CGV – CGU

Partie III – Se séparer
Titre 2 – Les effets patrimoniaux du divorce
Chapitre II – La liquidation et le partage

3344 Il convient d’envisager la liquidation et le partage dans le contexte de l’importation d’un jugement étranger (Section I), et dans l’hypothèse de l’exportation d’un jugement français (Section II).

Section I – Effets en France d’un jugement étranger contenant une ou des attributions de biens immobiliers situés en France au profit d’un ex-époux

3345 Le notaire français peut être confronté à trois types de situations face à un jugement étranger prononçant un divorce. En effet, ce jugement peut :

se contenter de prononcer le divorce ;

ou dans son dispositif préciser l’attribution en France d’un bien déterminé à l’un des époux ;

ou encore homologuer une convention qui comprend le partage de biens situés dans plusieurs pays.

3346 Depuis l’introduction de l’article 710-1 du Code civil par la loi du 28 mars 2011, il n’est plus possible de simplement procéder aux fins de publication en France, au dépôt du jugement étranger, mais un acte devra être établi par le notaire français réitérant l’attribution du bien situé en France au profit de l’ex-époux.

En matière de divorce, il est assez fréquent de recevoir des jugements rendus à l’étranger comprenant des attributions de biens immobiliers au profit des ex-époux. Ainsi, un bien immobilier situé à l’étranger pourra-t-il être attribué à l’ex-époux tandis que le bien immobilier situé en France sera attribué à l’ex-épouse. Souvent il s’agit d’une convention de partage conclue entre les époux, qui aura donné lieu à une ratification par le juge.

Force est alors de constater que le régime matrimonial des époux n’a pas toujours été liquidé suivant les règles contenues dans le contrat de mariage qui a pu être ignoré tant par les époux que par le juge étranger. Comment le notaire français doit-il alors réceptionner ce jugement ? Doit-il automatiquement procéder à la réitération par un acte authentique de l’attribution du bien situé en France aux fins de publication ? Quelles questions doit-il se poser ?

En pratique, les jugements de divorce rendus à l’étranger, sous réserve de leur régularité, produisent effets en France sans qu’il soit besoin d’exequatur, sauf désaccord des parties sur la liquidation. Dès 1985, la Cour de cassation reconnaissait la possibilité pour les époux, capables et maîtres de leurs droits, de convenir, dans leurs rapports réciproques, d’une liquidation sur des bases différentes de la loi applicable à leur régime matrimonial, sous réserve des droits des tiers463.

Cette liberté et cette autonomie laissées aux époux ne doivent pas pour autant faire perdre de vue le contrôle que doit effectuer le notaire, ne serait-ce que sur la valeur des biens attribués et sur « l’équilibre de la convention » au regard du régime matrimonial qui aurait dû gouverner la liquidation. Il arrive en effet que la valeur du bien situé en France citée dans la convention jointe au jugement de divorce ne soit pas du tout conforme à la réalité. S’il en est de même du bien situé à l’étranger, l’équilibre de la convention peut ne pas être affecté, mais le risque d’un redressement fiscal sur le droit de partage existe. Il convient d’en aviser les parties.

Le déséquilibre qui pourrait être constaté par le notaire (le mari ou la femme recevant presque l’intégralité des biens alors que l’autre ne reçoit pratiquement rien) devra le mettre en alerte quant à une éventuelle contrariété à l’ordre public. En 2008, le tribunal de grande instance de Paris avait refusé l’exequatur d’une décision américaine ayant ignoré le contrat de mariage des époux et ayant attribué 75 % des biens à la femme contre 25 % au mari464.

Section II – Effets à l’étranger d’un jugement français contenant une ou des attributions de biens immobiliers situés à l’étranger au profit d’un ex-époux

3347 Dans le cadre d’un divorce prononcé en France, il est possible que les époux aient acquis des biens à l’étranger ; il conviendra de ne pas les omettre dans la convention contenant liquidation-partage de leur régime matrimonial en France, et de se renseigner auprès d’un notaire ou avocat du lieu de situation du bien sur les éventuelles mentions à porter dans l’acte afin de faciliter les formalités de publication à l’étranger.


463) Cass. 1re civ., 3 janv. 1985, n° 83-15.386 et Cass. 1re civ., 25 janv. 2005, n° 02-15.648.
464) TGI Paris, 26 nov. 2008 : Rev. crit. DIP 2009, 310, note B. Ancel.
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