CGV – CGU

Partie II – S’unir
Titre 1 – Les couples non mariés
Sous-titre 1 – L’union de fait

3080 L’union de fait, le concubinage ou encore l’union libre sont autant d’expressions recouvrant une même réalité. Il s’agit de la situation dans laquelle deux personnes, non mariées, cohabitent ensemble.

À la différence d’un partenariat, cette cohabitation est effective et n’entraîne pas de véritable enregistrement. Tout au plus existe-t-il des certificats ou attestations de concubinage destinés à l’octroi de certaines prestations.

Le Code civil français définit le concubinage à l’article 515-8 comme une »(…) union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple« .

En droit international privé, l’union de fait se rapproche à la fois du droit de la famille et du droit commun des obligations. À travers le monde, l’union de fait est traitée de manière très diversifiée : elle est considérée comme illicite dans certains pays inspirés du droit musulman, ou au contraire assimilée à un mariage au regard de ses effets dans d’autres. En Europe, certains pays lui ont conféré un véritable statut (Autriche, ex-Yougoslavie).

3081 Unis dans les faits et partageant une vie commune, les couples non mariés représentent des millions de personnes à travers le monde. Dans de nombreux pays d’Amérique latine, l’assimilation du »concubin« au conjoint marié a été réalisée afin de prendre en considération le nombre très important de personnes vivant en union libre.

Certains États ont même consacré des articles au concubinage au sein de leur Constitution afin de réaliser totalement cette assimilation.

Ainsi au Pérou, est-il indiqué aux termes de l’article 5 du chapitre II de la Constitution de 1993 et de l’article 326 du Code civil114que l’union stable d’un homme et d’une femme, libres de tout lien matrimonial, mais qui forment un foyer de fait depuis au moins deux années, donne lieu à une société de biens soumise au régime de la société d’acquêts, dans laquelle le concubin exercera ses droits au moment de la liquidation après décès.

Dans un autre contexte, la loi sur les successions de 1965 applicable en Israël dispose, aux termes de son article 55, que le fait de vivre comme mari et femme dans un ménage commun donne le droit de succéder et d’être entretenu sur les biens successoraux, étant précisé que les concubins doivent être un homme et une femme célibataires. L’existence de cette loi a été justifiée de deux façons : certains prétendent qu’elle permet de contourner les empêchements à mariage institués par la loi religieuse (nullité du mariage entre juif et non juif en droit hébraïque), d’autres la justifient au regard de la similitude de comportements entre conjoints mariés et concubins devant produire les mêmes effets.

Plus près de la France, en Slovénie, la loi de 1976 accorde au concubin les mêmes droits successoraux que ceux accordés au conjoint marié.

D’autres pays, comme les pays scandinaves et certains pays de common law, ont mis fréquemment en place des contrats de concubinage.

Dès lors, comment réceptionner ces droits résultant de lois étrangères en faveur de ceux vivant en union libre ?

En droit international privé français, il n’existe aucune catégorie de rattachement propre au concubinage ou à l’union libre.

Le rattachement au statut personnel a été proposé par certains auteurs.

De façon un peu contradictoire, l’union libre est rattachée à la loi des effets personnels du mariage : loi nationale commune des époux et, à défaut, loi du domicile mais pas seulement, et l’approche se doit d’être fragmentaire.

La jurisprudence n’est pas très abondante.

S’agissant des contrats entre concubins, il conviendra de se reporter à la Convention de Rome du 19 juin 1980 devenue le règlement communautaire Rome I.

S’agissant des questions d’autorité parentale, il conviendra de se référer au règlement Bruxelles II bis ainsi qu’aux conventions de La Haye de 1961 et de 1966.

S’agissant des obligations alimentaires, il conviendra, à défaut de contrat, de se reporter à la Convention de La Haye de 1973, à celle du 23 novembre 2007, au protocole du 23 novembre 2007 ou encore au règlement européen n° 4/2009 du 18 décembre 2008.

Lorsque le concubinage ne résultera pas d’un contrat, les effets patrimoniaux résultant de sa rupture pourront faire appel à des notions de société de fait ou encore d’enrichissement sans cause obéissant à leur propre loi.

La Cour de cassation quant à elle, dans un arrêt du 20 avril 2017115concernant la liquidation d’une indivision entre concubins, a fait application du règlement Bruxelles I en affirmant que « le juge espagnol est seul compétent pour connaître d’un litige relatif à la propriété et au partage entre des résidents français, d’une indivision portant sur un immeuble situé en Espagne, de sorte que le juge français doit relever d’office son incompétence ».

Il faut noter que le notaire français se devra toujours d’être curieux, n’hésitant pas à poser des questions sur le mode de conjugalité des clients venus le consulter, afin de ne pas omettre des droits en faveur d’un concubin.

On imagine aisément le rôle important du notaire dans l’anticipation successorale. En effet, des concubins pensant hériter l’un de l’autre seront surpris d’apprendre qu’en France aucune vocation successorale n’existe en faveur du concubin et que s’il venait à hériter d’une disposition testamentaire, les droits de succession au taux de 60 % s’avéreront prohibitifs.


114) D.-L. n° 295, 24 juill. 1984.
115) Cass. 1re civ., 20 avr. 2017, n° 16-16.983 : JurisData n° 2017-007211 ; Dr. famille juill.-août 2017, comm. A. Devers ; JDI 2018, 134, note V. Parisot.
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