CGV – CGU

Partie I – Établir une filiation
Titre 1 – La filiation
Sous-titre 1 – L’établissement de la filiation par l’effet de la loi
Chapitre I – Par l’effet de la loi : principes en droit français

3006 Le droit français n’établit pas la filiation avec la mère de la même façon qu’avec le père. Les règles d’établissement de la filiation maternelle sont plus simples à énoncer (Section I) ; la filiation paternelle suppose des développements plus complets (Section II).

Section I – L’établissement de la filiation maternelle

3007 La filiation maternelle puise son fondement de l’adage Mater semper certa est.

Aux termes de l’article 311-25 du Code civil : « La filiation est établie, à l’égard de la mère, par la désignation de celle-ci dans l’acte de naissance de l’enfant ». Est donc présumée être la mère de l’enfant : la femme qui a accouché.

Peu importe que la femme soit mariée ou non7.

Une femme peut décider d’accoucher sous X, c’est-à-dire refuser que son nom figure dans l’acte de naissance de l’enfant8. Dans ce cas, cette femme pourrait, le cas échéant, reconnaître son enfant a posteriori9.

Il convient de préciser que cette nouveauté résulte de la loi du 16 janvier 2009, qui a mis un terme à l’impossibilité d’une reconnaissance a posteriori.

De plus, l’article 325, alinéa 1er du Code civil prévoit : « À défaut de titre et de possession d’état, la recherche de maternité est admise ».

L’établissement de la filiation maternelle semble donc assez évident. Celui de la filiation paternelle suscite plus de questionnements.

Section II – L’établissement de la filiation paternelle

3008 La filiation paternelle s’établit en principe suivant l’adage Pater is est.

L’article 312 du Code civil dispose : « L’enfant conçu ou né pendant le mariage a pour père le mari ».

L’article 313 du même code précise immédiatement ensuite qu’il s’agit en fait d’une présomption : « La présomption de paternité est écartée lorsque l’acte de naissance de l’enfant ne désigne pas le mari en qualité de père (…) ».

§ I – Le domaine de la présomption

3009 Cette présomption concerne le mari de la mère et l’enfant conçu ou né pendant le mariage.

Le mari de la mère : le mari de la mère est présumé être le père de l’enfant.

Cette présomption découle d’une obligation de fidélité inhérente à l’institution du mariage10.

L’enfant conçu pendant le mariage : la présomption joue si l’enfant est né au plus tôt le 180e jour après la célébration du mariage et au plus tard le 300e jour après la dissolution du mariage. L’enfant né pendant le mariage est légalement couvert par cette présomption11.

L’enfant porté pendant le mariage bénéficie également de cette présomption s’il a été conçu avant la célébration du mariage et/ou s’il est né dans les trois cents jours de la dissolution du celui-ci.

Cependant, cette présomption peut faire l’objet d’exclusions.

§ II – L’exclusion de la présomption

3010 Il existe deux cas dans lesquels l’enfant ne bénéficie pas de la présomption de paternité car celle-ci est peu probable.

Premier cas : lorsque l’enfant est conçu pendant une période de séparation judiciaire des époux12.

Dans l’instance de divorce par consentement mutuel, l’enfant ne sera pas couvert par la présomption de paternité s’il naît plus de trois cents jours après la convention homologuant le divorce. Dans le cadre du divorce conventionnel, ce délai de trois cents jours commencera à courir à partir de la signature de l’acte notarié de dépôt de la convention sous signatures privées contresignées par avocats.

Dans les autres types de divorce, lorsque l’enfant naît plus de trois cents jours après l’ordonnance sur tentative de conciliation (OSTC), la présomption de paternité est également écartée.

Second cas : la présomption de paternité ne trouvera pas application en cas de séparation de fait si le nom du mari ne figure pas sur l’acte de naissance de l’enfant. La femme qui accouche n’est en effet pas tenue de donner le nom de son mari. Si elle ne le fait pas ou donne un autre nom, la présomption ne joue pas.

Il convient cependant de signaler que, dans ce cas, le mari pourra reconnaître l’enfant13.

S’il arrive que la présomption puisse être exclue, elle peut également faire l’objet d’un rétablissement.

§ III – Le rétablissement de la présomption (de plein droit ou judiciaire)

3011 Il existe deux façons de rétablir la présomption Pater is est : soit de plein droit par application de l’article 314 du Code civil14, soit par la voie judiciaire prévue par l’article 329 du même code.

Le rétablissement de plein droit de l’article 314 résulte de l’existence d’une possession d’état entre le mari de la mère et l’enfant de celle-ci.

Dans cette hypothèse, le notaire devra dresser un acte de notoriété s’appuyant au besoin sur des témoignages consignés en la forme d’attestations.

Pour que ce rétablissement puisse être mis en jeu, l’enfant ne doit pas avoir d’autre paternité juridiquement établie.

Le rétablissement judiciaire de l’article 32915suppose quant à lui que le mari puisse prouver par tous moyens qu’il est le père biologique de l’enfant. Cette action doit être portée devant le tribunal de grande instance en formation collégiale.

En pratique cette action est très rarement utilisée, car longue et coûteuse… Le notaire pourra donc conseiller au mari, après s’être assuré que l’enfant n’a pas d’autre paternité établie, de privilégier l’établissement de la filiation par simple reconnaissance.

Les principes de l’établissement de la filiation par la loi en droit matériel français rappelés, il convient de s’intéresser à la dimension internationale de ceux-ci.


7) Ainsi qu’il résulte d’un revirement de jurisprudence en date du 14 février 2006 fondé sur les articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l’homme : abolissant la différence entre les enfants naturels et légitimes, Cass. 1re civ., 14 févr. 2006, n° 05-13.006 : Bull. civ. 2006, I, n° 73, p. 72.
8) C. civ., art. 326.
9) V. infra, n° a3018.
10) C. civ., art. 212 : « Les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours, assistance ».
11) C. civ., art. 311.
12) C. civ., art. 313.
13) C. civ., art. 315.
14) C. civ., art. 314 : « Si elle a été écartée en application de l’article 313, la présomption de paternité se trouve rétablie de plein droit si l’enfant a la possession d’état à l’égard du mari et s’il n’a pas une filiation paternelle déjà établie à l’égard d’un tiers ».
15) C. civ., art. 329 : « Lorsque la présomption de paternité a été écartée en application de l’article 313, chacun des époux peut demander, durant la minorité de l’enfant, que ses effets soient rétablis en prouvant que le mari est le père. L’action est ouverte à l’enfant pendant les dix années qui suivent sa majorité ».
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