CGV – CGU

Partie II – Les sources du droit international
Titre 3 – Le droit de l’Union européenne
Sous-titre 2 – La règle de droit européen
Chapitre I – Le droit primaire

1556 Le droit primaire est le droit directement créé par les États membres et qui est à l’origine de l’ordre juridique de l’Union européenne, c’est ainsi qu’il est aussi appelé droit communautaire originaire. Ce droit originaire est composé des traités constitutifs, mais aussi de leurs annexes, des protocoles et des modificatifs les concernant (Section I).

1557 Le droit primaire se situe au sommet de la hiérarchie de l’ordre juridique et prime les normes dérivées (Section II).

Section I – Les composantes du droit primaire

1558 Le droit primaire écrit est composé des traités fondateurs (Sous-section I), des traités qui sont venus les modifier (Sous-section II) ainsi que des protocoles, annexes et déclarations (Sous-section III).

Sous-section I – Les traités fondateurs

1559 Le premier traité, qui n’est plus en vigueur aujourd’hui, a été le Traité de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (Traité CECA) du 18 avril 1951, suivi duTraité instituant la Communauté économique européenne (Traité CEE), devenu le Traité instituant la Communauté européenne (Traité CE), et le Traité instituant la Communauté européenne de l’énergie atomique (Traité CEEA), signés à Rome et entrés en vigueur le 1er janvier 1958. Puis le Traité sur l’Union européenne a été signé à Maastricht le 7 février 1992. Il est entré en vigueur le 1er novembre 1993.

1560 Ces traités ont été modifiés tantôt pour rendre l’Union européenne plus efficace, tantôt pour accueillir de nouveaux adhérents.

Les traités qui ont porté sur une révision d’ensemble sont les suivants :

le traité de fusion (traité de Bruxelles), signé le 8 avril 1965, entré en vigueur le 1er juillet 1967, ayant pour objet la modernisation des institutions ;

l’Acte unique européen (AUE), signé le 17 février 1986 (Luxembourg) et le 28 février 1986 (La Haye), entré en vigueur le 1er juillet 1987, ayant pour objet de réformer les institutions pour accueillir le Portugal et l’Espagne et le processus des décisions pour préparer le marché unique ;

le Traité sur l’Union européenne (TUE) (traité de Maastricht), signé le 7 février 1992, entré en vigueur le 1er novembre 1993, ayant pour objet la création d’une union monétaire (l’euro) et les bases d’une union politique ;

le traité d’Amsterdam, signé le 2 octobre 1997, entré en vigueur le 1er mai 1999, ayant pour objet la réforme des institutions pour accueillir de nouveaux membres ;

le traité de Nice, signé le 26 février 2001, entré en vigueur le 1er février 2003, ayant pour objet la réforme des institutions pour le fonctionnement de l’Union européenne à vingt-cinq États membres ;

le traité de Lisbonne, signé le 13 décembre 2007, entré en vigueur le 1er décembre 2009, ayant pour objet de rendre l’Union européenne plus démocratique et la rendre plus efficace pour traiter les problèmes mondiaux.

Le traité de Lisbonne supprime la Communauté européenne et y substitue l’Union européenne. Il maintient, d’une part, la CEEA en apportant quelques modifications au niveau des dispositions institutionnelles et financières686et, d’autre part, les deux traités sur lesquels est fondé l’Union européenne : le Traité sur l’Union européenne (TUE), et le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE)687. Ces deux traités ont la même valeur juridique. Il n’existe ni barrière ni hiérarchie entre ces deux textes, même si la terminologie pourrait faire penser que le TFUE est l’instrument de mise en œuvre du TUE.

Le traité de Lisbonne reconnaît par ailleurs la valeur juridique des traités à la Charte des droits fondamentaux688. Le traité de Lisbonne a désormais autorisé le retrait d’un État membre689.

1561 Ces traités sont autonomes les uns par rapport aux autres, mais participent d’une unité fonctionnelle. Ainsi en ont décidé les juges690. Ainsi, en cas de mutisme d’un des traités, la Cour pourra se référer aux dispositions d’un autre des traités. La Cour a pu décider par exemple, dans une affaire CEZ691, que le principe de non-discrimination fondé sur la nationalité prévu au Traité CE (art. 12) s’applique également dans le cadre du Traité CEEA, muet à ce sujet, en tant que principe général du droit communautaire. Et inversement la Cour admet la validité d’un recours fondé uniquement sur le Traité CECA contre une décision du Parlement qui concerne les autres traités muets à ce sujet692.

Sous-section II – Les traités d’adhésion

1562 L’article 49 TUE dispose que tout État européen qui respecte les valeurs visées à l’article 2 et s’engage à les promouvoir peut demander à devenir membre de l’Union.

Il faut rappeler que l’article 2 mentionne comme valeurs le respect de la dignité humaine, de la liberté, de la démocratie, de l’égalité, de l’État de droit, ainsi que le respect des droits de l’homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités, et précise que ces valeurs sont communes aux États membres dans une société caractérisée par le pluralisme, la non-discrimination, la tolérance, la justice, la solidarité et l’égalité entre les femmes et les hommes.

1563 La procédure d’adhésion débute donc par la demande d’un État membre. Le Parlement européen et les parlements nationaux sont informés de cette demande. L’État demandeur adresse sa demande au Conseil, lequel se prononce à l’unanimité après avoir consulté la Commission et après approbation du Parlement européen qui se prononce à la majorité des membres qui le composent.

Ensuite un accord est signé entre le Conseil et l’État membre sur les conditions de l’admission et les adaptations que cette admission entraîne en ce qui concerne les traités sur lesquels est fondée l’Union.

Ledit accord est soumis à la ratification par tous les États contractants, conformément à leurs règles constitutionnelles respectives.

1564 Les différents traités d’adhésion signés jusqu’à maintenant sont les suivants :

1973 (Danemark, Irlande et Royaume-Uni) ;

1981 (Grèce) ;

1986 (Espagne et Portugal) ;

1995 (Autriche, Finlande et Suède) ;

2004 (Chypre, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Malte, Pologne, République tchèque, Slovaquie et Slovénie) ;

2007 (Bulgarie et Roumanie) ;

2013 (Croatie).

Sous-section III – Les protocoles, annexes et déclarations

1565 Le Traité sur l’Union européenne et le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne sont complétés par trente-sept protocoles et deux annexes, et soixante-cinq déclarations.

§ I – Les protocoles

1566 Il existe trente-sept protocoles au niveau européen, dont la liste figure ci-après :

Protocole (n° 1) sur le rôle des parlements nationaux dans l’Union européenne ;

Protocole (n° 2) sur l’application des principes de subsidiarité et de proportionnalité ;

Protocole (n° 3) sur le statut de la Cour de justice de l’Union européenne ;

Protocole (n° 4) sur les statuts du Système européen de banques centrales et de la Banque centrale européenne ;

Protocole (n° 5) sur les statuts de la Banque européenne d’investissement ;

Protocole (n° 6) sur la fixation des sièges des institutions et de certains organes, organismes et services de l’Union européenne ;

Protocole (n° 7) sur les privilèges et immunités de l’Union européenne ;

Protocole (n° 8) relatif à l’article 6, § 2, du traité sur l’Union européenne sur l’adhésion de l’Union à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Protocole (n° 9) sur la décision du Conseil relative à la mise en œuvre des articles 16, paragraphe 4, du Traité sur l’Union européenne et 238, § 2, du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne entre le 1er novembre 2014 et le 31 mars 2017, d’une part, et à partir du 1er avril 2017, d’autre part ;

Protocole (n° 10) sur la coopération structurée permanente établie par l’article 42 du Traité sur l’Union européenne ;

Protocole (n° 11) sur l’article 42 du Traité sur l’Union européenne ;

Protocole (n° 12) sur la procédure concernant les déficits excessifs ;

Protocole (n° 13) sur les critères de convergence ;

Protocole (n° 14) sur l’Eurogroupe ;

Protocole (n° 15) sur certaines dispositions relatives au Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord ;

Protocole (n° 16) sur certaines dispositions relatives au Danemark ;

Protocole (n° 17) sur le Danemark ;

Protocole (n° 18) sur la France ;

Protocole (n° 19) sur l’acquis de Schengen intégré dans le cadre de l’Union européenne ;

Protocole (n° 20) sur l’application de certains aspects de l’article 26 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne au Royaume-Uni et à l’Irlande ;

Protocole (n° 21) sur la position du Royaume-Uni et de l’Irlande à l’égard de l’espace de liberté, de sécurité et de justice ;

Protocole (n° 22) sur la position du Danemark ;

Protocole (n° 23) sur les relations extérieures des États membres en ce qui concerne le franchissement des frontières extérieures ;

Protocole (n° 24) sur le droit d’asile pour les ressortissants des États membres de l’Union européenne ;

Protocole (n° 25) sur l’exercice des compétences partagées ;

Protocole (n° 26) sur les services d’intérêt général ;

Protocole (n° 27) sur le marché intérieur et la concurrence ;

Protocole (n° 28) sur la cohésion économique, sociale et territoriale ;

Protocole (n° 29) sur le système de radiodiffusion publique dans les États membres ;

Protocole (n° 30) sur l’application de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne à la Pologne et au Royaume-Uni ;

Protocole (n° 31) relatif aux importations dans l’Union européenne de produits pétroliers raffinés aux Antilles néerlandaises ;

Protocole (n° 32) sur l’acquisition de biens immobiliers au Danemark ;

Protocole (n° 33) sur l’article 157 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ;

Protocole (n° 34) sur le régime particulier applicable au Groenland ;

Protocole (n° 35) sur l’article 40.3.3 de la Constitution de l’Irlande ;

Protocole (n° 36) sur les dispositions transitoires ;

Protocole (n° 37) relatif aux conséquences financières de l’expiration du Traité CECA et au fonds de recherche du charbon et de l’acier.

1567 Ces protocoles ont la même valeur juridique que les traités eux-mêmes. Certains protocoles présentent une très grande importance, comme par exemple le Protocole n° 3 sur le statut de la Cour de justice de l’Union européenne.

§ II – Les annexes

1568 Il existe deux annexes :

la liste, prévue à l’article 38 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, des produits soumis aux dispositions de ce traité relatives à l’agriculture et à la pêche ;

et la liste des pays et territoires d’outre-mer auxquels s’appliquent les dispositions de la quatrième partie du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (art. 198 et s.).

1569 Ces annexes ont la même valeur juridique que les traités eux-mêmes.

§ III – Les déclarations

1570 Au nombre total de soixante-cinq, les déclarations sont annexées à l’acte de la Conférence intergouvernementale (CIG) qui a adopté le traité de Lisbonne.

Ces déclarations peuvent être de trois types :

déclarations relatives à des traités ;

déclarations relatives à des protocoles annexés aux traités ;

et déclarations émanant d’États membres.

1571 Les déclarations n’ont pas force obligatoire. Néanmoins, lorsqu’elles sont adoptées par l’ensemble des États membres, elles peuvent avoir une forte autorité politique, alors que les déclarations émanant d’États membres reflètent simplement la position de ces derniers sur un point sans avoir autorité à l’égard des autres États.

Section II – La portée des traités

1572 La portée d’un traité sera caractérisée par son champ matériel (Sous-section I), son champ territorial (Sous-section II), son champ temporel (Sous-section III) et son effet direct (Sous-section IV).

Sous-section I – Le champ matériel des traités

1573 Les matières régies par les traités découlent du partage de compétences entre l’Union européenne et les États membres, opéré dans les traités constitutifs eux-mêmes. L’Union européenne ne dispose que d’une compétence d’attribution et « n’agit que dans les limites des compétences que les États lui ont attribuées dans les traités et que toute compétence non attribuée à l’Union appartient aux États membres »693. Les compétences ne sont pas toutes confiées exclusivement à l’Union. Certaines sont partagées et d’autres sont des compétences d’appui.

1574 Le Traité CECA (marché commun du charbon et de l’acier) donnait dans son annexe 1 la liste des produits couverts par les expressions « charbon » et « acier ». Le traité de Lisbonne694fait référence au marché intérieur sans donner de précision. La Cour se fonde sur l’un des objectifs fixés à la Communauté européenne par l’article 2 du Traité CE : assurer le développement harmonieux, équilibré et durable des activités économiques. La Cour a donné une définition du critère d’activité économique dans une affaire concernant des objets à caractère artistique ou archéologique, et a jugé qu’ils étaient régis par le traité dès lors qu’ils sont des « produits appréciables en argent et susceptibles comme tels de former l’objet de transactions commerciales »695. Il en a été jugé ainsi des activités sportives, si elles donnent lieu à des prestations de travail rémunérées par un salaire ou à des prestations de services rémunérées696. Dans un arrêt en date du 12 avril 2005697, la Cour a jugé que les utilisations militaires de l’énergie nucléaire ne relèvent pas de son champ d’application.

Sous-section II – Le champ territorial des traités

1575 L’article 299, § 1 TCE précise que le traité s’applique aux États membres ainsi qu’aux départements français d’outre-mer, aux Açores, à Madère et aux îles Canaries. L’article 355 TFUE a ajouté nommément les départements d’outre-mer et Mayotte, ancien Pays et territoire d’outre-mer (PTOM). Les traités s’appliquent également aux territoires européens dont un État membre assure les relations extérieures, à savoir Gibraltar et les îles Aland. Sont exclues de l’application des traités les îles Féroé, les zones de souveraineté que le Royaume-Uni a conservées à Chypre (bases militaires), les îles anglo-normandes et l’île de Man (sauf les règles douanières et les règles de restrictions quantitatives), la Principauté de Monaco, la République de Saint-Marin qui ont le statut d’États indépendants.

1576 Certains territoires bénéficient d’un régime particulier qui tient compte de leur spécificité, et ainsi les règles de l’Union ne leur seront pas appliquées ou pas appliquées dans les mêmes termes.

Les pays et territoires d’outre-mer dont la liste figure à l’annexe II du TFUE698bénéficient du régime de l’association699, défini dans la quatrième partie du traité et qui a pour but de favoriser leur développement économique, social et culturel. Le traité d’Amsterdam prévoit également un régime particulier pour les régions ultrapériphériques (RUP) : la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, La Réunion, Saint-Martin, Mayotte, les Açores, Madère et les îles Canaries. La Cour a jugé, à propos de Mayotte, que ces mesures particulières pouvaient fixer des conditions d’application « non seulement des dispositions de traités, mais également de celles du droit dérivé »700.

1577 Le droit de l’Union s’applique à toute personne physique ou morale, nonobstant sa nationalité, dès lors qu’elles exercent une activité même professionnelle sur le territoire d’un État membre. La Cour a jugé qu’une entreprise américaine était soumise au droit de la concurrence et aux sanctions en matière d’ententes anticoncurrentielles ou en matière de position dominante, si le comportement de celle-ci a une incidence sur le fonctionnement du marché intérieur701.

Sous-section III – Le champ temporel des traités

1578 Les traités sont des conventions, conclues entre États membres, et prévoient eux-mêmes tant leur entrée en vigueur que leur durée d’application. Le traité de Lisbonne (§ II) est venu largement modifier la situation ancienne (§ I).

§ I – Avant le traité de Lisbonne

1579 Avant l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, les traités entraient en vigueur à la date prévue par les traités eux-mêmes. L’article 247 du Traité CEE, devenu article 313 du Traité CE, stipulait que le traité entrerait en vigueur le premier jour du mois suivant le dépôt du dernier instrument de ratification ou, si ce dépôt avait lieu moins de quinze jours avant le début du mois suivant, le premier jour du deuxième mois suivant la date de ce dépôt. Cette date d’entrée en vigueur a été celle du 1er janvier 1958.

L’entrée en vigueur respecte donc la règle de droit international de dépôt des instruments de ratification des traités. Cette règle a retardé notablement, à de multiples reprises, l’entrée en vigueur des traités de révision (traités de Maastricht, Nice et Lisbonne).

1580 Cette entrée en vigueur des traités se distingue de l’existence de certaines de leurs dispositions qui peuvent avoir une application différée ou progressive. Tel a été le cas de l’établissement du marché commun sur une période transitoire de douze années divisée en trois étapes de quatre années, prévue à l’article 8 du Traité CEE. Il en est de même des dispositions transitoires prévues dans le cadre d’adhésion de nouveaux membres.

1581 S’agissant de la durée d’application du traité, il convient également de se rapporter à ses dispositions. Le Traité CECA avait été conclu pour une durée de cinquante ans, alors que d’autres traités l’ont été pour une durée illimitée : Traité CE, Traité CEEA, TUE.

Les traités peuvent faire l’objet de révisions, mais l’unanimité sera requise.

Il y a également lieu de préciser qu’une non-application des traités dans le temps ne les rendra pas caducs. Ainsi en a décidé la Cour dans une affaire dans laquelle la France prétendait que le Traité Euratom était devenu désuet du fait de sa non-application702.

Sur la question de la possibilité d’arrêter l’applicabilité dans le temps, un État membre ne pouvait a priori pas se retirer sans l’accord des autres, cette possibilité ne lui étant pas offerte précédemment par les traités.

§ II – L’apport du traité de Lisbonne

1582 Le traité de Lisbonne devait entrer en vigueur le 1er janvier 2009 à condition que tous les instruments de ratification aient été déposés, ou le premier jour du mois suivant le dépôt de l’instrument de ratification de l’État signataire qui procède le dernier à cette formalité, ce qui a conduit à son entrée en vigueur le 1er décembre 2009. Les articles 16 et 17 fixent respectivement des règles de vote au Conseil ainsi que des règles de composition de la Commission, d’application échelonnée.

Le traité lui-même est conclu pour une durée illimitée703.

Ce traité apporte de la souplesse à l’organisation de l’Union européenne, notamment dans les modalités de révision (A), mais également par la possibilité offerte aux États membres de se retirer plus facilement (B).

A/ Les modalités de révision

1583 Ce traité modifie de manière importante la procédure de révision. Le principe de l’unanimité ne disparaît pas, cependant l’article 48, § 1 introduit de nouvelles règles : « Les traités peuvent être modifiés conformément à une procédure de révision ordinaire. Ils peuvent également être modifiés conformément à des procédures de révision simplifiées ».

La procédure ordinaire de révision est ouverte à tout État membre, à la Commission et désormais au Parlement européen. Cette procédure concerne les modifications les plus importantes apportées aux traités, telles que l’accroissement ou la réduction des compétences de l’Union européenne. Un projet de révision est soumis au Conseil qui, à son tour, le soumet au Conseil européen et informe les États membres de la procédure. Si le Conseil est favorable à la révision, il a deux options :

soit les modifications sont considérées comme importante, alors il convoque une convention composée des parlements nationaux, des chefs d’État ou de gouvernement des pays de l’Union européenne, du Parlement européen et de la Commission. Cette convention adopte des accords. Puis le président du Conseil convoque une Conférence des représentants des gouvernements des pays de l’Union européenne. Cette conférence a pour objectif d’adopter les modifications à apporter aux traités ;

soit les modifications ne le sont pas et il ne convoque pas de conférence.

1584 Deux procédures simplifiées sont également prévues par le traité : la procédure de révision simplifiée des politiques et actions internes de l’Union (I) et la clause passerelle (II).

I/ La révision simplifiée

1585 Le Conseil européen peut adopter des décisions modifiant des dispositions du TFUE (3e partie) sans convoquer une conférence intergouvernementale et sans convention. À cette occasion, le Conseil européen statue à l’unanimité après consultation du Parlement européen et de la Commission, ainsi que de la Banque centrale européenne en cas de modification institutionnelle dans le domaine monétaire. Le texte modificatif devra être ratifié par les États membres. Saisie d’un renvoi par l’Irlande dans une affaire qui l’opposait à M. Pringle, la Cour a jugé que la révision du TFUE autorisant l’adoption par les États membres de la zone euro de l’accord MES (mesure instituant un mécanisme de stabilité dans les États signataires) au moyen de la procédure simplifiée était légale704. La décision ne peut toutefois pas accroître les compétences attribuées à l’Union dans les traités.

II/ La clause passerelle

1586 Instituée par l’article 48, § 7 TUE, cette clause permet au Conseil européen de voter à la majorité qualifiée au lieu d’un vote à l’unanimité dans un domaine relevant du TFUE ou de la politique étrangère et de sécurité commune de l’Union européenne (PESC), sauf dans le cas des décisions ayant des implications militaires ou relevant du domaine de la défense.

Le Conseil européen peut décider à l’unanimité, après approbation du Parlement, de substituer la procédure législative ordinaire à une procédure spéciale, pour que la décision soit adoptée en codécision par le Parlement et le Conseil à la majorité qualifiée.

L’utilisation de cette clause doit être notifiée aux parlements nationaux, et la décision prise ne pourra entrer en vigueur que si ces derniers ne s’y opposent pas dans un délai de six mois suivant la notification.

B/ Le retrait

1587 En vertu de l’article 50 TUE, tout État membre pourra, en respectant ses règles constitutionnelles, se retirer de l’Union. Le retrait est soumis à une période transitoire de deux années au cours desquelles le retrayant peut négocier un accord avec l’Union, fixant les modalités de son retrait et ses relations futures avec l’Union. Cet accord est conclu par le Conseil statuant à la majorité qualifiée après approbation du Parlement européen. Ce droit a été exercé par le Royaume-Uni, après un vote des citoyens britanniques du 23 juin 2016, par notification au Conseil européen en date du 27 mars 2017. Un traité de retrait a été régularisé le 25 novembre 2018 et sera soumis à la ratification du Parlement britannique. Le Royaume-Uni ne devrait plus faire partie de l’Union européenne à partir du 29 mars 2019.

Sous-section IV – L’effet direct des traités

1588 Le principe d’effet direct permet à tout individu d’invoquer une norme européenne directement devant les tribunaux nationaux ou européens, indépendamment de l’existence de textes issus en droit national. Ce droit peut être invoqué vis-à-vis du pays (effet direct appelé vertical), mais également vis-à-vis d’un autre individu (effet direct appelé horizontal). La Cour reconnaît selon les types d’actes soit un effet plein (effet direct vertical et horizontal), soit un effet partiel (limité à l’effet direct vertical).

1589 La Cour de justice a posé, dans l’arrêt Van Gend en Loos, le principe de l’effet direct des traités, et en a également précisé les conditions : la disposition concernée doit être suffisamment claire et précise, inconditionnelle et son application ne doit nécessiter aucune mesure complémentaire, ni de nature communautaire, ni de nature nationale.

La Cour a refusé de reconnaître l’effet direct à l’article 2 TCE (auquel s’est substitué l’article 3 TUE) fixant les objectifs de l’Union qu’elle juge trop général dans sa formulation705.

La Cour adopte la même position à l’égard de l’article 13 TCE (remplacé par l’article 19 TFUE) qui confère la possibilité et non l’obligation de combattre toute discrimination706.


686) Prot. n° 2, art. 3, § 3.
687) TUE, art. 1er, al. 3 et TFUE, art. 1er, al. 2.
688) TUE, art. 6, § 1er, al. 1.
689) TUE, art. 50.
690) CJCE, 15 juill. 1960, aff. C-27 et C-39/59, Campolongo c/ Haute Autorité : Rec. CJCE 1960, I, p. 824.
691) CJCE, 27 oct. 2009, aff. C-115/08.
692) CJCE, 10 févr. 1983, aff. C-230/81, Luxembourg c/ Parlement européen : Rec. CJCE 1983, I, p. 255.
693) TUE, art. 5, § 2.
694) TCE, art. 2.
695) CJCE, 10 déc. 1968, aff. C-7/68, Commission c/ Italie : Rec. CJCE 1968, I, p. 618.
696) CJCE, 12 déc. 1974, aff. C-36/74, Walrave : Rec. CJCE 1974, I, p. 1405.
697) CJCE, 15 déc. 1995, aff. C-415/93 : Rec. CJCE 1995, I, p. 4921.
698) TFUE, ann. II : Le Groenland, – La Nouvelle-Calédonie et ses dépendances, – la Polynésie française, – les Terres australes et antarctiques françaises, – les îles Wallis-et-Futuna, – Mayotte, – Saint-Pierre-et-Miquelon, – Aruba, – Antilles néerlandaises : – Bonaire, – Curaçao, – Saba, – Sint Eustatius, – Sint Maarten, – Anguilla, – les îles Caïmans, – les îles Falkland, – Géorgie du Sud et les îles Sandwich du Sud, – Montserrat, – Pitcairn, – Sainte-Hélène et ses dépendances, – le territoire de l’Antarctique britannique, – les territoires britanniques de l’océan Indien, – les îles Turks-et-Caicos, – les îles Vierges britanniques, – les Bermudes.
699) Régime d’application partielle du droit de l’Union.
700) CJUE, 15 déc. 2015, aff. C-132/14, Parlement c/ Conseil : Europe févr. 2016, 39, D. Simon.
701) CJCE, 21 févr. 1973, aff. C-6/72, Continental Can Inc. : Rec. CJCE 1973, I, p. 215.
702) CJCE, 14 déc. 1971, aff. C-7/71, France c/ Commission : Rec. CJCE 1971, I, p. 1003.
703) TUE, art. 53 ; TFUE, art. 356.
704) CJUE, 27 nov. 2012, aff. C-370/12.
705) CJCE, 24 janv. 1991, aff. C-339/89, Alsthom Atlantique : Rec. CJCE 1991, I, p. 107.
706) CJCE, 11 mars 2003, aff. C-186/01, Dory : Rec. CJCE 2003, I, p. 2479.

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