CGV – CGU

Chapitre I – Les impératifs du droit de l’énergie

Partie II – Les énergies renouvelables liées aux technologies modernes
Titre 1 – La mise en place d’une énergie renouvelable
Chapitre I – Les impératifs du droit de l’énergie

2494 Les énergies renouvelables ne font pas l’objet d’une législation d’ensemble particulière (Section I). D’une part, elles sont indirectement appréhendées au titre de la réglementation de la production électrique (Section II). D’autre part, elles sont concernées par les législations spécifiques à l’exploitation de certaines énergies (Section III).

Section I – L’absence de cadre général uniforme

2495 – Infinité des hypothèses à régir. – Les énergies renouvelables sont multiples. Pour ne rien simplifier, elles sont autant d’espèces d’un genre plus vaste. Aussi, convient-il de faire une distinction entre les sources d’énergie et l’énergie elle-même654. Les premières, dénommées « énergie primaire », désignent l’ensemble des ressources naturelles ayant un potentiel énergétique, qu’il s’agisse de ressources renouvelables (l’eau, le soleil, le vent, la biomasse) ou non (le charbon, l’uranium, le gaz, le pétrole, etc.). L’énergie consommée par les utilisateurs, dénommée « énergie secondaire » (électricité, carburant, etc.), résulte d’un processus de transformation de l’énergie primaire plus ou moins complexe. Il comporte parfois plusieurs étapes successives. Par exemple, quand l’énergie mécanique est convertie en énergie électrique. Il existe également des formes très variées de production, de stockage et de transport de ces énergies secondaires. Dans une réalité aussi protéiforme, l’organisation d’un corpus de normes cohérentes et structurées est délicate.

2496 – Le Code de l’énergie. – Afin d’organiser cette masse d’hypothèses pratiques, un essai de codification d’ensemble a été réalisé655. En 2005 et 2009, deux lois ont autorisé le gouvernement à procéder par ordonnances à la création de la partie législative d’un Code de l’énergie656. La partie législative de ce code résulte d’une ordonnance de 2011, ratifiée en 2013657. Sa partie réglementaire procède d’un décret de 2015658. Cette codification a la vertu de rassembler des textes législatifs épars concernant l’énergie hydraulique, l’électricité ou le gaz. Mais cette codification est imparfaite. Un certain nombre de points importants lui échappent. Ainsi, le Code minier coexiste à ses côtés. Mais surtout, l’énergie nucléaire, volontairement écartée de cette codification, est envisagée au sein du Code de l’environnement (C. env., art. L. 591-1).

2497 – Dispositions spécifiques aux énergies renouvelables. – Il existe aujourd’hui un véritable droit applicable aux énergies renouvelables659. Le Code de l’énergie contient d’ailleurs un livre 2 entièrement dédié à ces dernières (C. énergie, art. L. 211-1 et s.). Pour autant, seule une infime partie des normes applicables y est contenue. On y trouve principalement une définition législative des énergies renouvelables : « Les sources d’énergies renouvelables sont les énergies éolienne, solaire, géothermique, aérothermique, hydrothermique, marine et hydraulique, ainsi que l’énergie issue de la biomasse, du gaz de décharge, du gaz de stations d’épuration d’eaux usées et du biogaz. La biomasse est la fraction biodégradable des produits, déchets et résidus provenant de l’agriculture, y compris les substances végétales et animales issues de la terre et de la mer, de la sylviculture et des industries connexes, ainsi que la fraction biodégradable des déchets industriels et ménagers » (C. énergie, art. L. 211-2). Les autres normes contenues à cet endroit n’ont qu’un lien indirect avec la matière, cette partie du code traitant essentiellement des certificats d’économie d’énergie, de la performance énergétique dans l’habitat, des installations de chauffage et de climatisation, et de mesures particulières aux véhicules. Il existe certes un lien, en ce sens que la transition énergétique vers les énergies renouvelables suppose, dans le même temps, une politique d’économie d’énergie. Mais l’essentiel de la législation applicable aux énergies renouvelables est une adaptation du droit commun de l’énergie.

Influence européenne

L’énergie est au cœur de la construction européenne, puisque cette dernière débute avec la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA). Et le droit en la matière a connu une véritable révolution sous l’impulsion de l’Union européenne. Pourtant, l’Union ne mène pas une véritable politique énergétique, laissant une relative liberté aux États à ce sujet. Les directives européennes ont cependant imposé la libéralisation du secteur de l’énergie, en postulant que la libre concurrence sert l’intérêt général660. Dans le même temps, la politique européenne cherche à favoriser les économies d’énergie et le développement des énergies renouvelables661.

Section II – La réglementation de la production électrique

2498 La production d’électricité, y compris celle créée à partir d’une énergie renouvelable, ne procède pas d’un principe de liberté. Bien au contraire, la production électrique a relevé pendant longtemps de monopoles étatiques. Si l’Union européenne a contraint une ouverture à la concurrence, la production reste soumise au principe d’une autorisation préalable (§ I), sauf exceptions (§ II).

§ I – L’autorisation de produire de l’électricité

2499 – Principe de l’autorisation nécessaire. – En principe, l’exploitation d’une nouvelle installation de production d’électricité est subordonnée à l’obtention d’une autorisation administrative (C. énergie, art. L. 311-1). Les communes et les établissements publics de coopération peuvent aménager et exploiter toute installation utilisant les énergies renouvelables. Ils sont soumis au régime de l’autorisation préalable au même titre que les personnes de droit privé (CGCT, art. L. 2224-32). L’autorisation d’exploiter une installation de production d’électricité est délivrée par l’autorité administrative en tenant compte des critères suivants (C. énergie, art. L. 311-5) :

l’impact de l’installation sur l’équilibre entre l’offre et la demande et sur la sécurité d’approvisionnement ;

la nature et l’origine des sources d’énergie primaire au regard des objectifs de la politique énergétique nationale ;

l’efficacité énergétique de l’installation, comparée aux meilleures techniques disponibles à un coût économiquement acceptable ;

les capacités techniques, économiques et financières du candidat ou du demandeur ;

l’impact de l’installation sur les objectifs de lutte contre l’aggravation de l’effet de serre.

2500 – Procédure d’autorisation. – La demande d’autorisation d’exploiter est adressée au ministre chargé de l’énergie (C. énergie, art. R. 311-5). Parmi les éléments notables, elle comporte une note précisant :

les capacités techniques, économiques et financières du pétitionnaire ;

les caractéristiques de l’installation de production, sa capacité, les énergies primaires et les techniques de production utilisées ;

la localisation de l’installation de production ;

une note relative à l’efficacité énergétique de l’installation comparée aux meilleures techniques disponibles à un coût économiquement acceptable.

La demande précise également la destination de l’électricité produite : autoconsommation ou vente à des consommateurs finals. Le ministre statue sur la demande d’autorisation d’exploiter dans un délai de quatre mois (C. énergie, art. R. 311-7). Le refus d’autorisation est motivé. Le silence gardé pendant plus de quatre mois vaut décision de rejet. L’autorisation précise les conditions dans lesquelles l’installation de production devra être exploitée. En cas de changement d’exploitant, il est possible de demander le transfert de l’autorisation (C. énergie, art. R. 311-8). L’autorisation d’exploiter cesse de plein droit lorsque l’installation n’a pas été mise en service dans un délai de trois ans à compter de sa délivrance ou n’a pas été exploitée durant trois années consécutives, sauf cas de force majeure ou fait de l’administration assimilable à un tel cas (C. énergie, art. R. 311-10). Toutefois, à la demande du pétitionnaire, le ministre peut accorder des délais supplémentaires dans la limite d’un délai total de dix années, incluant le délai initial de trois ans.

2501 – Sanctions. – Si une installation est exploitée sans autorisation, ou si l’exploitant ne respecte pas les prescriptions définies par l’autorisation, le contrat d’achat de l’énergie produite peut être suspendu ou résilié (C. énergie, art. L. 311-14). L’exploitant doit alors rembourser tout ou partie des sommes perçues en application du contrat. Des sanctions pécuniaires et pénales spécifiques peuvent s’y ajouter, en fonction de la puissance électrique installée, avec un plafond de 100 000 € par mégawatt (C. énergie, art. L. 311-15). Enfin, une sanction pénale est possible : jusqu’à un an d’emprisonnement et 150 000 € d’amende, outre diverses peines complémentaires, dont la fermeture temporaire ou définitive de l’établissement, et l’interdiction d’exercer pour la personne mise en cause (C. énergie, art. L. 311-16 à L. 311-18).

§ II – Les exceptions

2502 – Autorisation d’office. – Dans le cadre de l’ouverture à la concurrence, les directives européennes imposent aux procédures nationales d’autorisation de ne pas entraîner une charge administrative disproportionnée par rapport à la taille et à l’impact potentiel des producteurs d’électricité662. Elle vise les installations dont la puissance installée est inférieure ou égale à un seuil dépendant du type d’énergie utilisée. Ces seuils sont les suivants (C. énergie, art. R. 311-2) :

cinquante mégawatts pour les installations utilisant l’énergie radiative du soleil ;

cinquante mégawatts pour les installations utilisant l’énergie mécanique du vent ;

cinquante mégawatts pour les installations utilisant à titre principal l’énergie dégagée par la combustion ou l’explosion de matières non fossiles d’origine animale ou végétale ;

cinquante mégawatts pour les installations utilisant à titre principal l’énergie dégagée par la combustion ou l’explosion de biogaz ;

cinquante mégawatts pour les installations utilisant l’énergie des nappes aquifères ou des roches souterraines, pour les installations valorisant des déchets ménagers ou assimilés (hors biogaz) ;

cinquante mégawatts pour les installations utilisant l’énergie houlomotrice, hydrothermique ou hydrocinétique ;

vingt mégawatts pour les installations utilisant à titre principal du gaz naturel ;

dix mégawatts pour les installations utilisant à titre principal d’autres combustibles fossiles que le gaz naturel et le charbon.

Importance des seuils

Pour donner un élément de comparaison, cinquante mégawatts correspondent à l’énergie nécessaire pour alimenter 50 000 radiateurs électriques domestiques de taille moyenne (1 000 watts chacun). Le propriétaire installant quelques panneaux photovoltaïques sur son toit, ou une éolienne sur son terrain, relève donc de l’autorisation d’office. Mais celle-ci ne le dispense pas d’obtenir les autres autorisations nécessaires, particulièrement en droit de l’urbanisme ou en droit de l’environnement (C. énergie, art. L. 311-8).

2503 – Autorisation environnementale unique. – L’autorisation environnementale unique est entrée en vigueur le 1er mars 2017663. Elle rassemble les autorisations concernant les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) et les installations, ouvrages, travaux et activités (IOTA) soumis à la législation sur l’eau (C. env., art. L. 181-1). Elle regroupe également une douzaine d’autres autorisations relevant de l’État664. En particulier, l’autorisation environnementale unique vaut autorisation d’exploiter une installation de production d’électricité en application de l’article L. 311-1 du Code de l’énergie (C. env., art. L. 181-2, 10°). Il n’y a toutefois aucune dérogation sur le fond. En effet, lorsque l’autorisation environnementale tient lieu d’autorisation d’exploiter une installation de production d’électricité, elle prend en compte les critères mentionnés à l’article L. 311-5 du Code de l’énergie, à savoir : l’impact de l’installation sur l’équilibre entre l’offre et la demande et sur la sécurité d’approvisionnement, la nature et l’origine des sources d’énergie primaire au regard des objectifs de la politique énergétique nationale, etc. L’objectif est de simplifier la vie des entreprises sans régression des contrôles. Elle s’articule autour d’une seule demande, et relève d’une procédure d’instruction unique et d’une enquête publique. L’autorisation unique vaut accord pour tous les aspects du projet respectant les prescriptions applicables. Le souhait du législateur est la réduction des délais d’obtention des autorisations nécessaires. À cette fin, l’entrepreneur peut désormais solliciter de l’administration des échanges préalables, ou un « certificat de projet ». Ce dernier identifie les régimes et procédures dont relève l’ouvrage projeté, précise le contenu attendu du dossier et fixe un calendrier d’instruction.

Section III – Les législations spéciales à chaque énergie

2504 Outre le droit commun centré autour de la production électrique en général, le droit de l’énergie contient son lot de législations spécifiques à chaque énergie. S’agissant des énergies renouvelables, les plus notables sont la géothermie (§ I), l’énergie hydraulique (§ II), le biogaz (§ III) et les biocarburants (§ IV).

§ I – La production géothermique

2505 – Application du droit minier et différentes catégories de géothermie. – Les « gîtes géothermiques » relèvent du droit minier665. Il s’agit des gîtes dans le sein de la terre dont on peut extraire de l’énergie sous forme thermique par l’intermédiaire des eaux chaudes et des vapeurs souterraines (C. minier, art. L. 112-1). Ces gîtes sont classés en plusieurs catégories selon leur importance. Les contraintes législatives varient dans cette mesure. Les gîtes géothermiques à haute température sont exploités pour la production d’électricité. Ils utilisent une ressource dont la température mesurée en surface est supérieure à 150 °C666. Les gîtes géothermiques à basse température sont exploités pour la production de chaleur. Ils se situent en dessous du seuil précédent. Les installations de moindre importance forment une sous-catégorie. Il s’agit des exploitations à basse température relevant du régime de la minime importance. Ce régime s’applique par exemple aux activités ne recourant qu’à des échangeurs géothermiques fermés dont la profondeur est inférieure à 200 mètres et dont la puissance thermique maximale est inférieure à 500 kilowatts667. Pour les installations encore plus légères, le droit commun est applicable, à l’exclusion du droit minier. Il s’agit notamment des puits canadiens668et des échangeurs géothermiques d’une profondeur inférieure à dix mètres (C. minier, art. L. 112-1)669.

2506 – Recherche de gîtes géothermiques. – La recherche d’un gîte géothermique à haute température ne peut être entreprise que par le propriétaire de la surface ou avec son consentement, après déclaration à l’autorité administrative compétente. À défaut, le projet nécessite l’autorisation de l’autorité administrative compétente, après que le propriétaire a été invité à présenter ses observations. Par ailleurs, la recherche est toujours admise pour le titulaire d’un permis exclusif de recherches (C. minier, art. L. 121-1). Ce permis confère en effet à son titulaire le droit exclusif de conduire tous travaux de recherches dans un périmètre défini (C. minier, art. L. 122-1). Il est accordé par arrêté du ministre chargé des mines pour une durée initiale maximale de cinq ans (C. minier, art. L. 122-2 et L. 122-3)670. La recherche de gîtes géothermiques à basse température nécessite quant à elle une autorisation de recherches accordée par l’autorité préfectorale. Cette autorisation détermine soit l’emplacement des forages autorisés, soit le périmètre à l’intérieur duquel les forages peuvent être exécutés. Sa validité ne peut excéder trois ans (C. minier, art. L. 124-4).

2507 – Exploitation de gîtes géothermiques. – Les gîtes géothermiques à haute température requièrent une concession de mines pour être exploités (C. minier, art. L. 134-2). Cette concession est accordée par décret en Conseil d’État et peut faire l’objet d’un cahier des charges (C. minier, art. L. 132-2). Elle est précédée d’une enquête publique et d’une mise en concurrence (C. minier, art. L. 132-3 et L. 132-4). Elle est accordée pour une durée fixée par l’acte de concession, la durée initiale ne pouvant excéder cinquante ans (C. minier, art. L. 132-11). L’acte de concession fixe également le montant de la redevance tréfoncière due par le titulaire aux propriétaires de la surface (C. minier, art. L. 132-15). De leur côté, les gîtes géothermiques à basse température sont exploités en vertu d’un permis d’exploitation accordé par le préfet (C. minier, art. L. 134-4). Ce dernier confère un droit exclusif d’exploitation dans un volume déterminé, défini par un périmètre et deux profondeurs (C. minier, art. L. 134-6). Sa durée initiale ne peut excéder trente ans (C. minier, art. L. 134-8). Là encore, l’autorisation suppose une enquête préalable, sauf dans l’hypothèse où elle intervient dans le cadre d’une autorisation de recherches (C. minier, art. L. 661-5). Enfin, la géothermie à basse température relevant du régime « de la minime importance » ne nécessite qu’une télédéclaration auprès de l’autorité administrative671.

§ II – La production d’énergie hydraulique

2508 – Analogie avec le droit minier. – Paradoxalement, l’hydroélectricité est assez peu influencée par la législation sur l’eau. Il existe néanmoins quelques liens672. Ainsi, les ouvrages ayant fait l’objet d’une autorisation au titre des installations, ouvrages, travaux et activités (IOTA) de la législation sur l’eau, susceptibles de produire de l’électricité à titre accessoire, sont dispensés d’une autorisation supplémentaire au titre du droit de l’énergie (C. énergie, art. L. 511-2 et L. 511-3). Néanmoins l’hydroélectricité est essentiellement influencée par le droit minier pour des raisons historiques. En effet, la loi fondatrice du 16 octobre 1919 repose sur le postulat que l’énergie hydraulique est assimilable à de la « houille blanche »673. Pour cette raison, le droit de l’hydroélectricité présente de très fortes similitudes avec la géothermie.

2509 – Concession et autorisation. – Par principe, nul ne peut disposer de l’énergie des marées, des lacs et des cours d’eau, sans une concession ou une autorisation de l’État (C. énergie, art. L. 511-1). Les installations hydrauliques dont la puissance excède 4 500 kilowatts sont soumises au régime de la concession (C. énergie, art. L. 511-5)674. Les installations sous ce seuil sont soumises au régime de l’autorisation. La concession présuppose une enquête publique et une étude d’impact (C. énergie, art. L. 521-1). Elle implique surtout le respect d’un cahier des charges déterminant notamment (C. énergie, art. L. 521-4) :

le règlement destiné à assurer la gestion équilibrée et durable de l’eau ;

la durée de la concession ;

les réserves en eau et en énergie à fournir ;

les conditions financières ;

les conditions du dénouement de la concession ;

et le contrôle technique et financier de la concession.

S’agissant des installations relevant uniquement du régime de l’autorisation, la procédure est régie par les règles en matière d’installations, ouvrages, travaux et aménagements (IOTA) soumis à la loi sur l’eau (C. énergie, art. L. 531-1). L’autorisation ainsi obtenue ne peut excéder soixante-quinze ans (C. énergie, art. L. 531-2).

§ III – La méthanisation

2510 – Analogie avec le gaz naturel. – Le biogaz résulte d’un processus de production et non d’extraction comme le gaz naturel. Les dispositions relatives au gaz occupent le livre 4 du Code de l’énergie. Elles concernent essentiellement le gaz naturel, mais également le biogaz de façon accessoire. Ce regroupement a pour conséquence de ne pas subordonner la production de biogaz à une autorisation675. Néanmoins, dans l’hypothèse où le processus de méthanisation conduit à utiliser le biogaz pour produire de l’électricité, le droit commun de la production électrique et les autorisations afférentes s’appliquent676. Sous l’impulsion d’une directive européenne677, le législateur est intervenu pour écarter certaines contraintes du droit de l’énergie s’agissant du biogaz. En effet, l’activité de fourniture de gaz naturel est en principe soumise à une autorisation administrative préalable (C. énergie, art. L. 531-2). Dans le cas du biogaz, une dérogation existe (C. énergie, art. L. 446-1). En effet, sous réserve de préserver le bon fonctionnement des réseaux de gaz naturel, tout producteur de biogaz peut conclure avec un fournisseur de gaz naturel un contrat de vente de biogaz à des conditions déterminées par décret (C. énergie, art. L. 446-2).

§ IV – Les biocarburants

2511 – Régulation a minima par le droit de l’énergie. – Le Code de l’énergie organise succinctement la réglementation des biocarburants. À l’inverse de la production électrique, il n’impose aucune autorisation préalable à leur mise en production678. En premier lieu, la législation se borne à poser des définitions utiles (C. énergie, art. L. 661-1). D’une part, le biocarburant est défini comme le combustible liquide ou gazeux utilisé pour le transport et produit à partir de la biomasse. D’autre part, le bioliquide est défini comme le combustible liquide produit également à partir de la biomasse, mais destiné à d’autres usages que le transport. Ces usages sont la production d’électricité, le chauffage et le refroidissement. Ensuite, la loi fixe les principes généraux, concernant notamment les critères de durabilité. Ainsi, la production et l’utilisation de biocarburants et bioliquides doivent présenter un potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 60 % (C. énergie, art. L. 661-4)679. Ainsi encore, les biocarburants et bioliquides ne doivent pas être produits à partir de matières premières provenant (C. énergie, art. L. 661-5) :

de terres de grande valeur en termes de biodiversité ;

de terres présentant un important stock de carbone ;

de terres ayant le caractère de tourbières.

2512 – Encadrement indirect par le droit fiscal. – Toute installation procédant à la fabrication, au stockage, à la réception ou à l’expédition des produits énergétiques est placée sous le régime de l’entrepôt fiscal de produits énergétiques (EFPE)680. L’EFPE permet de produire, détenir, recevoir et expédier les produits énergétiques en suspension de taxes de consommation (C. douanes, art. 158 D). L’EFPE concerne l’éthanol ainsi que les divers biocarburants destinés à être utilisés comme carburant ou combustible (C. douanes, art. 265 bis A). L’EFPE requiert un agrément douanier préalable à son exploitation. Ce contrôle administratif explique l’absence d’autorisation spécifique. Outre cet agrément, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) permet d’orienter la politique, son taux étant réduit lorsque les biocarburants répondent aux critères de durabilité (C. douanes, art. 265 bis A, 2)681.


654) M. Lamoureux, Le bien énergie : RTD com. 2009, p. 239.
655) M.-D. Hegelsteen, Un Code pour le droit de l’énergie : RJEP 2012, comm. 693.
656) L. n° 2005-781, 13 juill. 2005, art. 109. – L. n° 2009-526, 12 mai 2009, art. 92.
657) Ord. n° 2011-504, 9 mai 2011. – L. n° 2013-619, 16 juill. 2013, art. 38.
658) D. n° 2015-1823, 30 déc. 2015, relatif à la codification de la partie réglementaire du Code de l’énergie.
659) B. Le Baut-Ferrarèse et I. Michallet, Traité de droit des énergies renouvelables, Le Moniteur, 2e éd. 2012.
660) B. Isidoro, L’ouverture du marché de l’électricité à la concurrence communautaire, LGDJ, 2006. – C. Lemaire, Énergie et concurrence. Recherches sur les mutations juridiques induites par la libéralisation des secteurs de l’électricité et du gaz naturel, 2 vol., PUAM, 2003.
661) C.-M. Alves, Énergies renouvelables et droit de l’Union européenne entre marché (intérieur) et intérêt général : Rev. jur. env. 2014/2, p. 263.
662) Cons. UE, dir. n° 2003/54, 26 juin 2003, consid. 12.
663) Ord. n° 2017-80, 26 janv. 2017.
664) Autorisation de défrichement, dérogation à l’interdiction de destruction d’espèces protégées, etc.
665) H. Cassara, Géothermie : le droit à la recherche de l’or blanc : Gaz. Pal. 19 janv. 2006, n° 19, p. 10. – L. Lanoy, Vers un droit minier durable : géothermie, captage et stockage géologique de CO2 : Dr. env. 2013, n° 212, p. 183.
666) D. n° 78-498, 28 mars 1978, art. 3, mod. par D. n° 2016-835, 24 juin 2016.
667) D. n° 78-498, 28 mars 1978, préc.
668) Le terme « puits canadien » utilisé par le législateur est impropre, car le système ne vient pas du Canada. La pratique parle également de « puits provençal » ou de « puits romain ». Il s’agit d’un système géothermique de surface. Il repose sur l’idée que la température du sol varie plus lentement et avec une plus grande inertie que l’air atmosphérique. Le système consiste à préchauffer ou rafraîchir l’air de l’habitat, selon la saison, en le faisant circuler à faible profondeur dans le sol autour de la maison.
669) D. n° 78-498, 28 mars 1978, art. 2.
670) Le permis est délivré après mise en concurrence, uniquement à des personnes justifiant des capacités financières et techniques pour mener à bien les recherches.
671) D. n° 2006-649, 2 juin 2006, art. 22-2, mod. par D. n° 2016-835, 24 juin 2016.
672) Conseil d’État, L’eau et son droit : EDCE 2010, ann. 16, p. 371.
673) J. Poiret, Droit de l’hydroélectricité, Economica, 2004, p. 637. La loi de 1919 est désormais codifiée dans le Code de l’énergie.
674) X. Bezançon, Les concessions hydroélectriques aux sources du contrat de partenariat : CP-ACCP 2009, n° 86, p. 32.
675) F. Faurisson, Biogaz, valorisation énergétique des déchets : BDEI sept. 2010, p. 11-14.
676) B. Le Baut-Ferrarèse et I. Michallet, préc., p. 158.
677) Cons. UE, dir. n° 2003/54, 26 juin 2003, consid. 24.
678) A. Pagnoux, Les productions non alimentaires (biocarburants, énergie nouvelle) : RD rur. 2007, étude 12.
679) Ce seuil s’applique depuis le 1er janvier 2018.
680) Biocarburants : un moyen efficace mais encore onéreux de respecter nos engagements écologiques internationaux, Rapp. AN n° 1622, A. Marleix, Commission des finances de l’Assemblée nationale, juin 2004.
681) Lequel renvoie aux critères de durabilité prévus par l’article L. 661-4 du Code de l’énergie.

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