CGV – CGU

Partie IV – Hériter
Titre 1 – Les règles de conflit applicables à la succession
Sous-titre 1 – Vue mondiale sur les règles de conflit en matière successorale

3350 Il est important, pour pouvoir déterminer la loi ou les lois applicables à une situation, d’avoir une connaissance, ou tout au moins une vue globale des différents systèmes de règles de conflit applicables aux successions à caractère international à travers le monde.

La majorité des pays du monde est pourvue de règles de conflit dans leur droit international privé successoral interne.

Il existait, en 2011, 193 États reconnus dans le monde par l’Organisation des Nations unies466.

Chaque État dispose d’un ordre juridique propre.

Opérer une classification des différents systèmes juridiques existant dans le monde permet de décrire et de regrouper ces différents ordres en familles de systèmes ayant des caractéristiques communes.

Ce procédé permet d’avoir un accès plus rapide aux informations générales, mais ne permet pas toujours de fournir une réponse sûre et adéquate.

Il conviendra, une fois le ou les systèmes juridiques auxquels appartiennent les États concernés déterminés, de toujours vérifier les détails de l’information générale contenue dans le système, dans l’ordre juridique même des États concernés.

Selon les auteurs, on peut distinguer plusieurs familles de systèmes juridiques différents467.

Il n’existe pas de nomenclature officielle de ces systèmes juridiques.

Force est de constater que, selon la matière étudiée (civile ou commerciale par exemple), un même pays peut migrer d’une famille vers une autre.

En matière successorale, il paraît possible de distinguer les familles suivantes : la famille de la common law468, celle inspirée du droit romano-germanique puisant sa source dans le Code Napoléon, celle des systèmes juridiques allemands, celle des États anciennement communistes, celle des systèmes juridiques de l’Asie de l’Est également fondés sur le droit romano-germanique, celle des systèmes juridiques nordiques, et enfin celle de droit islamique469.

Il apparaît également possible, selon l’Institut du notariat allemand, de retenir les systèmes juridiques fondés sur le droit coutumier comme formant une famille à part entière, même s’il semblerait qu’en matière successorale le regroupement de tels systèmes en une famille propre ne donne pas de résultat pertinent sur le fond.

De cette classification en familles juridiques découlent en matière successorale deux conséquences.

D’une part, cela permet de déterminer ce qui, dans chaque famille, rentre dans la qualification de ce qui est rattaché juridiquement au regard de chaque ordre interne au domaine des successions (c’est l’action pour le professionnel du droit de qualifier).

D’autre part, cela permet d’identifier les éléments de rattachement470que retiennent chacune de ces familles pour déterminer la loi applicable.

Une règle de conflit résulte, comme il a été expliqué dans la première commission471, d’une qualification et d’un élément de rattachement. En matière successorale, c’est principalement la détermination de cet élément de rattachement qui peut poser une difficulté au praticien.

En présence d’une situation internationale, le notaire, après s’être assuré que la situation qui lui est soumise emporte bien la qualification juridique de « succession »472, va devoir déterminer, grâce aux éléments de rattachement retenus par les différents États en présence, quelle est la loi ou quelles sont les lois applicables à cette situation.

Il existe différents groupes et sous-groupes d’éléments de rattachement retenus par les règles de conflit des différents pays du monde.

Il existe une dichotomie principale qui peut être mise en avant entre deux groupes : le groupe des éléments de rattachement dits « unitaires » et celui des éléments de rattachement dits « scissionnistes ». Au sein de chaque groupe, des subdivisions se distinguent.


466) www.un.org/fr/sections/member-states/growth-united-nations-membership-1945-present/index.html
467) R. David et G. Grassmann, Einführung in die großen Rechtssysteme der Gegenwart, 3e éd. allemande, 1988. – V. aussi : G. Cuniberti, Grands systèmes de droit contemporains, Introduction au droit comparé, LGDJ, coll. « Manuels-Droit privé », 3e éd. 2015.
468) Pour illustrer le propos précédent indiquant que l’appartenance à une famille juridique donne des informations générales sur le contenu de la loi matérielle des États en faisant partie : on peut noter, par exemple, que les pays faisant partie de la famille de la common law retiennent en matière successorale : une scission de la succession quant aux éléments de rattachement désignant la loi applicable aux biens meubles et celle applicable aux immeubles (V. infra, n° a3361), la présence de deux témoins pour la validité des testaments, une liquidation de la succession réalisée par un exécuteur ou un administrateur. Encore, dans ces pays, l’institution de la réserve héréditaire est remplacée par un droit à pension alimentaire attribué par le juge suivant les règles de l’équité en fonction du contexte. Inheritance (Provision for Family and Dependants) Act 1975: www.legislation.gov.uk/ukpga/1975/63.
469) C. Hertel, directeur Deutsches Notarinstitut (DNotI – Institut notarial allemand), Würzburg, Systèmes juridiques dans le monde : Notarius International 1-2/2009.
470) Également appelés connecting factors en anglais.
471) V. supra, nos a1019 et s.
472) Entrent dans la qualification de problèmes liés aux successions : les causes d’ouverture de la succession, les qualités pour succéder, la répartition des parts successorales, les modalités de transmission du patrimoine, les modalités de partage, les testaments (Centre notarial de droit européen, Techniques et raisonnements de droit international privé).
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