CGV – CGU

Partie I – Préparation et rédaction de l’acte : enjeux et méthodologie
Titre 4 – La langue utilisée pour la rédaction de l’acte notarié
Sous-titre 1 – Rappel historique
Chapitre III – Sous les républiques ayant précédé la Cinquième

2106 Si, depuis l’an II, les actes publics sont écrits en français et l’instruction publique de l’État est assurée en français pour augmenter la force nouvelle de la République française au sein de toutes les couches de la société, au xixe siècle les dialectes et autres idiomes ou patois sont bannis de la sphère publique par la promulgation d’une loi du 18 mars 1882235.

Cette loi de 1882 est alors nécessaire afin de permettre à la République de renforcer ses valeurs fondamentales au sein de la société, et de rendre la situation interne cohérente avec la place que la France occupe sur la scène internationale.

En effet, la portée de la langue française dépasse très largement les frontières du pays, puisque l’un de ses caractères majeurs est sa vocation à l’universalisme : parce qu’elle est une langue diplomatique et internationale236, « le français est la langue internationale des chancelleries européennes »237. Comme le souligne le célèbre journaliste chroniqueur Jean Frollo, « tous les instruments diplomatiques, tous les traités sont écrits en français »238.

Cette expansion culturelle ayant dépassé les limites linguistiques du pays en établissant l’usage du français comme langue diplomatique, a toutefois rencontré certains revers, le premier étant la rédaction du traité de paix de Versailles mettant fin à la Première Guerre mondiale.

Le traité de Versailles fut en effet rédigé en français mais aussi en anglais, les deux versions faisant également autorité. Le texte portait le titre « Conditions de paix – Conditions of Peace ». « C’était la première fois depuis le traité de Rastatt de 1714 (qui mettait fin à la guerre de Succession d’Espagne) que le français n’était plus la seule langue officielle de la diplomatie occidentale »239. Pour la première fois, des diplomates américains prenaient part aux négociations. Ils ne parlaient ni latin ni français, mais anglais. Dès lors, le traité fut écrit en français et en anglais. Avec « l’industrialisation puis la mondialisation, l’anglais sera amené à prendre de plus en plus d’importance dans les échanges diplomatiques, sans pour autant totalement évincer le français. L’anglais et le français sont aujourd’hui les langues de travail officielles à l’ONU. Et les diplomates de l’Union européenne ont majoritairement recours à l’anglais, au français et à l’allemand »240.


235) Art. 4, al. 1er, dans sa rédaction résultant de la loi du 9 août 1936.
236) P. Malaurie, art. préc., p .572.
237) J. Frollo, La langue de l’Europe : Le Petit Parisien 14 juin 1892 (http://gallica.bnf.fr, consulté le 1er mai 2018).
238) V. note supra, dont la suite de l’article est délectable : « On se rappelle qu’en 1871 le prince de Bismarck proposa au prince Gortschakoff de substituer l’allemand au français dans les rapports officiels entre les puissances. La lettre de M. de Bismarck était en allemand, on le pense bien. M. de Gortschakoff répliqua en bon français que les raisons qui avaient fait adopter l’usage de notre langue par la diplomatie des siècles précédents lui paraissaient des plus sages, et qu’il lui était difficile de concevoir que l’avis du grand Frédéric sur ce point ne fût point celui de son petit-fils. On sait que le roi philosophe Frédéric II, le vrai fondateur de la puissance militaire de la Prusse, ne parlait et n’écrivait qu’en français, et que sa prétention était de rivaliser avec Voltaire en prose et en vers. C’est lui qui disait : je parle en Allemand à mes soldats, en Français avec mes pairs ».
239) www.axl.cefan.ulaval.ca/francophonie/versailles_Œ1919.htm, dernière mise à jour 30 janv. 2017, consulté le 1er mai 2018.
240) https://sites.arte.tv/karambolage/fr/la-langue-la-langue-de-la-diplomatie-karambolage, dernière mise à jour 24 juin 2017, consulté le 1er mai 2018.
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