cette procédure. Il faut en effet rappeler que les pays où le prix transite aussi systématiquement qu’en France par la comptabilité du notaire ne sont pas si nombreux.

Lorsqu’il reçoit les fonds, le notaire doit vérifier qu’ils lui ont été envoyés par l’acquéreur nommé dans l’avant-contrat de vente.

Parfois, lorsque le vendeur et l’acquéreur sont issus de pays dont la monnaie n’est pas l’euro, ils s’accordent sur un paiement du prix de vente dans leur monnaie commune ou tout au moins dans la monnaie du pays de résidence de l’un d’entre eux, afin d’éviter les frais de change lors du double transfert de fonds qui sera réalisé par l’acquéreur vers le compte du notaire, puis du compte de l’étude vers celui du vendeur (V. supra, n° a4117). Dans cette hypothèse, le paiement a lieu en dehors de la comptabilité du notaire. Pour tout de même constater que le paiement est comptant, le notaire doit s’assurer que le prix a bien été payé préalablement à la signature de l’acte authentique de vente. Selon l’article 1353 du Code civil174, c’est à l’acquéreur de prouver qu’il a acquitté le prix. Il résulte de la jurisprudence que la preuve du non-paiement pourra être rapportée par tous moyens175.

Il est alors vivement conseillé au notaire de réunir les preuves de la réalité du paiement intervenu en dehors de sa comptabilité, à l’étranger. Il existe des solutions qui lui permettront d’assurer la sécurité juridique du paiement du prix de vente.

Une première solution consiste à organiser le transfert du prix de vente par l’intermédiaire d’un notaire ou d’un juriste étranger, qui pourra confirmer par courrier qu’il détient la somme représentant le prix de vente. Si chaque partie a son propre notaire ou juriste, la sécurité du transfert sera renforcée. Le notaire ou le juriste sollicité peut en effet confirmer par courrier comportant son en-tête la bonne réalisation de la transaction. D’abord, le juriste choisi par l’acquéreur indique qu’il a reçu des fonds provenant d’un compte ouvert au nom de son client dans telle banque et qu’il a bien effectué le virement suivant mandat reçu de l’acquéreur sur le compte du notaire ou du juriste étranger choisi par le vendeur ou directement sur un compte ouvert au nom du vendeur. Ensuite, le juriste du vendeur confirme qu’il a bien réceptionné le virement destiné à son client, au nom et pour le compte de celui-ci. S’il n’a pas mandaté de professionnel, le vendeur lui-même pourra transmettre une confirmation écrite de la bonne réception des fonds sur un compte ouvert en son nom dans sa banque.

Déclarations confirmant le paiement d’une partie du prix de vente à l’étranger

Modèle de déclaration du juriste mandaté par l’acquéreur en français

« Je soussigné [nom du juriste et de sa société], confirme avoir reçu un virement de M./Mme X, demeurant à [adresse] depuis son compte numéro [n° du compte] ouvert à la banque [nom et adresse de la banque], le [date] ».

Dans la mesure du possible, le notaire envoie le modèle de déclaration dans la langue du juriste pour lui faciliter la rédaction de la déclaration et être certain que toutes les informations nécessaires seront intégrées.

Et s’il a viré les fonds chez un confrère : « Je déclare avoir viré ladite somme sur le compte de M. P/de la société P [professionnel mandaté par le vendeur], le [date], à la demande de M./Mme X ».

Ou s’il a effectué un virement sur le compte du vendeur : « Je déclare avoir effectué le virement des fonds transmis par M./Mme X sur le compte ouvert au nom de M./Mme Y [nom du vendeur], auprès de la banque [nom et adresse de la banque] ».

Modèle de déclaration par le juriste mandaté par le vendeur ou le vendeur lui-même

« Je soussigné [nom du vendeur ou de son mandataire] confirme la bonne réception de la somme de [montant] reçue le [date] depuis le compte numéro [n° du compte bancaire] ».

À défaut de notaire ou de juriste habilité ou prêt à jouer le rôle d’intermédiaire financier, une attestation émanant de la banque du vendeur précisant que le compte ouvert au nom du vendeur a été crédité à telle date, par un virement provenant d’un compte ouvert au nom de l’acquéreur, permettra au notaire de détenir une preuve écrite du règlement du prix de vente.

En cas de contrôle financier dans le pays de résidence des parties, elles pourront justifier de l’origine et des raisons du virement des fonds par la production de l’avant-contrat ou du projet d’acte de vente.

Le notaire devra tout de même recevoir au minimum une partie des fonds en euros, que ce soit pour les frais et charges devant être supportés par le vendeur ou pour les sommes dues en France par l’acquéreur.

Ainsi certaines sommes, dues par le vendeur, doivent être versées sur le compte du notaire :

la taxe sur la plus-value immobilière ;

les frais de représentation fiscale s’il y a lieu ;

les honoraires de l’agence immobilière ;

le solde des charges et travaux dus à la copropriété ;

les frais de mainlevée hypothécaire ;

le solde des prêts hypothécaires en cours ;

les factures des diagnostics ;

généralement, toute somme devant être acquittée en France à l’occasion de la vente.

D’autres sommes,dues par l’acquéreur, doivent être versées sur le compte du notaire :

la provision sur les frais d’acte de vente et de prêt, le cas échéant ;

la commission d’agence, si elle est à sa charge.

Selon le pays d’origine des fonds, l’acquéreur ne pourra pas les convertir en euros. C’est le cas par exemple du dinar algérien ou du rial iranien. Le notaire doit identifier ce problème dès le stade de l’avant-contrat afin de prévoir un délai de réalisation de l’acte de vente suffisamment long pour que l’acquéreur puisse s’organiser. Le transfert des fonds pourra être réalisé par l’intermédiaire d’un pays situé hors zone euro et qui accepte cette conversion.

Le notaire doit prendre un soin particulier à la rédaction de la clause de l’avant-contrat de vente relative au paiement du prix de vente. Le modèle ci-dessous reprend les informations à indiquer :

Clause de paiement du prix en partie dans une monnaie étrangère

Clause à prévoir dans l’avant-contrat de vente

« Ledit prix sera payé de la façon suivante :

 1) Partie payée par la comptabilité du notaire rédacteur de l’acte authentique de vente : la somme de … euros, représentant : [énumération des sommes qui doivent être adressées sur le compte du notaire].

Partie en dehors de la comptabilité du notaire rédacteur de l’acte authentique de vente

La somme de … [+ devise étrangère], qui sera versée sur un compte ouvert au nom du VENDEUR auprès de [+ nom de la société qui réceptionnera le prix de vente], préalablement à la signature de l’acte authentique de vente. Les parties conviennent que la réitération des présentes par acte authentique interviendra à compter de la réception de la confirmation écrite par [nom d’un notaire ou d’un juriste mandaté par le VENDEUR ou de la banque] que le compte ouvert au nom du VENDEUR a été crédité de la somme de … en provenance d’un compte ouvert au nom de l’ACQUÉREUR ».

Après s’être assuré du paiement sécurisé du prix de vente par l’acquéreur, le notaire procède au virement du prix de vente sur le compte du vendeur. Dans un contexte international, il doit encore faire preuve de vigilance.

Sous-section II – La remise du prix de vente au vendeur étranger

4121 Préalablement au virement du prix de vente sur le compte du vendeur ouvert dans une banque étrangère, le notaire effectue quelques vérifications auprès du vendeur et lui transmet des informations spécifiques.

§ I – Le paiement du prix de vente

4122 En premier lieu, comme dans l’ordre interne, il va de soi que le notaire doit vérifier si le nom figurant sur le relevé d’identité bancaire qui lui a été remis ou envoyé correspond parfaitement à celui du vendeur. Si le vendeur est une société et que son représentant lui indique qu’il n’a pas de compte bancaire ouvert au nom de celle-ci, le notaire n’a pas le droit de remettre les fonds au seul gérant sans une autorisation spéciale. Seule une délibération prise en assemblée générale ou une mention en ce sens dans les statuts peut l’autoriser à remettre les fonds à un seul ou une partie des associés. Que la société soit française ou étrangère, les associés n’ont pas toujours ouvert de compte en son nom. Ils utilisent volontiers le compte bancaire de leur société étrangère pour effectuer les paiements dans le cadre de leur acquisition. Le notaire sera donc bien avisé de le vérifier dès l’avant-contrat pour ne pas perdre de temps après la signature de l’acte de vente. La notion de relevé d’identité bancaire telle qu’elle est conçue en France n’existe pas sous cette forme à l’étranger. C’est la raison pour laquelle les vendeurs étrangers sont surpris lorsqu’un « RIB » leur est demandé. Il peut être intéressant d’utiliser les termes propres à leur langue176pour aider les parties à comprendre ce qu’on leur demande.

Conseil pratique sur l’obtention des références bancaires

Il appartient au notaire de solliciter de son client une attestation émanant de sa banque ou une correspondance avec l’en-tête de la banque elle-même certifiant qu’elle détient un compte ouvert au nom du client. Le modèle à transmettre au client pourrait être celui-ci :

« Nous attestons que M./Mme X ou la société X est titulaire du compte n° [numéro du compte] dont l’IBAN est [numéro IBAN] et le code BIC ou SWIFT est [numéro code] » + date et signature du représentant de la banque.

Il est déconseillé au notaire de se contenter d’un simple courriel du client reprenant les références du compte bancaire. Il serait judicieux de demander ce type de document dès la préparation de l’avant-contrat pour laisser à la banque le temps matériel de l’établir.

En deuxième lieu, il convient d’avertir le vendeur que le virement sera effectué en euros par la Caisse des dépôts et consignations, et qu’en cas de virement vers un compte libellé dans une devise étrangère, il lui appartiendra de vérifier en amont les conditions qui lui seront appliquées par sa banque pour la commission de conversion et le taux de change. Cela permettra au notaire d’éviter toute discussion avec le client vendeur qui aurait reçu moins de fonds qu’escompté en raison d’un taux de change défavorable à l’instant du virement et qui subirait des frais bancaires importants. Le notaire peut l’inviter à contacter un organisme spécialisé qui l’aidera à maîtriser les conditions de change et ainsi éviter tout risque de fluctuation du taux de change.

Avertissement du vendeur

Dès le début du dossier, le notaire doit attirer l’attention du client sur toutes les précautions qu’il peut prendre pour se mettre à l’abri des fluctuations des taux de conversion des fonds, en cas de transfert du prix de vente vers un compte ouvert à l’étranger. Il existe des organismes spécialisés dans la conversion des fonds. Ils apportent leurs conseils pour obtenir un taux stable quelle que soit la date de transfert et de conversion. Les clients retiennent une certaine somme dans leur monnaie en bloquant un taux qui ne sera pas modifié jusqu’au virement des fonds sur le compte ouvert auprès de cet organisme. Ils sont assurés de la sécurité de la somme qu’ils vont recevoir ensuite dans leur monnaie.

En troisième lieu, conformément à l’article 803 du Code général des impôts, si l’origine de propriété du bien vendu est une succession réglée préalablement à la vente et que le ou les héritiers vendeurs sont domiciliés de fait ou de droit à l’étranger, le notaire doit contrôler avant de libérer le prix de vente si les droits de mutation à titre gratuit ont bien été acquittés. Il agit dans le cadre de la protection de l’acquéreur, qui pourra être recherché par les services fiscaux en cas de défaut de paiement de ces droits177. Outre le prix de vente, le notaire doit fréquemment payer d’autres sommes à des intermédiaires mandatés par le vendeur. Là encore, des points de vigilance doivent être soulignés.

§ II – Les autres paiements

4123 Lorsqu’un acte de vente est signé, le notaire est généralement mandaté par l’une des parties pour payer les honoraires de l’agence immobilière qui a été leur intermédiaire. Il s’agit parfois d’un professionnel de l’immobilier établi à l’étranger. Quelle doit alors être l’attitude du notaire ? Ensuite, pendant le cours du dossier de vente, le notaire est en contact avec des intermédiaires financiers dont il doit vérifier la capacité d’exercice en France avant de les rémunérer pour le compte du client.

4124 Au préalable, le notaire doit toujours vérifier si l’agence immobilière mandatée par l’une des parties est titulaire d’une carte professionnelle. Cette activité est régie par la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, dite « loi Hoguet » et son décret d’application n° 72-678 du 20 juillet 1972, complétés depuis par d’autres textes législatifs ou réglementaires178.

Un prestataire ressortissant d’un pays de l’Espace économique européen (EEE) peut obtenir la carte professionnelle en France s’il réunit les conditions cumulatives suivantes :

s’il est établi légalement en France, c’est-à-dire s’il dispose d’un siège social en France ;

s’il peut justifier qu’il maîtrise suffisamment la langue française pour exercer son activité ;

s’il démontre, soit qu’il est titulaire d’un diplôme ou d’un titre de formation confirmant qu’il a effectué avec succès des études de troisième cycle d’une durée minimum d’un an en cas d’études à temps complet ou d’une durée équivalente s’il a suivi des études à temps partiel, soit qu’il a exercé à temps plein l’activité d’agent immobilier pendant trois ans consécutifs ou pendant trois années au cours des dix années précédant la demande de carte.

Si la demande est admise, la carte est délivrée pour une durée de dix-huit mois par la chambre de commerce et d’industrie locale. Le notaire doit donc vérifier que la carte qui lui est présentée est toujours valide.

Ceci est aussi applicable en matière de paiement des intermédiaires bancaires que le client lui demande de payer pour son compte. La réglementation française en la matière est en cours d’évolution sous l’impulsion d’une directive européenne Mortgage Credit Directive, dite directive « MCD » adoptée le 4 février 2014, transposée en droit français par le décret n° 2016-607 du 15 mai 2016. Les intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement (IOBSP) sont les courtiers en crédit et les mandataires. Tout courtier européen qui souhaite travailler en France doit répondre à certains critères de capacité et d’aptitude professionnelle et obtenir un passeport européen, conformément à l’article 32 de la directive 2014/17/UE du 4 février 2014 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel. L’article L. 519-8 du Code monétaire et financier prévoit que les intermédiaires doivent être immatriculés à l’ORIAS dans l’une des catégories d’IOBSP, à l’exception des mandataires d’IOBSP. Ceux-ci informeront l’ORIAS de leur souhait d’exercer en libre prestation de service (LPS) ou en libre établissement (LE) dans l’un des pays de l’Union européenne et/ou de l’Espace économique européen. Le notaire doit donc demander une copie du passeport professionnel de l’intermédiaire financier avant de le payer pour le compte de l’acquéreur.

Section II – Le paiement à terme ou selon un échéancier

4125 Lorsque le prix n’est pas payé comptant en totalité et que l’acquéreur réside ou est domicilié à l’étranger, le notaire doit organiser le paiement du solde du prix ou des échéances du prix dans le cadre d’une vente en l’état futur d’achèvement. En cas de non-paiement, il existe des règles applicables en matière de poursuite de paiement du prix de vente dans l’ordre international.

4126 L’organisation du paiement à terme ou selon un échéancier. Le notaire qui accompagne les parties à un contrat de vente comprenant un paiement à terme ou selon un échéancier ne doit pas manquer de sécuriser le paiement et de les informer sur les conséquences financières liées aux délais de paiement.

4127 Lorsque les parties s’accordent sur les modalités d’un paiement à terme d’une partie du prix de vente, le notaire doit redoubler de vigilance si le paiement doit provenir d’un acquéreur non résident. Il sera bien avisé de prévoir soit un taux d’intérêts fixe, soit une clause d’indexation pour la prise de privilège de vendeur dans le contrat de vente d’immeuble et de la reporter sur le bordereau d’inscription hypothécaire.

Le notaire peut prévoir une clause selon laquelle la partie du prix payé à terme sera évaluée conformément à un indice choisi par les parties, extérieur au contrat. Cela relève de l’article 12, § 1, b du règlement Rome I qui précise que le régime et les modalités de l’indexation sont soumis à la loi applicable au contrat. Si celui-ci est régi par la loi française, il convient donc d’appliquer les articles L. 112-1 à L. 112-4 du Code monétaire et financier (issu des ordonnances n° 58-1374 du 30 décembre 1958 et n° 59-246 du 4 février 1959). La jurisprudence considère que les clauses d’indexation sont valables en cas de paiement international, c’est-à-dire lorsque les fonds proviennent de l’étranger.

Il est fortement conseillé de prévoir qu’en cas de non-paiement des échéances à leur terme, les sommes à verser soient évaluées selon un indice et un taux relevant du système juridico-économique français, tel que l’indice du taux de la construction. Il n’est pas souhaitable de se référer à une monnaie étrangère, bien que cela semble admis si la monnaie est en rapport direct avec l’activité des parties179.

Dans le cadre d’une vente en l’état futur d’achèvement, il est bien entendu conseillé de prévoir que la totalité du prix de vente devra être payée en euros, sur le compte centralisateur du promoteur. Il peut être judicieux de conseiller à l’acquéreur d’ouvrir un compte bancaire en euros ou auprès d’un établissement bancaire situé dans la zone euro et de prendre toutes dispositions pour l’alimenter régulièrement selon les risques de fluctuation afin de ne pas subir de baisse des taux de change pendant la période de paiement du solde du prix de vente.

Si une clause d’indexation est prévue dans le contrat, elle devra être ajustée en faisant bien correspondre la période de variation de l’indice et la durée existant entre chaquerévision180. Il est fortement conseillé de se référencer à un indice dont le suivi sera aisé pour le praticien français.

Il est à noter cependant que le droit de l’Union européenne est moins restrictif que le droit interne. Il est donc permis de penser que dans l’ordre international, si les parties décidaient de prévoir une clause d’indexation plus flexible que ce qui est autorisé en droit français, la Cour de justice de l’Union européenne ne l’annulerait peut-être pas181.

Les bons réflexes du praticien

Dans un contexte international, il arrive parfois que les deux parties souhaitent que le prix soit payé en dehors de la comptabilité du notaire et directement entre elles, dans une monnaie autre que l’euro.

Cela revêt un double intérêt pour elles : non seulement elles évitent de payer une double commission bancaire pour la conversion des devises, mais encore elles échappent aux risques de variation entre l’euro et la monnaie choisie entre le moment du virement par l’acquéreur en amont de la signature de l’acte de vente et celui du transfert du prix de vente au vendeur après celle-ci.

En résumé, en présence d’un vendeur et d’un acquéreur étrangers qui ont convenu d’un paiement du prix de vente directement entre eux, le notaire doit veiller à respecter les points suivants :

I – Le virement des fonds par l’acquéreur : il doit verser a minima en euros sur le compte de l’étude :

1. la provision pour frais d’acte de vente et de prêt hypothécaire, le cas échéant ;

2. la commission de l’agence immobilière si elle a été stipulée à sa charge ;

3. la totalité de la somme que doit acquitter le vendeur en France, soit potentiellement :

le montant de la taxe sur la plus-value immobilière,

la somme nécessaire pour le désintéressement des créanciers hypothécaires,

le montant de la provision sur frais de mainlevée hypothécaire,

la somme représentant le montant de la commission d’agence,

le montant des charges et le solde des travaux dus au syndicat de la copropriété,

la somme correspondant à la facture de l’expert pour les diagnostics réalisés pour la vente.

II – Les documents assurant une sécurité juridique à réunir par le notaire :

1. une preuve de l’envoi des fonds par une personne ayant la même identité que la personne nommée comme « acquéreur » dans l’avant-contrat et le contrat de vente sur un compte bancaire ouvert au nom d’une personne ayant la même identité que la personne nommée comme « vendeur » dans l’avant-contrat et le contrat de vente. Cette preuve peut être par exemple la copie de l’ordre de virement bancaire ou une attestation de la banque émettrice précisant que le compte détenu au nom du client a été débité pour être affecté au crédit d’un compte ouvert au nom de l’acquéreur, sur tel compte ouvert dans tel établissement bancaire. Ainsi, la banque confirme que c’est bien le compte de la personne citée – l’acquéreur – qui a été débité en ses livres ;

2. une preuve de la bonne réception de la partie du prix de vente payée en dehors de la comptabilité de l’étude sur le compte du vendeur. Il peut s’agir d’une attestation de la banque de réception des fonds indiquant le montant reçu, la date et l’identité du titulaire du compte, d’un courrier daté et signé par le vendeur reprenant le numéro de compte, le montant reçu et la date de réception. La banque confirme donc que le compte de telle personne a bien été crédité de telle somme en provenance de tel organisme ;

3. prévenir l’acquéreur en lui envoyant les coordonnées du compte de l’étude que les fonds doivent obligatoirement provenir d’un compte bancaire ouvert à son nom et qu’à défaut ils ne pourront pas être affectés à l’opération envisagée et seront renvoyés.

Si les parties l’acceptent et si cela est possible dans leur pays d’origine, il peut être conseillé de leur demander de faire intervenir un juriste qui réceptionnera le prix de vente et confirmera les détails du paiement (montant, date, identité de l’émetteur et du destinataire des fonds).

En tout état de cause, le notaire doit bien informer ses clients que le paiement du prix doit être attesté par un intermédiaire juridique habilité à détenir les fonds jusqu’au moment où il pourra s’en libérer, à réception d’une attestation notariée de signature. En droit international privé, il faut garder à l’esprit que le rôle du notaire est de faire de la pédagogie vis-à-vis de clients qui pourraient lui reprocher de ne pas les avoir aidés à prendre toutes les précautions qu’un acquéreur français est en droit d’attendre. Le notaire doit conserver des preuves écrites des informations données, notamment à propos des risques encourus lors des transferts de fonds vers des comptes ouverts dans des banques étrangères.


174) C. civ., art. 1353, mod. par Ord. n° 2016-131, 10 févr. 2016, art. 4 : « Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation ».

175) C. civ., art. 1342-8. – Cass. 1re civ., 11 mars 2009, n° 07-20.132 : JurisData n° 2009-047363.
176) Correspondant par exemple au bank details en langue anglaise, au Bankkundensausweis en langue allemande, au certificado de identificacion bancaria en langue espagnole, à l’estratto identita bancaria en langue italienne, à la declaraçao de identidade bancaria en langue portugaise, ou au verklaring bij en langue néerlandaise.
177) C. civ., art. 803, mod. par Ord. n° 2010-420, 27 avr. 2010, art. 22 : « Tout acquéreur d’un immeuble ou d’un fonds de commerce situé en France et dépendant d’une succession dévolue à un ou plusieurs héritiers, légataires ou donataires ayant à l’étranger leur domicile de fait ou de droit, ne peut se libérer du prix d’acquisition si ce n’est sur la présentation d’un certificat délivré sans frais par le comptable public compétent et constatant soit l’acquittement, soit la non-exigibilité de l’impôt de mutation par décès, à moins qu’il ne préfère retenir, pour la garantie du Trésor, et conserver jusqu’à la présentation du certificat du comptable, une somme égale au montant de l’impôt calculé sur le prix ».
178) Autres textes de référence selon le site internet « economie.gouv.fr » : D. n° 2015-1090, 28 août 2015, fixant les règles constituant le code de déontologie applicable aux activités de transaction et de gestion des immeubles et des fonds de commerce ; D. n° 72-678, 20 juill. 1972, fixant les conditions d’exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et fonds de commerce ; D. n° 2016-173, 18 févr. 2016, relatif à la formation continue des professionnels de l’immobilier ; A. 10 janv. 2017, relatif à l’information des consommateurs par les professionnels intervenant dans une transaction immobilière ; A. 9 août 2017, sur la prise de position de l’autorité administrative sur l’information du consommateur sur les prix.
179) Cass. com., 22 mai 2001, n° 98-14.406 : JurisData n° 2001-009672 ; Bull. civ. 2001, IV, n° 98 ; JCP G 2001, IV, 2316. – Cass. 1re civ., 29 mars 2017, n° 16-13.050 : JurisData n° 2017-005684. – Cass. 1re civ., 29 mars 2017, n° 15-27.231 : JurisData n° 2017-005685 ; JCP G 2017, 532, note T. Bonneau ; JCP N 2017, 1158, note S. Piédelièvre ; RD bancaire et fin. 2017, n° 144, obs. T. Samin et S. Torck.
180) C. monét. fin., art. L. 112-1, al. 2. – V. Cass. 3e civ., 3 déc. 2014, n° 13-25.034 : JurisData n° 2014-029849 ; JCP E 2015, 1006, note Brignon. – Cass. 3e civ., 25 janv. 2015, n° 13-25.576 : JurisData n° 2015-001255 ; JCP E 2015, 1170, note Brignon. – Cass. 3e civ., 25 févr. 2016, n° 14-28.165 : JurisData n° 2016-003057 ; JCP E 2016, 1166. – Cass. 3e civ., 9 févr. 2017, n° 15-28.691 : JurisData n° 2017-001909 ; JCP E 2017, 1173, note B. Brignon.
181) G. Gruber, L’euro et les clauses d’indexation : D. 1999, chron. p. 258. – N. Guerrero, Les clauses d’indexation monétaire dans les contrats de prêt accordés par un établissement bancaire : une validité discutée : Banque et droit 2014, n° 153, p. 3.
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