CGV – CGU

Chapitre III – La cession de la forêt

Partie I – Du patrimoine agricole à l’exploitation sylvicole
Titre 2 – Du patrimoine forestier à l’exploitation sylvicole
Sous-titre 1 – De l’acquisition à la cession de la forêt
Chapitre III – La cession de la forêt

4255 La cession à titre onéreux de bois et forêts ou de parts de sociétés forestières rend exigibles les plus-values éventuelles. Une plus-value est également susceptible d’être exigible lors d’une cession à titre gratuit.

La nature de la plus-value diffère selon la qualité du cédant : particulier ou sylviculteur professionnel (CGI, art. 76 A). En d’autres termes, s’agit-il de la cession d’un actif professionnel ou d’un actif patrimonial privé347 ?

L’exercice à titre professionnel implique la participation personnelle, directe et continue aux actes nécessaires à l’activité (CGI, art. 155, IV). L’ampleur de l’activité est sans incidence sur son caractère professionnel. Il n’est pas nécessaire que l’activité concernée constitue la seule activité professionnelle du contribuable, ni même qu’il s’agisse de sa profession principale.

La qualité de professionnel est également reconnue aux sociétés ou groupements exerçant une activité notamment agricole. Toutefois, en l’absence de diligences régulières ou continues, l’activité de la société n’est pas professionnelle. L’exercice des seules prérogatives d’associés ou de propriétaires d’une entreprise, par exemple la participation aux conseils de direction ou aux assemblées générales ou le contrôle a posteriori de la gestion ne constitue pas une participation à l’activité de l’entreprise.

L’administration se fonde sur un faisceau d’indices pour apprécier le caractère professionnel ou non de l’activité348. Le critère de la délégation en droit ou en fait de la gestion des bois et forêts est plus particulièrement pris en compte par l’administration fiscale en matière sylvicole349.

La qualification du cédant, non professionnel ou professionnel, est primordiale. Elle détermine en effet l’application du régime des plus-values des particuliers (Section I) ou des plus-values professionnelles (Section II).

Section I – Le régime des plus-values des particuliers

4256 La plus-value résulte de la cession à titre onéreux de parcelles forestières (Sous-section I) ou de parts de sociétés forestières (Sous-section II).

Sous-section I – La cession de parcelles forestières

4257 – Une plus-value immobilière de droit commun. – Les personnes physiques ou les sociétés ou groupements soumis au régime fiscal des sociétés de personnes sont redevables de l’impôt de plus-value immobilière lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers non bâtis (CGI, art. 150 U, I). Les cessions réalisées par un groupement forestier ou une société d’épargne forestière relèvent ainsi des plus-values immobilières des particuliers350.

La plus-value ne s’applique pas aux cessions dont le prix est inférieur ou égal à 15 000 €. Le seuil de 15 000 € s’apprécie en tenant compte de la valeur en pleine propriété de l’immeuble ou de la partie d’immeuble (CGI, art. 150 U, II, 6°).

La valeur du bien est appréciée acquéreur par acquéreur. En cas de cession de plusieurs parcelles contiguës à un même acquéreur, la valeur est appréciée globalement. Dans la situation où les parcelles ne sont pas adjacentes, chacune d’elles forme un immeuble distinct et le seuil s’apprécie parcelle par parcelle351.

La détermination de la plus-value imposable de la cession de parcelles de bois et forêts résulte des dispositions de droit commun (CGI, art. 150 V et s.). Le prix de cession est pris en compte « peuplements inclus »352.

Le calcul de l’impôt de plus-value relève également des dispositions de droit commun (CGI, art. 150 VC, I. – CSS, art. 136-7, VI)353. La taxe sur les plus-values immobilières d’un montant supérieur à 50 000 € est susceptible de s’appliquer (CGI, art. 1609 nonies G).

4258 – Un abattement spécifique représentatif du forfait forestier. – L’impôt sur le revenu correspondant à la plus-value due par une personne physique lors de la cession de peuplements forestiers est diminué de 10 € par année de détention et par hectare cédé (CGI, art. 150 VF, III). Cette mesure ne profite pas aux cessions réalisées par une société, même s’il s’agit d’un groupement forestier.

L’abattement pour durée de détention est le même que celui de droit commun, peu important que le terrain n’ait pas été planté durant toute la période (CGI, art. 150 VC). Les fractions d’hectare sont négligées354.

Par simplification, l’administration fiscale admet que l’abattement s’applique à l’ensemble de la plus-value, sans distinguer la partie afférente au terrain de celle afférente aux arbres plantés355. L’abattement s’applique uniquement à l’impôt sur le revenu, à l’exclusion des prélèvements sociaux.

Sous-section II – Les cessions de parts de sociétés forestières

4259 Les parts de sociétés forestières sont elles-mêmes détenues soit par une personne physique (§ I), soit par une personne morale (§ II). L’imposition de la plus-value de cession varie selon la nature de l’associé cédant.

§ I – La cession par une personne physique de ses droits sociaux

4260 Les groupements forestiers relèvent obligatoirement de l’impôt sur le revenu (CGI, art. 238 ter). Les sociétés d’épargne forestière sont imposables à l’impôt sur le revenu, mais ont la faculté d’opter pour l’IS. Le régime de taxation varie selon le régime fiscal de la société dont les parts sont cédées : IR (A) ou IS (B).

A/ La cession de parts de sociétés soumises à l’IR

4261 – Des sociétés à prépondérance immobilière. – La prépondérance immobilière de la société est retenue lorsque son actif est, à la clôture des trois exercices précédant la cession, constitué pour plus de 50 % de sa valeur réelle par des immeubles ou des droits immobiliers non affectés à l’exploitation industrielle, commerciale, agricole ou à l’exercice d’une profession non commerciale de la société (CGI, art. 150 UB). Limité au secteur forestier, l’actif des groupements forestiers et des sociétés d’épargne forestière est majoritairement constitué de bois et forêts356.

Ainsi, les cessions occasionnelles de parts de ces sociétés relevant de l’impôt sur le revenu sont soumises au régime de la plus-value immobilière (CGI, art. 150 UB).

4262 – Une plus-value immobilière de droit commun. – L’associé cédant est imposable au titre de la plus-value immobilière357.

Le délai de détention est décompté à partir de la date d’acquisition ou de souscription des parts.

Le contribuable ne bénéficie pas de l’exonération lorsque le prix de cession est inférieur ou égal à 15 000 €358.

L’abattement spécifique de 10 € par année de détention et par hectare profite à l’associé cédant en proportion des parts cédées359.

En cas de cession en bloc de tout ou partie des parts d’une même société à un ou plusieurs acquéreurs, les moins-values réduites de l’abattement pour durée de détention s’imputent sur les plus-values réalisées sur les autres parts360.

B/ La cession de parts de sociétés soumises à l’IS

4263 Les cessions de parts de sociétés d’épargne forestière soumises à l’IS sont imposables au titre des plus-values de cession de valeurs mobilières et de droits sociaux (CGI, art. 150-0 A à 150-0 E). Ces plus-values sont imposables à l’impôt sur le revenu au barème progressif.

La plus-value résulte de la différence entre (CGI, art. 150-0 D, 1) :

le prix de cession majoré des charges361 ;

et le prix d’acquisition diminué des réductions d’impôt éventuellement obtenues ou de la valeur retenue pour déterminer les droits de mutation en cas d’acquisition à titre gratuit362.

Un abattement pour année de détention est applicable (CGI, art. 150-0 D, 1 ter).

Il est égal à :

50 % du montant des gains nets lorsque la détention est d’au moins deux ans ;

65 % du montant des gains nets lorsque la détention est d’au moins huit ans.

La durée de détention est décomptée à partir de la date de souscription ou d’acquisition des parts363.

Le cédant est également redevable des prélèvements sociaux au titre des revenus du patrimoine. Aucun abattement n’est applicable concernant les prélèvements sociaux.

§ II – La cession par une personne morale de ses droits sociaux

4264 – Une plus-value professionnelle taxée selon le régime fiscal de l’associé. – Lorsque les parts sociales sont inscrites à l’actif du bilan d’une personne morale passible de l’impôt sur les sociétés, la plus-value est imposée au titre de cet impôt. Lorsque les parts sociales sont inscrites à l’actif d’une entreprise industrielle, commerciale, artisanale ou agricole imposable à l’impôt sur le revenu, la plus-value est une plus-value professionnelle taxée comme telle (CGI, art. 238 bis K).

Section II – La plus-value professionnelle

4265 – Le principe. – Les plus et moins-values résultant de la cession à titre onéreux par une entreprise d’un élément d’actif immobilisé font partie de son résultat imposable.

Ces plus et moins-values relèvent du régime des plus-values professionnelles. Le régime applicable varie selon que l’entreprise est soumise à l’IR ou à l’IS364.

4266 – Une plus-value professionnelle exigible même en cas de mutation à titre gratuit. – Les plus-values professionnelles sont exigibles peu important la nature de la cession de l’actif immobilisé.

Ainsi, la donation et la transmission à cause de mort portant sur des parcelles forestières formant un bien professionnel du donateur ou du défunt rendent exigibles les plus-values professionnelles.

La solution est identique pour les parts de sociétés forestières soumises à l’IR appartenant à un contribuable exerçant son activité professionnelle dans cette société (CGI, art. 151 nonies).

Il convient de préciser que les cessions de parts de sociétés d’épargne forestière soumises à l’IS relèvent des gains en capital réalisés par les particuliers (CGI, art. 150-0 A). Ainsi, la cession à titre gratuit de ces parts n’entraîne pas de taxation aux titres des plus-values.

4267 – Une imposition rare en pratique. – Les entreprises ne dépassant pas certains seuils de recettes et exerçant leur activité depuis au moins cinq ans bénéficient d’une exonération totale ou partielle des plus-values (CGI, art. 151 septies). En pratique, la majorité des entreprises sylvicoles relevant du régime forfaitaire forestier365ne dépasse pas le seuil de recettes de 250 000 € hors taxes permettant l’exonération totale des plus-values. Lorsque l’exploitant est membre d’une société de personnes, le seuil d’exonération s’apprécie en totalisant ses recettes individuelles et sa quote-part dans les recettes de la société366.

En cas d’imposition, la plus-value professionnelle porte uniquement sur le terrain en tant qu’actif immobilisé. En effet, l’ensemble du boisement d’une forêt (bois matures ou en cours de croissance) appartenant à une entreprise ayant pour objet l’exploitation forestière a le caractère d’un stock367. Ainsi, la cession des arbres concomitante à celle du terrain les supportant constitue un profit d’exploitation.

4268 – Des régimes d’exonérations applicables. – Toutes conditions étant par ailleurs remplies, le sylviculteur imposable au titre des plus-values professionnelles est éligible aux dispositifs spécifiques d’exonération ou de report de l’imposition, et par exemple :

l’exonération totale ou partielle liée à la transmission d’une entreprise individuelle ou d’une branche complète d’activité, selon la valeur des éléments transmis (CGI, art. 238 quindecies) ;

le report ou l’exonération lié à la transmission à titre gratuit d’une entreprise individuelle (CGI, art. 41).

La singularité des groupements fonciers ruraux

Les groupements fonciers ruraux sont soumis aux dispositions applicables aux parts de groupements forestiers pour leur fraction représentative de biens en nature forestière (C. rur. pêche marit., art. L. 322-22, al. 3)368.


347) A. Arnaud-Emery, Plus-values : querelle autour des bois et forêts : JCP N 2011, n° 1, 1003.
348) BOI-BIC-PVMV-40-10-10-10, § 90 et s.
349) BOI-BIC-PVMV-40-10-10-10, § 250. – BOI-BA-SECT-20.
350) Sous réserve qu’elles n’exercent pas une activité professionnelle et que la société d’épargne forestière ne relève pas de l’impôt sur les sociétés.
351) BOI-RFPI-PVI-10-40-70.
352) BOI-RFPI-PVI-30-30-10, § 30.
353) V. n° a4513.
354) BOI-RFPI-PVI-30-30-10, § 50.
355) BOI-RFPI-PVI-30-30-10, § 60.
356) V. 2e commission, nos a2107 et s.
357) Sous réserve que les parts cédées ne constituent pas un actif professionnel : V. n° a4257.
357) BOI-RFPI-SPI-20, § 40 et s.
358) BOI-RFPI-SPI-10-20, § 150.
359) BOI-RFPI-SPI-30, § 20.
360) BOI-RFPI-SPI-20, § 90.
361) BOI-RPPM-PVBMI-20-10-10.
362) BOI-RPPM-PVBMI-20-10-20.
363) Même si les souscriptions sont libérées ultérieurement – BOI-RPPM-PVBMI-20-20-20-20, § 10.
364) V. nos a4515 et s.
365) V. n° a4272.
366) Mémento Lefebvre fiscal 2017, n° 18220.
367) CE, 9e et 8e ss-sect., 30 déc. 1998, n° 136430, SARL des Éts Masson-Couasnon : Dr. fisc. 1999, n° 41, comm. 738.
368) Pour leur fraction représentative de biens agricoles, elles sont soumises aux dispositions applicables aux parts de GFA.

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